Les caractéristiques du contrat de cautionnement

LES CARACTÉRISTIQUES DU CAUTIONNEMENT

  • Le cautionnement est un acte contractuel. C’est un contrat entre le créancier et la caution, ce n’est donc pas une opération à trois personnes. Le débiteur n’étant pas partie au contrat, il n’a pas à consentir ou non.
  • Le cautionnement est un contrat unilatéral (une seule partie s’oblige), mais contrat tout de même car ils sont deux à consentir. Le créancier n’est en principe tenu par aucune obligation, mais il faut nuancer.
  • Le créancier a toutefois un certain nombre d’obligations, comme par exemple l’obligation d’informer la caution de la situation de la situation de la dette régulièrement.
  • Le cautionnement est un contrat accessoire à une dette principale. C’est à dire qu’il s’instaure une sorte d’identité entre la dette du débiteur principal et l’engagement de la caution (2288 CC). En d’autres termes, la caution ne doit pas véritablement payer sa dette, mais doit payer la dette du débiteur. Formulé encore autrement, la dette de la caution n’existe qu’en référence à la dette principale.


A) LE CAUTIONNEMENT, CONTRAT ACCESSOIRE

Lorsqu’il définie le cautionnement, l’article 2011 du Code civil dispose que la caution s’engage a éventuellement satisfaire à l’obligation du débiteur »
Ce caractère accessoire est le lien existant entre une sûreté donnée par un tiers et la dette garantie. Mais pour le cautionnement le sens de ce caractère accessoire est encore plus important en ce que la garantie et l’obligation garantie vivent dans une étroite dépendance qui se retrouve principalement pour les effets et l’extinction de la sûreté
Ce caractère accessoire est exprimé par 2 dispositions :
– art 2012 alinéa 1 du Code civil : le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable
– art 2013 alinéa 1 du Code civil : le cautionnement en peut excéder ce qui est dû par le débiteur ni être contracté à des conditions plus onéreuses
Ce caractère accessoire n’est pas pour autant de l’essence des sûretés personnelles en ce qu’il est possible aux parties de l’écarter mais il faudra requalifier la sûreté, le plus souvent en garantie à première demande.
Ce caractère accessoire influe sur les obligations pouvant être cautionnées et l’étendue de l’engagement. Il explique le particularisme en la matière de la cause et de l’objet



1.Les obligations pouvant être cautionnées

  • Principe : seule une obligation valable peut être cautionnée

Le cautionnement d’une obligation nulle est sans effet. Ce n’est toutefois pas une nullité du contrat de cautionnement. Cela tient au fait que la naissance du cautionnement est liée à la naissance de l’obligation garantie. A la limite un contrat de cautionnement pourrait être valablement conclu avant la naissance une dette mais il n’accédera à la vie juridique qu’à la naissance de cette dette. Une dette future même indéterminée pourra être cautionnée à condition d’être déterminable lors du déclenchement de la garantie
En raison de son caractère accessoire le cautionnement ne produira aucun effet en cas de nullité de l’opération principale. Le principe est que la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal
Une difficulté se pose en matière de nullité qui invite à distinguer entre nullité relative et absolue.
S’il y a une cause de nullité absolue la caution pourra l’invoquer comme tout intéressé et donc si elle a été prononcée elle sera dégagée
S’il y a une cause de nullité relative, normalement l’action n’est ouverte qu’à la personne protégée, donc au débiteur principal. On admet toutefois que la caution puisse se prévaloir de la cause de nullité.
De plus, la confirmation est pour cette nullité toujours possible d’où la question de l’opposabilité de la confirmation à la caution l’article 1338 du Code civil indique que la confirmation est inopposable aux tiers mais cette disposition ne s’applique qu’aux ayant cause à titre particulier du confirmant ce que n’est pas la caution qui demeurera tenue
A partir du moment où il y a nullité il y a restitution. Est-ce que le cautionnement va devoir garantir cette restitution ? La jurisprudence a adopté une solution certaine mais critiquable. Elle a statué en matière de prêt : le cautionnement demeure tant que les parties n’ont pas été remises dans l’état antérieur à la conclusion du prêt. Cette solution heurte le caractère accessoire du cautionnement mais elle a été rendue à plusieurs reprises tant par la 1er ch.civ, que par la ch.com
De même pour les contrats successifs la jurisprudence a décidé que seule la disparition des obligations nées de ce contrat peut entraîner la disparition du cautionnement lequel conserve son efficacité à l’égard des obligations subsistantes
La vie du cautionnement est aussi influencée par l’obligation couverte. Le point de départ de la prescription de celui du cautionnement est celui de l’obligation principale.
Toutefois, il ne faut pas en conclure qu’il y a toujours identité. Le cautionnement retrouve son indépendance pour tout ce qui ne touche pas directement à sa fonction de garantie ce qui vise les clauses compromissoires et les clauses attributives de juridiction
Même si le cautionnement garantie principalement des obligations contractuelle, il peut garantir des obligations délictuelles à seule condition que celles-ci soient déjà nées

  • Le cautionnement de la dette d’un incapable

L’article 2012 alinéa 2 du Code civil dispose que « l’on peut néanmoins cautionner une obligation encore qu’elle put être annulée par une exception purement personnel à l’obligataire par exemple dans le cas de minorité »
Cette règle datant de 1804 s’explique par l’histoire de cautionnement. Originairement il était fondé sur la solidarité familiale.
Cette règle permet à un créancier de faire supporter à une caution (généralement un proche parent) les conséquences de l’incapacité du débiteur
Juridiquement cette exception se rapproche plus de la promesse de porte-fort que des règles du cautionnement

2. L’étendue de l’engagement de la caution

Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur ni être contracté sous des conditions plus onéreuses. Un tel cautionnement n’est pas nul, mais sera réductible à hauteur de l’obligation principale
L’étendue de l’obligation nécessite d’envisager plusieurs hypothèses :
– la caution garantie une dette déterminée : l’article 2016 du Code civil la dénomme « cautionnement indéfini une obligation principale » Ce texte précise que ce cautionnement s’étend alors à tous les accessoires de la dette. Les accessoires sont ceux qui apparaissent comme la conséquence directe de l’obligation couverte. Cela vise en premier lieu les intérêts (conventionnels, légaux ou moratoires), leur taux ne pouvant excéder ce qui est dû par le débiteur principal.
Le droit des procédures collectives infléchit parfois cette règle puisque l’article L.621-48 du Code de commerce prévoit que le jugement d’ouverture du redressement judiciaire arrête le cours des intérêts mais les coobligés et cautions ne peuvent s’en prévaloir
Cela vise aussi les frais de justice occasionnés par le recouvrement de la créance et les indemnités contractuelles
– la caution se porte garante de toutes les dettes d’un débiteur à l’égard d’un créancier. C’est le « cautionnement omnibus » Ces cautionnements sont les plus dangereux et pourtant la jurisprudence n’hésite pas à les valider. Il y a toutefois une volonté des tribunaux d’essayer par des recherche de volonté de les limiter à une catégorie de dette
– la caution fixe un maximum à son engagement Ces cautionnements posent une seule difficulté quand plusieurs cautions se sont engagées pour un montant déterminé : S’additionnent elles ou s’appliquent elles pour une même fraction de la dette ? Tout est interprétation de volonté, le principe étant que le doute profite à la caution

3. La cause et l’objet du cautionnement

  • La cause du cautionnement

Dans le droit du cautionnement, elle a fait l’objet une importante controverse doctrinale
– la 1ere thèse consiste à dire que le cautionnement est un acte abstrait et par conséquence valable indépendamment de sa cause Cette théorie suscite une difficulté car le droit français est causaliste et que rien dans la réglementation ne permet de trouver un support pour la théorie de l’acte abstrait
– les 2 autres théories sont causalistes et s’opposent sur la cause du contrat de cautionnement
– la cause se situerait dans les relations entre le créancier et le débiteur. Il y a cautionnement car il y a une obligation à cautionner. Cette théorie a été retenue par un arrêt de la chambre commerciale du 8 novembre 1972 L’Empereur. L’inconvénient de cette théorie tient au fait que finalement la cause va se confondre avec le caractère accessoire du cautionnement.
– Pour cette raison, certains auteurs sont venus dire que la cause doit être recherchée dans les relations qui unissent la caution et le débiteur principal : service d’ami rendu ou rémunération Cette solution est difficile à admettre car on fait dépendre la cause d’un contrat d’un autre contrat

Cette question en pratique n’a pas une grande portée car lors de la formation du contrat la cause se confond avec le caractère accessoire du cautionnement
Certaines cautions ont toutefois voulu faire jouer un rôle à la cause dans l’exécution du contrat ce qui vise deux hypothèses :
– le chef d’entreprise qui a cautionné les dettes de sa société. Il démissionne et oublie de résilier son cautionnement. La société est soumise à une procédure collectives et il est recherché comme caution
– un époux cautionne les dettes de la société de l’autre. Ils divorcent et la caution omet de résilier le cautionnement. Son ex conjoint fait faillite
L’un des moyens de défense des cautions consistait à dire que la cause de la caution se situait dans le mariage ou l’exercice des fonctions de dirigeant et que le cautionnement devrait disparaître avec ces événements.
Cette position n’a logiquement pas été admise compte tenu de la conception du cautionnement du droit du cautionnement qui fait de la cause un élément de formation et non d’exécution du contrat
Cet inconvénient est pallié par les obligations d’information

  • L’objet

Pendant longtemps l’objet ne posait pas de problème Il consiste simplement dans le paiement de la dette du débiteur principal
Il doit être licite et déterminé ou déterminable ce qui ne suscitait pas de difficultés car si l’objet est illicite le contrat est illicite et par la théorie de l’accessoire on aboutissait à l’annulation du cautionnement
Cette théorie a reçu un regain d’intérêt avec la garantie à 1ere demande En effet se sont développé des questions de qualification Pour résoudre cette difficulté il faut passer par la théorie de l’objet.
Pour les garanties à première demande, l’objet consiste dans le versement d’un somme d’argent indépendante du contrat couvert mais en matière de cautionnement la caution s’engage à payer la dette du débiteur principal


B) LE CAUTIONNEMENT, CONTRAT CONSENSUEL

Traditionnellement le cautionnement est parfait par le seul échange des consentements Pourtant l’article 2015 du Code civil pose une règle semblant démentir cette affirmation : « le cautionnement ne se présume point; il doit être expresse »
En réalité cette disposition s ‘analyse uniquement en une règle d’interprétation qui impose au juge d’effectuer une vérification de la déclaration de volonté de la caution qui devra résulter d’actes positifs, par conséquent le cautionnement ne peut jamais être tacite
Pourtant, il existe actuellement une tendance de la législation à faire du cautionnement un contrat formaliste.
C’est d’abord le Code de la consommation qui a imposé la rédaction de mention manuscrite pour la validité même du contrat. Toute personne physique s’engageant comme caution pour garantir une opération de crédit à la consommation ou de crédit immobilier doit, à peine de nullité, recopier une mention manuscrite prescrite par le l’article L.313-7 du Code de la consommation
De même l’article L.313-8 du Code de la consommation prévoit aussi une mention manuscrite pour le cautionnement solidaire
La loi du 21 juillet 1994 sur l’habitat prévoit aussi un formalisme par le biais d’une mention manuscrite obligatoire des cautions pour les cautionnements à durée indéterminée des baux d’habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989
Cette tendance au formalisme a été accentuée par la loi du 1er Août 2003 sur l’initiative économique dont le domaine d’application est très large puisque le système s’applique à toutes les Personnes physiques qui s’engagent envers un créancier professionnel.


Suivant le nouvel article L.341-2 du Code de la consommation «toute Personne Physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit à peine de nullité de son engagement faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante et uniquement de celle-ci :

en me portant caution de X dans la limite de la somme couvrant le paiement du principal, de intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ___ je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X n’y satisfaisait pas lui- même »


Ce formalisme présente un caractère en grande partie régressif et il est illusoire de penser que quelques mots dictés par un établissement de crédit permettront à un profane de valablement comprendre à quoi il s’engage Les juges n’auront aucun pouvoir d’appréciation : soit la mention est exactement recopiée et le cautionnement est valable, soit elle ne l’est pas et le cautionnement est nul
Cette nouvelle disposition pose des problèmes. Elle utilise la formule « Je m’engage à rembourser le prêteur » est-ce à dire que cette disposition est limitée au cautionnement des contrats de prêts au sens de l’article 1892 du Code civil ? Telle n’a pas été la volonté du législateur et il vaut mieux considérer que le texte vise les différentes opérations de crédit consenties par les établissements de crédit comportant une avance de fond de la part du banquier


Le cautionnement d’un montant indéterminé parait être condamné par ce texte car la mention impose de mentionner la somme garantie ou ce qui caractérise ces cautionnements c’est que l’on en peut fixer de montant à leur souscription
Pourtant, l’article L.341-5 du Code de la consommation dispose que les stipulations de solidarité et de renonciation au bénéfice de discussion sont réputées non écrites si l’engagement de la caution n’est pas limité à un engagement global d’où la possibilité d’un cautionnement à montant indéterminé.
La même remarque peut être faite pour la durée La mention manuscrite impose qu’elle figure mais l’article L.341-6 du Code de la consommation qui établit une obligation d’information dispose que si l’engagement est à durée indéterminé le créancier rappel la faculté de révocation à tout moment t les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée aussi la validité de ces cautionnements semble t’elle admise
Le non respect de ces prescriptions est sanctionné par la nullité du contrat. Là encore les juges n’auront aucun pouvoir d’appréciation. Ils ne pourront plus tenir compte de la qualité de la caution.
Depuis quelques années le cautionnement simple était quasiment tous les cautionnements étaient en voie de disparition et quasiment tous les cautionnements étaient devenus solidaires. Le législateur a voulu réagir contre cette pratique qui tient encore plus la caution Là encore le législateur s’est trompé : les textes mis en place visent seulement le bénéficie de discussion et non celui de division
Selon l’article L. 341-3 du Code de la consommation « lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire la Personne Physique qui se porte caution doit à peine de nullité de son engagement faire précéder son engagement de la mention manuscrite suivante : en renonçant au bénéfice de discussion de l’article 2221 du Code civil et en m’obligeant solidairement avec X je m’engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu’il poursuive préalablement X »


Pour les cautionnements les plus dangereux le législateur va exiger la rédaction par la caution de 2 mentions manuscrites mais là encore on retrouve des imperfections Le domaine d’application est le même que précédemment : créancier professionnel et caution personne physique mais surtout le législateur n’a pas fait de distinction entre le cautionnement donné par acte sous seing privé et celui donné par acte notarié pour lequel la mention ne s’impose pas vraiment compte tenu du devoir de conseil du notaire
L’autre critique tient à la sanction : on aurait pu penser que la sanction naturelle de l’omission de cette mention serait la nullité partielle Pourtant le législateur a prévu une sanction excessive : la nullité de l’intégralité du contrat de cautionnement


C) LE CAUTIONNEMENT, CONTRAT UNILATÉRAL

Il est en principe un contrat unilatéral en ce que seule la caution souscrit un engagement positif vis à vis du créancier qui se contente d’accepter l’engagement
La conséquence de ce caractère unilatéral tient à l’application de règles de preuve spécifiques : le cautionnement sera soumis à la mention manuscrite de l’ art 1326 du Code civil mais pas à celle du double de 1325
Malgré tout il existe une tendance législative consistant à mettre à la charge du créancier un certain nombre obligation Celles-ci ne disqualifient pas le cautionnement en contrat synallagmatique car il n’y a pas d’interdépendance entre les obligations.

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  1. Sûreté personnelle (cautionnement) et réelle (gage, hypothèque…)
  2. Le cautionnement
  3. Les caractéristiques du contrat de cautionnement
  4. Conditions du cautionnement (capacité, pouvoir, consentement)
  5. La preuve du cautionnement
  6. La mise en œuvre du cautionnement
  7. L’obligation d’information de la caution
  8. Les recours de la caution
  9. Les causes d’extinction du cautionnement
  10. La Garantie à première demande
  11. Les privilèges généraux (AGS, frais de justice…)
  12. Le droit de rétention
  13. Le gage sur meuble incorporel (créance, nantissement de parts sociales…)
  14. Le gage sur meuble corporel (argent, marchandise…)
  15. Le Gage : définition, constitution, extinction, effets
  16. Les différentes suretés réelles immobilières
  17. La publicité des sûretés immobilières
  18. Les effets des suretés réelles immobilières

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