Les conditions et le déroulement de la saisie-vente

La saisie-vente : conditions et procédures

La saisie-vente, ancienne saisie exécution, constitue la procédure de droit commun applicable à la saisie des meubles corporels, toutefois, il existe à côté des procédures spécifiques pour certains meubles corporels ou incorporels que nous étudierons dans un autre cours.

Définition de la saisie-vente : La saisie-vente est la procédure qui permet au créancier de faire vendre un ou plusieurs biens meubles corporels appartenant à son débiteur, et de récupérer sur le produit de la vente la somme qui lui est due.

Sources de la saisie-vente : Loi de 91 Article 50 à 55, Décret de 92 Article 81 à 138 : la saisie-vente est une saisie qui permet à tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible de faire procéder, après un commandement, à la saisie et à la vente des meubles corporels de son débiteur, dans ce cas, le créancier est payé sur le prix de vente des biens.

Section 1 : Les conditions de la saisie-vente

Si la saisie-vente vaut pour tous les meubles corporels (1), toutes les créances ne permettent pas d’y recourir car a un caractère subsidiaire (2).

1) Les conditions relatives au bien saisi

La saisie-vente vaut pour tous les meubles corporels appartenant au débiteur, qu’il soit en sa possession ou en celle d’un tiers. En sont exclus, les biens meubles incorporels et les immeubles i.e. les immeubles par nature ainsi que les immeubles par destination. Toutefois, il existe 2 exceptions :

  • – L91 Article 14-5 in fine : les immeubles par destination peuvent être saisis indépendamment du fonds lorsque la saisie est poursuivie pour le paiement du prix de ces immeubles. Cette exception se justifie au regard du privilège du vendeur.
  • – L91 Article 50 al.1 in fine en prévoyant saisi d’un bien chez un tiers permet la saisie-vente de biens à livrer

Tous les biens meubles corporels peuvent faire l’objet d’une saisie-vente dès qu’ils appartiennent au débiteur selon droit des biens, régime matrimonial, indivision. Même si le bien meuble corporel appartient au débiteur, le bien fondé de la saisie-vente dépend directement de la créance cause de la saisie.

2) Les conditions relatives à la créance cause de la saisie

En principe Article 50 L91, tout créancier peut procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur pour obtenir le recouvrement de sa créance.

Mais Article 51 L91 soumet la saisie-vente du mobilier se situant dans le local d’habitation du débiteur à certains conditions : en effet, le créancier ne peut pas pratiquer une saisie-vente pour recouvrer une créance non alimentaire inférieur ou égale à 535 euros dès lors que le recouvrement peut être obtenu par la saisie d’un compte de dépôt ou par la saisie des rémunérations du travail. C’est pourquoi la saisie-vente est en principe subsidiaire pour les petites créances. Si le créancier souhaite mettre en œuvre une saisie-vente pour une créance inférieure à 535 euros, il doit obtenir au préalable une autorisation du JEX (donnée si les autres saisies sont impossibles).

Section 2 : Les opérations de saisie

1) Le déroulement des opérations de saisie

Les opérations de saisie débutent par un commandement de payer (A), l’huissier pourra alors dresser un acte de saisie (B).

  1. A) Le commandement de payer

Le commandement de payer comprend des mentions obligatoires (1) et ses effets conditionnent le déroulement ultérieur de la procédure de saisie (2).

1) Le contenu du commandement de payer

Le commandement de payer est un exploit d’huissier signifié en tout lieu où le débiteur se trouve. Cette signification ne peut avoir lieu à domicile élu. De plus, dans un souci d’efficacité et de rapidité, le commandement de payer peut être délivré en même temps que la signification du jugement lorsque le titre exécutoire est une décision de justice.

Le commandement de payer comprend à peine de nullité mention D92 Article 81 :

  • – mention du titre exécutoire en vertu duquel la mesure est poursuivie
  • – décompte des sommes réclamées en principal, frais et accessoires avec taux d’intérêt
  • – un commandement fait au débiteur d’avoir à payer la dette dans un délai de 8 jours en informant le débiteur qu’à défaut, il peut être contraint au paiement par la vente forcée de ses biens mobiliers.

Pour les créances non alimentaires d’un montant inférieur à 535 euros, le commandement de payer contient injonction ?? de communiquer dans les 8 jours à l’huissier l’adresse de son ou ses employeurs ou désignation de son ou ses comptes bancaires. Le débiteur a le choix de la mesure d’exécution : employeur ou banque. Si dans le délai de 8 jours, il n’a pas fourni ces renseignements, l’huissier pourra procéder à la saisie-vente dans les conditions de droit commun.

2) Les effets du commandement de payer

Le commandement de payer est valable pour une durée de 2 ans (il peut être invoqué pendant 2 ans), il a 3 effets principaux :

  • – il vaut mise en demeure de payer et fait donc courir les intérêts moratoires (par opposition aux intérêts compensatoires)
  • – il interrompt la prescription
  • – il faut courir un délai de 8 jours au terme duquel les biens du débiteur pourront être saisis s’il ne s’exécute pas volontairement : le délai lui permet de faire un paiement total ou partiel.

A l’expiration du délai de 8 jours, si le débiteur s’exécute intégralement, la procédure s’arrête. A défaut, l’huissier se déplace chez le débiteur pour procéder à la saisie en dressant un acte de saisie. Il ne peut agir avant l’expiration du délai de 8 jours mais doit agir dans les 2 ans sinon un nouveau commandement de payer est nécessaire avant de dresser l’acte de saisie.

  1. B) L’acte de saisie

2 cas de figure lorsque l’huissier se présente pour dresser l’acte de saisie: les biens se trouvent dans les mains du débiteur (1) ou d’un tiers (2).

1) L’acte de saisie des biens entre les mains du débiteur

En cas de besoin, l’huissier peut obtenir au préalable une autorisation de pénétrer dans les lieux et peut, le cas échéant, se faire assister si le débiteur est absent ou lui refuse l’entrée dans les lieux pour l’inventaire. Lorsque l’huissier se présent chez le débiteur 3 cas de figure :

  • – les locaux sont vides : l’huissier peut requérir des informations nécessaires pour retrouver le débiteur et pour poursuivre la procédure de saisie-vente.
  • – les biens garnissant les lieux n’ont aucun valeur marchande ou il s’agit uniquement biens insaisissables : l’huissier dresse un procès verbal de carence.
  • – des biens sont saisissables et ont une valeur marchande : il dresse l’acte de saisie. L’acte de saisie comprend mentions de D92 Article 94
    • — mention du titre exécutoire en vertu duquel
    • — désignation détaillée et précise des biens (pour éviter que le débiteur ne puisse y substituer des biens d’une valeur inférieure), photos peuvent être annexée
    • — si le débiteur est présent : déclarations éventuelles du débiteur au sujet d’une saisie antérieure des mêmes biens
    • — mentions en caractères très apparents que biens indisponibles, placés sous garde du débiteur … doit faire connaître saisie
    • — indication que le débiteur a délai d’1 mois pour procéder vente amiable
    • — personnes le cas échéant, doivent signer sinon huissier constate absence signature
    • — reproduction dispositions Article 314-6 CP, détournement d’objet saisi, D92 Article 107 à 109 dispositions sur vente amiable

Si l’huissier trouve des sommes en espèce, il doit respecter une procédure particulière. Elles peuvent être saisies dans la limite de la créance du créancier, elles sont consignées dans les mains de l’huissier qui en fait mention dans l’acte. L’huissier précise au débiteur qu’il a un délai d’1 mois à compter de la signification de l’acte pour former une éventuelle contestation devant le JEX.

Si le débiteur est présent, l’huissier lui remet une copie de l’acte de saisie qui vaut signification à personne.

Si le débiteur est absent, l’huissier signifie au débiteur l’acte de saisie à personne ou à domicile. Dans ce dernier cas, le débiteur a un délai de 8 jours pour informer l’huissier des éventuelles saisies antérieures su les biens et de lui en communiquer l’acte de saisie (PV de saisie).

Si l’on craint que le débiteur ne soit pas suffisamment vigilant pour la conservation des biens saisis, le JEX sur requête peut ordonner la remise des biens à un séquestre.

2) L’acte de saisie des biens entre les mains d’un tiers détenteur

Dans ce cas, sur présentation du commandement de payé signifié au débiteur et à l’expiration du délai de 8 jours laissé pour qu’il s’exécute volontaire, l’huissier peut saisir dans les biens d’un tiers les biens que celui-ci détient pour le compte du débiteur. L’huissier commence à inviter le tiers à déclarer les biens qu’il détient pour le compte du débiteur et parmi ceux-ci, ceux qui, éventuellement ont fait l’objet d’une saisie antérieure. Si le tiers est absent lorsque l’huissier se présente, l’huissier lui adresse une sommation d’avoir à déclarer dans un délai de 8 jours s’il est détenteur de biens pour le compte du débiteur et s’ils ont fait l’objet d’une saisie antérieure.

Le tiers a 3 possibilités:

  • – il refuse de répondre et/ou fait une déclaration inexacte ou mensongère: il peut être condamné au paiement des causes de la saisie.
  • – il déclare ne détenir aucun bien pour le compte du débiteur: l’huissier dresse un acte qui est remis ou signifié au tiers, avec l’indication en caractères très apparents des sanctions encourues en cas de déclaration mensongère. La procédure s’arrête si la déclaration est exacte.
  • – le tiers confirme la détention des biens: l’acte de saisie peut être dressé

mentions Article 101 du décret de 92:

  • – mentions du titre exécutoire
  • – mentions du nom et domicile du tiers
  • – déclaration du tiers et mention caractères très apparents des sanctions
  • – désignation des biens saisis
  • – mention en caractère très apparent que les biens sont indisponibles, qu’ils sont placés sous la garde du tiers, qu’ils ne peuvent être ni aliénés ni déplacés sauf cause légitime sous peine de sanction pénale et que le tiers est tenu de faire connaître à tout créancier l’existence de la procédure en cours.
  • – mention que le tiers peut refuser la garde des biens saisis
  • – mention que le tiers peut faire valoir…
  • – désignation de la juridiction compétente
  • – nom des personnes présentes, signature ou mention de refus
  • – reproduction des dispositions du CP

Si le tiers est présent, l’huissier lui remet l’acte, sinon, il lui signifie l’acte en lui laissant un délai de 8 jours pour préciser si les biens ont fait l’objet d’une précédente saisie. A l’issue de ce délai l’huissier informe le débiteur des opérations de saisie réalisées en lui signifiant la saisie réalisée entre les mains du tiers. L’huissier informe le débiteur qu’il dispose d’un délai d’1 mois pour procéder à la vente du ou des biens saisis.

2) Les effets des opérations de saisie

L’acte de saisie rend les biens indisponibles en attendant l’issue de la procédure. Les biens sont ainsi placés sous la garde du débiteur ou du tiers. Toutefois, le tiers peut refuser d’assumer cette garde et dans ce cas, l’huissier procède à la désignation d’un gardien et procède à l’enlèvement des biens. Les biens étant simplement indisponibles, le débiteur ou le tiers conserve l’usage des biens mais ils ne peuvent en aucun cas être aliénés ou déplacés sous peine de sanctions pénales pour détournement d’objets saisis. L’acte de saisie gèle la situation pendant un délai d’attente d’1 mois. Ce délai permet au débiteur de former une éventuelle contestation devant le JEX mais aussi de rechercher le cas échéant un acquéreur amiable pour ses biens car la vente amiable est une des issues de la saisie-vente.