Les effets du contrat de bail

LES EFFETS DU CONTRAT DE BAIL

Le bail d’habitation est un contrat qui a pour conséquence de mettre à la charge du bailleur et du locataire certaines obligations.

Obligations du bailleur

L’obligation principale du bailleur est d’assurer au locataire des conditions de vie normales dans un logement décent.

Il doit, à cet effet :

– délivrer un logement en bon état et comportant les équipements mentionnés dans le contrat de location ;

– assurer au locataire la jouissance paisible du logement en réparant les vices ou défauts de nature à entraver cette jouissance ;

– entretenir le logement en bon état et y effectuer toutes les réparations qui lui incombent ;

– accepter les aménagements réalisés par le locataire à condition qu’ils n’aboutissent pas à la transformation du logement loué.

Obligations du locataire

Le locataire doit, en premier lieu, payer le loyer et les charges qui lui incombent ou que le bail prévoit (les charges récupérables par le bailleur peuvent concerner aussi bien les parties privatives que les parties communes de l’immeuble).

Le locataire doit également respecter plusieurs obligations relatives à l’usage du logement. Il doit user paisiblement du logement et respecter sa destination (usage d’habitation, usage professionnel ou usage mixte).

Il doit assurer l’entretien courant du logement et des équipements mentionnés dans le bail, réparer les dégradations survenues par sa faute et dans une certaine limite, il doit laisser exécuter les travaux d’amélioration et de maintien en l’état.

En revanche, il ne peut pas réaliser des travaux de transformation sans l’accord écrit du bailleur.

De plus le locataire ne peut ni céder son bail, ni sous-louer partiellement ou totalement son logement sans l’accord écrit du bailleur.

Enfin, le locataire est tenu de s’assurer contre les risques locatifs dont il a la charge.

Paragraphe 1er: Les obligations du bailleur.

Articles 1719 à 1727 du Code civil. Toutes les obligations du bailleur s’explique par celle énoncée à l’article 1719, 3°, du Code civil, «Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière d’en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail». Les auteurs qualifient cette obligation d’âme du bail. Arrêt Civ. 3ème, du 18 décembre 2002, affaire du Digicode, refus de la Cour de cassation de modifier des installations nouvelles contraires aux convictions et pratiques religieuses au nom de l’article 9 de la Convention EDH. Il s’agissait ici non pas d’enlever une clause du contrat, mais d’en ajouter une. Doit-on au nom de la jouissance paisible de son bail, le bailleur doit il permettre une pratique effective de la religion dans ses lieux ? Cela ferrait alors peser des obligations sur le bailleur qu’il ne pouvait en aucun cas prévoir.

A/ Les obligations.

L’obligation de sécurité vaut aussi pour le loueur.

  1. L’obligation de délivrance.

Article 1719, 1°, du Code civil : «Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière de délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent». C’est une obligation d’ordre public, impérative. L’article 1720, 1°, «Le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état de réparations de toute espèce». Le problème ici posé est celui de la combinaison entre 1719,1° (impératif) et 1720, 1° (supplétif). La tentation est grande pour le bailleur par le truchement d’une clause concernant 1720 1°, de remettre en cause son obligation de délivrance, le preneur déclare prendre le bien en l’état dans lequel il se trouve au moment de son entrée en jouissance, écartant ainsi 1720,1°. Toutefois si le bien est dans un tel état que le preneur ne peut en avoir un usage communément admis, la clause de remise en l’état est alors considéré comme nul ; Civ. 3ème, 5 juin 2002.

La modification de 1719, 1° par la loi SRU de décembre 2000, faisant obligation de délivrer un logement décent pour un logement principal, article 6 de la loi de 1989 sur le bail d’habitation. Décret d’application de 2002 qui précise ce qu’est un logement décent. Si l’exécution n’est pas exécutée, le juge peut ordonner la réalisation des travaux, en s’ils ne le sont pas, le juge peut ordonner une réduction du loyer ; article 20 indice 1 de la loi de 1989.

Cette réforme législative est conforme à la volonté du Conseil Constitutionnel, qui avait érigé l’octroi de logement décent au rang d’objectif de valeur Constitutionnelle, réaffirmé par la décision du 13 décembre 2000 relative au contrôle de constitutionnalité de la loi SRU.

Ce qui pose problème est que l’obligation a été appliquée à un bail relevant de la loi de 1948 ; Civ 3ème, 15 décembre 2004, la Cour de cassation a imposé cette obligation de délivrer un logement décent même dans le cadre de la loi de 1948. Problème juridique : rapport droit commun et droit spéciale (droit spéciale déroge au droit général) disposition spéciale prévoyant cette question qui déroge alors à la loi générale, les baux 1948 sont soumis à des montants minables ne pouvant pas être indexés, les propriétaires n’ont de fait pas les moyens de rénover les immeubles.

  1. L’obligation d’entretien.

L’article 1719 2° «Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée » (non impératif) et 1720, alinéa 2, « Le bailleur doit y faire, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que les locatives» (non impératif). Les articles 605 et 606 du Code civil sont relatifs à la répartition des réparations entre usufruitier et nu propriétaire… Là encore, la Cour de cassation est particulièrement vigilante à ce qu’une clause relative à l’entretient de la chose jugée ne soit pas telle qu’elle remette en cause l’obligation de délivrance ; arrêt du 9 juillet 2008, toutes les réparations mises à la charge du preneur, la Cour de cassation a précisé que cette cause était inefficace à exonérer le bailleur des travaux rendus nécessaires par les vices affectant la structure de l’immeuble car on passe de l’article 1720 à 1719 du Code civil.

La non réalisation de cette obligation, sauf si elle remet en cause l’obligation de délivrance, n’exonère pas du paiement des loyers (on ne peut faire jouer l’exception d’inexécution).

B/ Les garanties.

  1. La garantie des vices cachés.

La garantie est plus étendue qu’en matière de droit commun, même s’ils sont apparus en cours de bail. Les clauses relatives limitatives sont parfaitement valables sauf pour les baux d’habitation, la jurisprudence n’ayant pas repris les distinctions entre professionnel et profanes.

  1. La garantie d’éviction.

Elle est due soit du fait personnel soit du fait du tiers.

Du fait personnel.

Articles 1723 et 1724 du Code civil. La question intéressante est ici de savoir au titre de la garantie d’éviction le bailleur peut se voir interdit l’exercice similaire à celui du preneur ou de louer un local qui servirait à l’exercice de la même activité. En jurisprudence, la garantie légale d’éviction ne l’interdit pas, d’où la nécessité d’une clause en ce sens.

Du fait d’autrui.

Article 1725 du Code civil. Le bailleur doit garantie pour les troubles de droit (articles 1726 et 1727 du Code civil) et non les troubles de fait (articles 1725 du Code civil). Article 2278, alinéa 2, du Code civil.

La notion de tiers est extrêmement importante. De nombreuses jurisprudences ont trait à cette notion de tiers, adoptant la plupart du temps la notion de tiers, extension de la garantie du bailleur.

Un autre bailleur n’ést pas un tiers, le concierge non plus, tout comme un entrepreneur ou un client d’un locataire ou encore une personne hébergée par un locataire.

Paragraphe 2ème: Le statut du preneur.

A/ Les obligations du preneur.

Prévues par les articles 1728 à 1735 du Code civil.

  1. Les obligations relatives à la chose.

a) L’usage de la chose.

Le locataire doit utiliser le bien en « bon père de famille », ce qui revient donc à condamner tout abus de jouissance ou utilisation excessive du bien qui nuirait à autrui : tapage, possession d’animaux dangereux, possession d’animaux en très grand nombre, débauche.

L’utilisation doit être conforme à la destination conventionnelle du bien. Concernant les baux commerciaux, les clauses fixant la destination commerciale est valable, mais posent problème car sont contraires à la liberté du commerce et de l’industrie et leur stipulation peut sembler inopportune car les exigences économiques doivent permettre l’évolution du marché. Le statut des baux commerciaux permet pour le preneur la possibilité de s’affranchir de cette clause : on parle de déspécialisation. Si elle est partielle (adjoint des activités complémentaires) elle est de droit, en revanche la déspécialisation totale nécessite l’accord du bailleur.

La jurisprudence est surtout importante en matière de baux d’habitation.

Clause d’habitation bourgeoise excluant l’exercice de toute activité commerciale ou artisanale, mais n’interdit pas l’utilisation d’une activité libérale (sauf spécification).

Clause d’habitation personnelle par laquelle il est fait interdiction d’héberger qui que ce soit, sauf ses enfants mineurs. Cette clause a été condamnée par deux fois par la Cour de cassation sur le fondement de l’article 8 de la Convention EDH (droit à la vie privée et familiale). Le bailleur ne peut interdire au locataire de loger ses proches ; Civ. 3ème 6 mars 1996 puis réaffirmé par le Civ. 3ème 22 mars 2006. Il parait inopportun d’invalider de telles clauses, car permet au bailleur de se prémunir contre toute sur occupation des locaux. De plus, la notion de proche est très vaste, ne permettant donc pas de circonscrire le droit du preneur. La garantie du fait des tiers s’en trouve fortement atteinte, car il doit garantie pour quelque chose contre lequel il ne peut se prémunir. La dernière critique est relative à la manière dont la Cour analyse la Convention EDH, le principe de proportionnalité est appliqué par la Cour EDH, mais il est totalement évincé par la Cour de cassation car elle ne tient compte que de la vie privé du locataire et ne tient pas compte des autres intérêts en présence, notamment des droits du bailleur. Alors que le droit à pour objectif d’établir un équilibre entre les intérêts pesant sur les parties.

b) La restitution de la chose.

Article 1730 du Code civil : «S’il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, celui-ci doit rendre la chose telle qu’il l’a reçue, suivant cet état, excepté ce qui a péri ou a été dégradé par vétusté ou force majeure». D’où la nécessité d’un état des lieux, car d’après 1731 «S’il n’a pas été fait d’état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire».

En cas de dégradation du bien, il existe une présomption de faute à la charge du locataire. Le preneur doit alors en répondre : article 1732 du Code civil. Il s’agit donc d’une obligation de résultat atténué, pesant sur le preneur, le dépositaire, l’emprunteur…

En cas de perte ou dégradation de la chose par incendie, prévue aux articles 1733 et 1734 du Code civil, le preneur est alors soumis à une garantie, le preneur ne peut s’exonérer par l’absence de faute, il ne peut le faire que dans les cas prévus par 1733. Ceci explique donc l’obligation de s’assurer qui pèse sur le locataire.

  1. Le paiement du loyer.

C’est le droit commun des obligations de paiement qui s’applique. Deux précisions :

Pour se prémunir contre le défaut de paiement, demande d’un dépôt de garantie ne pouvant pas excéder 2 mois de loyer sans charge.

On réclame par ailleurs un cautionnement, engagement d’une tierce-personne. Arrêt Civ 3ème 19 mars 2003, la Cour de cassation a considéré qu’une disposition d’un contrat de bail, selon laquelle seuls les étrangers à l’Union Européenne devaient réaliser le dépôt de garantie, n’était pas contraire à la Convention EDH.

B/ Les pouvoirs du preneur.

Article 1717 du Code civil.

  1. La cession du bail.

Parfaitement valable, étant précisé que les baux commerciaux sont soumis à ce droit commun, à la nuance près que la cessibilité du bail est impérative lorsqu’elle intervient dans la cession d’un fond de commerce. La cessibilité est d’ordre public ; L145-16 du Code de commerce. Tous les autres baux spéciaux limitent la cession du contrat de bail. Pour les baux d’habitation, la cession se fait avec l’accord du bailleur (article 6 de la loi de 1989). En matière de baux spéciaux, l’interdiction de cession est absolue, même en cas d’accord du bailleur.

  1. La sous-location.

L’article 1717 admet la possibilité du principe de la sous-location en droit commun, mais pas en matière de baux spéciaux : autorisation pour les baux commerciaux et pour les baux d’habitation avec l’accord du bailleur mais interdiction en ce qui concerne les baux ruraux. Cependant le législateur y est hostile du fait de la forte protection du locataire pour des raisons sociales ou économiques (besoin de l’immeuble). Or, lorsque le sous locataire sous-loue, il montre ne pas en avoir besoin, il n’a donc pas à bénéficier de la protection. La sous location étant une forme de spéculation immobilière. Le loyer de la sous location ne peut être supérieur au loyer principal. Le bailleur est sous locataire s’ignore. A ceci 2 exceptions :

Article 1753 : si le loyer principal n’est pas payé, le bailleur peut réclamer le loyer auprès du sous locataire.

En matière de bail commercial, le sous locataire a un droit direct subsidiaire du bail contre le bailleur en cas de renouvellement.