LES INVENTIONS DE SALARIÉS
On estime qu’environ 90% des inventions sont réalisées par des salariés, se pose alors le problème de savoir à qui revient cette invention.
Pendant longtemps il n’y avait aucune réglementation, les règles résultant soit des contrats de travail, ou conventions collectives, ou encore de la jurisprudence qui distinguait entre l’invention de « service « réalisée par le salarié en exécution de son contrat de travail et propriété de l’employeur, l’invention « libre » créée par le salarié sans aucune relation avec son employeur, et donc propriété du salarié, et l’invention « mixte » faite par l’employé mais avec le concours matériel ou intellectuel de l’employeur, dans ce cas le propriété revenait aux 2.
Mais depuis la loi du 3 juillet 1978 les inventions de salariés relèvent de l’art. L611-7 du CPI / règles d’attribution et L615-21/ CNI.
- Cours de droit de la propriété intellectuelle
- Cours de droit de la propriété industrielle
- Les indications géographiques (IGP, AOP; STG)
- L’appellation d’origine contrôlée (AOC)
- Le nom de domaine : définition, condition de sa protection
- Protection du nom commercial, enseigne et dénomination sociale
- La reproduction de marque et l’apposition de la marque
I. Le régime des inventions de salariés.
Caractère supplétif : Le régime légal mis en place par la loi de 1978 ne s’applique qu’à défaut de stipulation contractuelle plus favorables au salarié.
A. Le champ d’application temporel
La loi est entrée en vigueur le 1/07/79 et pour savoir si une invention est soumise à cette loi il faut selon la doctrine, tenir compte de la date de conception de l’invention, alors que la jurisprudence est elle plus divisée.
B. Le champ d’application dans le temps
A quoi Le régime issu de la loi de 78 s’applique t-il ? Selon la doctrine il faut rechercher quelle est la loi applicable à la relation de travail, et donc si celle-ci est soumise au droit français L611-7 s’appliquera aussi bien aux brevets français qu’aux brevets étrangers parallèles tout comme aux demandes de brevets portant sur des inventions réalisés par des salariés français ou étrangers dont le contrat de travail est soumis au droit français.
La loi applicable au contrat de travail est en pcp la loi d’autonomie, mais l’art.6 Convention de Rome de 1980 désigne la loi du lieu d’accomplissement habituel du travail même pendant un détachement temporaire, et l’art.60 de la CBE désigne le droit de l’état sur le territoire duquel s’exerce l’activité principale.
C. Le champ d’application quant aux personnes
L611-7 ne s’applique qu’aux inventions réalisées par des salariés, sont donc exclus :
· Les dirigeants sociaux mais pas les mandataires sociaux qui cumulent leur mandat avec un contrat de travail
· Les stagiaires sauf s’ils sont liés à l’entreprise par un véritable contrat de travail à l’essai
· Les consultants liés par un contrat d’entreprise
L611-7 §5 prévoit que les dispositions sont applicables aux agents de l’Etat, des collectivités publiques, des établissements publics, à toutes personne morales de droit public, aux chercheurs universitaires dont le statut comporte une mission inventive.
D. Le champ d’application quant aux inventions
L611-7 ne s’applique qu’aux inventions brevetables ayant ou non fait l’objet d’un dépôt
II. Typologie des inventions de salariés
A. les inventions de missions
1. principes
· Il s’agit des inventions réalisées par un salarié en exécution de son contrat de travail, elles ne peuvent être brevetées qu’au nom de l’employeur–L611-7 §1 al1 – supposent que soit fournie la preuve de la mission confiée au salarié, mission qui peut occasionnelle ou permanente. L’emploi du salarié doit soit avoir pour objet des travaux de recherche (la mission doit être effective, ne pas relever de la fiction) soit l’invention est réalisée par le salarié en exécution d’une mission occasionnelle mais tjs explicite.
· La qualification de l’invention oblige à tenir compte des conditions dans lesquelles elle a été conçue et non point de celles de son achèvement.
· L’employeur a seul le choix du mode de protection de l’invention cad par le brevet ou le secret. S’il opte pour le brevet celui-ci sera à son nom, l’inventeur salarié sera mentionné come tel dans le brevet.
2 . principe de rémunération et son montant
· Depuis la loi du 26/11/1990 le pcp d’une rémunération supplémentaire versée au salarié est obligatoire cf. le terme « bénéficie ». Pour la doctrine, dont Azéma, cette obligation concerne les inventions réalisées par des salariés avant l’entrée en vigueur de la loi, soit le 29/11/90, même si elles ont déjà été brevetées ou fait l’objet d’un dépôt avant cette date.
A priori une renonciation au bénéfice de cette rémunération est possible si elle n’est pas équivoque.
· S’agissant du montant de la rémunération supplémentaire : source d’un important contentieux. Il est normalement fixé par les parties, partenaires sociaux, à défaut la Commission Nationale des inventions de salariés ou le tribunal compétent. Mais en général les conventions collectives/contrats de travail sont lacunaires sur ce point. Question de savoir ce qu’il faut prendre comme base de référence ? La CNIS écarte la valeur commerciale de l’invention comme référence, et garde le salaire comme point de mire, allouant des rémunérations supplémentaire égale à 3 ou 4 fois le salaire mensuel de l’inventeur, alors que les conventions collectives, en général, proposent toute une série de paramètres ex : importance de la participation du salarié, exploitation de ’invention, difficultés de mise au point pratique. Com. 21 novembre 2000, elle, a considéré qu’il ne fallait ni tenir exclusivement du salaire, ni exclusivement de la valeur commerciale de l’invention à moins d’un texte conventionnel/réglementaire express dans ce sens.
· Il appartient au salarié de démontrer que la rémunération qui lui a été proposé est le cas échéant insuffisante et d’apporter la preuve des paramètres sur lesquels il fonde ses prétentions financières.
3. le versement de la rémunération
2 problèmes : les modalités de versement et la prescription de la rémunération supplémentaire.
· Les modalités de versement relèvent des conventions collectives/accords professionnels/ contrat de travail, à défaut librement fixé par l’employeur. Dans la pratique le versement est forfaitaire, et il faut veiller à ce que chaque invention se trouve énumérée.
· Lorsque le calcul de la rémunération supplémentaire s’appuie sur l’exploitation de l’invention, et ses résultats, quand la convention collective le prévoit ou quand le tribunal retient ce paramètre, la prescription ne peut courir qu’à compter de la mise en connaissance du salarié de ces éléments par l’employeur.
B. les inventions hors missions –L611-7 §2 al 2 –
1. les inventions hors missions attribuables
Recoupe 3 hypothèses :
· L’invention se trouve réalisée au cours de l’exécution des fonctions, le salarié n’était investi d’aucune mission inventive, mais chargé d’une autre fonction dans l’entreprise.
· L’invention entre dans le domaine des activités de l’entreprise (activées réellement exercées). Il s’agit des inventions réalisées par des salariés d’une société appartenant à un groupe mais entrant dans le domaine d’activité d’une autre société du même groupe.
· Inventions faite par la connaissance ou l’utilisation de technique sou moyens spécifiques à l’entreprise ou de données procurées par elle.
Ces inventions appartiennent au salarié mais l’employeur a le droit de se faire attribuer la propriété ou la jouissance de toute ou partie des droits attachés au brevet, le salarié doit alors obtenir un juste prix ; qui sera évalué au jour de l’exercice du droit d’attribution, en fonction des apports initiaux du salarié et de l’employeur, de l’utilité industrielle et commerciale de l’invention. Cette somme perçue par le salarié n’est pas considérée comme un salaire mais est imposable au titre des bénéfices non commerciaux.
L’employeur se voit alors reconnaitre le bénéfice d’une option : il peut sa faire attribuer la jouissance de l’invention (cad concession/licence) ou la propriété de l’invention.
2. les inventions hors missions non attribuables
Elles rassemblent toutes les autres inventions brevetables, le salarié, bien qu’étant obligé de les déclarer, dispose à leur égard d’une liberté totale : il peut les conserver secrètes, les publier, les protéger par brevet tant en France qu’à l’étranger. Il appartient à l’employeur de prouver, s’il veut revendiquer un droit sur ces inventions qu’elles relèvent d’une autre catégorie que celle des inventions hors missions non attribuables.
Le Cours complet de droit de la propriété industrielle est divisé en plusieurs fiches :
- Cours complet de droit de la propriété industrielle
- Le secret de fabrique – Les indications géographiques (IGP, AOP, STG) – Appellation d’origine contrôlée – Les créations ornementales, dessins et modèles – Les logiciels : la protection par le droit d’auteur – Les obtentions végétales – Les produits semi-conducteurs – La protection du nom de domaine – La protection juridique du savoir faire
- La protection du nom commercial, de l’enseigne et de la dénomination sociale
- La contrefaçon de marque – Les marques : définition et typologie – Les marques : limite des droits conférés par la marque – Les marques : le monopole d’exploitation attaché à la marque – Les marques : la déchéance de la marque – Les marques : procédure d’acquisition de la marque – Les marques : le principe de spécialité – Les marques : la disponibilité du signe – Les marques : distinctivité du signe – Les marques : licéité du signe
- Condition de fond du brevet : l’existence d’une activité inventive – Condition de fond du brevet : le caractère de l’invention – La procédure de délivrance du brevet – Les inventions de salariés – Le monopole du salarié sur son invention – L’exploitation du brevet: cession, concession de licence, nantissement – Droit des brevets et droit de la concurrence : entente et position dominante – Le brevet : l’action en contrefaçon du brevet – L’action en nullité du brevet
III. La procédure applicable
A. les règles de procédure
Procédure fixée par le décret du 4 septembre 1979. Quelque soit la catégorie d’invention en cause, l’inventeur salarié doit en faire immédiatement la déclaration à l’employeur, qui doit contenir des informations nécessaires pour permettre à l’employeur d’effectuer le classement de l’invention dans l’une des 3 catégories prévue par la loi. Le défaut de déclaration est une faute professionnelle. Lorsque le classement implique l’ouverture au profit de l’employeur du droit d’attribution, la déclaration est accompagnée d’une description de l’invention. La déclaration peut aussi résulter d’une transmission par l’INIPI à l’employeur du 2e exemplaire d’un pli adressé par le salarié à l’INPI pour y être conservé : l’enveloppe Soleau, dont l’autre exemplaire est adressé à l’employeur. Dans un délai de 2 mois l’employeur doit ou bien marquer son accord ou bien son désaccord quant au classement choisi. S’il ne prend pas parti il est présumé avoir accepté le classement résultant de la déclaration du salarié.
Enfin l’employeur dispose d’un délai d e 4 mois pour exercer son droit d’attribution.
B. Le contentieux
L615-21 : si l’une des partie le demande, toute contestation (…) sera soumise à la Commission nationale des inventions de salariées la CNIS, elle se compose de 3 membres : un présidant, un magistrat de l’ordre judiciaire dont la voix est prépondérante, et de 2 assesseurs l’un choisi parmi les personnes proposées par les organisations de salariés et l’autre parmi les personnes proposées par les organisations d’employeurs.
La CNIS est saisie par une demande devant comporter un certains nombres de mentions et autres éléments utiles à la solution du litige. Le secrétariat de la CNIS invite l’autre partie à faire dans le délai imparti par le président, ses observations écrites sur le mérite de la demande, puis notifie aux parties la composition de la CNIS et les convoque pour une réunion préliminaire de conciliation.
La procédure devant la CNIS est contradictoire et son président peut procéder à des mesures d’instructions. Une proposition de conciliation est établie même lorsqu’une partie ne comparait pas et vaut accord si dans le mois de sa notification l’une des partie n’ pas saisi le TGI compétent, si bien que l’accord deviendra exécutoire par décision du président du TGI dans le ressort duquel la proposition de conciliation a été formulée.
Si les parties ne sont pas d’accord sur le contenu de la proposition de conciliation, celle-ci est portée à la connaissance du tribunal, mais les parties s’interdisent de faire état des propositions/concessions faite par l’autre partie devant la commission. Le TGI doit surseoir à statuer si la CNIS est saisie.