Les corporations

Le travail organisé, les corporations.

Le terme de corporation, qui apparaît en français au xviesiècle, désigne une association d’artisans ou de marchands spécialisés qui s’unissent pour réglementer leur profession et défendre leurs intérêts.

Travail encadré, hiérarchie, autorité, … il s’agit d’un groupe clair.

Paragraphe 1 : Les origines des corporations.

Au XIème, XIIème siècle, c’est le renouveau des villes.
Dans certaines villes et, en particulier dans l’Est de la France, les corporations forment des collèges électoraux qui désignent les magistrats qui dirigent la ville.
Les villes sont dirigées par les mêmes familles économiques.
Les puristes ont voulu faire un classement des corporations.

Les catégories de corporation :

Ce sont des catégories générales.
Il n’y a pas d’organisation uniforme, il y a des variantes.
Dans cette organisation des métiers, on observe 2 catégories :

A) Les métiers jurés ou les jurandes (définition universalis).

Les métiers jurés qu’on appelle confréries, guildes, ou bannières, sont caractérisés par leur autonomie d’organisation.
Ces métiers se sont auto-organisés.
Pour accéder aux métiers, il faut être agrée par tous les autres membres de la jurande.
Lorsque l’on est accepté, il faut prêter serment.
Le serment est la cohésion institutionnelle, mais aussi la cohésion morale.
Ces métiers jurés, aujourd’hui, on les retrouvera dans l’ordre des médecins, l’ordre des avocats, …
Sous l’Ancien Régime, les avocats font partie d’une conjuration et les médecins ont une déontologie.

B) Les métiers réglés.

« Réglés », cela signifie qu’ils sont organisés et contrôlés par l’autorité publique.
Ici, L’autorité publique impose des statuts.
Dans ces métiers, l’accès est en général obligatoire.
Ici, il n’y a pas d’autonomie.
Il y a une tutelle de l’autorité publique.
Ces métiers réglés n’ont pas la personnalité juridique.
Ce ne sont pas des Personnes Morales
Ils sont représentés par les villes.
Dans le sud de la France, l’identité municipale est très forte ( donc pas de Personne Morale).

C) Les métiers libres.

Lorsqu’il n’y a pas de conditions d’entrée et pas d’organisation, le métier est dit « libre ».
Il existe également des métiers réglés qui ont aussi des serments, ce sont des métiers mixtes.
La classification de ces métiers peut donc être remise en cause.
Les métiers jurés sont sous le contrôle politique de l’intendant.
A côté de ces catégories classiques (jurés, réglés et libres) que fait la monarchie dans cette réglementation des corporations ?
La monarchie est favorable aux corporations.
Elle favorise l’organisation des métiers puisque ceci permet de contrôler les métiers et ce, toujours sous la tutelle de l’Etat.
Louis XIV avec Collbert a ainsi voulu généraliser les corporations.
Or, dans les villes, les différents métiers n’ont pas voulu et la monarchie n’a pas pu généraliser le modèle des corporations.
Il y a plein de métiers qui ne sont pas organisés.
Ce sont, en général, les « petits boulots ».
A côté de ces petits métiers que l’on va réglementer avec la police, il faut aussi évoquer les enclaves urbaines.
Celles-ci avaient un statut particulier et bénéficiaient d’un droit particulier
A Paris, le quartier Saint-Antoine était une enclave qui échappait aux corporations et aux taxes municipales.
Dans ces enclaves, les artisans s’installaient.
Aujourd’hui, on pourrait parler de « zones franches ».
A Saint-Antoine, il y avait plus de 900 menuisiers, plus de 1000 cordonniers, des fabricants de bas,…
A côté de ces zones franches, il faut également évoquer le commerce forain qui est libre.
Les forains vont de ville en ville vendre leurs marchandises.
Il y avait également des métiers mobiles comme les transporteurs.
Il y avait aussi les métiers privilégiés.
Les fournisseurs du roi ont le privilège d’échapper aux corporations, mais pour cela ils doivent payer le privilège.
Le roi accorde également des privilèges à des inventeurs.
Les manufactures qui ont des privilèges donnés par l’Etat échappent également aux corporations .
Ces privilèges sont donnés par le roi dans le but de développer un secteur économique.
Il y a les mines, les manufactures de porcelaine,…
On peut citer également les compagnies de commerce coloniales.
A la fin de l’Ancien Régime, les distinctions juridiques s’estompent.

Paragraphe 2 : Organisation et compétences des corporations.

Comment marche une corporation ?

Chaque corporation dispose d’un statut.
Le statut a pu être crée à l’origine par les artisans et les commerçants et il a par la suite été homologué par les juges royaux pour être reconnu.
Dans ces statuts, on trouve de tout.
On peut trouver des règles disciplinaires.
Dans ces corporations, on y voit plusieurs phénomènes:
– La direction.
– Les privilèges.
– Le contrôle des métiers.

1) La direction et la nomination des maîtres.

Tous les adhérents participent et votent.
On va qualifier cela de système démocratique.
Les corporations se sont hiérarchisées de manière très stricte et ces transformations ont assuré la domination des maîtres.
Il y a les maîtres, les compagnons et les apprentis.
Cette hiérarchie s’est figée et au XVIIème siècle, les apprentis et les compagnons ne votent plus pour élire les dirigeants.
Dans la corporation, il y a l’assemblée générale et le bureau.
Au début, l’assemblée générale réunissait tout le monde.
L’assemblée générale a pour fonction d’élire les dirigeants, de notifier les statuts, …
Au XVIIème siècle et au XVIIIème siècle, l’assemblée générale devient l’assemblée générale des maîtres.
Elle devient par la suite une réunion annuelle où tous les maîtres se retrouvent souvent et où cela se finit par un banquet.
Au XVIIIème siècle, toutes ces décisions doivent être approuvées, soit par le pouvoir politique, soit par la ville, soit par le roi ou leurs représentants.
La fonction de l’assemblée générale est de désigner les dirigeants, c’est-à-dire le bureau de la conjuration.
Les personnes élues sont des jurés, des prud’hommes, des syndics, des gardes, des maîtres-gardes, le numéraire suivant la religion,…
Souvent, ils sont élus pour un an.
Le renouvellement se fait en principe, par 1/3 (une partie tous les ans).
Les familles principales ont phagocyté les corporations.
Ceci renforce le caractère corporatiste (fermé) de la corporation.
Souvent, ceux qui dirigent la ville (Les conseillers municipaux) sont les mêmes personnes qui dirigent les corporations.
On contrôle les brevets, les marques, les marchandises.
La finance et la discipline sont gérées de façon courante.
Il y a un arbitrage dans les corporations.
« On lave son linge sale en famille ».
Le registre est contrôlé par l’autorité publique.

2) Les privilèges des corporations.

Les corporations ont un rôle d’intérêt général.
Elles exercent des missions de service public.
C’est pour cela que le roi leur donne des privilèges.
Il y a une tutelle de plus en plus serrée de la part de la monarchie sur les villes et les corporations.
Puisque le roi leur accorde des privilèges, la corporation a aussi le privilège d’être la représentante officielle de la profession auprès de l’administration et du roi.
Lorsque le roi veut négocier avec les différentes branches de métier, les corporations ont le monopole.
Le roi doit négocier avec les corporations.
Le roi confie aux corporations des missions de services publics.
A Paris, les corporations ont le monopole la police de la navigation.
Elles touchent les taxes et les amendes.
C’est une sorte de délégation de service public.
Le roi a très peu de fonctionnaires, il préfère déléguer.
Les épiciers de Paris sont la police des poids et mesures.
Ils vérifient les étalons : C’est l’étalonnage.
Dans les métiers dangereux, les corporations participent à des missions d’ordre public.
Ce sont, par exemple, les bijouteries, les orfèvres, ils sont obligés de tenir un registre des clients.
Et ce pour éviter le recel.
Dans d’autres domaines, il y a le registre hôtelier, le registre des voyageurs, …
On va par exemple, confier à la corporation des maçons la mission de service public d’alignement des rues.
A la corporation des libraires, on va déléguer la censure.
Le roi peut aussi demander aux corporations le service militaire (1 ou 2 soldats à fournir par corporation).
Le roi peut demander aux corporations des contributions volontaires (Exemple : faire des dons).
Les corporations participent à la levée des impôts.
Pour exercer leurs missions de service public, on leur donne des privilèges.
Bien entendu, il y a toujours une tutelle du pouvoir royal.

3) Le rôle de la corporation : le contrôle du métier.

Le contrôle du métier reste une mission de droit public.
Sa mission d’intérêt général est de contrôler le métier.
Produire des produits de bonne qualité, c’est une mission d’intérêt général.
La philosophie de l’Ancien Régime est marquée par la conception chrétienne du travail.
On travaille pour le bien commun, pour le bien de tous.
On interdit la grève parce que cela empêche par exemple le client d’utiliser le service public.
Les corporations exercent un monopole.
Et la contrepartie du monopole, c’est l’interdiction de faire grève.
On va donner des prérogatives.
La 1ère prérogative, c’est celle qui sert à la qualité du produit.
La marque, la « trademark », c’est la garantie de qualité.
A Besançon, la corporation des cuirs contrôle les importations.
Les marques et poinçons sont des choses publiques qui appartiennent à la puissance publique.
Le monopole, c’est une garantie de la qualité.
Le contrôle de la qualité est effectif.
Les jurés ont un droit de visite.
Ils inspectent les ateliers de production.
Le droit de visite va jusqu’au droit de perquisition au domicile de l’artisan.
Les jurés ont le pouvoir de saisir les biens, prononcer des amendes.
Les chambellans sont les travailleurs au noir.
Tous les conflits sont arbitrés par le bureau et à défaut, par la juridiction de police de droit commun.
Les contrôles se font également sur les marchés.
Ceci permet de contrôler les forains.
Pour mieux organiser les contrôles, on crée des Halles.
On s’occupe également des matières premières.
A chaque opération, il y a des taxes.
On répartit la pénurie en contrôlant l’approvisionnement des matières premières.
Dans les corporations, on embauche les jeunes diplômés.
Le nombre d’employé est limité.
Souvent, le nombre d’ouvriers ou d’employés est contingenté.
Pour chercher du travail, on s’inscrit sur le registre des recherches d’emplois de la corporation.
Le bureau de la corporation est un organe disciplinaire.
Tout ceci se fait au nom de la qualité.