Les modalités de l’indemnisation et de la réparation du préjudice

LES EFFETS DE LA RESPONSABILITÉ : RÉPARATION, INDEMNISATION DU PRÉJUDICE 

La réparation est l’aboutissement de la justice faite à la victime. Elle doit la replacer dans la situation antérieure dans laquelle elle se trouvait avant que le dommage ait été réalisé. L’indemnisation peut être directement réalisée par l’auteur du dommage qui en porte la responsabilité. Cette réparation est alors exécutée soit en nature, soit par équivalent. Quoi qu’il en soit son objectif est de remettre la victime dans la situation dans laquelle elle se trouvait avant qu’elle ne soit lésée.

  • I – L’ÉTENDUE DE LA RÉPARATION                          § 1. Définition de la réparation      § 2. Moment de la réparation
  • II – MODES D’ÉVALUATION ET DE RÉPARATION    § 1. Les préjudices extrapatrimoniaux      §  2. Les préjudices d’ordre économique
  • III – CONCOURS D’INDEMNITÉS                                 §1. La règle de non-cumul    §  2. Règles sommaires sur les recours  
  • IV – RECOURS ENTRE COOBLIGÉS                        §1. Le droit commun       § 2. La loi du 5 juillet 1985
  • V. GARANTIES ET ASSURANCES

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I – L’ÉTENDUE DE LA RÉPARATION

 § 1. Définition de la réparation

 Toute victime a droit d’obtenir réparation par l’auteur du dommage qu’elle subi. La réparation est une peine, frappant l’auteur de l’infraction. Dédommagement d’un préjudice par la personne qui en est responsable, soit par le rétablissement de la situation antérieur soit par l’allocation d’une somme d’argent. La réparation couvre les dommages matériels et moraux.

 

A. Principe de la réparation intégrale

Intégrale ⇒ replacer la victime dans l’état ou elle se serait trouvé en l’absence de dommage.

 

Il existe un principe d’équivalence entre le dommage et la réparation. Le responsable doit réparer tout le dommage et rien que le dommage. L’indemnisation doit permettre la réparation du préjudice économique, personnel et patrimonial. Les Dommages Intérêts doivent réparer le préjudice subi sans qu’il en résulte pour elle ni perte ni profit.

1) Contenu de la réparation intégrale

 La réparation s’étend à tous les chefs de préjudice.

 

Délimiter les contours de ces dommages relève de la problématique de la causalité (entre le dommage et le préjudice) et la définition du dommage réparable.

 

Exceptions au principe de réparation intégrale : en matière contractuelle, ne sont réparable que les dommages prévisible. Les parties peuvent aussi limiter leur responsabilité par un commun accord.

 

La limitation de l’indemnisation de la victime lorsqu’elle a contribué à son propre dommage s’explique par l’idée de contribution à la dette de réparation de son propre dommage : étant donné que la victime a en partie causé le dommage, elle est considérée comme co-auteur du dommage, qu’elle doit réparer proportionnellement à sa faute.

2) Conception objective de la réparation intégrale

Pour évaluer le dommage ⇒ le juge prend en compte son intensité. Ne sont donc pas pris ne considération:

  la nature du fait dommageable (responsabilité pour faute/ de plein droit)

  la gravité de la faute (intentionnel, négligence).

 Le principe de réparation intégrale ⇒ objectif dans la mesure où il consiste en un critère stable et unique d’évaluation de l’étendue du dommage ⇒ meilleure égalité dans l’indemnisation des victimes.

 

3) La mise en œuvre de la réparation intégrale

 Cour de Cassation : refus de contrôle sur les méthodes et bases d’évaluation. Comment la réparation peut être intégrale en l’absence de base d’évaluation (préjudice morale) ? La réparation qui vise à remettre la victime dans l’état dans lequel elle se serait trouvée en l’absence du fait dommageable peut n’avoir aucun sens. L’auteur d’un accident doit en réparer toutes les conséquences dommageables, mais l’état antérieur de la victime doit être pris en compte et peut majorer le dommage réparable.

 

4) Réparation intégrale, gravité de la faute et facultés contributives

 Ce principe ne laisse aucune place à la prise en compte de l’appréciation de la gravité de la faute et des facultés contributives de l’auteur du dommage, ⇒ solutions peu satisfaisantes du point de vue de l’équité.

 

Faute légère ⇒ lourde dette de responsabilité pour son auteur si elle cause un dommage important. Faute intentionnelle ⇒ faible dette de réparation proportionnellement aux facultés contributives de son auteur, si le préjudice qui s’ensuit est minime, ou si le préjudice permet à l’auteur de réaliser un gain parallèle plus important : c’est le problème de la faute lucrative. Faute lucrative : faute dont les avantages retirés par celui qui l’a commise dépassent les réparations imposés par les tribunaux. Le responsable du dommage a donc intérêt à violer le droit.

 

Cela met en exergue le caractère indemnitaire de la responsabilité civile, à l’exclusion de fonctions punitives, dissuasives et préventives.

 

5) Analyse économique du droit

 Dans cette perspective, la réparation a pour but la prévention des dommages.

 

Dans un régime de responsabilité pour faute, le principe de réparation intégrale a peu d’incidence vis-à-vis de l’auteur qui suivra les précautions exigées par les juges, alors que dans un régime de responsabilité sans faute (où aucun critère de comportement n’est donné à l’auteur), le respect de ce principe est essentiel, car l’auteur doit pouvoir évaluer les coûts de prévention optimaux compte tenu du dommage causé, afin de prévenir sa future responsabilité.

 

6) Mode de réparation

>Réparation en nature: remettre matériellement les choses en l’état ou elle se trouvait avant le dommage.

 

Il existe des procédés divers de rétablissement de la situation antérieure au dommage, assure une « réparation adéquate » mais pas forcément intégrale. Ce remplacement peu créer une plus-value donc un enrichissement pour la victime. Selon certains, elle doit être préféré car elle remplit mieux l’objectif de la responsabilité civile, qui est de replacer la victime dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée en l’absence de la survenance du fait dommageable.

 

La réparation en nature met en œuvre implicitement la notion économique de valeur d’usage du bien, puisque l’idée est de permettre à la victime d’user de son bien de la manière au moins aussi effective qu’avant la survenance du dommage

 

> Réparation par équivalent : octroie à la victime une somme d’argent censée réparer exactement le préjudice subi. En vertu de la fongibilité de l’argent, ce type de réparation semble le mieux à même de respecter le principe de la réparation intégrale du dommage.

 

La réparation par équivalent s’attache plutôt à réaliser la notion de valeur d’échange, c’est-à-dire la valeur de marché, puisque le juge estime la perte de la victime à sa valeur comptable nette.

 

7) Avant projet de réforme

 Affirmation du principe de réparation intégrale. Renforcement de l’obligation faite aux juges de motiver spécialement sa décision, en cas de rejet d’une demande relative à un chef de préjudice. Egalité entre réparation en nature ou par équivalent. Si la réparation en nature est privilégiée par le juge, c’est qu’elle doit «être spécifiquement apte à supprimer, réduire ou compenser le dommage ». Dommage relatifs aux biens, le principe de la réparation intégrale (en nature) est mis de coté au profit de la réparation adéquate (équivalent).

 

Victime privé de réparation lorsqu’elle a cherché volontairement le dommage. En cas d’atteinte a l’intégrité corporelle, seule une faute grave peu entrainer une exonération partielle.

 

Le juge peut limiter l’étendue du préjudice en cas de négligence de la part de la victime si elle avait la possibilité de réduire l’étendue de son préjudice. Validité des conventions limitatives de responsabilité en matière extracontractuelle si elles ont été acceptées de manière non équivoque par la victime.

 

En matière contractuelle, ses clauses peuvent être illégales : (ex – impossible de limiter la responsabilité d’un dommage corporel).

 

B. Une réparation indemnitaire

Indemnitaire ⇒ ne doit couvrir que le préjudice enduré. Sur ce fondement:

  La victime ne peut cumuler les indemnisations

  L’indemnité ne saurait avoir un caractère punitif.

  On ne peut retenir une valeur à neuf d’un bien ⇒ valeur vénal appliquant un coefficient de vétusté.

 

C. Réparation in concreto

 L’appréciation du préjudice doit se faire in concreto et non pas généralement.

 

§ 2. Moment de la réparation

 La détermination de la date de naissance à laquelle nait le droit à réparation ⇒ date à partir duquel le responsable est tenu de réparer ⇒ a d’importantes conséquences pratiques. Le responsable n’est tenu qu’à compter de la naissance du droit à réparation. A partir de ce jour la sont dus les intérêts sur les indemnités, date d’ouverture de la procédure collective. 2 thèses s’affrontent :

  Le droit à réparation existe dès que le dommage est réalisé : le jugement est déclaratif de droit.

  Ce droit nait qu’à compter de la décision du juge : le jugement est constitutif de droit. La jurisprudence a retenu cette dernière analyse.

    Le droit à réparation existe en son principe dès la réalisation du dommage mais se trouve consolidé qu’à compter du jugement.

 ⇒ Conséquences : les conditions de responsabilité vérifiées à la date du dommage, la prescription court à cette date, modification postérieures dans la situation de la victime sont sans influence.

 

La règle selon laquelle le droit à réparation nait en même temps que la réalisation du dommage connait une exception : art. 1146 du CC : le DI ne sont dus qu’à compter de la mise en demeure adressée au débiteur.

 

II – MODES D’ÉVALUATION ET DE RÉPARATION

 § 1. Les préjudices extrapatrimoniaux

 

A. Le préjudice corporel

Préjudice non économique liée à la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel. Objectif ⇒ traduire les constatations médicales en une appréciation monétaire et juridique en vue de l’indemnisation par équivalent du préjudice subi par la victime.

 

Le calcul de l’indemnisation est le calcul au point : consiste à établir la valeur général d’un point d’incapacité et de l’appliquer ensuite au taux d’incapacité constaté par l’expert. L’évaluation médico-légale de ce déficit se fait en pourcentage d’incapacité.

 Critiques de cette méthode : aucune prise en compte des spécificités professionnelles. Le juge use de son pouvoir souverain pour estimer la portée des préjudices encourus.

 

B. Les incapacités personnelles permanentes

Préjudice définitifs.

  Préjudice d’agrément : impossibilité de pratiquer un sport / loisir, atteinte a la vie sociale. C’est la diminution de plaisirs de la vie, causée notamment par l’impossibilité ou la difficulté de se livrer à des activités.

 

  Préjudice sexuel : ce préjudice recouvre trois aspects : l’aspect morphologique lié aux atteintes aux organes sexuel, le préjudice lié a l’acte sexuel, et la fertilité.

  Préjudice esthétique : échelle de 1 à 7. Traduit financièrement les séquelles que le fait va laisser sur le corps comme une marque indélébile. Apprécié en fonction de l’importance et de la place de cette marque.

 

§ 2. Les préjudices d’ordre économique

A. Damnum emergens et lucrum cessans

Art. 1149 établit cette distinction entre :

  Perte éprouvée : damnum emergens ⇒ préjudice subi. Dépenses engagées suite à la survenance du dommage. (Ex- destruction d’un meuble). Préjudice résulte de la valeur vénale du bien. Le bien détruit ou dégradé peut être une valeur incorporelle entrainant un préjudice économique : produit contrefait une grande marque ⇒ atteinte a la propriété industriel. Difficulté d’évaluation pécuniaire du préjudice.

Contient aussi les dépenses liées à la défense des intérêts de la victime (frais d’avocat).

  Gain manqué : lucrum cessans. Distinction entre:

 

>  La victime qui travaille : couvrir les pertes de revenus éprouvées durant la période d’indisponibilité et celles liées a l’existence d’une incapacité professionnelle permanente.

>  La victime qui ne travaille pas : couts liés à l’impossibilité d’entretenir le foyer et élever les enfants + la perte de chance de travailler après.

Pertes d’exploitation d’une entreprise ⇒ hypothétique ⇒ préjudice immatériel.

 

B. La perte d’une chance

 C’est la question de la réparation par le droit de la responsabilité de l’incertain. Pour être indemnisable le juge doit analyser la chance invoquée et sa perte. La chance doit revêtir un caractère certain alors que par définition une chance n’est jamais certaine. Exigence de la preuve de la probabilité du chiffre d’affaires qu’aurait pu réaliser l’entreprise en l’absence de dommage.

 La chance doit être directe : exigence d’un lien de causalité entre le fait générateur et le dommage.

 

C. Le préjudice écologique

 Le droit français n’envisage pas le dommage causé à l’ensemble des citoyens. Les dommages environnementaux sont pris en compte que s’ils portent préjudice à des intérêts individuels.

 

⇒ Est ce qu’une atteinte à l’intérêt général (le sort de notre planète) pourrait être le fondement d’une action en réparation ?

 

Prise en compte de l’atteinte à l’environnement ⇒ préjudice écologique pur: Convention de Lugano porte sur la responsabilité civile des dommages résultant d’activités dangereuses pour l’environnement (n’est pas rentré en vigueur). La législation européenne (directive de 2004) vise à initier des politiques de prévention et favoriser la remise en état des lieux souillés. L’action en responsabilité est réservée à l’autorité compétente de chaque pays.

 

Projet de réforme du Code civil : est réparable tt préjudice certain dans la lésion d’un intérêt licite, patrimonial ou extrapatrimonial, individuel ou collectif.

 

III – CONCOURS D’INDEMNITÉS

 §1. La règle de non-cumul

Il existe 2 types d’assurance :

  Les assurances concernant les dommages: garantie contre le risque de perte d’un bien ou contre le risque de voir sa responsabilité mis en cause. Dans ce cas, il n’y a pas de cumul car l’action vise à apporter une indemnité supplémentaire à celle obtenue de l’assureur.

  Les assurances concernant les personnes: en principe forfaitaires et l’assuré n’a pas de recours contre le tiers responsable. Les organismes débiteurs se substituent à l’auteur du délit, débiteur originel.

Distinction entre :

   Le préjudice corporel : préjudice résultant de l’atteinte à l’intégrité physique. Les sommes versé par la sécu ne se cumulent pas avec les indemnités dues au titre de la responsabilité. La victime peut agir contre le responsable que quand les prestations de la sécu ne réparent pas complètement son préjudice.

  Le préjudice personnel : préjudice non soumis à recours de la sécu comme le préjudice moral, esthétique, d’agrément, pretium doloris : l’assuré peut agir contre le responsable sans avoir à tenir compte des prestations reçues de la sécu.

 

§ 2. Règles sommaires sur les recours

 L’assureur / la sécu peuvent agir pout le compte de l’assuré – victime du dommage : il paye a la place de l’auteur et ils bénéficient du mécanisme de subrogation légale pour agir contre le responsable.

 Le tiers payeur (sécu, assureur) peut une fois qu’il a indemnisé la victime, agir contre le tiers responsable.

 Le tiers payeur a droit au remboursement de toutes les prestations servies par eux à la victime. Le juge divise en deux catégorie les sommes allouées : celles soumises au recours de la sécu (CPAM) sur lesquelles elle pourra exercer son recours et les sommes non soumises au recours.

 

IV – RECOURS ENTRE COOBLIGÉS

 §1. Le droit commun

 Chacun des coauteurs d’un dommage doit supporter dans ses rapports avec les autres coauteurs et dans une mesure déterminée par les juges, les conséquences de sa propre faute. Les coauteurs ne peuvent exercer entre eux un recours de garantie. Les héritiers sont obligés à réparation du dommage.

 Le coauteur qui a payé l’intégralité de l’indemnité dispose d’une action personnelle contre son coauteur qui peut subsister malgré la renonciation de la victime mettant obstacle à la subrogation.

 

§ 2. La loi du 5 juillet 1985

>  Ouverture d’action récursoire entre coobligés (= coauteurs).

 >  Revirement de jurisprudence en 1998 : la responsabilité de plein droit cesse lorsqu’il s’agit d’envisager les rapports des coobligés : c’est à dire les rapports des personnes condamnées entre elles.

 >  2011 : La gravité des fautes est le seul critère approprié pour déterminé la part contributives des coauteurs. En l’absence de faute prouvée, la contribution se fait entre eux à parts égales.

 

V. GARANTIES ET ASSURANCES

 L’assurance ne suffit pas toujours pour indemniser la victime :

   soit vu l’ampleur du phénomène social à l’ origine du risque dépasse les possibilités des assurances ou entrainerait des cotisations démesurées pour les assurés.

   soit par que l’auteur du fait juridique est inconnu ou non assuré.

 

  Naissance de l’idée d’un fonds de garantie : entité qui va se substituer à l’assurance défaillante au moyen d’une collectivisation du risque.

 

Alimentés par un prélèvement obligatoires sur l’ensemble des citoyens / auteurs potentiels du trouble. Mutualisation d’un risque dont l’ampleur excède la technique classique de l’assurance.

 

L’intervention de ces fonds de garanties est par nature subsidiaire. Il indemnise que si le responsable n’est pas identifié, s’il n’est pas assuré, ou si son assureur est insolvable.

 

Obligation nationale de solidarité, accordé sans condition de ressources.

 

Le contrat d’assurance vise à garantir le souscripteur contre un certain nombre de sinistres (automobile, immobilière, vie etc.). C’est aussi une garantie pour l’assuré et les tiers : ces derniers seront indemnisés en cas de dommage causé par l’assuré. Certaines assurances permettent même d’être indemnisé du fait du par notre propre faute et seul. Si les assurances proposées par les compagnies ne suffisent pas à la victime, il pourra opter pour la voie contentieuse.

 

L’assurance peut exercer un recours contre un tiers auteur du délit pour obtenir le remboursement des sommes qu’elle a versées a son propre assuré.

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