Les motifs disciplinaires du licenciement pour motif personnel
L’employeur peut rompre le contrat d’un salarié en utilisant la procédure du licenciement pour motif personnel. Ce motif doit être justifié (reposer sur une cause réelle et sérieuse). Toutefois, certains motifs sont interdits par la loi.
Le licenciement pour motif personnel est possible :
- pour motif disciplinaire
- (en cas de faute du salarié),
- ou non disciplinaire (en cas d’insuffisance professionnelle, d’inaptitude physique, de refus d’une modification du contrat de travail…).
L’employeur doit respecter la procédure de licenciement, sous peine de sanctions, qui varient en fonction du motif et selon que le salarié est protégé ou non.
Quels sont les motifs disciplinaires d’un licenciement pour motif personnel ?
- Droit social (droit du travail et des relations collectives)
- Le comité d’hygiène et de sécurité (CHSCT)
- L’exercice du mandat de délégué du personnel
- Le droit d’alerte des délégués du personnel
- L’obligation de consultation des délégués du personnel
- Le rôle du délégué du personnel
- Le mandat du délégué du personnel (durée, remplacement…)
1) La faute du salarié comme motif de licenciement
L’employeur dispose d’un pouvoir disciplinaire lui permettant de prononcer le licenciement pour faute du salarié. La faute invoquée par l’employeur doit présenter les caractères de sérieux et de réalité étant précisé que le conseil de prud’homme dispose du pouvoir de contrôler la réalité et le sérieux du motif invoqué.
La cour de cassation (chambre sociale) précise avec constance que la cause réelle et sérieuse peut exister malgré l’absence de faute grave et ceci même si le manquement commis par le salarié n’est pas intentionnel et présente un caractère isolé quand bien même il y aurait une absence de sanction disciplinaire antérieure d’avertissement ou d’observation qqe soit l’ancienneté du salarié.
Dès lors la cour de cassation nous dit qu’il peut y avoir un licenciement disciplinaire même en l’absence de faute grave.
2) La prescription
L’employeur ne peut pas invoquer à l’appui d’un licenciement une faute dont les faits reprochés au salarié sont présents.
Les dispositions de l’article L122-44 du code du travail prévoit en effet une prescription pour la sanction des fautes. Ainsi cette prescription est acquise 2 mois après que l’employeur ait eu connaissance de l’agissement fautif du salarié. Au-delà de ce délai de 2 mois, l’employeur ne peut plus engager une procédure de licenciement pour faute à l’encontre du salarié. Si malgré cela une procédure devait être engagée, le licenciement ne pourrait pas être fondé sur un motif réel et sérieux compte tenu de la prescription des faits fautifs. Par ailleurs la faute invoquée par l’employeur ne doit pas être amnistiée.
3) Le principe de l’unicité de la sanction
En vertu de ce principe, une même faute ne peut être sanctionnée qu’une seule et unique fois. Dès lors la chambre sociale de la cour de cassation estime que l’employeur ne peut pas fonder le licenciement d’un salarié sur une faute qu’il a déjà sanctionné et ce qqe soit la nature et le degré de la sanction notifiée antérieurement.
En revanche, ce principe connaît 2 exceptions. La première est constituée par le refus du salarié de la première sanction tel est le cas lorsque dans le cadre de son pouvoir disciplinaire l’employeur notifie au salarié à titre de sanction une rétrogradation qui constitue un motif d’un élément essentiel du contrat. Dans cette hypothèse, le salarié dispose de la faculté de refuser la modification de l’élément essentiel du contrat que tente de lui imposer l’employeur par le biais de la rétrogradation. Dès lors en cas de refus du salarié cette première sanction est annulée et peut être remplacée par 1 autre sanction.
Par ailleurs une faute qui a donné lieu à une sanction peut motiver un licenciement si par la suite elle est répétée dès lors le salarié qui commet une nouvelle faute similaire à celle déjà sanctionnée peut une nouvelle fois faire l’objet d’une sanction disciplinaire.
4) La faute et les poursuites pénales
L’employeur peut procéder au licenciement du salarié sur la base, fondement de la faute qui lui est reproché et engager parallèlement des poursuites pénales contre le salarié.
La décision du juge pénal aura des répercussions sur le bien fondé du licenciement notifié au salarié. Dès lors la décision du juge pénal si elle aboutie à une relaxe fondée sur le caractère non-établi des faits reprochés, la juridiction prud’homale considérera que le licenciement n’est pas justifié par application du principe de l’autorité au civil de la chose jugée au pénal.
5) La faute doit être imputable au salarié
Un licenciement fondé sur une faute ne peut résulter que d’un fait imputable personnellement au salarié.
Il en résulte qu’un licenciement ne peut pas être fondé sur des agissements imputables à des personnes appartenant à la famille ou à l’entourage du salarié. Par exemple, les injures et menaces prononcées par la sœur d’un salarié en la présence passive de celui-ci ne constitue pas une faute justifiant un licenciement.
En revanche le licenciement devient fondé si le salarié a incité ou provoqué le comportement fautif de la tierce personne.
6) La typologie de la faute
Les dispositions légales et la jurisprudence dégagent 3 types de faute :
a) La faute dite légère
Par application des dispositions des articles L122-6-8-9 une faute peut justifier un licenciement sans pour autant présenter un caractère de gravité suffisant pour imposer la cessation immédiate de la relation de travail.
L’existence de cette faute et du licenciement qui en résulte ne prive pas le salarié du bénéfice du préavis des indemnités de licenciement et de congés payés.
b) La faute grave
Elle est une faute dont la gravité est telle qu’elle ne permet pas la poursuite des relations contractuelles même pendant le temps du préavis. Il en résulte que par application des articles L122-6-8-9 la faute grave prive le salarié du bénéfice du préavis et de l’indemnité de licenciement. En revanche le salarié bénéficie toujours de l’indemnité compensatrice de congés payés.
La cour de cassation a donné dans le cadre de 2 arrêts des 25/04/90 et 26/02/91 une définition très précise de la faute grave. Pour la chambre sociale de la cour de cassation, la faute grave se caractérise par la réunion de 3 éléments :
- La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de fait imputable au salarié personnellement
- Le fait ou les faits incriminés doivent constituer une violation des obligations contractuelles ou un manquement à la discipline de l’entreprise. Ainsi la faute grave ne peut pas être retenue pour des faits étrangers à la relation de travail
- La violation reprochée au salarié doit être d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintient du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis
Il résulte de cette définition précise qu’en présence d’une faute grave imputable au salarié, il appartient à l’employeur de notifier au salarié une mise à pied conservatoire pendant le temps de la procédure de licenciement. La mise à pied, conservatoire ne constitue pas une sanction disciplinaire mais simplement une mesure prise temporairement et à titre provisoire par l’employeur à l’encontre du salarié pour éviter que ne se renouvelle les griefs invoqués contre le salarié. La faute grave doit être prouvé par l’employeur étant précisé que si un doute persiste dans l’esprit du juge, ce doute doit par application des dispositions de l’article L122-14-3 alinéa 2 profiter au salarié. Dès lors si doute il y a le licenciement sera qualifié par le juge de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
c) La faute lourde
Elle est une faute plus grave que grave qui révèle de la part du salarié l’intention de nuire à l’entreprise ou à l’employeur.
Ainsi il ne peut pas y avoir de faute lourde en l’absence d’intention de nuire à l’employeur de la part du salarié. Elle prive le salarié de l’intégralité de ses droits au préavis à l’indemnité de licenciement et de congés payés. Enfin elle permet (et c’est la seule) à l’employeur d’engager la responsabilité civile du salarié. Par ce biais l’employeur peut saisir une juridiction civile pour solliciter la condamnation du salarié à lui verser des dommages-intérêts destinés à réparer le préjudice qu’il a subi consécutivement à la commission de la faute par le salarié.
7) Le contrôle des motifs
a) Le contrôle judiciaire
Article L122-14-3 alinéa 1 → en cas de contestation un litige est porté devant le conseil de prud’homme afin que le juge puisse apprécier le caractère réel et sérieux du motif invoqué.
Il en résulte que le juge ne peut pas se limiter à vérifier l’exactitude des faits invoqués sans rechercher si ces faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Le pouvoir d’appréciation du juge ne peut en aucun cas être limité même par les dispositions de la convention collective. En effet selon la jurisprudence constante de la cour de cassation, les dispositions d’une convention collective qui prévoient une cause de licenciement ne peuvent en aucun cas lier le juge qui dispose toujours de la faculté de considérer que les faits dont il s’agit ne constituent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement. Dès lors s’il est constant que le juge du fond apprécie souverainement le caractère réel et sérieux de la cause du licenciement il n’en demeure pas moins qu’il doit motiver de manière suffisante et cohérente sa décision.
Si un doute subsiste dans l’esprit du juge, ce doute doit (L122-14-3 alinéa 2) toujours profité au salarié.
b) La compétence du conseil de prud’homme
Par application des dispositions de l’article L511-1, les tribunaux judiciaires composés par le conseil de prud’homme, la chambre sociale de la cour d’appel et de cassation sont seuls compétents pour connaître du litige portant de la validité et de la régularité d’une procédure de licenciement.
Il subsiste toute fois une exception inhérente à la protection particulière dont bénéficient certains salariés titulaires d’un mandat représentatif (représentants du personnel, délégués syndicaux…).
Ces salariés ne peuvent être licenciés que sous réserve d’avoir préalablement et obligatoirement soumis à l’inspecteur du travail une demande d’autorisation de licenciement.
Ce licenciement n’est possible qu’après avoir obtenu l’autorisation de l’inspecteur de travail de licenciement.
En cas de contestation de la procédure ou du motif de licenciement, elle n’est pas juridiction prud’homale compétente mais juridiction administrative. La contestation du licenciement ou de sa procédure nécessite pour le salarié de contester la décision administrative prise par l’inspecteur du travail autorisant le licenciement.
Le rôle attribué au juge du fond pour apprécier le licenciement qui lui est soumis l’oblige à vérifier en premier lieu la réalité des faits invoqués par l’employeur pour justifier la mesure de licenciement.
Pour vérifier cela le juge va former sa conviction sur les éléments fournis par le salarié et l’employeur et au besoin en ordonnant une mesure d’instruction.
Ensuite une fois que le juge a apprécié la réalité des faits, il va apprécier si les griefs sont suffisamment sérieux pour justifier du licenciement. Toute fois le pouvoir d’appréciation du juge du fond est limité au fait invoqué dans la lettre de licenciement. La lettre de licenciement fixe les limites du litige. Lors des débats, on ne discutera que des griefs mentionnés dans cette lettre, tous les autres faits non mentionnés n’ont pas à être débattus devant la juridiction prud’homale.
Le salarié dispose en cas de contentieux d’une position plus confortable que celle de l’employeur car il suffit au salarié de contester un motif de licenciement pour contraindre l’employeur à prouver la réalité et le sérieux des griefs invoqués à l’encontre du salarié.
Il en découle que l’employeur est tenu de justifier d’un fait précis, objectif et contrôlable.
Dès lors il est interdit à l’employeur de procéder par affirmation.
La preuve du motif de licenciement peut être apporté par tous moyen. La preuve d’un fait fautif ne pourra pas être obtenu en utilisant des moyens portant atteinte aux droits fondamentaux ou aux droits des personnes et des libertés individuelles.
Il arrive que malgré les preuves apportées tant par le salarié que par l’employeur, le juge ne soit pas en mesure de former sa conviction. Ainsi pour pouvoir statuer le juge prud’homal dispose par application de l’article L122-14-3, il dispose de la faculté de prescrire des mesures d’instruction pour s’informer davantage. Ces mesures d’instruction peuvent être les suivantes :
- Ordonner la production par l’une des parties ou par un tiers de documents nécessaire à l’administration de la justice
- Le déplacement sur les lieux
- La désignation d’un expert judiciaire avec l’organisation d’une expertise judiciaire
- La comparution personnelle des parties
- La citation de témoin