Les défendeurs à l’action civile : le délinquant et les autres (assureur, héritiers…)

  L’action publique ne peut être exercée qu’à l’encontre du délinquant. Ce n’est pas le cas de l’action civile.

  • Les défendeurs à l’action publique sont uniquement les auteurs , les co – auteurs et complices de l’infraction.
  • Alors que concernant l’action civile, elle peut être exercée contre le délinquant (auteur ou complice) mais aussi contre les héritiers de délinquant (devant la juridiction civile) contre les tiers civilement responsable du délinquant contre l’administration.

Chapitre 1. Le délinquant

 

  Au nombre de ces défendeurs, figure le délinquant lui- même, auquel s’adresse prioritairement cette demande de réparation. Il faut alors retenir d’autres personnes, car en dehors de ce délinquant, on peut avoir un grand nombre d’individus pouvant répondre à la demande de réparation formulée par la partie civile.

 

On peut ainsi procéder à un effort de classification, avec deux catégories : les garants du délinquant et ses éventuels héritiers. Ils peuvent alors être présents devant le juge pénal. Cela présente un avantage pour la partie civile, qui peut concentrer ses demandes dans un même procès.

 

Chapitre 2. Les garants du délinquant

 Évoquer les garants du délinquant, c’est nécessairement se tourner vers la responsabilité civile. En effet, elle connaît bien l’hypothèse où une personne va être civilement responsable du dommage causé à une autre. Ce sont ces personnes civilement responsables que l’on verra, pour voir ensuite les autres garants.

 Section 1 : Les personnes civilement responsables du délinquant

 On dit d’une personne qu’elle est civilement responsable d’une autre quand elle sera civilement tenue de réparer le dommage causé par l’autre. Le Code civil connaît plusieurs hypothèses de cette nature comme les parents quant à leur enfant mineur, le commettant, l’artisan etc. Toutes ces personnes que le droit civil désigne comme responsables, peuvent   donc être responsables d’un fait dommageable. Il est possible que ces personnes civilement responsables soient présentes devant les juridictions répressives. Le Code de Procédure Pénale consacre cette possibilité notamment en reconnaissant à la partie civile la possibilité de citer ces personnes devant les juridictions répressives, aux côtés du délinquant . Étant entendu que la personne civilement responsable a possibilité d’intervenir elle-même volontairement dans l’instance pénale pour faire valoir sa défense.

 

En effet, la personne civilement responsable peut intervenir volontairement dans l’instance pénale pour faire valoir sa défense, et pour tenter d’échapper à la réparation du dommage causé par le délinquant dont elle répond. Cette présence doit être soigneusement circonscrite. La personne civilement responsable n’est pas partie au stade de l’instruction. Elle n’apparaît qu’au stade du jugement. Elle va donc, si elle est citée, avoir la possibilité de faire valoir sa défense, de tenter d’échapper à la responsabilité du fait d’autrui, de se soustraire à l’obligation de réparer les conséquences dommageables de l’infraction.

 

Les personnes civilement responsables peuvent contester l’existence de la faute pénale en disant que celui dont ils répondent n’a commis aucune infraction. Ils peuvent aussi contester le fait que les conditions de leur responsabilité soient réunies.

 

Ces personnes étant parties à la procédure, peuvent exercer un droit de recours comme un appel. Si elles sont parties, elles ne sont parties à la procédure que s’agissant de l’action civile et non de l’action publique. Lorsqu’elles exercent les droits de recours, l’exercice de ces droits n’a aucune incidence sur l’action publique.

 

Section 2 : Les autres garants du fait du délinquant

 Il existe des personnes dans la position d’un garant, qui vont être exposées à réparer les conséquences du dommage causé, sans avoir pourtant la qualité de personne civilement responsable. Il s’agit principalement de l’assureur et l’administration elle-même.

  • 1. L’assureur

 S’agissant de l’assureur du prévenu, la même réforme a permis que soit assurée la présence de l’assureur du délinquant devant la juridiction civile. Il peut être présent parce qu’il a été mis en cause (p.ex par la victime, soucieuse d’avoir un garant solvable devant elle) ou parce qu’il est intervenu de lui-même dans la procédure pour faire valoir sa propre défense.

 

Là encore, cette présence n’est envisageable que devant les juridictions de jugement. L’avantage de sa présence au procès pénal, volontaire ou contrainte, est que la décision rendue sur l’action civile, va lui être opposable. Ici encore, comme pour l’assureur de la victime, l’assureur de la personne poursuivie est une solution exceptionnelle qui n’est possible que par rapport à des infractions précises comme un homicide ou des blessures par imprudence.

 

Il reste que cet assureur du prévenu, de la personne poursuivie, va être défendeur à l’action civile. Le Code de Procédure Pénale – pour faire simple –, décide que les droits de l’assureur du prévenu sont les mêmes que ceux de la personne civilement responsable. Il peut tenter d’échapper à son obligation de garantie en disant que son client n’est pas pénalement responsable ou que la garantie ne peut pas jouer selon le contrat.

 

  • 2. L’administration

 Pour que cette situation se présente, il faut supposer qu’une infraction a été commise par un fonctionnaire. Il se trouve que, sous certaines conditions, l’administration est garante des conséquences dommageable des fautes de ses propres agents. Cela peut être le cas lorsque la faute de l’agent est pénale

 

Lorsqu’une infraction a été commise par un fonctionnaire, on se pose des questions.

 

  • Qui va être tenu d’indemniser la victime : le fonctionnaire ou son administration ? Il faut donc déterminer le débiteur de l’infraction.
  • Vient alors la question de l’ordre de juridiction compétent pour allouer cette réparation : l’ordre judiciaire ou administratif ?

 

  1. Le débiteur de la réparation

 Le fonctionnaire, lorsqu’il cause un dommage à autrui, peut être tenu de réparer lui-même les conséquences de sa faute. Cela n’arrive que parfois. Il n’est tenu que de réparer les conséquences de ses fautes personnelles « détachables de ses fonctions ». On veut suggérer ici que le fonctionnaire peut commettre des fautes qui n’ont plus de lien avec l’exercice de ses fonctions. Il doit alors en répondre personnellement.

 

Cela est par opposition à des « fautes de service ». On oppose ainsi les fautes personnelles aux fautes de service. Ces dernières engagent la responsabilité de l’administration qui est garante des fautes de ses propres agents. Le tout est alors de savoir à quelle catégorie de faute appartient la faute pénale.

 

Il serait tentant de penser qu’une faute pénale a vocation à être une faute personnelle donc détachable des fonctions. Cela n’est pas la position du tribunal des conflits. Depuis l’arrêt Thépaz, il considère qu’une faute pénale n’est pas une faute détachable des fonctions dans tous les cas.

 

Tribunal des conflits, 14 janvier 1935, Thépaz, n° 00820 : Considérant que, dans les conditions où il s’est présenté, le fait imputable à ce militaire, dans l’accomplissement d’un service commandé, n’est pas constitutif d’une faute se détachant de l’exercice de ses fonctions ; que, d’autre part, la circonstance que ce fait a été poursuivi devant la juridiction correctionnelle en vertu des dispositions du nouveau Code de justice militaire sur la compétence, et puni par application de l’article 320 du Code pénal, ne saurait, en ce qui concerne les réparations pécuniaires, eu égard aux conditions dans lesquelles il a été commis, justifier la compétence de l’autorité judiciaire, saisie d’une poursuite civile exercée accessoirement à l’action publique.

Il peut y avoir une faute de service alors qu’il y a infraction pénale.

 

Pour qu’une faute pénale soit détachable des fonctions et que l’administration ne soit pas garante, il faut que cette faute « révèle d’un manquement volontaire inexcusable à des obligations d’ordre professionnel et d’ordre déontologique ». Ça n’est qu’à la condition que la faute pénale corresponde à cette définition, qu’elle est détachable des fonctions. La faute détachable des fonctions n’est alors pas nécessairement une faute intentionnelle, car on parle aussi de faute inexcusable qui peut être non intentionnelle.

 

Par cette formule, on peut tirer la conséquence que la faute détachable des fonctions n’est pas nécessairement une faute intentionnelle, puisque Thépaz vise aussi une faute inexcusable, qui peut être involontaire. Cette solution, quelle que soit la portée exacte de cette formule, est avantageuse pour les victimes. En admettant qu’une faute pénale puisse être une faute de service, la jurisprudence offre à la victime, l’administration comme garant, dont on est sûr de la solvabilité.

 

  1. L’ordre de juridiction compétent

 Lorsque la faute pénale du fonctionnaire est une faute de service, non détachable de l’exercice de ses fonctions, l’appréciation de la responsabilité de l’administration relève exclusivement des juridictions de l’ordre administratif. L’administration ne peut alors se retrouver défenderesse devant une juridiction répressive.

 

La victime de l’infraction commise par un fonctionnaire, infraction dont l’administration va être le garant, ne peut donc pas attendre du juge répressif la réparation du dommage causé par le fonctionnaire. La juridiction judiciaire est incompétente. La victime peut néanmoins se constituer partie civile au pénal pour déclencher l’action publique.

  • 3. Les héritiers du délinquant

 On retrouve ici la même règle du droit successoral que les héritiers de la victime. Ils sont les continuateurs de la personne du défunt. Ils sont tenus de ses dettes s’ils acceptent la succession. Ils peuvent alors se retrouver dans la position de défendeur à l’action civile intentée contre le défunt.

 

Le délinquant étant par hypothèse décédé, l’action publique est éteinte. La situation normale verra ces héritiers défendeurs à l’action civile uniquement devant les juridictions civiles. Ils ne peuvent déclencher l’action publique si le défunt ne l’a pas fait de son vivant. Il y a une seule atténuation : l’action civile peut avoir été exercée au pénal contre le défunt, de son vivant. En cours de procédure, voilà que le délinquant décède. La juridiction pénale ne statue plus sur l’action publique, mais sur l’action civile pour laquelle elle a été initialement saisie.

 

Ici, les héritiers du délinquant pourront être défendeurs à l’action civile contre une juridiction pénale, demandée initialement contre le défunt.

Isa Germain

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