Les décisions du juge constitutionnel et leur autorité

LES DÉCISIONS DU JUGE CONSTITUTIONNEL

Au cœur du contentieux constitutionnel   se trouvent les décisions du juge constitutionnel, qui occupent une place prépondérante dans l’interprétation et l’application des normes constitutionnelles. Le juge constitutionnel est chargé de veiller à la conformité des lois et des actes administratifs à la Constitution. Il est investi d’un pouvoir de contrôle et de garantie de la primauté de la norme constitutionnelle. Ainsi, ses décisions ont une autorité suprême et sont considérées comme la plus haute expression du droit constitutionnel.

L’autorité des décisions du juge constitutionnel découle de sa compétence exclusive en matière d’interprétation et de protection de la Constitution. Ces décisions sont contraignantes pour l’ensemble des pouvoirs publics, y compris le législateur et l’administration. Elles s’imposent également aux juridictions ordinaires, qui doivent les suivre et les appliquer.

C’est la pratique et la logique des textes qui ont conduit à distinguer les types de décision que peut prendre le Conseil constitutionnel. Le texte constitutionnel donne peu d’informations.

P1. LES DIFFÉRENTS TYPES DE DÉCISION

La décision de conformité

 C’est une décision apparemment très simple mais qi appelle des décisions quant à sa prête. Pendant longtemps, le Conseil constitutionnel a utilisé différentes expressions pour formuler la conformité. Le problème qui se pose est quand le dispositif se contente de déclarer que les articles sont conformes. On se demande si c’est une présomption de conformité et s’il est possible de réexaminer le texte plus tard. Le Conseil constitutionnel en a conclut à la conformité de la loi.

La décision d’inconformité totale

 Elle est rare et peut résulter de différents motifs. D’abord, on a l’hypothèse d’un vice de procédure particulièrement grave comme la non consultation des assemblées de collectivité d’Outre Mer. Ensuite, on a aussi le non respect le la compétence du Législateur au sens de l’article 34 mais c’est rare car seul le Gouvernement peut le faire mais il ne le fait jamais. Ensuite, on a la violation directe d’un principe constitutionnel. L’exemple est la décision de 1977 concernant la fouille des véhicules où le Conseil constitutionnel a été sévère en soulignant que l’étendue des pouvoirs de police et le caractère général autorisant l’intervention de la police étant tels que ce texte porte atteinte aux principes essentiels sur lesquels repose la liberté individuelle.

La décision de conformité partielle

 L’hypothèse a été prévue dans les textes concernant l’ordonnance de 1958 aux articles 22 et 23. Dans l’article 22, la loi pose l’hypothèse d’une disposition contraire et inséparable et donc dans e cas on ne peut promulguer la loi. L’article 23 pose l’hypothèse d’une décision du Conseil ne déclarant pas l’inséparabilité et dans ce cas le Président de la République peut promulguer la loi sans la déclaration d’inconstitutionnalité ou demander une nouvelle lecture.

 La pratique a précisé deux éléments autour de la notion de l’inséparabilité et des pouvoirs du Prédisent.

  • Concernant les critères de l’inséparabilité, l’inséparabilité diffère de l’inconformité totale. Ce qui défère sont les causes de la non promulgation, ce qui fait qu’en pratique la promulgation voir reste possible en cas d’inséparabilité dans l’hypothèse où le texte est reprit dans un autres contexte juridique. Lorsque le Conseil déclaré l’inséparabilité, le reste peut être reprit par le Législateur dans un contexte différent et donc l’inséparabilité ne jouerait plus. Les deux critères principaux apparaissent après deux questions successives que le Conseil se pose. La première question est celle de savoir si la loi reste applicable malgré les amputations prononcées par le juge. Par exemple dans la décision du 16 janvier 1982, l’article 2 dit que certaines dispositions ne sont pas séparables de l’ensemble de la loi. La conséquence est que les dispositions constitutionnelles donc la plus grande partie de la loi ne peuvent entrer en vigueur en l’absence des articles inconstitutionnels. La seconde question est de savoir si les disputions censurées étaient importantes pour le Législateur au point qu’il n’aurait pas adopté la loi.
  • Concernant les conséquences de la non conformité partielle, l’article 23 de la Constitution ouvre une option discrétionnaire au Président de la République car il peut promulguer la loi soit en amputant la loi des dispositions contraires à la Constitution soit après substitution des dispositions inconstitutionnelles par des dispositions qui seraient constitutionnelles. Dans la décision de 1985, le Conseil a saisit l’occasion pour redonner le sens de son contrôle de la constitutionnalité. Il est dit que l’objet de son contrôle n’est pas de freiner le pouvoir législatif mais d’assurer sa conformité à la constitution. Si le président choisit la promulgation après amputation, ce choix a pour effet de mettre fin à la procédure législative. Si on veut promulguer à nouveau les dispositions non conformes, il faudrait recommencer à zéro une procédure législative. Si le Président choisit la substitution en vue d’une mise en conformité, le choix de la substitution ne constitue pas le vote d’une loi nouvelle. Il s’agit seulement de l’intervention dans la procédure législative d’une phase supplémentaire découlant du contrôle de constitutionnalité. La phase législative n’est donc pas interrompue. En conséquence, le juge constitutionnelle refuse de faire la différence entre une nouvelle lecture et une nouvelle délibération. Il y a donc aucune raison d’écarter l’application de l’article 45 de la Constitution car on est toujours dans la même procédure législative.

La décision de conformité sous réserves

 Cette hypothèse a été utilisée la première fois indirectement dans les décisions de juin 1959 sur le règlement des assemblées. La première fois directement est le 30 janvier 1958. La technique de la réserve est devenue habituelle à partir de la décision de 1980 concernant une loi sur la sécurité. En 1984, le Conseil a introduit une lance avec la notion de stricte réserve d’interprétation.

 Ces conformités sous réserve sont des injonctions adressées aux autorités chargées d’appliquer la décision. Il s’agit de l’ensemble des pouvoirs publics à commencer par le Président, les autorités administratives et juridictionnelles. Le Conseil constitutionnel souligne le caractère impératif et obligatoire de cette interprétation.

 C’est l’idée que la conformité à la loi est reconnue à condition que la loi soit interprétée dans un sens précis. Cela a un avantage car cela donne une souplesse au juge constitutionnel. L’affrontement avec le législateur a été évité cependant. Dans la réalité de la législation, aucune loi n’est immédiatement ou totalement contraire à la Constitution. L’étude de la conformité est complexe. Il y a aussi des inconvénients sérieux. C’est le fait qu’on pourra toujours soupçonner le juge de réécrire la loi. L’autre difficulté est de savoir comment le juge constitutionnel est capable d’assurer le respect de son interprétation.

Une fois ces questions réglées, les réserves prennent différentes formes. La doctrine tente de les classer.

  • Le premier type est les interprétations directives. C’est un modèle dans lequel le Conseil indique les modalités d’application de la loi qi sont en conformité avec la Constitution à ses yeux. Par exemple, dans la décision concernant les privatisations de 1986, le conseil constitutionnel a donné la méthode d’évaluation des entreprises. Dans la décision de 1984, le Conseil constitutionnel a été jusqu’à dire « toute autre interprétation ». Il arrive que ces directives soient adressées au législateur et il s’y est conformé. Dans une décision de 1983, le Conseil constitutionnel a dit que « les dispositions auraient du ».
  • Le deuxième type est les interprétations neutralisantes. Au sens strict, cela signifie que le Conseil interprète les dispositions litigeuses de façon à les priver de tout effet juridiques. Au sens large, le Conseil constitutionnel adopte une interprétation minorante. Concernant les effets neutralisants, le Conseil a par exemple dit que des dispositions n’ont pas d’effet juridique. Dans la décision de 1984, il est dit que les dispositions sont interprétées « comme n’exigeant que ». Concernant l’interprétation neutralisante, dans une décision de 1985, il a été dit que « au regard de la portée générale le droit doit s’entendre comme ».
  • Le troisième type est l’interprétation constructive. C’est le cas où le Conseil ajoute au texte de la loi pour le rendre conforme à la Constitution. Cela donne donc plus de sens à la disposition que ce qui est écrit. Cela apparaît dans les hypothèses où la loi est mal rédigée et intervient dans les libertés fondamentales, là où on a le plus besoin de sécurité juridique. Par exemple, dans une décision de 1989 sur le licenciement économique, le juge dit que de telles dispositions pour respecter la liberté syndicale des salariés impliquent que doit être présent dans le texte différentes choses qu’il liste. Le conseil ici est constructif car il dit que les textes doit avoir toutes les informations nécessaires pour que le salarié ne soit pas obligé de passer par un syndicat.

P2. L’AUTORITÉ DES DÉCISIONS DU JUGE CONSTITUTIONNEL

 Il faut distinguer l’autorité juridique du problème de la mise en application.

A) L’autorité juridique des décisions

 L’article 62 annonce l’étendue de cette autorité en disant que les décisions ne sont susceptibles d’aucun recours et s’imposent aux pouvoirs publics ainsi que les autorités administratives et juridictionnelles. L’autorité de la chose jugée est limitée à la déclaration d’inconstitutionnalité visant certaines dispositions de la loi qui sont soumises selon le Conseil. Aucun recours n’est donc possible, donc concernant le pouvoir de révision de la Constitution.

 Le Conseil a rappelé la doctrine traditionnelle en la matière, donc concernant le dispositif de la décision et aux motifs qi en sont le soutien et le fondement.

 La déclaration de non conformité a une autorité de la chose jugée absolue. Pour les décisions de conformité, l’autorité de la chose jugée ne vaut que pour l’objet de la loi contrôlée car il s’agit de savoir ce que le Conseil a clairement contrôlé. On se demande aussi si cette autorité s’attache aux réserves d’interprétation. On peut résonner logiquement car la réserve d’interprétation fait partie des motifs commandant la solution et dons ils ont la même autorité sue le dispositif.

B) La portée de la décision du Conseil constitutionnel

 La question est de savoir à qui s’impose les décisions du Conseil et comment.

  1. A l’égard du Conseil constitutionnel lui même

 Si c’est une décision de conformité, le juge se refuse à nouvel examen de la conformité si les nouvelles dispositions sont identiques à la loi antérieure. Si on se trouve par rapport à une décision antérieure de non conformité, le Conseil constitutionnel est plus souple et ne fera pas jouer automatiquement la chose jugée car devant une nouvelle loi on peut avoir des termes différents et nouveaux et donc les dispositions invalidées précédemment peuvent être reprises dans une loi de manière à ce qu’elles deviennent constitutionnelles.

 Par exemple, dans l’affaire de la reprises des syndicalistes de Renaud qi a fait ‘objet d’une amnistier en 1988, le Conseil refuse la nouvelle loi car elle reprend une déclaration d’inconstitutionnalité.

 Si le texte de référence a été modifié entre deux contrôles de constitutionnalité, est ce que le Conseil ré intervient à nouveau ? C’est le problème de la décision de Maastricht II après la décision de Maastricht I. Le Conseil a admit que normalement il ne pouvait pas intervenir à nouveau mais il a posé deux exceptions. La première est le fait que la révision est insuffisante. La seconde est le fait que la révision a été trop importante et donc elle a fait apparaître de nouvelles causes d’inconstitutionnalité.

 

A l’égard des pouvoirs publics

  • Le Président de la République

 C’est lui qui promulgue la loi et donc c’est lui qui donne l’effet à la loi et à la décision du Conseil constitutionnel. En cas de conformité partielle, il a le choix entre une promulgation réduite ou une demande de nouvelle lecture.

 Si la disposition est non conforme et qu’elle est essentielle à l’application de la loi, il faut procéder à une nouvelle procédure législative. L’exemple est la décision du 13 décembre 1985 où le Président promulgue la loi mais en même temps il obtient le vote de novelles dispositions conformes.

  • Le Parlement

 Il est tenu de respecter les décisions du Conseil constitutionnel. Il y avait le cas du règlement des Assemblées. En 1969, les sénateurs ont trainé les pieds pour obéir aux injonctions du Conseil constitutionnel.

 Dans le cas de la loi ordinaire, le Législateur ne eut pas reprendre une disposition invalidée dans une nouvelle loi. C’est le cas d’une décision du 9 juillet 1989 dans laquelle le Conseil censure l’article 3. L’autorité de la chose jugée s’attache au dispositif mais aussi aux dispositifs qui en sont le soutien nécessaire selon le Conseil. Ainsi, on ne peut pas invoquer une décision du Conseil constitutionnel contre une nouvelle loi. Le Conseil dit qu’il n’en va pas de même quand ce sont des dispositions qui bien rédigées différemment ont un analogue avec d’autres dispositions déclarées inconstitutionnelles. Le 20 juillet 1988, le Conseil constitutionnel avait déclaré non conforme une loi qui avait intégré à nouveau ce que le Conseil constitutionnel a censuré.

La question des conformités sous réserves se pose aussi. Le Parlement doit tenir comte de ces indications. Tout va dépendre de la clarté et de la précision de la réserve. Lorsqu’il y a des interprétations directes, le Législateur s’y conforme strictement.

  • Le Gouvernement

Il tient compte de la jurisprudence du conseil constitutionnel, notamment lors de l’élaboration des projets de loi. Il y a aussi l’hypothèse de la mise en œuvre concrète de la loi après une réserve d’interprétation. Dans ce cas, les circulaires interviennent.

  • A l’égard des autorités juridictionnelles

Le Conseil constitutionnel n’est pas une cour suprême et le Conseil d’Etat et la Cour de cassation tente d’empêcher ce type de comportement. En effet, le Conseil constitutionnel ne peut pas assurer lui même l’effet de sa jurisprudence car il n’est pas au dessus d’autres juridictions. On a donc une coexistence entre l’ordre administratif et de l’ordre judiciaire, personne n’ayant un contrôle sur l’autre. Ce sont donc des juridictions dont le système juridique n’a pas été élaboré en référence à la Constitution. Ainsi, il y a une jurisprudence constitutionnelle à coté.

Les ordres administratifs et judiciaires refusent de contrôler la constitutionnalité des lois. Or, le Conseil constitutionnel, le 23 janvier 1987 avait eu une incidente dans laquelle il a déclaré que la séparation des autorités n’a pas de valeur constitutionnelle. Le juge judiciaire s’est longtemps montré réticent vis-à-vis de la jurisprudence constitutionnelle. Par exemple, la Cour de cassation a refusé de suivre le Conseil constitutionnel sr la question de la fouille des véhicules. Par la suite, les choses ont changé.

Le Conseil d’Etat examine toujours la constitutionnalité des projets de loi dans sa fonction consultative. Au contentieux, on a la même prudence et réserve au début que le juge judiciaire. En 1985, le Conseil d’Etat a fait référence à une interprétation dégagée par le Conseil constitutionnel pour la première fois. En 1994, il s’est expressément référencé au Conseil constitutionnel

Il subsistera toujours des possibilités de divergence car les ordres ne sont pas coordonnés entre eux.