La rupture fautive des pourparlers (intention de nuire, mauvaise foi…)

LES CAS DE RUPTURES FAUTIVES DES POURPARLERS

Pendant longtemps la rupture des négociations n’a donné lieu qu’à un faible contentieux car la liberté de ne pas contracter était considéré comme un principe absolu.

Et donc le fait de rompre les discussions ne pouvait donner lieu à sanction.

Principe : le fait de rompre les discussions n’est sanctionné qu’en cas de faute

Aujourd’hui la jurisprudence tend à réduire la portée de ce principe, en sanctionnant les manquements commis au cours de cette période.

Il faut concilier le principe de la liberté contractuelle (rompre les discussions) avec le souci légitime d’une certaine sécurité attendue par les partenaires à la discussion.

La victime d’une rupture des pourparlers est soumise au régime de la responsabilité : il doit justifier d’une faute, d’un préjudice, d’un lien de causalité.

Le principe est que la rupture n’est pas fautive : se sera donc a celui qui prétend au caractère fautif de la rupture dans rapporter la preuve.

L’appréciation de la faute dans la rupture : les cas dans lesquels la rupture peut être qualifiée de fautive

Pour déterminer une faute éventuelle, le juge se réfère en principe à une appréciation objective de la faute.

On analyse le comportement de l’auteur de la rupture avec le comportement qu’aurait eu un négociateur standard, normalement prudent, diligent et avisé: négociateur qui se serait comporté en bon père de famille.

Le juge doit tenir compte des circonstances spécifiques de l’espèce, les juges vont adapter leur analyse en fonction de différent critère comme la nature du contrat négocié, la qualité des partenaires, leur profession, leur expérience…

Les juges vont utiliser à la fois des éléments objectifs et subjectifs.

  1. a) conditions subjectives de la faute:

L’intention de nuire :

*le juge considèrera qu’il y a nécessairement intention de nuire lorsque la négociation a été entreprise ou poursuivit dans le but d’empêcher le partenaire de traiter avec un tiers.

*intention de nuire si la discussion a été engagée dans le but d’obtenir des informations confidentielles.

Ce critère n’est pas obligatoire.

La mauvaise foi :

La cour de cassation avait rendu des décisions dans lesquelles elle paraissait exiger la mauvaise foi pour retenir une faute dans la rupture.

La chambre commerciale de la cour de cassation dans un arrêt du 12 octobre 1993 a écarté cette approche en indiquant que les juges du fond pouvait, sans retenir la mauvaise foi ou l’intention de nuire, retenir une faute dans la rupture, faute basé uniquement que la légèreté avec laquelle l’auteur de la rupture a agit.

  1. b) conditions objectives de la faute

La faute dans le cadre de ces conditions va se déduire des circonstances dans lesquelles la rupture est intervenu :

  • *la durée des négociations
  • *la brutalité de la rupture
  • *la croyance légitime dans l’aboutissement des pourparlers

La durée des négociations:

Cette longueur des discussions est souvent retenue pour apprécier la faute commise par l’auteur de la rupture.

Plus les négociations auront durées, plus le juge estimera qu’elles étaient sérieuses.

Plus le temps passe plus les chances de conclure le contrat sont importantes, ce qui réduit les possibilités de rupture de la négociation.

Il faut rechercher si l’auteur de la rupture a laissé trainer inutilement les négociations, on regardera qu’elle était la durée normale de ces négociations au regard par exemple de la complexité du contrat.

Le juge sera plus exigent sur les motifs de la rupture si elle intervient après une longue période de discussion.

Même si la durée était brève, l’intensité des discussions peut permettre de caractériser le caractère fautif de la rupture.

La brutalité de la rupture:

On regarde la manière dont la rupture a été réalisée et on sanctionne celui qui agit de manière cavalière.

Par exemple rupture des discussions par un simple coup de téléphone après des négociations qui avaient durées deux ans.

Les modes de rupture ne doivent pas être déloyales, ni surprendre l’autre partie : il faut rompre avec délicatesse, douceur.

La croyance légitime de l’autre partie :

Plus le temps passe et plus l’autre partie croit à l’aboutissement des discussions et croyant à cet aboutissement elle peut anticiper la conclusion du contrat en effectuant des investissements, des démarches, pensant légitimement que le contrat sera effectivement conclu.

Cette croyance légitime peut être retenue pour apprécier le caractère fautif de la rupture: l’auteur laisse croire à son partenaire que la conclusion du contrat était certaine.