LES MAGISTRATS DU SIÈGE
Les magistrats du siège désignent les juges qui siègent dans les tribunaux et les cours pour rendre des décisions de justice en appliquant le droit. Ils sont appelés ainsi parce qu’ils exercent leur fonction en étant « assis » pendant les audiences, par opposition aux magistrats du parquet, qui sont les représentants du ministère public.
En résumé, Les magistrats du siège, juges professionnels ou non, rendent des décisions de justice en toute impartialité. Leur rôle est distinct de celui des magistrats du parquet, qui représentent l’État. Ils sont recrutés par concours et formés pour garantir leur indépendance. Leur carrière est encadrée par des organes tels que le Conseil Supérieur de la Magistrature. Certains juges non professionnels apportent leur expertise dans des juridictions spécifiques, comme le Conseil de prud’hommes et les tribunaux de commerce.
I) La distinction magistrat du siège et magistrat du parquet
Tous les juges sont des magistrats, mais tous les magistrats ne sont pas juges. Cette distinction se retrouve notamment entre les magistrats du siège et les magistrats du parquet.
- Les magistrats du siège sont des juges qui tranchent les litiges. Leur rôle est d’examiner les faits, d’appliquer le droit et de rendre des décisions de justice en toute impartialité. Ils sont indépendants et ne reçoivent aucune instruction dans leur fonction.
- En revanche, les magistrats du parquet (ou du ministère public) sont des représentants de l’État. Leur mission principale est de veiller au respect de l’ordre public et de représenter l’intérêt général dans les affaires portées devant la justice
Parmi les magistrats du siège, on trouve des juges professionnels (formés à l’École Nationale de la Magistrature) et des juges non professionnels, comme ceux siégeant dans certaines juridictions spécialisées (ex. : conseil des prud’hommes, tribunal de commerce). Ces derniers exercent la fonction de juge à temps partiel, en parallèle de leur activité professionnelle, et apportent leur expertise spécifique dans certains domaines.
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II) Les juges professionnels
Les juges peuvent être généralistes, c’est-à-dire compétents pour juger aussi bien des affaires civiles que pénales, ou bien spécialisés, compétents uniquement dans certains domaines spécifiques. Ces juges spécialisés sont affectés à des juridictions particulières selon le domaine de droit concerné, par exemple en matière commerciale ou sociale.
A) Les juges professionnels de l’ordre judiciaire
En France, les juges de l’ordre judiciaire sont formés et recrutés selon des procédures strictement encadrées pour garantir leur compétence et leur indépendance.
Dans l’histoire, plusieurs systèmes ont été proposés pour la nomination des juges, mais ils ont été jugés inadéquats pour l’impartialité nécessaire à la fonction de juger :
- Achat de charge : Autrefois, la charge de juge pouvait être achetée, mais ce système est abandonné, car il compromettait l’impartialité et créait une justice liée à des intérêts privés.
- Élection des juges : Aux États-Unis, certains juges sont élus par le peuple, mais cela soulève des questions sur l’indépendance des juges, qui peuvent être influencés par l’opinion publique.
- Cooptation : Un système où les juges choisiraient eux-mêmes leurs collègues créerait un cercle fermé et risquerait de nuire à la diversité et à la représentativité des juges.
- Nomination par l’exécutif : La nomination par le gouvernement existe en France, mais elle est strictement encadrée pour assurer l’indépendance du juge face à l’État.
Le recrutement des juges en France se fait par concours, garantissant l’égalité des chances et la compétence des candidats. Ce concours ouvre les portes de l’École Nationale de la Magistrature (ENM), où les lauréats suivent une formation. À la fin de cette formation, les magistrats sont nommés auditeurs de justice, puis juges après avoir satisfait aux exigences professionnelles. La nomination des juges est validée par le gouvernement, mais les garanties de leur indépendance sont nombreuses.
L’indépendance des juges est protégée tout au long de leur carrière. Les décisions concernant leur avancement sont prises en collaboration avec le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM), un organe indépendant qui examine les propositions de promotion, mutation ou sanction. Les magistrats du siège, c’est-à-dire ceux qui jugent les affaires, sont inamovibles et ne peuvent être mutés sans leur consentement. De plus, la discipline judiciaire est également du ressort du CSM, ce qui renforce encore l’autonomie des juges dans l’exercice de leurs fonctions.
B) Les juges professionnels de l’ordre administratif
Les juges administratifs, compétents pour juger les litiges entre les citoyens et l’administration, suivent un parcours de recrutement différent. Les magistrats du Conseil d’État et des juridictions administratives sont souvent formés à l’École Nationale d’Administration (ENA), mais un accès par concours externe est également possible pour certaines juridictions, comme les tribunaux administratifs.
Pour juger l’action de l’administration, une compréhension approfondie du fonctionnement de celle-ci est indispensable. Ainsi, ces juges doivent avoir une expertise dans les domaines de l’intérêt général et des politiques publiques.
L’indépendance des juges administratifs est également protégée. Les décisions concernant leur nomination et leur carrière sont encadrées par le Conseil Supérieur des Tribunaux Administratifs et des Cours Administratives d’Appel (CSTA). Bien que le Conseil d’État n’ait pas d’organe spécifique pour gérer la carrière de ses membres, l’avancement y est principalement basé sur l’ancienneté.
Dans les juridictions administratives, un rapporteur public joue un rôle important. Il est chargé de donner un avis impartial sur le litige devant la juridiction, afin d’éclairer le juge. Contrairement à certaines idées reçues, le rapporteur public n’est pas un représentant du gouvernement ; il rend un avis indépendant, exclusivement basé sur son analyse juridique du dossier.
III) Les juges non professionnels
Certains citoyens exercent des fonctions de juges tout en poursuivant leur activité professionnelle principale. Leur rôle est d’apporter leur expérience pratique dans des domaines spécifiques, comme le droit du travail ou le commerce. Ces juges non professionnels ne sont pas nécessairement des juristes de formation, mais reçoivent une courte formation juridique pour assurer leur mission.
Conseillers prud’homaux et juges des tribunaux de commerce
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Les conseillers prud’homaux : Ils siègent au Conseil de prud’hommes, où ils sont élus parmi les employeurs et les salariés. Leur mission est de trancher les conflits individuels entre employeurs et salariés, en s’appuyant sur leur propre expérience du monde du travail. Bien qu’ils ne soient pas des professionnels du droit, leur connaissance pratique est considérée comme un atout pour comprendre les enjeux des affaires qui leur sont soumises.
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Les juges des tribunaux de commerce : Ces juges, également non professionnels, sont des commerçants ou entrepreneurs élus par leurs pairs. Ils sont compétents pour juger des litiges commerciaux ou des procédures de redressement judiciaire. Le recours à des juges issus du milieu économique est justifié par leur connaissance des pratiques commerciales et des réalités économiques.
Ces juges non professionnels sont aussi choisis pour leur coût moindre, car leur engagement est limité dans le temps et ils ne perçoivent pas le même salaire qu’un juge professionnel.
Les juges de proximité (supprimés en 2017)
Les juges de proximité n’existent plus depuis 2017. Ils avaient été créés pour traiter les petits litiges civils et pénaux, mais cette fonction a été intégrée aux tribunaux d’instance, puis aux tribunaux judiciaires après la réforme judiciaire de 2020. Désormais, ce sont les juges professionnels des tribunaux judiciaires qui se chargent de ces affaires.
Les jurés d’assises
Dans les cours d’assises, des citoyens sont appelés à siéger comme jurés pour participer aux décisions portant sur des crimes (comme les meurtres ou les viols). Chaque citoyen inscrit sur les listes électorales peut être sélectionné pour cette tâche. Contrairement aux idées reçues, les jurés ne sont pas toujours plus sévères que les juges professionnels. En réalité, les décisions rendues par les cours d’assises avec des jurés populaires peuvent parfois être plus indulgentes que celles des tribunaux correctionnels, où seuls des juges professionnels interviennent. Les tribunaux correctionnels appliquent souvent le droit pénal de manière plus stricte, tandis que les cours d’assises, où les jurés sont sensibilisés aux faits graves, peuvent se montrer plus sensibles aux circonstances atténuantes.