Les obligations des commerçants
Le commerçant est celui qui exerce des actes de commerce de façon indépendante et en fait sa profession habituelle (article L121-1 du Code de commerce). Toute la définition du commerçant repose donc sur la notion d’acte de commerce. Les articles L110-1 et L110-2 du code de commerce fournissent une liste d’actes de commerce.
Traditionnellement les commerçants sont astreints à certaines obligations et ont certains droits. Mais on est dans une configuration où beaucoup des règles du droit positif opposent activité professionnelle et activité non professionnelle. Bien souvent on se trouvera face à des obligations qui sont celle de tous les professionnels.
Les obligations du commerçant sont l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS), des obligations comptables du commerçant, ainsi que l’obligation d’avoir un compte en banque
- Le droit des affaires
- Qu’est-ce que le droit des affaires et le droit commercial?
- L’histoire du droit des affaires au Moyen-Âge
- La codification du droit commercial
- La crise du droit commercial
- Les sources du droit des affaires
- Définition de l’acte de commerce et du commerçant
I – L’obligation d’immatriculation
L’idée de s’enregistrer est très ancienne car lorsque sous l’ancien régime on était membre d’une corporation on était inscrit dans un registre qui était tenu par la corporation. L’inscription au registre du commerce remonte à 1919 qui est devenu le registre du commerce et des sociétés en 1978. Au moment du vote de la loi de 1978 on a décidé que l’immatriculation sur ce registre serait le passage obligé pour avoir la personnalité morale. Il y a les sociétés commerciales mais aussi les sociétés civiles, pour avoir la personnalité morale. Le champ dépasse celui des seuls commerçants.
Qui doit s’immatriculer au RCS ? Tous les commerçants personne physique qui exercent une activité commerciale, les sociétés commerciales, mais aussi les sociétés civile et les GIE.
Le RCS est un registre tenu au greffe du tribunal de commerce. Si on est une personne physique on a 15 jours à partir de notre activité pour nous immatriculer et si on ne le fait pas le juge peut nous enjoindre de nous immatriculer, auquel cas on s’expose à différentes sanction pénale si on ne respecte pas l’injonction du juge (amende par exemple). Si on ne s’enregistre pas on ne peut pas bénéficier du statut des baux commerciaux. Les personnes morales n’ont pas de délai pour se faire immatriculer. Mais si elles ne procèdent pas à cette immatriculation on n’obtient pas la personnalité morale, la société reste une société en participation. Si on procède à cette immatriculation on va acquérir la personnalité morale.
Dès que la société va acquérir la personnalité morale, ca va faire en sorte que tous les actes pour conclure la société vont être réputés avoir été conclus par la personnalité morale alors qu’elle n’existait pas encore. Immatriculation = reprise rétroactive de tous les engagements de la société. On doit fournir des informations au greffe et on sera sanctionner si on donne de fausses informations. Une fois qu’on est enregistré au RCS on nous donne un numéro et on va avoir un « extrait cadis ». Il y a un bulletin officier qui s’appelle le BODACC : bulletin officiel des annonces civiles et commerciales : publication de notre immatriculation.
Conséquences de l’immatriculation :
Elles rejaillissent sur la personne et sur son statut.
La personne qui s’immatricule ne va pouvoir opposer aux tiers que ce qui a été publié, et les tiers pourront se prévaloir de tout ce qui a été publié. Ca signifie que si on a omis de mentionner une information, on ne pourra pas nous prévaloir de cette information omise contre les tiers et contre l’administration. Par exemple on a omis de dire qu’on est divorcé, qu’on était en séparation de biens, si cela ne figure pas dans les mentions publiées, on ne pourra pas opposer cet élément. La publication au RCS est une condition d’efficacité de certains actes, de certains événements. Ca ne joue pas si le tiers est de mauvaise fois, s’il est au courant de notre situation réelle.
Deuxièmement, les incidences sur le statut. On est une personne physique, on s’immatricule au RCS on va être présumé être commerçant. Les tiers peuvent se prévaloir de cette présomption mais il y a possibilité pour eux d’apporter la preuve contraire. Autrement dit, si on est commerçant, que l’on cède notre fonds de commerce, que l’on cesse notre activité et qu’on oublie de nous radier du RCS ca va jouer contre nous parce qu’on sera présumé être commerçant. Mais dans les 1 ans à compter de notre radiation on à la possibilité de se voir ouverte une procédure collective contre nous. Si on est une personne morale, c’est ce qui nous permet de l’acquérir. Mais il n’y a pas d’autres conséquences. Notre immatriculation au RCS n’entrainera pas une présomption de commercialité, on a des GIE et des sociétés civiles immatriculées au RCS : l’immatriculation est sans influence sur la qualité de commerçant.
Le Cours complet de droit des affaires est divisé en plusieurs fiches :
- Cours complet de droit des affaires – L’histoire du droit des affaires au Moyen Âge – La codification du droit commercial – La crise du droit commercial – Les sources du droit des affaires – Définition du droit des affaires et du droit commercial
- Définition de l’acte de commerce et du commerçant – Les intermédiaires commerçants (ou non) de la distribution – Les obligations des commerçants – Définition et régime juridique des actes mixtes – Définition et régime juridique des actes de commerce – Professionnels non commerçants (artisans, agriculteurs…)
- Définition et composition du fonds de commerce – La nature juridique du fonds de commerce – Bail commercial : définition et champ d’application – Droits et obligation du locataire et bailleur d’un bail commercial – Le droit au renouvellement à l’expiration du bail commercial
- La cession de fonds de commerce – La location gérance du fonds de commerce – Le nantissement du fonds de commerce
- EIRL : Entreprise individuelle à responsabilité limitée
- Interdiction des ententes et abus de position dominante – Clauses de non concurrence : définition, condition, effets – L’interdiction de la concurrence déloyale – La protection de la concurrence
- Le contrôle des concentrations – Contrats de distribution (franchise, concession, approvisionnement…)
II – L’obligation de tenir une comptabilité
C’est une obligation qui s’impose au commerçant depuis très longtemps puisque c’était une pratique du commerce qui a été codifié dans l’ordonnance de 1673, reprise au moment de la codification napoléonienne. Aujourd’hui cette obligation figure à l’article L 123-12 du code de commerce qui nous dit que toute personne physique ou morale ayant la qualité de commerçant doit procéder à l’enregistrement comptable des mouvements affectant le patrimoine de son entreprise.
Il existe un droit comptable au sens où l’on a dans ces articles L 123-12 et suivant du code de commerce des prescriptions qui sont complétées par un décret de 1983 et il faut aussi tenir compte d’un arrêté de 1982 qui a fixé le plan comptable général. Il existe des sanctions si le commerçant ne fait pas de comptabilité régulière, sanction pénale et fiscale. Si on fait l’objet d’une procédure collective et si l’on voit que notre comptabilité n’est pas fiable, on peut se retrouve très lourdement sanctionné. On peut faire l’objet d’une mesure de faillite personnelle, faire l’objet d’une interdiction d’exercer le commerce, payer des dommages et intérêts. Donc c’est une obligation très importante. On va présenter ces livres comptables qui doivent être tenus par les commerçants.
Les livres comptables c’est que ce l’on tient au quotidien, on les oppose aux livres annuels. Ce sont des livres qui retracent les mouvements qui affectent le patrimoine de l’entreprise.
Premièrement on a le livre journal qui est tenus quotidiennement et sur lequel tous les jours on retrace les mouvements qui affectent le patrimoine de l’entreprise. Donc un livre qui est tenu de manière chronologique.
Ensuite on va récapituler toutes ces opérations sur le mois. Et c’est ce qu’on appelle le grand livre : on centralise les écritures du livre journal. Toutes les opérations vont être présentées sur une base mensuelle.
Ensuite on a le livre d’inventaire. C’est celui qui regroupe les données d’inventaire. Tous les éléments actifs et passifs du patrimoine avec pour les éléments d’actif mention de la quantité et de la valeur de chaque bien qui figure dans le patrimoine à la date de l’inventaire.
Il s’agit des 3 livres de base qui, en principe, sont tenus par tous les commerçants. On a accepté pour certaines toutes petites exploitations que l’on se contente de documents simplifiés. C’est le cas pour le régime des micro-entreprises. Ça a des conséquences fiscales, on a un régime taxé au forfait sur le plan fiscal.
Chaque année on va établir à la clôture de l’exercice des comptes annuels. L’exercice est une période de référence. En général on retient les dates de l’année civile. Pour l’entreprise en France on va retenir souvent 1er juillet au 30 juin. Donc ce n’est pas nécessairement l’année civile qui s’impose. Les comptes annuels sont le bilan, le compte de résultat et l’annexe. Le bilan décrit les éléments d’actif et de passif. Les éléments de passif c’est les ressources. Les éléments d’actif c’est les emploies.
Les prêts figurent au passif par exemple. L’action est ce qui représente cette quotepart dans le capital social. Un actionnaire n’est pas prêteur. La société considérée a besoin de capitaux, elle n’a pas envie d’avoir de nouveaux actionnaires, l’idée est plutôt d’emprunter de l’argent et au lieu d’emprunter à des banques ou établissements de crédit on va émettre un emprunt obligataire, qui est un titre de créance sur la société. On n’est pas associé mais juste préteur. Pour autant ce type de créance va être négocié sur les marchés financiers au même titre que l’action. L’Etat français lève des emprunts obligataires. Dans le passif il y a aussi les fonds propres et l’argent qu’on a emprunté. Donc ces emprunts obligataires figurent au passif. Mais il y a aussi tout l’argent que l’on doit à quelqu’un, par exemple les créances des salariés, on doit de l’argent aux salariés donc on va indiquer dans le bilan qu’on a telle somme à payer au titre des salaires.
Du côté de l’actif on a les emploies de ces ressources. On va avoir les immobilisations, c’est-à-dire d’abord les biens immobiliers que l’on a pu acquérir. On est propriétaire de l’immeuble dans lequel on a mis notre siège social. Mais il y a aussi les biens mobiliers comme des ordinateurs. On va aussi inscrire à l’actif les créances qu’on peut avoir sur certaines personnes comme les clients.
Le montant de l’actif correspond au montant du passif puisqu’on est dans une logique d’emploies-ressources. Le bilan permet de connaitre la position du patrimoine de l’entreprise. Et en particulier ce qui intéresse beaucoup les investisseurs c’est l’endettement de l‘entreprise qui figure dans les postes de passif et qui va montrer la différence entre le capital social et l’endettement proprement dit, les fonds qu’on nous a prêté et qu’on doit rembourser. On a régulièrement des dirigeants sociaux qui sont condamnés. Les dirigeants ont communiqués sur des éléments de bilan erronés, qui n’ont pas été honnêtes quant à l’endettement de l’entreprise. Il y a des ratios endettement/fonds propres à respecter. Si l’endettement dépasse beaucoup trop le montant des fonds propres les marchés vont nous sanctionner.
On a aussi le compte de résultat. C’est un compte qui retrace les produits et les charges de l’exercice. Ce sont tous les flux qui affectés ce patrimoine pendant l’année écoulée. Qu’est ce qu’on a fait rentrer comme argent, qu’est ce qui est sorti du patrimoine : les produits et les charges. On a ensuite un bénéfice ou une perte.
Aujourd’hui il existe un troisième type de document que l’on va publier : l’annexe. Le principe de cette annexe est de faire figurer un certain nombre d’éléments qui n’apparaissent pas dans les comptes de bilan et de résultat par exemple concernant les engagements financiers, certains contrats. Par exemple le cas des immobilisations en crédit-bail. On veut acheter des biens, on n’a pas tout « le cash » suffisant.
Première solution : on va emprunter de l’argent et on va acheter ce dont on a besoin, on remboursera ensuite l’établissement de crédit qui nous a prêté l’argent nécessaire à l’acquisition. On va payer des intérêts pour l’emprunt qu’on a fait.
Deuxième possibilité : on va conclure une opération de crédit bail auprès d’un établissement spécialisé qui va acheter ce dont on a besoin. Il sera le propriétaire et il les mettra à notre disposition moyennant un loyer. Autrement dit, on va se trouver locataire de ces véhicules par exemples, on va payer chaque mois un loyer et au bout d’un certain temps on aura la possibilité d’acheter définitivement ces biens pour une valeur résiduelle en tenant compte des loyers qu’on a acquittés. On pratique beaucoup cette méthode pour les véhicules. C’est une opération de crédit, c’est plus qu’un simple contrat de location. Cela peut se révéler plus intéressant financièrement plutôt que d’emprunter et de payer des intérêts et ca va faire en sorte que ces biens ne fassent pas parti de notre patrimoine. Donc si on a des créanciers qui veulent saisir nos biens, ils ne pourront pas saisir ces biens puisqu’on n’en est pas propriétaire. Il y a des gens qui abusent de ce système puisque quasiment toutes les immobilisations ne leur appartiennent pas. Si les biens dont on se sert on n’en est pas propriétaire, le gage des créanciers en est réduit d’autant. C’est la raison pour laquelle dans cette annexe on fait quand même figurer les biens en crédit bail pour que l’idée que l’on se fait de l’entreprise soit complète. On donne aussi dans l’annexe des précisions sur les emprunts obligataires, sur les titres qu’on a émis.
Ces comptes dans un certain nombre d’entreprise il y aura des commissaires au compte qui viendront les certifier. Ils vont venir éplucher la comptabilité avant de garantir que la comptabilité donne une image fidèle de la situation de l’entreprise. Dès lors qu’il apparait des informations erronées, on va imputer au commissaire aux comptes en disant qu’il a certifié des comptes qui ne donnaient pas une image sincère. Pour des sociétés plus importantes il faut parfois publier d’autres documents. C’est le cas lorsqu’on est en présence d’un groupe de sociétés d’une certaines importance : il faut publier des comptes consolidés. Ca veut dire des comptes qui reflètent la situation du groupe et pas seulement des sociétés qui composent ce groupe. Par exemple dans le compte de résultat on va agglomérer le chiffre d’affaire des sociétés et on va avoir le gros poste de chiffre d’affaire qui regroupe toutes les sociétés. Les chiffres d’affaire ce sont les ventes avant que le produit de ces ventes se voit imputer les charges.
Autre type de documents qui doivent être publiés : la comptabilité prévisionnelle. C’est ce qu’on envisage pour l’année suivante, nos prévisions de charge, de bénéfice etc. c’est uniquement les très grandes entreprises qui ont cette obligation : personnes morales de droit privé ayant une activité économique, des personnes qui emploient plus de 300 salariés ou qui font un chiffre d’affaire supérieur ou égale à 18 millions d’euros.
Ces documents doivent être conservés pendant 10 ans.
Remarque :ces documents doivent donner une image fidèle de la situation de l’entreprise. Ils doivent être réguliers, sincères qui donnent une image fidèle de la situation et de l’entreprise selon l’article L 123-12 du Code de commerce. Les documents comptables doivent être rédigés en français, en euros et il faut suivre les spécifications du plan comptable général.
Portée juridique de cette comptabilité :on va l’utiliser parfois dans certains contentieux et on peut l’utiliser comme mode de preuve.
Article L 123-23 du code de commerce : une comptabilité régulièrement tenue peut être admise en justice pour faire preuve entre commerçants. Donc si cette preuve se fait entre commerçant, alors un commerçant ne va pas opposer sa comptabilité à un non commerçant. Il peut arriver parfois qu’on ait un commerçant en face de nous qui nous présente sa comptabilité en montrant qu’on lui doit de l’argent, et cela ça ne peut pas fonctionner. Il faut que la comptabilité soit régulière, sinon on écarte sa portée probatoire, à la limite on l’utilisera comme un indice mais pas plus. Entre commerçants on va utiliser la comptabilité pour prouver à l’encontre du commerçant mais aussi au bénéfice du commerçant qui la tient.
Dans le cadre d’un procès, on peut avoir besoin d’exiger en justice la communication de documents comptables, ce qui est possible. On est dans un litige avec un commerçant, on a besoin des documents comptables de ce commerçant. On peut demander au juge de la mise en état qu’il ordonne la communication des documents comptables pour les besoins du litige.
Remarque :le commerçant est un contribuable et il est assujetti à des impôts spécifiques. Si on est une société non seulement on tient une comptabilité mais aussi on paye un impôt sur les sociétés. Si on est un commerçant personne physique on paye un impôt sur les bénéfices. On paye la taxe sur le chiffre d’affaire TVA qu’on peut récupérer. Entre commerçant on se facture tout hors taxe. On ne paye pas la TVA. C’est le consommateur final qui paye la TVA. En tant que commerçant on peut être amené à payer différentes taxes sur les salaires de nos employés.
III. Les autres obligations du commerçant
Premièrement l’obligation d’avoir un compte en banque. C’est vrai depuis 1940 car on a adopté une loi en 1940 qui prévoyait que dans certains cas le commerçant devait payer par chèque (et donc avoir un compte en banque). Le principe du droit au compte s’applique aux commerçants. Si on ne trouve aucun établissement bancaire acceptant d’ouvrir un compte on s’adresse à la banque de France qui va désigner une banque qui va être obligée d’ouvrir un compte.
Deuxièmement l’obligation de délivrer une facture.
Troisièmement, l’obligation de respecter les règles de la concurrence loyale, de respecter les prescriptions du droit de la concurrence. Par exemple de respecter les procédures applicables en matière de concentration. Concentration : deux entreprises vont se rapprocher, bien souvent fusionner, or le droit de la concurrence a son mot à dire parce que quand on voit des géants économiques s’assembler ca peut conduire à créer des ensembles qui contrôlent 80% du marché et qui peuvent imposer leurs prix aux consommateurs. L’autorité de la concurrence contrôle ces concentrations, la commission de Bruxelles contrôle aussi de manière à éviter la création au sein de l’Europe de très grandes entités économiques qui contrôlent le marché.
Quatrièmement, il faut aussi respecter le droit de la consommation : se plier à diverses obligations d’information, éviter d’insérer des clauses abusives dans les contrats. Par exemple des clauses où l’on s’exonère de toute responsabilité.