Le travail dissimulé : définition, sanction

Le travail dissimulé

A l’origine, l’interdiction du travail dissimulé a été conçue comme complément nécessaire à la règlementation sur les congés payés : empêcher les salariés de travailler pendant ces congés légaux. Aujourd’hui c’est surtout le coût économique du travail. La loi du 28 mars 2003 a aggravé les sanctions encourues : de 2 à 3 ans d’emprisonnement et de 30 000 à 40 000 euros d’amende, des contrôles de plus en plus important par l’Urssaf dans les entreprises, al création en 2005 d’un office central de lutte contre les fraudes.

Art L8224-2 Code du travail. Il y a deux sortes de travail dissimulé : la dissimulation d’activité (art L8221-3 Code du travail), la dissimulation d’emploi, (art L8221-5 Code du travail), le recours au travail dissimulé (art L8221-1 Code du travail). L’élément matériel est différent pour ces trois infractions alors que l’élément moral est le même.

§1 Les éléments matériels des délits de travail dissimulé

A- La dissimulation d’activité (art L8221-3 Code du travail)

C’est la situation d’une personne ou d’une entreprise qui se livre à une activité artisanale, commerciale, libérale, industrielle ou agricole, sans s’immatriculer au RCS ou au Registre des Métiers, sans effectuer les déclarations aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale.

Pour qu’il y ait infraction, il faut qu’une des infractions énumérées par la loi soit dissimulée. Élément matériel : Article L8221-3 Code du travail « Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’activité l’exercice à but lucratif d’une activité de production, réparation … »

1- La notion d’activité exercée dans un but lucratif

a) Les visées par le texte

Art L8221-3 Code du travail + Agriculture, pêche…toutes les activités de prestations de services…

L’activité peut être dissimulée quelque soit sa fréquence.

b) Les activités exclues

Article L8121-2 Code du travail : les travaux d’urgence dont l’exécution immédiate est nécessaire pour prévenir les accidents imminents. Les activités à but non lucratif + les travaux domestiques et familiaux ayant pour objet l’entretien du domicile privé.

Ces activités ne sont pas mentionnées par l’article L8221-3 Code du travail. par conséquent, les activités de femmes de ménages, gardiennage, jardinage, ne peuvent être poursuivit sur la base de cet article. Toutefois, cela relève du travail dissimulé avec des indices comme le non versement de cotisations sociales ou la non remise de bulletins de paie.

c) Dans un but lucratif

Le contrevenant doit avoir l’intention de retiré un gain ou avantage de son activité illégale. Ce n’est qu’une intention, c’est-à-dire que même si au final l’intérêt est minime ce n’est pas important.

Afin de faciliter la preuve du caractère lucratif de l’activité l’article L8121-4 Code du travail pose des présomptions d’intention:

  • Recours à la publicité sous une forme quelconque en vue de la recherche de la clientèle
  • La fréquence ou l’importance de l’activité
  • Lorsqu’il s’agit d’activité artisanale le matériel et l’outil présente par sa nature ou son importance un caractère professionnel ex soc 8 fév 2000 les prévenus, à la suite de la liquidation du garage paternel avaient conservés une partie du matériel avec lequel ils exécutaient dans un garage fermé diverse réparations automobile pour leur entourage et contre argent.
  • Lorsque la facturation est absente ou frauduleuse

Le juge doit se contenter de cette liste énumérer par le législateur, de plus il doit interpréter strictement le texte.

2- La notion de dissimulation

Article L8121-3 Code du travail envisage la dissimulation comme « la soustraction intentionnelle à une quelconque obligation mentionnée par le texte ». Sont ainsi visés :

  • Le non respect de l’obligation de requérir son immatriculation au RM ou RCS. La cour de cassation considère même que l’ignorance de la modification de son activité sur le registre constitue un défaut d’immatriculation. Donc le juge peut considérer que l’activité exercée est une dissimulation d’activité.
  • La poursuite d’une activité, malgré le refus d’une immatriculation ou suite à une radiation. Crim 14 mai 1996 : Conformément au principe d’interprétation stricte de la loi pénale, seule l’absence d’une des formalités mentionnées à l’article L8221-3 Code du travail constitue l’infraction, à l’exclusion des formalités propres à l’activité exercée.
  • Le fait de ne pas avoir précédée aux déclarations qui doivent être faite aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale, en application des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur.
  • La cour de cassation sanctionne également la dissimulation d’activité consistant à délocaliser juridiquement une activité à l’étranger pour ne pas avoir remplir les obligations légales en France, alors que l’activité s’exerce uniquement en France.

B- La dissimulation d’emploi (le délit de travail dissimulé par dissimulation d’emploi) (art L8221-5 Code du travail)

Article L8221-5 Code du travail définit l’élément matériel :

  • Le fait de se soustraire intentionnellement à la formalité de déclaration préalable à l’embauche (article L1221-10 Code du travail)
  • Lorsque l’employeur mentionne un nombre d’heures inférieur à celles normalement effectuées (art L3243-2 Code du travail)

La loi du 6 juillet 2011 a rajouté un al 3 à l’article L8221-5 Code du travail :

  • Lorsque l’employeur se soustrait intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires, aux cotisations sociales…, auprès des Urssaf et de l’administration fiscale

Il se peut qu’il y ait des indices à la dissimulation d’emploi :

  • L’employeur à l’obligation de tenir un registre du personnel. Ce manquement ne figure pas au nombre des formalités obligatoires dont l’omission constituerait le délit de travail dissimulé mais constitue un indices à la dissimulation d’emploi salarié

La preuve de la dissimulation est plus compliquée quand il existe une présomption de non salariat : art L8221-6 Code du travail dispose d’une présomption de non salariat pour les personnes physiques immatriculées au RCS ou Registre des Métiers.

C- Le recours au travail dissimulé (art L8221-1 3° Code du travail)

Afin d’aboutir à une répression plus efficace du travail dissimuler le législateur va essayer d’atteindre les bénéficiaire du travail dissimulé. Art L8221-1 3° « est coupable de travail dissimulé celui qui recours sciemment de manière directe ou par personne interposé au service de celui qui exerce une activité dissimulée ».

Article L8222-1 Code du travail cass 23 janv 2003

§2 L’élément moral de l’infraction

Article L8221-3 Code du travail l’élément moral est «toute personnese soustrayant intentionnellement à ses obligations».

Article L8221-5 «tout employeur… 1°2° soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité…3° soit de se soustraire intentionnées aux déclarations ».

Donc il faut avoir recours sciemment et en toute connaissance de cause eau travail dissimulé.

A- La dissimulation intentionnelle d’activité ou d’emploi

La dissimulation d’activité ou d’emploi repose sur l’inobservation des dispositions réglementaires. Il serait alors tentant de déduire que l’élément intentionnel serait le non accomplissement de ces obligations. Les juges criminels ont cette position : crim 19 mars 2002 « la seule constations de la violation en connaissance de cause d’une prescription légale ou réglementaire implique de la part de son auteur l’intention coupable exigée par l’article 121-3 Code Pénal ». Toutefois, il faut faire une nuance entre la volonté délibérée de ne pas respecter ces obligations et un simple retard ou absence….

Le cas particulier de la dissimulation d’emploi en cas de requalification d’une situation en contrat de travail :

art L8221-6 Code du travail dispose d’une présomption de non salariat : les parties sont d’accord. Donc dans cette situation la nécessité de qualifie le dol pénal est encore plus marqué puisque l’article L8221-6 Code du travail indique expressément que dans ce cas, il faut faire la preuve que le donneur d’ouvrage s’est volontairement soustrait aux obligations de l’article L3243-1 Code du travail et L1221-10 Code du travail.

Le cas de la dissimulation partielle d’emploi :le salarié travail en réalité plus que déclaré. Le texte précise que « la mention sur le bulletin de paie d’un nombre d’heure inférieur à celui réellement effectué constitue une dissimulation d’emploi salarié ». L’emploi du présent parait ne pas laisser place à la discussion et donc une présomption de travail dissimulation. C’est l’interprétation admise par les diverses juridictions. La cour de cassation est venue préciser : il ne s’agit pas réellement de l’intention de travail dissimulé lorsqu’il s’agit d’une erreur de rédaction (soc 29 oct 2003) ni lorsque les heures sont dans une rubrique différente que celle où elles devraient être sur le bulletin de paie (soc 15 oct 2002). Soc 21 mai 2002 les juges doivent rechercher l’intention.

  • Il faut regarder l’importance et la durée de l’omission : un certain nombre d’argument peuvent être avancés par l’employeur afin de démontrer le défaut d’intention délictueuse : s’il a inscrit une durée inférieure à celle réellement effectué c’est en raison d’une faute ou d’une légèreté blâmable du salarié.
  • Le décompte erroné des horaires
  • Le non paiement des heures supplémentaire: lorsqu’un employeur ne paie pas des heures supplémentaire, il y a réellement ‘intention ; même si le paiement est effectué par le biais de prime …

B- Le recours au travail dissimulé

C’est le fait d’avoir recours à une entreprise qui ne déclare pas ses salariés ou à quelqu’un qui ne s’est pas immatriculé. Le problème est que l’inobservation des dispositions légales n’est pas observer par celui qui est poursuivit mais par la personne avec lequel il a travaillé. Donc l’élément moral ne sera constitué que si il est prouvé que la société contrôle n’a pas vérifier un manquement de la société qu’elle a employé. Ex indices, si la société employeur a payé en espèces ; lorsque la société employeur paie un prix dérisoire (cass 19 déc 2000).

§3 Les personnes responsables des délits de travail dissimulé

A- Les personnes physiques

1- Exclusion du salarié

Le salarié qui n’est pas déclaré par son employeur, ne peut être poursuivit pour l’exercice d’un travail dissimulé, seul son employeur sera mis en cause. La question s’est toutefois posée de la complicité du salarié qui accepterait de ne pas être déclaré ou de se faire déclarer des heures sans que celle-ci ne soit portée sur le bulletin de paie. Mais le salarié étant considéré comme victime du lien de subordination qui lui empêche de refuser cette situation imposé par l’employeur. Il est donc important d’examiner chaque situation afin de déterminer l’existence ou non d’un lien de subordination.

2- Les personnes visées

Son susceptibles d’être poursuivit :

  • Celui qui exerce une activité dissimulé : la dissimulation d’activité. Ex un indépendant qui ne s’immatricule pas au RCS ou Registre des Métiers.
  • L’employeur qui dissimule ses salariés : la dissimulation d’emploi salarié
  • Celui qui sciemment recours de manière directe ou par personne interposée au service de celui qui exerce le travail dissimulé

Il est donc important de recherche si la personne qui travail n’est pas déclaré par son employeur ou que le travailleur indépendant n’est pas immatriculé.

Si l’auteur de l’infraction, notamment par dissimulation d’emploi ou recours au travail dissimulé, est une entreprise, se seront les dirigeants de droit comme les dirigeants de fait qui pourront être poursuivis des chefs des infractions relatives au travail dissimulé. Il faut également recherche s’il n’y a pas délégation de pouvoir.

B- Les personnes morales responsables

Si l’infraction est commise par un organe ou un représentant de la personne morale, pour le compte de la personne morale. Art L8224-5 Code du travail dispose que « les personnes morales peuvent être déclarées pénalement dans les conditions prévues par l’article 121-2 Code Pénal des infractions prévues par les art L8224-1 et L8224-2 Code du travail ». Ex petite SARL, un gérant [dirigeant de droit ; pas de délégataire ; bien l’organe de représentation] décide de ne pas déclarer un salarié : dissimulation d’emploi salarié ; on engage la responsabilité de la personne physique ; mais étant donné que la personne physique a commise l’infraction pour le compte que la personne morale.

§4 Les sanctions des délits de travail dissimulé

A- Les sanctions pénales

1- Personnes physiques

Article L8224-1 Code du travail pose une double pénalité : peine d’emprisonnement de 3 ans et amende de 45 000 euros. S’il s’agit d’un mineur, l’article dispose que la peine peut aller jusqu’à 5 ans et que l’amende est de 75 000 euros.

Article L8224-3 Code du travail peines complémentaires:

  • L’interdiction d’exercer pour une durée de 5 au plus directement ou par personne interposée l’activité professionnelle à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise
  • L’exclusion des marchés publics pour une durée maximale de 5 ans
  • La confiscation des objets ayant servis directement ou indirectement à commettre l’infraction ou qui ont été utilisés à cette occasion ainsi que ceux qui en sont le produit ou qui appartiennent au condamné
  • L’affichage ou la diffusion de la décision prononcée
  • L’interdiction suivant les articles 131-26 Code Pénal des droits civiques, civils et de famille

2- Personnes morales

Article L8224-5 Code du travail permet la mise en cause de la responsabilité pénale des personnes morales. Cet article dispose que les peines sont « l’amende suivant les modalités prévues par l’article 131-38 Code Pénal » : 220 000 euros ; si mineurs 375 000 euros.

De plus les peines de l’article 131-39 Code Pénal :

  • Dissolution de la société
  • L’interdiction d’exercer l’activité qui a été l’objet du dissimulé
  • Le placement sous surveillance judiciaire
  • La fermeture temporaire ou définitive
  • L’exclusion des marchés publics
  • La confiscation de la chose ayant servie à commettre l’infraction
  • L’affichage ou la diffusion du jugement

B- Les autres sanctions

1- Les sanctions administratives

Art L8272-1 Code du travail « lorsque l’autorité administrative a connaissance d’un procès verbal relavant d’un des infractions constitutive du travail …peut refuser les aides en matière d’emploi, de formation, de culture… ». De plus l’entreprise devra rembourser les aides versées par l’Urssaf ou les exonérations fiscales…

L’administration peut en fonction des aides sollicitées et de l’avantage qu’elles procurent à l’employeur refuse d’accorder pendant une durée maximale de 5 ans les aides publics à l’emploi ou à la formation professionnelles à la personne physique ou morale ayant fait l’objet de cette verbalisation.

Lorsqu’il y a annulation ou demande de remboursement, ce remboursement est plafonné par un décret et est égal au montant ou exonérations pratiqués dans l’établissement sur la période où à été constaté l’infraction.

2- La Solidarité financière

Toute personne condamnée pour avoir recourue directement ou par personne interposée aux services de celui qui exerce un travail dissimulé est tenue solidairement avec ce dernier au paiement des impôts, taxes, cotisations obligatoires.

3- Les droits du salarié dissimulé

Cette sanction ne concerne que la dissimulation d’emploi salarié. Art L8223-1 Code du travail: si le salarié dont le contrat est rompu et que ce salarié a été embauche dans les conditions de l’article L8221-3 Code du travail, ce rend compte qu’il a été vicitme d’une dissimulation d’activité il aura droit à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire ; celle-ci pourra se cumuler avec toutes les autres indemnités.

La Conseil constitutionnel s’est prononcé suite à une QPC : est-il constitutionnel de cumuler cette indemnité de 6 mois plus les autres indemnités CC 25 mars 2011 n°2011-111 cette indemnité ne constitue pas une sanction ayant le caractère de punition au sens de l’article 8 DDHC de 1789; cette indemnité a pour objet d’assurer une réparation minimale du préjudice subi par le salarié du fait de la dissimulation du travail, qui conduit faute de versement, de cotisations sociales, à une perte de droits que le caractère forfaitaire de l’indemnité est destiné à compensé la difficulté pour ce salarié de prouver le nombre d’heures de travail accomplit. Que dès lors cette indemnité qui est distincte des sanctions pénales ne constitue pas une sanction ayant le caractère d’une punition au sens de l’article 8 DDHC.