Les exceptions aux droits patrimoniaux de l’auteur (parodie, citation…)

Les exceptions au droit de propriété incorporelle (parodie, citation, copie privée, cercle familial…) :

Elles ont toujours existé, mais aujourd’hui compte tenu de l’usage de plus en plus important des œuvres, elles ont pris une place importante : si exception, l’auteur perd son droit exclusif, le bénéficiaire de l’exception n’a pas besoin de lui demander l’autorisation, et n’a pas à le rémunéré.

Les exceptions peuvent être considérées comme des servitudes incorporelles (obligations attachées à la chose pour des motifs essentiellement d’intérêt général).

L122-5 : contient la plupart des exceptions, depuis 1957.

Mais elles étaient peu utilisées, puis avec le développement de la consommation de masses des œuvres, elles ont pris un aspect considérable.

La directive de mai 2001 avait consacré un article 5 sur toutes les nouvelles exceptions et quelques anciennes au droit d’auteur, cette directive avait été adoptée, mais la Commission et le Parlement ont décidé de ne pas obliger les États membres à transposer ces nouvelles exceptions.

La France l’a transposée, auteurs, gros groupes de pression : transposition maximale, augmentation du nombre des exceptions.

L’exception est d’interprétation stricte : (« exceptio est strictissimae interpretationis »).

Exception du droit exclusif d’auteur :

Sous-section I : la copie privée :

L125-5-2° : l’auteur ne peut interdire les copies strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinée à une utilisation collective.

L’usage de « strictement » qui fait renvoi explicite à l’adage de droit romain.

L’auteur perd son droit exclusif et l’usage sera gratuit.

La définition, la qualification de copie privée est cruciale.

Dans l’esprit des rédacteurs, la copie privée était le consommateur faisant exceptionnellement pour ses besoins privés, une copie totale ou partielle d’une œuvre.

À partir de ce moment là, il n’y a pas d’usage public a priori l’auteur ne peut s’y opposer, et même s’il s’y opposait les moyens employés seraient disproportionnés.

Ex : la copie papier.

Exception imposée par la loi.

Pour compenser cette perte sera payée aux auteurs et aux éditeurs, une redevance : la rémunération pour copies privées.

Révolution numérique :

– logiciel : une personne achète un logiciel, il a deux ordinateurs, peut-il copier le logiciel ?

122-6-1° : la personne ayant droit d’utiliser le logiciel peut faire une copie de sauvegarde lorsque celle-ci est nécessaire pour préserver l’utilisation du logiciel.

La loi autorise l’utilisateur à faire une seule copie, afin de préserver l’utilisation du logiciel.

Faire une copie pour la mettre sur un autre ordinateur : illégal, contrôle des fournisseurs de logiciel, pouvant savoir le nombre.

– CD : à partir du moment où le consommateur se trouve dans le cadre de son usage privé, il peut copier un CD audio sur son ordinateur, MP3 ou d’autres supports.

Mais cela pose le problème du caractère non limité du nombre de copies.

Problème de la destination de la copie : selon le nombre de copies.

– le DVD : lorsqu’un programme passe à la radio ou à la TV, le consommateur peut copier (rémunération par les fournisseurs de supports vierges), mais le problème se pose sur le nombre de copies, et son usage.

Les copies privées, du fait de l’évolution des technologies, du changement de supports : remis en cause du principe.

Il y avait les associations de consommateurs qui lutter pour élargir le champ des copies privées.

Manque

Copie privée est licite, mais les titulaires de droit menacés par un usage trop large, ont la possibilité de la limiter.

Loi du 1/08/2006 : elle pose comme la directive européenne la nécessaire coexistence du droit exclusif des titulaires leur permettant de contrôler l’usage fait de leurs œuvres et en même temps de la copie privée.

La loi de 2006 permet aux titulaires de droit de procéder à des mesures techniques de protection, c’est-à-dire d’utiliser des moyens informatiques permettant d’empêcher ou de limiter le droit de copie privée.

Mais dans le respect de la possibilité pour l’usager de faire cette copie privée ; L 331-5 CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE.

Conseil Constitutionnel, dans une décision du 27/07/2006 a considéré que dans des cas exceptionnels, les titulaires de droit peuvent interdire complètement la copie.

Cour de cassation ; 28/02/2006 : un film, au cinéma, puis DVD, avec dispositif de protection, avant que la loi intervienne, un consommateur mécontent prétendant copier ce film pour en remettre un support à ses parents a fait un procès aux éditeurs et producteurs du film.

Enjeu : le consommateur a-t-il la possibilité de faire une copie, au moins, ou si les titulaires du droit peuvent apposer des techniques.

Cour de cassation : pas de copie privée d’un DVD préenregistré, manque à gagner, risque de détournement, possibilité de copie illimitée.

On ne peur raisonner sur tous supports, toutes œuvres confondues, dans certains cas, la copie est possible, mais dans d’autres non.

Conseil Constitutionnel : impossibilité de copier une œuvre en VOD (vidéo à la demande).

Il est souhaitable de limiter le nombre de copie et de s’assurer de la destination de ces copies, c’est-à-dire l’usage privé.

La loi de 2006 : permet aux titulaires de droit d’apposer des moyens pour limiter mais ne pose pas une quantité minimum pour limiter.

La loi invite les titulaires de droit à :

– laisser les consommateurs pour pouvoir faire des copies privées.

– les encadrer, les limiter.

Mais le législateur a été méfiant : pour contrôler les producteurs et les auteurs, la loi de 2006 amis en place une AAI : l’autorité de régulation des meures techniques, dont le statut dans le CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE.

Cette autorité a été copiée sur le Conseil de la Concurrence, en effet, elle peut être saisie par tout intéressé qui se plaindrait que des mesures techniques ont été abusivement apposées sur une œuvre et serait contraire à son droit de copie privée.

Elle peut lui ordonner de déverrouiller l’œuvre, pouvoir d’injonction, de répression non privative de liberté.

La loi va même au-delà, il semble l’autoriser à déterminer elle-même le nombre de copie pour tel type d’œuvre, de support.

Décret d’application de la loi dans les prochaines semaines, pour clarifiera sûrement ses pouvoirs.

Le problème qui se pose est que les termes de la loi sont extrêmement techniques, or l’AAI largement formée de fonctionnaires etc.

Et crainte d’une dépossession du juge judiciaire, or ici c’est une AAI qui va dire le droit.

Mais le juge judiciaire ne s’en trouve pas pour autant déposséder, il conserve sa compétence : deux sortes de contentieux parallèles entre les mêmes parties (consommateurs et titulaires de droit).

L’AAI a un autre pouvoir, lié à la copie privée, les consommateurs, mais aussi les fabricants de support se plaignent de ce qu’il n’est pas facile parfois de passer d’un support à un autre.

Interopérabilité : transfert des données d’un support à un autre.

Sujet difficile, a priori les titulaires de droit n’y sont pas favorables, facilitant la copie et les distributeurs voulant capter leur clientèle (Apple).

Légitimité du passage d’un support à un autre non considérée par la loi de 2006 ; L331-6 et -7 : elle a prescrit que les titulaires de droit et les fabricants de matériels peuvent être obligés de communiquer les informations ( ?).

La loi a procédé de la même façon que pour le contrôle de police : compétence de l’AAI, dotée d’un pouvoir d’injonction et d’amende.

Des plateformes (I-Tunes) peuvent se voir contrainte de livrer à des fabricants de MP3 toute information technique leur permettant de faciliter la copie privée sur leur matériel.

→ Rapport de concurrence.

Articulation mesures techniques / copies privées / interopérabilité.

Loi de 2006 innovation au sujet de savoir s’il n’y a pas la possibilité de contrôler l’usage, la destination des copies privées et l’exercice même par le consommateur de cette faculté de faire des copies.

Cour de cassation ; arrêt de 2006 précédent : application d’une technique de contrôle juridictionnelle : test des trois étapes.

Technique d’origine internationale : convention de Berne sur le droit d’auteur et dans la directive de 2001, sur le droit d’auteur dans la société d’information.

Ce test a été transposé dans l’article L132-5 : les exceptions énumérées par le présent article ne peuvent porter atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ni causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l’auteur.

Trois étapes : possibilité pour le juge :

– de vérifier si un texte permet des exceptions et dans quelles conditions.

– de vérifier si ces exceptions portent atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre.

– si elles causent un préjudice injustifié, dommage, aux intérêts légitimes de l’auteur.

Si la réponse est positive, le juge devrait avoir le pouvoir de suspendre l’exception, d’interdire aux consommateurs d’y faire usage.

Arrêt de 2006 : acheteur d’un DVD enregistrer peut le copier pour ses parents

– L122-5 le lui permet

– atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ? non, si copie non distribuée à des tiers, pas d’atteinte à l’exploitation, oui : n’iront pas acheter le DVD.

– préjudice injustifié : manque à gagner auteur, chaînes de TV.

Cour de cassation : il était dans son pouvoir de priver le consommateur de son droit de copier un DVD préenregistré.

Les fausses copies privées :

Le copiste peut reproduire l’œuvre sans utilisation collective, c’est donc pour l’usage personnel et non pas pour un usage collectif.

Tout est question de qualification : « usage personnel » : destination, c’est de copier l’œuvre pour les besoins propres.

Arrêt de 2006 : possible de permettre à un parent de recopier la musique sur un MP3, copie privée est-elle strictement limitée à l’usage de celui qui a acheté le produit ?

Normalement, interprétation stricte des exceptions : copie privée, seulement pour celui qui l’a acheté.

Prof : pas d’accord, limitée à la sphère privée, usage domestique.

Cour de cassation n’a pas dénié directement le fait que la copie privée n’était pas pour lui-même, elle casse sur la théorie des 3 étapes.

Si entre amis, on n’est plus vraiment dans le cercle de la famille, si convivialité : pas légal.

Mesure technique est préventive : si bien faite, l’œuvre ne pourra pas être transférée.

Manque à gagner est absolument incontestable.

La liaison du droit et de l’économie fait qu’il n’était pas possible d’autoriser cet usage illimité.

Conditions, impact économique et la façon dont les meures techniques vont s’implanter dans notre vie quotidienne : encadrement des transferts de données entre deux appareils appartenant à une même personne et entre plusieurs personnes.

Ministre de la Culture : amende de 38€ pour téléchargement illégal.

Conseil Constitutionnel : inconstitutionnel, rupture d’égalité devant la loi, l’échange illicite est un délit de contrefaçon ordinaire (3 ans de prison et 300 000€ amende).

Prof : contrefaçon, infraction pénale et appliquer des mesures aussi sévères que le délit apparaît disproportionné.

Tout est entre les mains des titulaires de droit, des fabricants de support et de l’autorité de régulation.

Les mesures techniques vont limiter sans supprimer la copie et prévenir les échanges de fichiers sur internet.

Sous-section II : La citation :

L122-5 autorise « sous réserve que soit indiquer clairement le nom de l’auteur et la source les analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, pédagogique, scientifique ou d’information de l’œuvre à laquelle elles sont incorporées ».

Une personne peut publiquement citer l’œuvre d’une autre personne sans avoir à lui demander une autorisation et à la payer.

—> Droit d’utiliser publiquement et de façon raisonnable les extraits d’un œuvre protégée.

Il faut distinguer selon les types d’œuvre, les rédacteurs de ce texte avaient en vue principalement les œuvres littéraires.

  • 1°)- Les œuvres littéraires :

Autorisation de la courte citation dans un but et une cause d’information.

Ex : 10 lignes, citation pour polémiquer. Journaliste rend compte d’un livre qui paraît et l’illustre par quelques lignes etc.

≠ de la compilation : s’approprier le travail d’autrui.

Les deux conditions de L122-5 : courte citation et but désintéressé.

C’est au cas par cas, que le juge déterminera que la personne qui a cité une œuvre a outrepassé son droit, pas de limite quantitative.

Peu de jurisprudence, les condamnations sont prononcées sur le fondement de l’abus du droit de citation.

Ex : une biographie sur Sartre, l’auteur va utiliser les œuvres de Sartre, cela va dépendre du nombre de citations, de la quantité, et du volume total de l’œuvre.

La quantité limitée n’est pas la seule condition, il faut que se soit dans un but désintéressé, d’information ou de critique, mais s’il s’agit d’un but commercial, pour mieux vendre son propre produit, la citation sera condamnée.

Pour internet : très peu de jurisprudence.

Si quantité très forte de site internet, et quantité astronomique de citations diverses : droit de citation peut-il aussi s’appliquer sur internet ? Oui, peu importe le support, mais il ne faut pas que se soit une simple compilation.

Au sujet des bases de données : Cour de cassation pour les revues de presse, possible de prendre des parties d’articles, compilation de plusieurs journaux : constitue des citations, pas de condamnation, or pour prof : contrefaçon, commercial.

  • 2°)- Les œuvres musicales :

Citation musicale, on prend quelques notes, secondes : courte citation.

Mais le but doit être désintéressé.

Il y a de nombreuses fausses citations, récupère une mélodie pour l’intégrer dans leur propre musique : sampling, besoin de l’autorisation de l’auteur.

Plate forme musicale I tunes : peut télécharger quelques secondes, caractère licite ? (juste prof), besoin de l’autorisation de la SACEM, véritable citation, mais dans l’intérêt de l’auteur.

  • 3°)- Les citations artistiques :

Citation d’un tableau ou d’une sculpture.

Exposition, Tv filme l’ouverture et donc filme les tableaux, photo sur internet, livre.

Cour de cassation a admis en 1926, mais depuis 20 ans la doctrine et la jurisprudence l’a refusé : procédé d’interprétation de la loi, CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE 122-5 : les courtes citations, si on voit un tableau, on voit l’ensemble du tableau. Cour de cassation interprétation littérale, n’admet pas citation.

Prof : pas d’accord, élément matériel peut être la brièveté de l’extrait, ex JT de 20h, intérieur de la salle du musée : quelques secondes, brièveté dans le temps.

La loi du 1/08/2006 a brisé la jurisprudence de la CCass, CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE L122-5-9° : « l’auteur ne peut intervenir (…) la représentation intégrale ou partielle d’une œuvre d’article dans un but exclusif d’information immédiate, par voie de presse, écrite, audiovisuelle ou en ligne ».

Si perspective d’information, un organe de presse peut reproduire l’œuvre, l’auteur ne peut l’interdire.

  • 4°)- La citation audiovisuelle et en ligne:

Reprise d’émissions passées par une chaîne, reprise par une autre.

Ex : césars, émission en elle-même œuvre, canal + a les droits, mais rediffusion au 20h, pas d’autorisation, contrefaçon ou droit de citation ?

Les juges leur reconnaissent un droit de citation, aussi admis par le droit européen : directive européenne.

NB : pour toutes ces citations on applique le test des trois étapes.

Sous section III : le cercle de famille :

CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE ; L122-5-1° : « l’auteur ne peut interdire les représentations privées et gratuites, effectuées exclusivement dans un cercle de famille ».

« Cercle de famille » : interprétation littérale, parents enfants et cousins, pas amis.

Prof : interprétation raisonnable, intimes, la convivialité, cercle restreint, qui ne s’identifie pas à la famille, amis : celui qui diffuse l’œuvre a invité nommément, individuellement certaines personnes.

Nature, qualité du rapport à prendre en considération.

Sous section IV : La parodie :

CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE ; L122-5-4° : « l’auteur ne peut interdire (…) la parodie, le pastiche ou la caricature, compte tenu des lois du genre »

—> parodie: procédé humoristique tendant à faire rire le public en s’emparant d’une œuvre et en la parodiant.

L’auteur qui parodie emprunte à l’ouvre préexistante, en théorie besoin autorisation, mais droit français admet très largement la liberté d’expression, illustrée par le droit d’auteur.

L’auteur peut seulement agir si abus du droit, droit moral ou atteinte à l’honneur.

Cour de cassation ; 2002 : guignol, refuse de condamner.