La détermination des actes de gouvernement
L’acte de gouvernement est la dénomination appliquée à un certain nombre d’actes émanant des autorités exécutives et dont la caractéristique est de bénéficier d’une immunité juridictionnelle absolue. De tels actes ne sont pas susceptibles d’être déférés au Conseil d’Etat par la voie contentieuse
Le Président de la République et le Premier Ministre prennent des actes de Gouvernement ainsi que d’autres actes <= les actes de Gouvernement sont des actes pris par les autorités administratives échappant à la compétence du Juge administratif, et généralement à tout contentieux Voici quelques exemples d’actes de gouvernement :
la décision du Premier ministre de déposer un projet de loi (CE, 19 octobre 1962, Brocas), la décision de nommer un membre du Conseil constitutionnel (CE, ass., 9 avril 1999, Mme Ba), le décret de nomination du Gouvernement (CE 16sept. 2005, M. Hoffer), la décision de recourir à l’article 16 de la Constitution (CE, Ass, 2 mars 1962,Rubin de Servens), la décision de mise en œuvre d’un embargo (CE, CE, 29 décembre 1997,Société Héli-Uni).
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I – Une détermination délicate d’un point de vue théorique
– ces autorités agissent en tant qu’acteurs, ou en tant que gouvernants => sans distinction organique, il convient d’effectuer une analyse au cas par cas
– certains auteurs ont essayé de définir les deux actions => ainsi, pour E. Laferrière, administrer c’est assurer l’application quotidienne des lois, veiller aux rapports des citoyens avec l’Administration, et aux rapports des diverses Attentions entre elles ; tandis que gouverner c’est veiller à l’observation de la Constitution, au fonctionnement des pouvoirs publics (Notamment aux rapports qu’ils entretiennent entre eux) et aux rapports avec les puissance étrangères
II – Une détermination effectuée par le juge, espèce par espèce
A/ Une absence de critères actuels d’identification de l’acte du Gouvernement
– conception originelle : tout acte de l’Administration pris en considération de motivation politique
– le critère du mobile politique, posé par CE 1822, Laffitte et abandonné par CE 1875, Prince Napoléon, contraire à l’Etat de droit, n’a pas disparu mais reculé => il peut servir de fondement à une annulation ; et CE 1954, Barel censure un refus (politique) d’inscription à un concours administratif traduisant en réalité un détournement de pouvoir.
– malgré l’absence de critère et le positionnement empirique du Conseil d’Etat en la matière, on note une cohérence de la cn jurisprudentielle en l’absence de critère tangible
B/ Les deux domaines de prédilections de l’acte de Gouvernement
– conception actuelle : les actes de Gouvernement peuvent être regroupés en deux catégorie => actes accomplis dans les relations entre pouvoir public et actes accomplis dans les relations internationales <= mais la détermination d’un acte de Gouvernement reste une question d’espèce, emprunte de considération d’opportunité
- Les rapports entre les pouvoirs publics
- a) les actes traditionnels
– sont des actes de Gouvernement
– le refus de l’exécutif de présenter un projet de loi au Parlement : CE 1930, Rouché
– le dépôt d’un projet de loi de transposition d’une directive Union Européenne : CE 2012, Krikorian
– le déc. de promulgation d’une loi : CE 1933, Desreumeaux ou le refus de prendre un tel déc.
– le décret de dissolution de l’Assemblée Nationale (12 Constitution) : CE 2006, Hoffer
- b) les actes spécifiques à la Ve République
– sont des actes de Gouvernement
– la mise en œuvre (et la durée d’application) de 16 Constitution : CE 1962, Rubin de Servens
– la décision de soumettre un projet de loi à un référendum (11 Constitution) : CE 1962, Brocas
– la saisine du Conseil Constitutionnel
– la nomination du Premier Ministre par le Président de la République / du Gouvernement par le Président de la République et le Premier Ministre
- Les relations internationales
– les actes internationaux sont soumis au droit international public mais des actes internes peuvent transposer une disposition d’ordre international <= parmi ces actes, sont des actes de gouvernement
– l’acte qui vient ratifier un Traité international: CE 1926, Dame Caraco
– les actes concernant la politique de défense de la France comme l’engagement armé à l’étranger (CE 2008, Hoffer) ou la décision de procéder à des essais nucléaires
– les prises de position dans la politique internationale de la France comme le refus d’organiser des élections présidentielles étrangères sur le territoire français (CE, ord. 2014, Mme B)
– la fonction diplomatique comme protection des français à l’étranger (CE 1966, Veuve Cramencel pour un pillage après un séisme)
C/ La multiplication des « actes détachables » de la fonction gouvernementale
- Une jurisprudence initiée dans le domaine internationale
– des actes relevant du domaine international sont suffisamment autonomes pour être « détachés » du domaine des relations internationales
– CE 1903, commune de Gorre : pose la détachabilité d’un acte (délibération d’un Conseil Général) s’inscrivant dans une opération administrative complexe (contrat de bail imposé) ; CE 1905, Martin étend la détachabilité à tous les acte administratifs ; CE 1924, Goldschmidt applique cette théorie aux actes pris dans les relation international
– sont des actes détachables des Relations Internationales
– la décision de répartition d’une somme d’argent reçue par le gouvernement français d’une autorité étrangère visant à indemniser des entreprises nationalisées : CE 1956, Epoux Deltel
– le refus d’extrader un étranger : CE 1993, RU de GB
– une interdiction d’exportation : CE 1988, Robatel
– CE 1988, Ville de Strasbourg (accélérateur de particules)
- L’extension limitée de la détachabilité aux actes intéressant les rapports entre les pouvoirs publics internes
– « jurisprudence d’espèce » => est un acte détachable un décret du Premier Ministre chargeant un parlementaire d’une mission administrative temporaire : CE 1998, Mégret
III – Les problèmes soulevés par « l’injusticiabilité » des actes du gouvernement
A/ Exposition du problème
– problème procédural => l’acte de Gouvernement n’est pas un acte administratif <= il échappe au contrôle du Juge Administratif => à son contrôle de légalité (violation d’une norme >) et à son contrôle de responsabilité (dommage occasionné) <= problème d’incompétence (et non d’irrecevabilité) implique une immunité des actes, aucune juridiction ne pouvant prétendre à les connaître tant sur le plan des relation entre pouvoir public (le Conseil Constitutionnel ne possédant qu’une compétence d’attribution, il refuse de sortir des limites posées par la Constitution/LO ,ce qui signifie par ex. qu’aucun juge ne pourrait sanctionner le non respect des condition de dissolution de 12 Constitution) que sur le plan des relation international
B/ Les solutions envisageables
– pour les relations entre pouvoir public, un aménagement de la compétence du Conseil Constitutionnel serait une solution mais nécessiterait une révolution Constitutionnelle
– pour les Relations Internationales, le développement de la technique de la détachabilité permet au Juge Administratif d’étendre son contrôle en la matière tout en veillant à ne pas s’immiscer trop loin dans les affaires du gouvernement, comme l’appréciation de la suspension d’un traité (CE 1992, Préfet de Gironde c/ Mahmedi)
– une brèche pourrait s’ouvrir avec un contentieux de responsabilité : le Juge Administratif accepte de réparer un dommage causé par une Convention internationale en élargissant la responsabilité sans faute du fait de la loi au domaine international <= un parallèle peut être fait avec CE 2011, Mme Saleh => le dommage occasionné par l’inexécution d’une décision de justice par une autorité étrangère (pas une faute imputable à l’Etat) doit être réparé par l’Etat (responsabilité sans faute)