Les devoirs et obligations des époux pendant le mariage

Quels sont les rapports d’ordre personnel entre les époux ?

Le mariage, bien qu’il implique une certaine perte d’indépendance, repose sur des principes fondamentaux de réciprocité et d’égalité entre les époux. Chaque conjoint conserve toutefois l’exercice de ses droits et libertés individuels, garantissant son autonomie dans le cadre de l’union.

Les droits fondamentaux des époux

Même en étant mariés, les époux jouissent de libertés essentielles qui ne peuvent être entravées par leur conjoint :

  • Droit à l’intégrité physique : Chaque époux est libre de consentir ou non à une intervention médicale, comme une chirurgie ou une interruption volontaire de grossesse (IVG).
  • Liberté professionnelle : Les conjoints décident individuellement s’ils souhaitent travailler et peuvent choisir librement leur profession.
  • Liberté d’opinion : Les époux ont le droit de pratiquer un culte, de s’engager dans une activité syndicale ou culturelle selon leurs convictions personnelles.
  • Liberté du mode de vie : Chaque conjoint peut s’adonner aux loisirs de son choix et est protégé par le droit au secret de la correspondance.

Les devoirs et obligations entre époux

Le mariage impose également des devoirs et des obligations réciproques, qui visent à renforcer les liens conjugaux et à assurer la stabilité de l’union.

  • Le devoir de fidélité : La fidélité est une obligation légale imposant l’exclusivité des relations affectives et sexuelles entre époux. L’adultère, défini comme l’entretien de relations sexuelles extraconjugales, constitue une violation directe de ce devoir.
  • Le devoir d’assistance : Ce devoir impose une solidarité morale et matérielle entre époux, les obligeant à se soutenir dans toutes les dimensions de la vie conjugale. Être un « bon époux » ou un « bon parent » est une illustration de ce devoir. Par exemple, un comportement destructeur, tel que sombrer dans l’alcoolisme, peut être considéré comme une violation de l’obligation d’assistance.
  • L’obligation de communauté de vie : La communauté de vie s’exprime à travers deux aspects principaux : la cohabitation et la relation intime

 

Section 1 – Les devoirs et obligations entre époux

Le mariage, en tant qu’institution légale et sociale, repose sur plusieurs devoirs fondamentaux. Ces obligations, qui trouvent leur origine dans la dimension morale et religieuse du mariage, ont été progressivement enrichies et adaptées par le droit moderne, notamment avec l’introduction du devoir de respect par la loi du 4 avril 2006. Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours, assistance, communauté de vie et respect.

A) Le devoir de fidélité

Le devoir de fidélité s’applique pendant toute la durée du mariage, y compris en cas de séparation de fait ou de corps, et jusqu’à la dissolution définitive du lien matrimonial par le divorce.

  • Nature du devoir :
    Il impose l’abstention de relations sexuelles extraconjugales et, plus largement, de toute relation amoureuse avec un tiers. Même en l’absence de relations physiques, une infidélité morale (par exemple, une relation tendancieuse) peut constituer une faute et justifier une demande de divorce (Cour de cassation, 10 juillet 1973 ; CA Paris, 13 février 1986). Toutefois, les mœurs évoluent : un tribunal a jugé qu’un baiser amoureux pouvait n’être qu’une violation mineure du contrat conjugal.

  • Évolution des sanctions :

    • Avant 1975, l’adultère constituait une infraction pénale, avec une sévérité accrue pour les femmes.
    • Depuis la loi du 11 juillet 1975, l’adultère n’est plus pénalement sanctionné mais reste une faute civile.
      • Il peut constituer une cause de divorce, mais le juge conserve une marge d’appréciation.
      • Il peut donner lieu à des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi. Cependant, la responsabilité civile du tiers complice de l’adultère est désormais exclue (Cour de cassation).

B) Le devoir d’assistance

Le devoir d’assistance reflète la solidarité morale et matérielle entre époux. Il implique une aide mutuelle dans les situations exceptionnelles (maladie, crise psychologique) mais aussi dans les actes de la vie quotidienne.

  • Applications pratiques :

    • L’aide apportée par un époux dans l’activité professionnelle de l’autre relève souvent de ce devoir. Une rémunération n’est due que si cette aide dépasse les limites normales de l’assistance conjugale.
    • Le devoir d’assistance justifie également le rôle du conjoint dans la protection juridique du majeur incapable. Ainsi, le conjoint peut demander l’ouverture d’une tutelle et est de droit désigné comme tuteur de son époux.
  • Sanctions : Le manquement à ce devoir peut entraîner un divorce pour faute et donner lieu à une condamnation à des dommages et intérêts.

C) La communauté de vie

La communauté de vie regroupe le devoir conjugal et le devoir de cohabitation. Ces obligations visent à préserver l’unité affective et matérielle du couple.

  1. Le devoir conjugal :
    Les époux doivent entretenir des relations intimes.

    • Le refus injustifié peut constituer une faute justifiant un divorce ou des dommages et intérêts.
    • Toutefois, des circonstances exceptionnelles, notamment médicales, peuvent justifier une abstinence.
    • Consentement mutuel : Ce devoir ne saurait être imposé de manière coercitive. Depuis la loi du 4 avril 2006, le viol entre époux est spécifiquement incriminé (article 222-22 du Code pénal).
  2. Le devoir de cohabitation :
    Traditionnellement, ce devoir implique de vivre sous le même toit. Cependant, depuis 1975, une conception plus souple permet des domiciles distincts (article 108-1 du Code civil), notamment pour des raisons professionnelles. Ce qui importe, c’est le maintien d’une communauté affective. Les époux doivent régulièrement se retrouver dans la résidence familiale choisie d’un commun accord.

D) Le devoir de respect

Introduit par la loi du 4 avril 2006, ce devoir vise à protéger la dignité et l’intégrité des époux.

  • Contenu : Il interdit les violences physiques, verbales ou psychologiques entre époux. Les comportements vexatoires ou injurieux sont également contraires à ce devoir.

  • Sanctions et applications :
    Ce devoir trouve un écho dans les mesures de protection des victimes de violences conjugales, telles que l’éviction du conjoint violent du domicile familial ou la mise en œuvre de sanctions civiles et pénales.

En résumé : Les devoirs entre époux, enrichis par les évolutions légales et jurisprudentielles, imposent une solidarité morale et matérielle, la fidélité, le respect, et le maintien d’une communauté de vie. Ces obligations, bien que d’origine traditionnelle, sont désormais adaptées aux besoins de protection et de dignité de chaque conjoint.

Section 2 – La direction de la famille

Principe de codirection :  En vertu de l’article 213 du Code civil, les époux assument ensemble la direction morale et matérielle de la famille. Cela inclut :

  • L’éducation des enfants : Décisions concernant leur scolarité, religion, et activités doivent être prises conjointement.
  • Les choix patrimoniaux : Les décisions importantes concernant les biens de la famille relèvent également de la responsabilité partagée.

Le choix de la résidence familiale :  L’article 215, alinéa 2, prévoit que le lieu de la résidence familiale est choisi d’un commun accord. En cas de désaccord persistant, il est possible de saisir le juge pour trancher. Ce choix symbolise l’équilibre entre les droits et devoirs de chacun.

 

Section 3 – Les caractères et sanctions de ces obligations ou devoirs

A) Les caractères

Les obligations entre époux reposent sur des principes d’égalité et de réciprocité, lesquels ont un caractère d’ordre public. En conséquence, il n’est pas possible pour les époux de déroger à ces principes, même dans un contrat de mariage.

  • Nullité des pactes contraires à l’ordre public :
    • Un pacte d’infidélité serait déclaré nul.
    • Un pacte visant à rétablir la qualité de chef de famille pour le mari serait également nul.

Trois précisions importantes s’appliquent :

  1. Validité de certains accords en cas de divorce ou de séparation de corps :
    Lorsque les époux sont engagés dans une procédure de divorce ou de séparation de corps, certains accords peuvent être conclus. Ces accords sont licites car ils s’inscrivent dans un contexte où le lien matrimonial est déjà affaibli.

  2. Modification par le juge en dehors de toute procédure de divorce :
    En vertu de l’article 220-1, alinéa 3 du Code civil, un juge peut intervenir pour modifier les rapports entre époux, mais uniquement en cas de cause grave justifiant cette intervention.

  3. Incidence des aménagements hors divorce :
    Certains aménagements pris en dehors d’une procédure de divorce peuvent avoir une influence sur les sanctions applicables ultérieurement, notamment si ces aménagements sont jugés contraires à l’ordre public ou aux devoirs des époux.

B) Les sanctions

Les manquements aux obligations matrimoniales peuvent entraîner des sanctions civiles, mais les sanctions pénales sont désormais inexistantes.

1° Les sanctions pénales

L’adultère, autrefois réprimé pénalement, a été dépénalisé par la loi du 11 juillet 1975. Cette dépénalisation reflète un changement sociétal, visant à respecter la vie privée des époux et à retirer le droit pénal des questions d’ordre matrimonial.

2° Les sanctions civiles

La mise en œuvre de sanctions civiles exclut l’exécution forcée en nature, jugée inconcevable et attentatoire aux libertés individuelles. Cependant, trois types de sanctions civiles peuvent être prononcées :

  • Le divorce pour faute :
    Le juge peut prononcer un divorce pour faute lorsque l’un des époux manque gravement à ses devoirs conjugaux. La faute doit être grave et répétée, au point de rendre la vie commune intolérable. Le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation dans l’évaluation de la gravité des faits.

  • La condamnation à des dommages et intérêts :
    L’époux fautif peut être condamné à indemniser son conjoint pour le préjudice moral subi. Toutefois, cette sanction est rarement retenue. La jurisprudence actuelle exclut par ailleurs la responsabilité civile du tiers complice de l’adultère, suivant une position consolidée par la Cour de cassation.

  • La déchéance de certains droits :

    • L’époux qui abandonne sans motif légitime la résidence familiale peut perdre le droit de réclamer à l’autre une contribution aux charges du mariage.
    • Un époux peut également être privé des avantages patrimoniaux (par exemple, les donations reçues de son conjoint) en cas de comportement fautif. Un tel comportement peut être qualifié d’ingratitude, justifiant la révocation des donations.

En résumé : Les obligations matrimoniales, fondées sur des principes d’égalité et de réciprocité, sont protégées par des sanctions d’ordre public. Si les sanctions pénales ont disparu depuis 1975, les sanctions civiles, telles que le divorce pour faute, les dommages et intérêts, et la perte de certains droits, restent des moyens de sanctionner les manquements graves.

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