Le principe de la légalité criminelle

Le principe de la légalité

En vertu du principe de la légalité criminelle, il ne peut pas y avoir d’infraction en dehors d’un texte légale (nullum crimen, sine lege), et la loi est nécessaire pour toute incrimination. Ainsi le juge n’a pas le droit de créer un délit, ou de déclarer punissable des faits que le législateur ou le pouvoir exécutif n’a pas incriminé.

Section 1 : Les origines et les évolutions de la règle légaliste

§1 : Les origines et les fondements du principe

Ce principe de la légalité, on en retrouve des traces dans le Code qui avait fixé une échelle des peines. Au Moyen-âge, le système des peines a été adopté, mais pendant très longtemps, le droit pénal a connu des difficultés car il était divers : les règles pouvaient être issues de beaucoup de sources. Cela créait un arbitraire pour les justiciables, et c’est donc pour combattre cet arbitraire qu’au XVIIIe, on a considéré que ce système n’était pas juste pour le justiciable : la DDHC a alors posé le principe de la légalité pénale.

En vertu de l’article 5 de la Déclaration : « tout ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché ». L’article 8 de la DDHC ajoute que « la loi ne peut établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit ».

Ce principe a valeur constitutionnelle, et a également été consacré au niveau international et européen : en effet, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 affirme en son article 11 que « nul ne sera condamné pour des actions ou omissions qui, au moment où elles ont été commises, ne constituaient pas un acte délictueux d’après le droit national et international.

Ce principe de la légalité a été repris par la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, qui rappelle qu’il « n’est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l’infraction a été commise ».

Le Code pénal a repris ce principe de légalité à l’article 111-3, en vertu duquel « nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi ou pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis par un règlement ; nul ne peut être puni d’une peine qui n’est pas prévue par la loi si l’infraction est un crime ou un délit, ou par un règlement si l’infraction est une contravention.

§2 : L’évolution de la règle de légalité

A/ L’affaiblissement progressif du principe par rapport à sa conception originale

Certains auteurs estiment que le principe de légalité criminelle a connu, depuis sa création dans la DDHC, un certain affaiblissement. On a pu constater qu’on pouvait trouver certaines sources de ce déclin dans le domaine législatif, mais aussi dans le domaine judiciaire.

On notera tout d’abord la disparition de l’exclusivité législative dans la création des textes à caractère répressif : ce pouvoir législatif va accorder au pouvoir exécutif le droit de décrire des incriminations (il reviendra alors au pouvoir législatif de fixer des peines associées, sauf en matière contraventionnelle ou l’exécutif pourra s’en charger). Le pouvoir exécutif pourra aussi fixer des peines complémentaires ou restrictives de droits en matière délictuelle et criminelle.

Des auteurs ont également souligné que la multiplicité des actes répressifs peut avoir une conséquence négative sur le principe de la légalité : ils soulignent qu’on a de plus en plus de textes, qui sont de plus en plus souvent modifiés, et parfois assez vagues. Portalis avait souligné qu’en matière criminelle, où il n’y a qu’un texte formel et préexistant pouvant former l’action du juge, il faut des lois précises, et point de jurisprudence.

Cela signifie qu’en matière pénale, seule la loi doit créer des infractions, délimiter leur champ d’application, les textes pénaux ne doivent pas être incertains, et ainsi la jurisprudence ne devrait avoir qu’un rôle accessoire en appliquant des dispositions pénales claires.

Or la jurisprudence a un rôle de plus en plus important, en cela on peut considérer qu’il y a un déclin du principe de légalité criminelle.

B/ La transformation du principe

Ce principe de légalité a dû évoluer et se transformer pour s’adapter, car là encore on a octroyé de nouveaux droits au juge répressif. En effet, il pourra apprécier la légalité d’un texte lorsqu’il sera un règlement administratif : c’est ce qu’on appelle l’exception d’inégalité, consacrée à l’article 111-5 du Code pénal.

En effet, les juridictions pénales sont compétentes pour interpréter les actes administratifs, règlementaires ou individuels, et pour en apprécier la légalité. Lorsque de cet examen dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis, en vertu de l’article 111-5 du Code pénal, le juge pénal va pouvoir rechercher si l’acte administratif n’est pas entaché d’un vice d’incompétence de forme, de violation de la loi, ou encore de détournement de pouvoir.

Pour pouvoir exercer ce contrôle, il faut nécessairement que l’acte administratif mis en cause soit à l’origine des poursuites pénales, et que de cette interprétation dépende l’issue de ce procès pénal. Dans cette hypothèse, le juge va pouvoir vérifier que l’acte administratif est conforme à toutes les normes supérieures à cet acte.

Dans ce cas là, la décision que le juge pénal va prendre ne vaudra que pour le jugement pénal en cause.

 

Section 2 : La signification du principe de légalité pénale

Le législateur et le juge face au principe de légalité pénale