Quelles sont les compétences du Conseil Constitutionnel?

Les attributions du Conseil Constitutionnel

Comment dans l’ensemble des missions du Conseil Constitutionnel on peut situer sa mission spécifique de contrôle de la constitutionnalité des lois? Or, dans la Constitution de 1958 le contrôle de constitutionnalité des lois n’est pas au cœur des préoccupations des constituants. Le discours de DEBRE devant le Conseil d’Etat, 2 lignes sur le Conseil Constitutionnel, il l’évoque uniquement comme « instrument de rationalisation du régime parlementaire ». La protection des droits et libertés n’est jamais invoquée en 1958 comme prérogative, le conseil est là pour « supprimer ‘arbitraire parlementaire » c’est à dire empêcher le parlement d’empiéter sur le domaine du règlement. En 1958, le Conseil Constitutionnel est « le chien de garde de l’exécutif ». Tout est dans le discours de Bayeux 12 ans + tôt.

le Conseil Constitutionnel n’a pas du tout le même visage qu’aujourd’hui, il s’auto qualifie d’organe régulateur des pouvoirs publics, pour que le régime ne retombe pas des défauts de la IIIème et IVème république (parlementarisme absolu).

2 dates changent tout: décision 1971 où le Conseil Constitutionnel se dit le gardien des libertés publiques alors que rien dans la Constitution ne lui donne se titre. Révision constitutionnelle de 1974, permet à l’opposition parlementaire de saisir le Conseil Constitutionnel 60 députés OU 60 sénateurs peuvent saisir le conseil.

La dernière révolution: révision constitutionnelle de 2008, la QPC.

Ces missions de contrôle de la constitutionnalité sont attribuées par la Constitution, il y a un autre contentieux: le contentieux électoral (pas objet du cours). A partir de ces missions plusieurs questions vont se poser. La principale: l’interprétation du texte juridique, comment et qui doit interpréter? Comment interpréter les compétences du Conseil Constitutionnel? il y a deux réponses possibles, et le Conseil Constitutionnel navigue entre les 2 :

– interprétation limitative des compétences, c’est à dire il interprète a minima la Constitution, le Conseil Constitutionnel s’autolimite pour ne pas entrer en conflit avec les représentants du peuple.

– interprétation large de ses compétences, dès que le Conseil Constitutionnel va voir une violation de la Constitution il va la censurer. Dans ce cas, il va y avoir un danger de conflit entre le pouvoir politique et le gouvernement des juges.

Donc dans certains cas au grès des textes on va avoir une interprétation stricte ou large. on ne comprend pas quelle méthode d’interprétation le Conseil Constitutionnel retient, il interprète selon sa volonté, or, en droit on doit suivre une méthode d’interprétation.

I – Le rôle du Conseil Constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a deux attributions principales :

– il vérifie si les lois adoptées par le Parlement sont conformes aux dispositions de la Constitution : il s’agit du contrôle de constitutionnalité des lois ;

– il contrôle la régularité des élections présidentielle, parlementaires (législatives et sénatoriales) et des référendums. Il proclame les résultats de l’élection présidentielle et des référendums.
■ LE CONTRÔLE DE CONSTITUTIONNALITÉ

Le Conseil constitutionnel ne peut exercer son contrôle qu’à la condition d’être saisi.

  • Cette saisine est obligatoire pour : – les règlements des assemblées parlementaires (Sénat et Assemblée nationale) ; – les lois organiques (lois complétant la Constitution). • Cette saisine est facultative pour : – les lois ordinaires (ex : la loi relative aux OGM en 2008) ; –les engagements internationaux (ex: le Traité établissant une Constitution pour l’Europe en 2004).
  • Dans le cas du contrôle facultatif, le Conseil peut être saisi par une des autorités suivantes : – le président de la République ; – le Premier ministre ; – le président de l’Assemblée nationale ; – le président du Sénat ; – un groupe de 60 députés ; – un groupe de 60 sénateurs. Dans le cadre de ce contrôle de constitutionnalité, le simple citoyen ne peut donc jamais saisir directement le Conseil constitutionnel. • Le contrôle de constitutionnalité intervient après le vote de la loi mais avant la promulgation, c’est-à-dire la signature des textes par le président de la République. Le Conseil dispose d’un délai d’un mois (réduit à huit jours sur la demande du Gouvernement) pour juger de la conformité à la Constitution.
  • La réforme constitutionnelle de juillet 2008 permettra aussi à la demande de toute personne, dans le cadre d’un procès, la saisine du Conseil constitutionnel par le Conseil d’État ou la Cour de cassation, s’il est soutenu qu’une loi déjà en vigueur porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit. Cette nouvelle compétence du Conseil constitutionnel ne sera mise en place qu’après le vote d’une loi organique à venir.
    QUEL EST LE RÔLE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET QUI PEUT LE SAISIR ?
    ■ LE CONTRÔLE DES ÉLECTIONS NATIONALES ET DES RÉFÉRENDUMS
  • L’élection présidentielle Le Conseil constitutionnel contrôle toutes les opérations concernant l’élection du président de la République : – il établit la liste des candidats après avoir vérifié la validité des 500 signatures d’élus nécessaires pour se présenter à l’élection ; – il juge les réclamations ou les irrégularités qu’il peut constater lui-même ou par l’intermédiaire de ses délégués dans les bureaux de vote, ou encore s’il a été saisi par un électeur ou un candidat ; – il assure le décompte des voix et proclame les résultats ; – enfin, il juge les contestations des candidats sur le contrôle de leurs comptes de campagne.
  • Les référendums Comme pour l’élection présidentielle, le Conseil suit l’intégralité des opérations du référendum. Il veille à leur régularité et juge les réclamations. Enfin, il assure le décompte des voix et proclame les résultats.
  • Les élections parlementaires Le Conseil statue sur la régularité de l’élection des députés et des sénateurs s’il est saisi par un électeur ou un candidat concurrent. Il vérifie également le respect par les candidats des règles relatives au financement des campagnes électorales.
    ■ LES AUTRES ATTRIBUTIONS DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
  • Le Conseil s’assure, à la demande de l’assemblée concernée, du garde des Sceaux ou du parlementaire lui-même, qu’il n’y a pas d’incompatibilité entre le mandat de député ou de sénateur et les autres fonctions de cet élu.
  • Le Conseil constate, à la demande de l’assemblée concernée ou du garde des Sceaux, la déchéance d’un parlementaire devenu inéligible.
  • Le Conseil, saisi par le Gouvernement, constate l’empêchement du président de la République d’exercer ses fonctions.
  • À la demande du Premier ministre ou du président de l’assemblée concernée, le Conseil vérifie que le Parlement et le Gouvernement respectent leurs domaines de compétence.
  • En cas de circonstances exceptionnelles, le président de la République consulte le Conseil constitutionnel sur les mesures qu’il envisage de prendre. L’article 16 de la Constitution n’a été mis en œuvre qu’une fois lors des événements d’Algérie en avril 1961.

II – Les sources des compétences

Les missions du Conseil Constitutionnel sont a priori strictement déterminées par la Constitution, on trouve les compétences énumérées : article 7 (constater l’empêchement du président république), article 16 (pour intervenir lors de l’application des pleins pouvoirs), article 37 (procédure de délégalisation), article 41 (sur les irrecevabilité au moment de l’adoption de la loi), article 54 (contrôle par le Conseil Constitutionnel de la conformité à la Constitution des traités ou plutôt de la non contrariété du traité à la constitution), article 58 (il veille à la régularité de l’élection du président république), article 59 (sur la régularité de l’élection des députés et sénateurs), article 60 (contrôle de la régularité des opérations de référendum), article 61, 61-1, 62 et 63 (compétence strictes du Conseil Constitutionnel en matière de contrôle e la constitutionnalité de la loi).

La logique juridique interdit en principe à d’autres textes de restreindre ou élargir ces compétences. Le Conseil Constitutionnel est un pouvoir constitutionnelle au même titre que le parlement, le président république, il est institué par la Constitution dont les décisions ne peuvent pas faire l’objet d’un recours et s’imposent à tous. Si on donne en + au conseil des compétences non prévues dans a Constitution, cela revient à retirer ces compétences d’une autre institution.

En pratique, il y a un texte: ordonnance 7 novembre 1958 régit l’organisation du Conseil Constitutionnel. Cette ordo va restreindre les compétences du conseil qui lui sont données par la Constitution. En se basant sur cette ordo, le conseil s’est déclaré en 1962 incompétent pour les lois référendaires. La Constitution donne compétence au conseil pour vérifier de la constitutionnalité des lois, or, l’ordo 1958 dit que le conseil n’est compétent que pour les lois parlementaires. Donc l’ordo a priori restreint les compétences du Conseil Constitutionnel.

Dans d’autres cas, le conseil va aller au delà de l’ordo, il est compétent pour contrôler les règlements des 2 assemblées, or le conseil se déclare compétent pou contrôler le règlement du congrès (réunion des 2 chambres pour réviser la const), mais on ne trouve pas trace de cette compétence ni dans la Constitution ni dans l’ordo. L’ordo doit permettre d’interpréter la Constitution de 1958 , mais l’interprétation va varier en fonction des fluctuations politiques, l’interprétation n’est donc pas toujours la même, et + le temps s’écoule – l’intention des constituants apparait claire. Il va falloir se fier à la parole de l’interprète. Ex de la DDHC, comment interpréter aujourd’hui un texte de 1789.

Donc en interprétant, le Conseil Constitutionnel se dote d’un pouvoir constituant alors qu’il n’a pas le droit de créer du droit à valeur constitutionnelle, pose le problème de la place de cette juridiction.

Théorie de l’aiguilleur, selon WENDEL, le Conseil Constitutionnel est un chien de garde, il dit si la loi est contraire ou non à la Constitution, le Conseil Constitutionnel peut bloquer une loi, mais il ne peut pas l’arrêter, il aiguille le législateur. Sur la réforme Balladur 1993, la loi est contraire à la Constitution, le Conseil Constitutionnel la bloque, il indique qu’il faut réviser la Constitution.

III – L’interprétation des compétences

Cette interprétation est contradictoire, le Conseil Constitutionnel cherche tantôt à restreindre sa compétence, et dans certains cas il interprète de manière large ses compétences.

  • L’interprétation stricte

Le Conseil Constitutionnel n’a pas pour compétence générale de veiller au respect de la Constitution. Celui qui doit veiller au respect delà Constitution c’est le président république article 5 Constitution. Selon CAPITANT l’article 16 c’est ce qui a manqué a régime de Vichy et république de WEIMAR. Toute la controverse SCHMITT-KELSEN se retrouve dans la considère, pour SCHMITT le gardien de la Constitution c’est le chef d’état, pour KELSEN c’est le Conseil Constitutionnel.

Pendant toutes les 1ères années de la Vème république, le conseil est discret quand il est amené à contrôler des normes législatives. Il le fait très peu, mais souvent il le fait par le président du Sénat qui est un opposant de de Gaulle. Décision 1962 caractéristique de la timidité du Conseil Constitutionnel.

Exemples de cette autolimitation du Conseil Constitutionnel:

– décision 1er septembre 1961, requête curieuse du président AN qui demande au Conseil Constitutionnel si une motion de censure déposée pendant période d’application de l’article 16 serait recevable? article 16: pleins pouvoirs du chef de l’état. article 16 appliqué qu’une seule fois en France en 1961, pendant la guerre d’Algérie: il y a eut une tentative de coup d’état par les militaires, le push est maté en 3 jours. Il n’y a aucune dispositions sur la durée d’application de cet art, les pleins pouvoirs ont durés 8 mois. A donné lieu à un arrêt Canal. Le Conseil Constitutionnel se dit incompétent à cette demande car la Constitution ne donne pas pouvoir pour émettre un avis, » le Conseil Constitutionnel ne saurait être amené à statuer ou donner un avis que dans les cas, et suivant les modalités que la Constitution a fixée ».

– décision 6 novembre 1962, loi référendaire voulue par De Gaulle qui modifie de mode d’élection du président république. Cette loi est inconstitutionnelle, il faut réviser la Constitution, or pour réviser il faut passer par article 89, mais il ne peut pas réviser la Constitution par la voie du congrès. le président Sénat saisi le Conseil Constitutionnel pour lui demander de statuer sur la conformité de la loi référendaire. On ne peut pas réviser la Constitution par une loi référendaire. Or, le Conseil Constitutionnel est prisonnier il ne peut pas s’opposer à la loi de De Gaulle, donc le Conseil Constitutionnel se déclare incompétent car sa compétence est « strictement limitée par la Constitution et l’ordo » donc il ne peut pas se prononcer sur d’autres cas que ceux limitativement énumérés par les textes, les textes ne disent pas expressément que le Conseil Constitutionnel peut contoler les lois référendaires donc il est incompétent. Le Conseil Constitutionnel se limite pour éviter le conflit avec le pouvoir exécutif.

– Décision 15 janvier 1975, décision IVG. La loi Veille est votée à l’époque par qq députés UDR (alors que la majorité est à droite) et par l’opposition. C’est donc l’opposition qui permet l’adoption de la loi. La loi est transmise au Conseil Constitutionnel par la majorité parlementaire, pour contrôler la conformité de la loi à la CEDH, au motif que l’article 55: le traité a une valeur supérieure à la loi interne. Les parlementaires demandent à ce que l’IVG soit déclaré contraire à la CEDH. Problème juridique et moral. La solution juridique qui va prévaloir joue sur les mots, le Conseil Constitutionnel est compétent pour effecteur seulement un contrôle de constitutionnalité de la loi et non un contrôle de conventionalité de la loi: donc Conseil Constitutionnel incompétent. Dans ce cas, les juges ordinaires vont se saisir du contrôle de conformité de la loi à un traité, d’où la Jurisprudence Jacques-Vabre de la ccas. Il faut attendre Jurisprudence Nicolo du Conseil d’Etat pour s’aligner.

Dans cette décision le Conseil Constitutionnel dit que « l’art 61 ne confère pas au Conseil Constitutionnel un pouvoir général d’appréciation et de décision identique à celui du parlement ». c’est à dire que le Conseil Constitutionnel dit qu’il n’est pas une assemblée politique, il ne statut pas en opportunité, il n’a compétence que pour répondre à des questions de droit, il ne doit pas se substituer à la volonté du parlement. Ce considérant est toujours réaffirmé par le conseil.

  • L’interprétation large

Dès lors que le conseil est dans ses compétences, il les interprète largement.

La Constitution limite les compétences, mais le conseil va interpréter très largement chacune des compétences.

Exemples:

– il s’est reconnu compétent pour contrôler le règlement des assemblées et celui du congrès.

– il s’est reconnu compétent pour le contrôle de la conformité des lois à la Constitution et pour interpréter le terme de Constitution, pour le Conseil Constitutionnel la Constitution c’est le texte de 1958+le bloc. c’est à dire que le Conseil Constitutionnel interprète le terme de Constitution et il se fait constituant.

En 1971 le Conseil Constitutionnel se déclare gardien des libertés, or, la Constitution ne garantie aucune libertés, donc le conseil doit trouver ces libertés dans d’autres textes: préambule.

– le Conseil Constitutionnel considère qu’il peut contrôler la régularité d’une loi déjà promulguée mais qui n’avait pas été soumise à son examen. Décisions 1985 et 1999: quand une loi nouvelle arrive et modifie le domaine de la loi ancienne, le Conseil Constitutionnel pourra contrôler la loi ancienne. Cette Jurisprudence perd de son intérêt aujourd’hui avec la QPC.

Il est difficile de poser des règles absolues d’interprétation. On a une interprétation ni stricte ni large. c’est à dire que la plupart du temps le Conseil Constitutionnel va naviguer entre plusieurs objectifs. Ex de la décision IVG, il pouvait y avoir une multiplicité de solutions, mais on aurait pu estimer par exemple que le contrôle de conformité de la loi à un traité ne pose pas en lui même un problème de constitutionnalité. Mais on peut trouver une autre justification de l’incompétence, la solution d’incompétence va permettre aux autres juridictions d’écarter une loi contraire au Traité. Le Conseil Constitutionnel voit bien que cette décision d’incompétence est la meilleure pour les citoyens, car en donnant compétence aux juridictions c’est à dire que tout citoyen peut saisir un juge ordinaire pour écarter une loi contraire à un traité, alors que si le Conseil Constitutionnel s’était déclaré compétent le justiciable ne peut le saisir. Cette solution va donc peut être dans le sens de la protection des citoyens.

C’est une position souple, mais qui va plutôt vers un accroissement des compétences. Une des missions essentielles est celle du contrôle de constitutionnalité d’une loi, le conseil a une compétence très particulière et il va faire une interprétation très particulière.