Le droit de rétention
Ce droit peut être définit comme le droit de retenir une chose dans l’attente du paiement de sa créance.
Jusqu’en 2006, il n’existait que des droits spéciaux de rétention propres à telle ou telle institution. Ainsi, on reconnaissait au créancier gagiste, un droit de rétention. Il y avait un droit de rétention général.
Ce droit de rétention est rentré dans le code civil lors de la réforme du droit des suretés à travers l’article 2286 qui lui est consacré. Mais le code civil n’a pas tranché sur la nature de cette institution.
Certes ce droit est rangé parmi les sûretés, mais le législateur a pris soin de ne le ranger ni avec les suretés personnelles ni avec les suretés réelles. Il s’agirait d’une troisième catégorie innommée. De ce fait, n’est pas tranché la nature de ce droit :
Pour la jurisprudence, il s’agit d’un droit réel et en tant que tel il est opposable à tous. Ce droit ne porte pas sur la valeur de la chose mais sur la chose elle-même. Au final on peut s’accorder pour dire que le droit de rétention est d’abord une situation de fait d’où découle une situation juridique favorable au rétenteur.
Le droit de rétention a des problèmes de frontière avec d’autres institutions :
→ Avec la compensation, article 1289 et suivant, qui permet à un créancier d’obtenir satisfaction en se payant sur ce qu’il doit lui-même à son débiteur. Dans le droit de rétention, le créancier va utiliser sa propre obligation de resituer le bien qu’il refuse d’exécuter jusqu’à ce qu’il soit payé.
Malgré cette proximité, il existe des différences :
La compensation suppose des dettes fongibles, mais dans le droit de rétention le créancier est tenu d’une obligation de restitution.
L’autre différence est que la compensation est un paiement raccourcit, puisqu’elle a pour effet d’entrainer l’extinction des créances à concurrence de la plus faible. Le droit de rétention ne vise qu’à inciter le débiteur à payé, il s’agit d’une pression qui amènera peut être le débiteur à satisfaire son créancier.
→ Il est plus difficile de distinguer ce droit avec l’exception d’inexécution :
La difficulté dans les deux cas est qu’une partie refuse d’exécuter son obligation. L’exception d’inexécution suppose des obligations réciproques procédant d’un même rapport de droit. Il faut donc un rapport synallagmatique. Le domaine du droit de rétention n’est pas limité au rapport synallagmatique. Le domaine du droit de rétention est ainsi plus large que celui de l’exception d’inexécution. Lorsque la rétention est fondée sur une connexité juridique, celles-ci se regroupent.
L’article 2286 du code civil dispose « peut se prévaloir d’un droit de rétention sur la chose : celui à qui la chose a été remise jusqu’au paiement de sa créance, celui dont la créance impayée résulte du contrat qui l’oblige à la livrer, celui dont la créance impayée est née à l’occasion de la détention de la chose, celui qui bénéficie d’un gage sans dépossession ».
En exceptant le dernier cas, il apparait que pour qu’il y ait rétention, il faut qu’il y ait une détention. Mais il faut aussi être créancier et qu’il existe un lien entre la détention et la créance.
Le droit de rétention permet de faire pression sur le débiteur en le privant d’une chose. Fort logiquement, pour pouvoir retenir il faut d’abord détenir. Le de droit de rétention et la conséquence de la détention. Celle-ci doit présenter certaines caractéristiques :
→ Il faut être un détenteur et non un possesseur : Le rétenteur sait qu’il est tenu de restituer la chose et c’est en pleine connaissance de cause qu’il refuse de la restituer. Le possesseur, au contraire, prétend être titulaire d’un droit réel sur la chose et en invoquant ce droit réel, il refuse de restituer.
→ Le détenteur doit détenir pour son propre compte : Cela signifie qu’il dispose d’un pouvoir indépendant sur la chose et de ce fait, ceux qui détiennent une chose en vue d’un rapport de subordination ne peuvent pas être détenteur. Le préposé n’est pas détenteur en nom propre. Il ne faut pas confondre cette hypothèque avec la possibilité de détenir par l’intermédiaire d’un tiers qui est autorisé : l’entiercement. Ainsi, le préposé va détenir pour le compte de son commettant.
→ La détention doit exempte de vices : Violence, Fautes…
La détention suppose une détention réelle, mais la jurisprudence puis le législateur ont consacré la possibilité d’une détention fictive. Le législateur a généralisé la solution à tous les gages en dépossession par la loi du 4 Aout 2008, qui a jouté un alinéa 4 à l’article 2286. Ainsi, tout créancier gagiste sans dépossession est détenteur fictif.
En tout état, la détention doit avoir un objet (bien meuble ou immeuble), tout bien étant susceptible d’être retenu. Mais il y a des exceptions qui trouvent leur fondement dans l’ordre public, et la personne humain. Ainsi, il a été refusé à dentiste la rétention sur la prothèse, ou la rétention d’une pompe funèbre sur un cadavre.
Peut-on retenir un bien immatériel ? Rien n’interdit d’envisager un tel droit si ce dernier est bien entendu comme le pouvoir d’empêcher quelqu’un de bénéficier d’une utilité relative à un bien. Le législateur consacre un droit de rétention sur une chose incorporelle: créancier gagiste sur compte d’instrument financier : pouvoir de blocage.
Ce droit est aussi pour les biens dits « mixtes » : en matière de propriété littéraire et artistique, le droit de rétention est permis mais sur le seul support de l’œuvre.
Le droit de rétention vise à inciter un débiteur à payer. Cela suppose que le rétenteur soit créancier. Cette créance doit présenter certains caractères :
→ Elle doit être certaine en son principe : cela emporte que le garagiste se voit refuser le droit de rétention s’il a effectué sur le véhicule de son client sans que ce dernier n’ait donné son accord sur le prix.
→ Elle doit être exigible
→ Elle doit être liquide : cela ne signifie pas qu’il faille que le montant soit connu quand le créancier invoque son droit. L’essentiel est qu’en cas de contentieux le juge puisse en fixer le montant.
La rétention est un acte de justice privée, mais la justice privée n’a en principe pas de place. Cependant on l’admet dès lors que cet acte est légitime. Cette légitimité en matière de rétention va résulter du lien entre la créance et la détention. Ce lien permet de refuser de restituer un bien. L’article 2286 envisage trois sortes de connexités :
1) La connexité juridique
Article 2286 al 2, ce texte permet au créancier d’exercer un droit de rétention sur la chose lorsque la créance impayée résulte du contrat qui l’oblige à la payer.
Celle-ci ne concernerait donc que les cas où la créance garantie et l’obligation de livrer la chose résulte du même contrat. La jurisprudence avait admit l’existence d’un lien de connexité dans tous les rapports synallagmatique. La Cour de Cassation précise qu’il y a connexité juridique entre la créance et la détention de la chose, lorsque tous deux sont nées à l’occasion d’un même contrat ou d’un même quasi contrat.
La jurisprudence va jusqu’à affirmer que le droit de rétention peut être exercé dans le cadre des restitutions réciproques consécutives à l’anéantissement rétroactif d’un contrat.
2) La connexité matérielle
Article 2286 al 3 : « le droit de rétention peut être exercé lorsque la créance impayée est née au moment de la détention de la chose ». C’est le cas lorsque la créance du détenteur est née pour la conservation ou l’amélioration de la chose. La chose doit répondre des dettes qu’elle engendre.
Ces deux types de connexité ne sont pas exclusive l’une de l’autre, il peut y avoir les deux : c’est le cas du garagiste qui répare un véhicule.
3) La connexité conventionnelle
Elle a été fortement débattue jusqu’en 2006, on se demandait si les parties pouvaient attribuer à l’une d’elles un droit de rétention sur un bien déterminé remis à cette fin, en dehors des hypothèses légales et en l’absence de connexité juridique ou matérielle. On y a recours lorsque la chose n’a pas de valeur marchande ou ne peut relever du commerce juridique. C’est le cas pour des documents administratifs par exemple.
Elle présente aussi un intérêt lorsque les parties ne veulent pas conférer au créancier les prérogatives attribuées au créancier gagiste. La jurisprudence avait admis cette hypothèse et le législateur l’a consacrée en 2006 dans l’article 2286 alinéa 1.
Cette sûreté procure à son titulaire un moyen de pression visant à obtenir le paiement de la créance. L’effet majeur du droit de rétention c’est sa large opposabilité.
Ils peuvent se résumer à deux propositions « le droit de rétention permet au rétenteur de refuser de restituer » « mais il ne permet pas d’obtenir le paiement direct de la créance ». La rétention confère une légitimité au refus de restituer au propriétaire mais aussi aux autres créanciers du débiteur. Enfin, à noter que le droit de rétention est comme toute sureté indivisible. Tant qu’il n’a pas obtenu la totalité du paiement le rétenteur peut retenir.
Le droit de rétention ne confère pas de droit sur la valeur de la chose retenue ; il ne peut pas se payer directement sur la chose et fort évidemment même s’il est un droit réel le rétenteur n’a pas le droit de préférence ni de droit de suite. Enfin le rétenteur ne dispose pas des droits du créancier gagiste ; il ne peut pas demander l’attribution du bien.
Mais le rétenteur retient une chose il doit veiller à sa conservation mais ne peut pas jouir de la chose de telle sorte qu’il ne puisse recueillir les fruits du bien.
Ce qui est remarquable avec le droit de rétention c’est que le rétenteur peut se prévaloir de son droit à l’égard de tous. Aucune publicité n’est organisée et c’est la seule apparence de la rétention qui fonde le droit de retenir.
A cela une limite a été posée par l’ordonnance du 23 mars 2006 ; dans le cas d’une mise en gage sans dépossession préalable. On a vu que le gage peut être rendu opposable aux tiers aujourd’hui soit par la dépossession soit par le biais d’une publicité sur un registre spécial. Du fait de cette double possibilité un même bien peut faire l’objet d’un gage sans dépossession et d’un gage avec dépossession. L’article 2340 du Code Civil indique que le droit de préférence du créancier gagiste antérieur est opposable au créancier gagiste postérieur lorsqu’il est régulièrement publié nonobstant le droit de rétention e ce dernier. Dans cette hypothèse le rétenteur gagiste ne peut se prévaloir de son droit à l’égard du créancier gagiste antérieur sans dépossession.
Or de cette hypothèse il y a une efficacité maximale ; dans l’hypothèse de la procédure collective, le rétenteur peut opposer son droit aux autres créanciers de la procédure et cela lui permet de primer les autres créanciers dans le paiement puisqu’il ne libérera pas le bien tant qu’il ne sera pas payé.
Que se passe-t-il lorsqu’il y a droit de rétention fictif et droit de rétention réel ? La jurisprudence paraît faire prévaloir le rétenteur réel ; la justification est relativement simple car l’un a le bien entre les mains et l’autre n’a rien. Il faut prendre en compte la réalité ; la mainmise réelle sur le bien doit prévaloir.
Le droit de rétention est également opposable au propriétaire de la chose ; cela signifie qu’un tiers peut acquérir une chose retenue ; l’acquéreur du bien ainsi retenu va l’acquéreur avec cette situation. Il peut arriver aussi que le rétenteur détienne un bien dont le propriétaire n’est pas son débiteur (hypothèse du cas pratique de la voiture) et même ce propriétaire n’a jamais acquis ce bien avec une rétention. Cette hypothèse là se paraît envisageable que si le droit de rétention est fondé sur une connexité matérielle.
III) L’extinction du droit de rétention
L’article 2286 du Code Civil entrevoit une seule cause de disparition du droit de rétention soit le dessaisissement volontaire du créancier.
Suppose que la créance cause de la rétention disparaisse : article 1234. S’il n’y a plus de créance justifiant la rétention le refus de restitution n’est plus légitime et par conséquent celui qui refuse de restituer engagera au mieux sa responsabilité.
L’explication est simple ; par définition le droit de rétention suppose la dépossession du débiteur et la détention corrélative du créancier soit directement soit par l’intermédiaire d’un tiers : entiercement. La dépossession du rétenteur emporte perte du droit de rétention : Entendons la dépossession volontaire du bien à savoir lorsqu’il remet le bien au propriétaire, en cas de saisie sur soi même par le créancier ou enfin en cas de saisie sur le débiteur.
→ Le droit de rétention confère à son titulaire un droit à savoir le droit de retenir la chose et non pas un privilège sur la valeur du bien.
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