Le rôle et le statut des intermédiaires d’assurance

LE RÔLE DES DISTRIBUTEURS D’ASSURANCE

Parler de la distribution d’assurance c’est aborder en soi une matière au sein du droit des assurances car le droit de la distribution est une branche importante du droit et en droit des assurances elle fait l’objet d’un traitement entièrement intégré du droit de la distribution lui-même, il est réglé par des lois et règlements depuis des dizaines d’années. Cette distribution de l’assurance est un domaine en très forte évolution, elle connaît de très grands changements, cela concerne beaucoup de professionnels, cela utilise des techniques de commercialisation très variées et cela offre des perspectives d’emploi.

C’est un secteur très surveillé par le droit européen avec des directives transposées en droit français et qui cherchent à harmoniser la distribution de l’assurance dans l’UE. Parler de la distribution de l’assurance ramène toujours à deux problématiques :

  • D’abord la problématique du statut des distributeurs qui obéissent à des droits et des obligations variées selon les statuts et il y a la problématique de la protection des consommateurs, également des professionnels qui ont recours à ces distributeurs car c’est un métier dangereux, qui appelle beaucoup de protection de la part de ceux qui s’adressent à des personnes qui n’ont pas toujours les capacités de comprendre et de comparer les produits d’assurance.

C’est une profession qui présente des risques pour les acheteurs donc elle est protégée avec des règles tout à fait exceptionnelles en droit privé, les techniques de protection des clients font l’objet de textes particulièrement précis et qui sont uniques en droit privé.

L’une des premières nouveautés importantes qu’a apporté le droit européen c’est que les textes européens parlent d’intermédiaires d’assurance ou intermédiation.

Tous les professionnels qui distribuent de l’assurance sont des intermédiaires d’assurance. L’avantage c’est pouvoir appliquer un ensemble de règles communes quitte à spécialiser selon les types de distributeurs.

Les règles générales de l’intermédiation

Ces règles sont contenues dans un titre entier du Code des assurances qui est le titre 2 aux articles L520-1 et suivants du Code des assurances mais aussi des définitions aux articles L511-1 et suivants du Code des assurances.

Ces textes sont issus d’une loi du 15 décembre 2005 qui a transposé une directive européenne relative à l’intermédiation de 2001.

On a une loi de transposition et depuis il y a d’autres projets de directive.

La loi donne une définition à l’article L511-1 de l’intermédiation :

L’intermédiation en assurance est l’activité qui consiste à présenter, proposer ou aider à conclure des contrats d’assurance ou à réaliser d’autres travaux préparatoires à leur conclusion. Le texte ajoute que n’est pas considérée comme de l’intermédiation en assurance l’activité consistant exclusivement en la gestion, l’estimation et la liquidation des sinistres.

Ce texte est très important car il donne des indications sur les règles qui vont s’appliquer et la définition est très large et dépasse très largement ce que l’on entend par mandataire, par courtier ou courtage.

Traditionnellement les mandataires qui agissent pour le compte de leur mandant sont des intermédiaires.

La définition ouvre plus largement à ce que l’on appelle des courtiers cad ceux qui agissent pour le compte d’un assuré mais sans représentation.

Ces activités de mandat et de courtage qui sont des activités classiques sont incluses dans l’intermédiation mais ne se limitent pas à ces activités. Il s’agit de regrouper sous le terme d’intermédiation toutes les activités professionnelles qui amènent à la conclusion d’un contrat d’assurance quel que soit leur forme.

L’objectif étant d’amener à la conclusion d’un contrat d’assurance et ici on peut à ce moment-là faire appliquer ce texte à des professionnels qui captent une certaine clientèle et offre les moyens techniques de souscrire un contrat d’assurance.

Exemple: beaucoup de sites proposent de la pub pour les assurances mais quand le site en ligne propose de pouvoir obtenir un devis ou le lien pour une souscription en ligne d’un contrat d’assurance, celui qui gère le serveur du site ne se contente pas seulement de faire de la pub, il permet éventuellement à un autre intermédiaire d’assurance de capter des clients et de les conduire à souscrire à un contrat d’assurance.

Aujd les juristes peuvent être amenés à proposer à leur client de les aider à trouver un assureur. Il y a également pas mal d’activités éloignées de l’assurance qui sont de l’ordre de la distribution générale en droit des assurances qui sont des canaux qui permettent de capter des clientèles.

Dans les grandes surfaces, on voit de plus en plus de vendeurs proposer des assurances. Proposer une extension de garantie des vices cachés n’est pas un assureur. Le vendeur peut proposer parfois de la vraie assurance, par exemple en cas de vol, de risque ou de pertes et en faisant cela il devient intermédiaire d’assurance et il doit respecter la réglementation d’intermédiaires d’assurance.

L’intermédiation se cache partout et parfois même des distributeurs font de l’intermédiation sans s’en rendre compte. Chaque fois qu’il y a une activité économique, il se cache souvent de l’assurance. Quand un commerçant a un canal de clientèle, il y a toujours des assureurs qui essayent de s’adosser à ce canal pour avoir des clients.

L’activité de gestionnaire de sinistres: ce ne sont pas des intermédiaires car ils n’ont pas en ligne de mire le rapprochement entre un assureur et un assuré pour conclure le contrat, ils sont dans la mise en œuvre d’une garantie donc ils ne sont pas dans l’intermédiaire, ils sont juste dans le travail de l’assureur une fois que l’assuré a conclu le contrat. Tous les professionnels qui conduisent à amener à la conclusion d’un contrat, ils sont qualifiés d’intermédiaires mais une fois que le contrat est conclu, les gestionnaires ne sont pas considérés comme des intermédiaires.

Quelles sont les règles qui s’appliquent à tous ces intermédiaires d’assurance ?

  • L’obligation d’immatriculation:

Il existe un registre unique mis en place par la loi qui s’appelle l’ORIAS qui est l’organisme qui recense et qui matricule les intermédiaires d’assurance. On a un numéro d’immatriculation, on a un suivi des informations nous concernant et une pub gérée par cet organisme qui détient également un très grand pouvoir de sanction et d’enquête. C’est un organisme qui habilite, gère, contrôle, sanctionne, rend publiques toutes les immatriculations des intermédiaires d’assurance. Cette information est obligatoire sur tous les courriers, sur tous les sites internet.

  • L’accès à la profession d’intermédiaire exige une capacité professionnelle, des diplômes. Aujd, le niveau de qualification des intermédiaires d’assurance est passé à niveau bac +4/+5.

  • Condition d’honorabilité fixée par la loi:

Elle vise à assurer une certaine indépendance et compatibilité entre les organes d’assurance. Il y a l’obligation d’avoir une assurance de responsabilité civile de la part des distributeurs d’assurance. Le distributeur doit lui-même être couvert en cas de faute et de façon à garantir les clients de toute difficulté de recouvrement de créance, de réparation.

  • Les intermédiaires doivent tous garantir une garantie financière:

Ce sont des fonds bloqués pour les remboursements qui transitent par les intermédiaires, ce sont des cautions financières qui garantissent le versement ou le remboursement des sommes qui transitent sur les comptes des intermédiaires.

Ces sommes il doit les donner à ses assurés ou aux professionnels avec lesquels il travaille. Il faut des garanties qui assurent que ces sommes seront bien promises au mandant et dans certains plafonds. Ces garanties sont limitées. Il y a parfois des intermédiaires qui sont tentés par des détournements de fonds. C’est une profession à risque. Tout cela est assorti de contrôles, de sanctions pénales. La France est un pays où le niveau de sérieux des intermédiaires d’assurance est élevé.

  • Ils sont également tenus par la loi de fournir obligatoirement un certain nb d’informations à tout client ou candidat à l’assurance :

Il s’agit en particulier de l’obligation de délivrer son identité, son immatriculation, des procédures de recours et de réclamation ainsi que les liens financiers existant avec une ou plusieurs entreprises d’assurance.

La loi impose à l’intermédiaire de justifier de son indépendance économique ou financière à l’égard des entreprises pour lesquelles il travaille.

S’il n’y a pas d’accord de fourniture et s’il travaille avec plusieurs fournisseurs, il doit dire qu’il travaille avec plusieurs entreprise et proposer sans exclusivité.

  • Il y a un devoir de conseil que la loi a fixé :

Ce devoir de conseil se trouve à l’article L520-1 du Code des assurances. C’est le seul texte de loi qui pose et qui régit l’obligation de conseil.

Le devoir de conseil tire sa source de la loi, c’est la loi qui reconnaît le devoir de conseil, c’est une obligation légale et le régime juridique est fixé par la loi, certes les juges l’avaient reconnu en matière de courtage, de distribution d’assurance mais le régime de l’obligation de conseil prêtait toujours à discussion.

C’est une obligation autonome, c’est un devoir qui ne se confond pas avec le devoir d’information. Son régime juridique est particulier, il est celui que la loi pose, les juges n’ont pas possibilité d’inventer d’autres règles. Ce devoir pèse clairement et exclusivement sur l’intermédiaire et non pas sur l’assureur. La compagnie d’assurance n’a pas de devoir de conseil. Dans la pratique également, quand il y a un contentieux avec des grands groupes d’assurance, bancaires, l’un des intermédiaires les plus fréquents de l’assurance, ce sont précisément les banques.

Quel est le régime juridique du devoir de conseil et sa sanction ?

Nous nous situons avant la conclusion du contrat et donc il s’agit d’un devoir de conseil pré-contractuel, nous sommes dans le cadre de relations qui ne sont pas encore sous la loi du contrat.

Le régime légal c’est le régime de responsabilité pour faute (1382/1383) et un peu plus loin dans le texte, le devoir de conseil ne va pas se limiter au moment de la phase précontractuelle mais également tout au long de la vie du contrat et en particulier lors de sa modification ou de son renouvellement.

L’article L520-1 du Code des assurances nous dit que l’intermédiaire doit d’abord préciser les exigences et les besoins de son client avant de donner son conseil.

  • La première chose que doit faire l’intermédiaire avant même de donner son conseil c’est de recueillir les besoins et les exigences de son client ou du candidat à l’assurance. La loi oblige l’intermédiaire à recueillir par écrit selon la méthode qu’il souhaitera, on est dans le domaine de la preuve formelle. La loi distingue deux concepts: besoin et exigence.

* Le besoin renvoie à des nécessités fondamentales avec des besoins qui sont de l’ordre objectif, c’est une obligation à laquelle on ne peut pas se soustraire.

* L’exigence renvoie sans doute à des attentes plus subjectives qui sont le produit de notre propre volonté. Chez tout candidat à l’assurance, on a des besoins d’assurance parce que la loi ne nous laisse pas le choix. Il faut entendre ce que le client a à dire mais il faut l’enregistrer et le garder avec soi pour se protéger. La première personne dont il faut se méfier c’est le client car il ne nous dit pas tout.

  • Ensuite l’intermédiaire va devoir donner son consei A nouveau le conseil doit être donné par écrit et être motivé. Il doit donner toutes les raisons qui motivent le conseil. La loi va distinguer selon le degré de conseil en fonction de l’exclusivité ou pas de l’intermédiaire.

* Si l’intermédiaire travaille exclusivement une entreprises d’assurance, le conseil va être en fonction des produits qu’il distribue. Il va le faire en fonction des produits qu’il offre et de l’adaptation ou pas des contrats qu’il a en boutique à son client.

* Quand l’intermédiaire ne va pas travailler exclusivement pour telle ou telle entreprise, son conseil doit être fondé sur une analyse objective du marché et cet intermédiaire est tenu d’analyser un nombre suffisant de contrats d’assurance offert sur le marché de façon à pouvoir recommander en fonction des critères professionnels le contrat qui serait adapté aux besoins du souscripteur éventuel.

Le devoir de conseil est bcp plus lourd car celui qui se présente comme intermédiaire d’assurance doit toujours indiquer pour qui il travaille. Il faut qu’il puisse parler avec suffisamment de contrats pour que ce soit représentatif du marché et parmi tous ces contrats être capable de dire quel est le mieux adapté à la personne qui est en face de lui et pour quelles raisons. Si le contrat se révèle inefficace dans telle ou telle situation c’est l’intermédiaire et son assureur qui vont payer et qui seront responsables.

L’intermédiaire doit ce devoir de conseil gratuitement, il ne le fait pas payer.

Sur la sanction du manquement à l’obligation de conseil, ce devoir est très lourd, frappe tous les intermédiaires en fonction de leur degré d’exclusivité, c’est l’application des règles de la responsabilité civile soit délictuelle si nous sommes dans la phase précontractuelle soit contractuelle si nous sommes dans un devoir de conseil en cours de contrat, il s’agit des règles de la responsabilité civile, les juges vont évaluer le montant des DI en fonction soit de la perte de chance de pouvoir obtenir une garantie adéquate:

Les juges condamnent à l’obtention de la garantie qui aurait dû fonctionner ou qui était attendue par le client et le résultat est beaucoup plus fort puisque l’intermédiaire va donc engager sa responsabilité civile pour défaut de conseil et devoir la garantie qui ne fonctionne pas à l’égard de son client.

Autrement dit, la sanction ici c’est directement la mise en jeu de la garantie d’assurance attendue:

Un assuré qui n’a pas pu obtenir une assurance-crédit, en raison du défaut de conseil, l’intermédiaire va devoir prendre en charge le crédit à 100% comme si la garantie avait fonctionné. Le défaut de conseil est sanctionné par l’obtention de la garantie elle-même. Celui qui va payer ce n’est pas tant l’intermédiaire que son assureur de responsabilité civile, c’est à nouveau un assureur de responsabilité civile qui va payer le sinistre et donc payer la garantie d’un autre.

Aujourd’hui, c’est surtout les Banques qui sont touchées par ce devoir de conseil. Les petites structures notamment d’intermédiaires d’assurance s’exposent beaucoup plus en cas de procès.