Les caractères de la 5ème république

Quels sont les caractères de la 5ème république ?

La Cinquième République, instaurée en 1958, se distingue par trois caractéristiques fondamentales : une naissance difficile dans un contexte de crise, un attachement à la tradition républicaine, et le principe de l’indivisibilité de la République. Ces traits reflètent les conditions historiques de sa création et les principes fondamentaux qui la structurent.

1) Une naissance difficile et controversée

a) Une crise politique majeure : la guerre d’Algérie

La transition de la Quatrième à la Cinquième République s’est déroulée dans un contexte de crise politique et sociale aiguë, marqué par :

  • L’insurrection à Alger (mai 1958) : Des généraux et partisans de l’Algérie française remettent en cause l’autorité du gouvernement, jugé incapable de gérer la situation.

  • Une paralysie gouvernementale : L’instabilité chronique de la Quatrième République, avec des gouvernements fragiles et éphémères, rendait le régime inefficace face à cette crise.

b) Le rôle décisif du général de Gaulle

Face à cette menace, le Président de la République de l’époque, René Coty, fait appel au général de Gaulle, perçu comme une figure d’autorité capable de rétablir l’ordre.

  • Nomination au poste de chef du gouvernement : De Gaulle accepte à condition d’obtenir les pleins pouvoirs pour élaborer une nouvelle constitution.

  • La loi constitutionnelle du 3 juin 1958 : Le parlement vote une loi permettant au gouvernement de rédiger un projet de Constitution sous certaines conditions :

    • Le régime doit être démocratique, avec le suffrage universel comme source de pouvoir.

    • Il doit garantir une séparation effective des pouvoirs.

    • La responsabilité des gouvernements devant le parlement doit être maintenue.

c) Une adoption controversée

Le texte de la Constitution est adopté par référendum le 28 septembre 1958 avec une large majorité, mais non sans controverse. Certains y voyaient une rupture brutale avec les traditions républicaines et une concentration excessive des pouvoirs au profit de l’exécutif.

2) Un régime attaché à la tradition républicaine

Pour dissiper les craintes d’un retour à un régime autoritaire, notamment celui du régime de Vichy, les rédacteurs de la Constitution ont insisté sur la continuité républicaine.

a) Une référence explicite à l’héritage républicain

La Cinquième République s’inscrit dans la continuité des Troisième et Quatrième Républiques :

  • Réaffirmation des principes républicains : Liberté, égalité, fraternité.

  • Conservation de droits fondamentaux : Le préambule de la Constitution de 1958 renvoie à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ainsi qu’aux principes fondamentaux proclamés dans le préambule de la Constitution de 1946.

b) Une République démocratique

La Cinquième République garantit :

  • Le suffrage universel comme fondement de la légitimité politique : Cela inclut l’élection du Président de la République au suffrage universel direct depuis 1962.
  • La souveraineté populaire et nationale : L’article 1er réaffirme que la République est « indivisible, laïque, démocratique et sociale », posant les bases d’un régime respectueux des droits et libertés des citoyens.

La Cinquième République française, instaurée par la Constitution du 4 octobre 1958, se distingue par des caractéristiques qui reflètent son ambition de rompre avec l’instabilité des régimes précédents, notamment la Quatrième République. Son architecture institutionnelle repose sur un équilibre spécifique entre les pouvoirs exécutif et législatif, tout en affirmant une certaine souplesse pour s’adapter aux évolutions politiques.z

Une république parlementaire rationalisée

La Cinquième République conserve les principes fondamentaux d’une démocratie parlementaire tout en corrigeant les dérives du parlementarisme absolu des régimes antérieurs.

a) Le rejet de l’instabilité gouvernementale

Sous la Troisième et la Quatrième Républiques, la domination du parlement entraînait une forte instabilité gouvernementale. La Cinquième République se distingue par :

  • La rationalisation du parlementarisme :
    • La motion de censure est encadrée (article 49 alinéa 2 de la Constitution) : elle nécessite une majorité absolue pour être adoptée, rendant sa mise en œuvre plus difficile.
    • Le gouvernement peut engager sa responsabilité sur un texte législatif (article 49 alinéa 3), ce qui permet de faire adopter une loi sans vote explicite du parlement.
  • La stabilité du gouvernement :
    • Les gouvernements disposent d’une durée de vie plus longue, contrairement aux fréquents changements sous les régimes précédents.

b) Une séparation souple des pouvoirs

La Cinquième République conserve une séparation souple des pouvoirs, caractéristique des régimes parlementaires, mais introduit des mécanismes de collaboration renforcés entre les pouvoirs exécutif et législatif.

Un exécutif renforcé

La Cinquième République se distingue par le renforcement significatif du pouvoir exécutif, en rupture avec les précédents régimes parlementaires dominés par le législatif.

a) Un exécutif bicéphale

L’exécutif est composé :

  • Du président de la République, chef de l’État, qui dispose de prérogatives étendues.
  • Du Premier ministre, chef du gouvernement, chargé de l’action gouvernementale.

b) Le rôle prééminent du président de la République

Le président de la République occupe une position centrale, renforcée par plusieurs mécanismes :

  • Élection au suffrage universel direct depuis 1962 : cette réforme, adoptée par référendum, confère au président une légitimité populaire forte.
  • Pouvoirs étendus :
    • Le président nomme le Premier ministre (article 8).
    • Il dispose du pouvoir de dissolution de l’Assemblée nationale (article 12).
    • Il peut recourir à l’article 16, qui lui donne des pouvoirs exceptionnels en cas de crise grave.
    • Il est le garant des institutions, de l’indépendance nationale et du respect de la Constitution (article 5).
  • Un rôle arbitral : Dans la conception gaullienne, le président n’est pas un simple chef de l’exécutif, mais un arbitre au-dessus des partis.

c) Le rôle du Premier ministre

Le Premier ministre est responsable devant le parlement et exerce des pouvoirs exécutifs importants, notamment dans la mise en œuvre des politiques publiques. Cependant, son influence est réduite lors des périodes de « fait majoritaire », où le président bénéficie d’un soutien parlementaire.

Un parlement encadré

Le parlement, bien que conservant son rôle législatif et de contrôle, voit ses prérogatives limitées pour éviter les excès du régime d’assemblée.

a) Limitation des prérogatives

  • Le domaine de la loi est strictement défini à l’article 34 de la Constitution, laissant les matières non mentionnées au pouvoir réglementaire (article 37).
  • Les procédures parlementaires sont rationalisées pour éviter les blocages :
    • Limitation des amendements parlementaires (article 44).
    • Vote bloqué permettant d’adopter un texte sans modification.

b) Maintien de la fonction de contrôle

Le parlement conserve toutefois des outils de contrôle, notamment :

  • Le vote de la motion de censure pour renverser le gouvernement.
  • La possibilité de poser des questions au gouvernement ou de créer des commissions d’enquête.

Une flexibilité institutionnelle : le semi-présidentialisme

La Cinquième République est souvent qualifiée de régime semi-présidentiel, car elle combine des éléments des régimes présidentiels et parlementaires.

a) Une dualité des rapports entre président et gouvernement

  • En période de fait majoritaire, lorsque le président et la majorité parlementaire appartiennent au même camp, le président domine largement l’exécutif.
  • En période de cohabitation, lorsque le président et la majorité parlementaire sont de camps opposés, le pouvoir revient principalement au Premier ministre, chef de la majorité parlementaire.

b) Une adaptation aux conjonctures politiques

La flexibilité du régime permet de s’adapter à des configurations politiques variées, sans nécessiter de révisions constitutionnelles majeures.

La garantie de l’État de droit

La Cinquième République consolide l’État de droit en renforçant la protection des droits fondamentaux et le contrôle de la constitutionnalité des lois.

a) Le rôle du Conseil constitutionnel

Créé par la Constitution de 1958, le Conseil constitutionnel garantit la conformité des lois à la Constitution :

  • Contrôle a priori des lois (article 61).
  • Contrôle a posteriori via la Question Prioritaire de Constitutionnalité (réforme de 2008).

b) Références aux droits fondamentaux

La Cinquième République intègre dans son préambule les principes énoncés dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et le préambule de la Constitution de 1946.

 

 

Une République démocratique et sociale

a) Un équilibre entre souveraineté nationale et populaire

La Cinquième République combine deux conceptions de la souveraineté, affirmées dans l’article 3 de la Constitution :
« La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. »

  • Souveraineté nationale :

    • Elle s’exerce principalement à travers des représentants élus (Président de la République, parlementaires, etc.).
    • Le recours au suffrage universel confère une légitimité forte aux institutions.
  • Souveraineté populaire :

    • Le référendum est un outil clé, permettant au peuple de s’exprimer directement sur des décisions importantes. Il a été utilisé à plusieurs reprises, par exemple pour :
      • La réforme de l’élection du Président au suffrage universel direct (1962).
      • L’approbation de la Constitution européenne (2005).

b) Une République sociale

La Cinquième République est également une République sociale, conformément à son ancrage dans le préambule de la Constitution de 1946, qui proclame des droits économiques et sociaux fondamentaux :

  • Droit à la santé,
  • Droit à l’éducation,
  • Droit à la sécurité sociale,
  • Droit au travail.

Le Conseil constitutionnel est chargé de garantir que les lois ne remettent pas en cause ces droits sociaux. Cependant, son contrôle reste limité, car :

  • La marge d’appréciation du législateur est importante.
  • L’interprétation des droits sociaux laisse une latitude à la politique gouvernementale.

Une République décentralisée

a) Une évolution progressive

Lors de l’élaboration de la Constitution de 1958, la décentralisation n’était pas une priorité pour les rédacteurs. Cependant, une série de réformes a progressivement renforcé ce principe :

  • Révision constitutionnelle du 28 mars 2003 : Elle a introduit l’affirmation explicite selon laquelle « l’organisation de la République est décentralisée » (article 1er).
  • Ces réformes ont marqué une avancée importante, même si la France reste un État unitaire.

b) Caractéristiques de la décentralisation

  • Autonomie des collectivités territoriales : Régions, départements et communes disposent de compétences propres pour gérer les affaires locales.
  • Encadrement par l’État : L’autonomie reste relative, car les collectivités restent soumises à la tutelle juridique de l’État, qui fixe les règles générales.

 

Le principe de l’indivisibilité de la République

a) Une République indivisible

Le principe d’indivisibilité, inscrit à l’article 1er de la Constitution, revêt plusieurs dimensions :

  • Intégrité territoriale : L’État garantit l’unité et la continuité du territoire national, limitant les possibilités de sécession ou de division.
    • Exemple : L’attachement à l’unité nationale a été affirmé lors des crises régionales, notamment en Corse.
  • Unicité de l’autorité étatique : L’État exerce seul le pouvoir constituant et maintient un monopole sur les fonctions régaliennes.
  • Unité du peuple français :
    • La République ne reconnaît aucune distinction entre ses citoyens selon leur origine, leur race ou leur religion.
    • Ce principe est essentiel pour garantir l’égalité devant la loi.

b) L’application du principe d’indivisibilité

Ce principe a été affirmé dans plusieurs décisions politiques et juridiques, notamment :

  • Le rejet de la notion de peuple distinct au sein de la République :
    • En 1991, le Conseil constitutionnel a censuré une loi reconnaissant le « peuple corse » comme une composante distincte du peuple français, invoquant l’indivisibilité de la République.
  • La protection de l’unité nationale face aux revendications régionalistes.

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