Définition de l’acte règlementaire
Les actes réglementaires sont des actes qui ont une portée générale et impersonnelle et visent ou concernent des catégories envisagées abstraitement et dans leur ensemble., à la différence des actes administratifs “individuels”, qui s’adressent à des destinataires identifiables
– La décision règlementaire est une prérogative majeure de l’Administration lui permettant de modifier unilatéralement l’ordonnancement juridique : c’est le pouvoir de décision unilatérale constituant un instrument majeur de l’action administrative (acte administratif par excellence) et matérialise le privilège du préalable (principe majeur du Droit Administratif) selon lequel l’obligation est faite aux administrés de se conformer à la décision même contestée (le recours n’est pas suspensif, sauf référé d’urgence) ; et dispense est faite à l’Administration de recourir au juge pour mettre en œuvre la décision prise dans le cadre de son pouvoir unilatéral (CE 1913, Préfet de l’Eure)
I – Acte réglementaire et acte non réglementaire
– un élément suffit à les distinguer : la généralité ou non de la norme posée : l’acte non règlementaire pose une règle particulière
- Droit administratif : cours – fiche L2 – Semestre 3
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A/ Les caractéristiques de l’acte réglementaire.
– la généralité signifie que l’objet de l’acte réglementaire est défini sans considération des personnes à qui il s’adresse, comme l’interdiction de stationner, ou l’interdiction du port d’un signe religieux par un règlement intérieur d’un collège : CE 1992, Kherouaa
– mais la norme général peut produire des effets personnalisés notamment lorsqu’elle a un champ d’application en rapport avec une qualité personnelle (l’octroi d’une prime à raison d’une qualité)
B/ Caractéristique de l’acte non réglementaire
– matérialisation à un cas particulier d’une norme général préexistante => l’acte non réglementaire particularise une norme générale ; l’objet de la décision non réglementaire se définit par référence à un élément concrètement identifiable : il vise une personne en particulier ou une situation particulière
- Les actes individuels
– visent souvent une personne nommément désignée (port-d’arme, permis de construire…)
– une même décision peut concerner plusieurs individus précis : « décision collective » (l’octroi de la Légion d’Honneur, liste d’attribution de postes après un concours…)
- Les décisions d’espèce
– décision hybride ressemblant à un acte réglementaire & non réglementaire : ne vise pas un individu en particulier (acte réglementaire), pose une norme général (acte réglementaire) applicable à une situation donnée (versement à l’acte réglementaire), permet alors indirectement une identification de certaines personne (acte non réglementaire), et donc une individualisation des droits et obligation (acte non réglementaire)
– sont des décisions d’espèce personnalisées : la liste des personnes admises à un concours de la fonction publique, la déclaration d’utilité publique procédant aux expropriations, l’arrêté de classement en site protégé…
II – Actes réglementaire et acte non impératif
– la réglementation s’impose à ses destinataires => le caractère impératif de la norme est consubstantiel à l’idée de réglementation : on parle de « droit dur » par opposition au « Droit mou » qui oriente certains comportements sans le caractère de commandement s’attachant au droit dur <= illustre la contribution du Conseil d’Etat à la cn du droit Aif
– rapport de 2013 consacré au droit souple, conceptualise le droit mou et tente de dégager certains critères de définition afin d’éviter des confusions avec le droit dur (même forme, processus d’élaboration similaire)
– le droit mou ne modifie pas en lui-même l’ordonnancement juridique => il tente d’influencer mais n’est pas normatif
A/ Circulaire non réglementaire, instructions et notes de services
– ces instruments poursuivent le même but : la circulaire vise le bon fonctionnement de l’Administration (efficacité) par l’explication du droit applicable (légalité) aux agents : elle interprète le droit à destination des agents et assure parfois la cohérence de règles apparemment opposé (uniformité)
– elle a également une mission d’information des évolutions récentes
– elle a une portée générale et non une portée impérative : elle est informative, indicative, ou interprétative
– problème : l’auteur tente souvent d’imposer un comportement (« droit dur« ) sans forcément détenir un pouvoir réglementaire : le Juge Administratif vient déterminer ce qui relève de l’indicatif & de l’impératif : la circ. purement interprétative ne faisant pas grief, la circ. impérative obéit au même régime que les acte administratifs : il convient alors de savoir si sous l’appellation de circulaire on a une circulaire ou un règlement.
– l’état du droit a évolué et le juge n’emploie plus les mêmes critères : à l’origine, CE 1954, Institution Notre-Dame du Kreisker : présence ou non dans la circ. de règles nouvelles par rapport au droit (ou jurisprudence) existant : le critère d’apport au droit existant amenait le Juge Administratif à effectuer des analyses complexes et fastidieuses l’amenant à un contrôle de fonds avant un contrôle de recevabilité
– CE 2002, Mme Duvignère propose un critère plus maniable, plus évident : la présence ou non dans la circ. d’un caractère impératif envers les agents
B/ Les lignes directrices de l’action administratives
- Présentation générale
– un texte en vigueur laisse à l’autorité administrative une marge de manœuvre importante dans l’exercice de la mission qu’il lui confie : elle dispose d’un pouvoir discrétionnaire
– une autorité supérieure de l’Administration concernée peut alors éprouver le besoin de définir une ligne de conduite pour que l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire ne soit pas arbitraire : elle tente d’harmoniser les pratiques des services en la matière par des orientations souvent techniques (on parle de « pouvoir d’orientation« )
– CE 2014, M. B : la loi accorde à l’AEFE le pouvoir d’accorder des bourses ; un décret 1991 précise des conditions en prévoyant notamment l’édiction par AEFE d’une instruction posant des conditions d’octroi : ces condition sont-elles impératives ou s’inscrivent elles dans une orientation ? La règle posée étant susceptible de dérogation (motivée) pouvant conduire à l’octroi de bourse, c’est une orientation donc une « ligne directrice » (première fois dans cet arrêt) de l’action administrative qui peut être dégagée sans aucun pouvoir réglementaire.
– CE 1970, Crédit Foncier de France : pratique qualifiée de « directive » : rapport 2013 préconise un changement d’appellation pour éviter la confusion avec l’homonyme européen. : Le Juge Administratif fait évoluer le droit en reconnaissant un instrument juridique, et par son activité d’étude et de rapport, suggère également une évolution
- Régime juridique
– régime juridique hybride défini par CE 1970, Crédit Foncier de France : les autorités peuvent élaborer des « lignes directrices » leur permettant de définir des orientations générales afin de diriger leurs activités, mais sans renoncer à leur pouvoir d’appréciation, sans limiter celui de leurs agents, sans édicter aucune condition nouvelles par rapport au texte à appliquer
- a) L’opposabilité des lignes directrice
– les lignes directrices servent de normes de référence aux autorités amenées à édicter des décisions individuelles dans le secteur considéré : elles sont donc opposables aux administrés (loi 17 juil. 1978 prévoit donc leur publication) et peuvent être revendiquées par les administrés
– sur le terrain de l’opposabilité, elles ressemblent à des actes réglementaires
- b) La possibilité de déroger à la ligne conductrice
– les Lignes Directrices énoncent des orientations générales et non des droits et des obligations : les autorités compétentes peuvent donc s’en écarter en fonction de la situation d’espèce (le Juge Administratif est attentif à cette liberté laissée) : une Ligne directrice bridant complétement l’action de ses agents serait requalifié de « règlement » : CE 2004, Comité anti-amiante de Jussieu requalifie une directive ne laissant aucune marge de manœuvre à ses subordonnés
- c) L’impossibilité d’un recours direct à l’encontre des lignes directrices
– une Ligne Directrice ne peut pas être attaquée directement devant le juge, mais un administré peut contester la Lignes Directrices elle-même, son application ou sa non application à l’occasion du recours formé contre l’acte individuel pris dans son cadre : c’est un mécanisme d’exception
- d) L’invocabilité par l’administré
– peut mettre en doute la régularité de la ligne appliquée en dénonçant sa « nature réelle » (règlement) ou l’apport de conditions nouvelles, ou en avançant la nécessité d’une dérogation justifiée par sa situation particulière
– de même, un administré peut revendiquer l’application d’une Ligne Directrice
- e) L’invocabilité par l’administration
– qu’elle applique ou non les orientations d’une ligne directrice. L’Administration devra toujours se justifiée devant le juge, et peut dénoncer l’irrégularité d’une Ligne Directrice