Les pouvoirs du dirigeant de société

Le pouvoir de la direction de la société

Les associés nomment les dirigeants de la société. La loi leur confère des pouvoirs propres qui s’ajoutent nécessairement à ceux que les statuts leur donnent. Ils sont donc tenus de bien gérer et ils peuvent en cas de faute, engager leur responsabilité.

-. Dans l’ordre interne : Les dirigeants ont pour fonction de conduire les affaires sociales et ont plein pouvoir pour cela sous réserves de clauses statutaires. L. 221-4 pour la SARL : en l’absence de pouvoir dans les statuts, le gérant peut faire tout acte dans l’intérêt de la société Pour les SA : L. 225-6 : le directeur général à les pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance dans la limité de l’objet social.

– Dans l’ordre externe (c’est à dire dans les rapports avec les tiers) : La société ne peut être engagée qu’à l’égard des tiers que par les dirigeants doté d’un pouvoir de représentation de la société. Le titulaire de ce pouvoir de représentation peut le déléguer. Pour les sociétés de personnes (SNS, SCS), les SARL et sociétés en commandite, un seul organe est doté du pouvoir de gestion interne, celui de représentation de la société. La volonté de protéger les tiers dans un souci de sécurité juridique.

  • A) La qualité des dirigeants de société


1) La notion

Les dirigeants sont les personnes nommées par les associés. Ils représentent, seuls ou au sein d’un organe de direction (conseil d’administration, direction générale, directoire dans les SA, gérant(s) ou conseil de gérance) la société à l’égard des tiers. Les dirigeants sociaux signent les conventions avec les fournisseurs et les clients et pour diriger les salariés de la société.

A défaut d’une nomination régulière, la ou les personnes qui dirigent la société ne sont pas considérées comme des dirigeants de droit, mais comme de simples dirigeants de fait. Cette qualité est attribuée aux personnes pour assurer la protection des tiers qui ont traité avec ces dirigeants.

2) La nature juridique des fonctions de dirigeants

Le dirigeant est plus qu’un simple mandataire social. Il est un organe de la société car il est de la nature de la société, par anthropomorphisme, d’avoir un organe interne qui exprime sa volonté. On dit parfois qu’il est l’incarnation par l’effet de la loi de la personne juridique abstraite.

Il représente la personne instituée conformément à la loi. Toutefois, comme la volonté des associés est indispensable pour que le dirigeant soit élu, il reste, comme la théorie contractualiste de la société le sous-entend, le mandataire de la collectivité de associés. Plus la société est contractuelle dans sa forme et son organisation (SAS, existence de pactes d’actionnaires), plus la fixation et la limitation de ses pouvoirs au sein de la société sont aisées à déterminer. Les limitations ne sont opposables aux tiers que si la loi le permet, sinon, ils ont les pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société (SARL, SA, SAS).

3) Le statut juridique du dirigeant

Le dirigeant n’est pas, sauf dans certaines sociétés de personnes, un commerçant. C’est la société qui est commerçante puisqu’il agit pour elle et en son nom. Il n’est pas non plus un salarié de la société lorsqu’il est rémunéré, même si, en droit en droit de la sécurité social et en droit fiscal, il est souvent (SARL, SA) assimilé à un salarié. Comme il n’est pas salarié au sens du droit du travail, càd dans une relation hiérarchique, il ne sera pas considéré comme bénéficiaire des indemnités de chômage si il est licencié ou si la société cesse ses paiements et est mise en liquidation judiciaire.

Le dirigeant peut bénéficier d’un contrat de travail en situation de cumul lorsqu’il exerce en sus de ses fonctions de dirigeant une fonction particulière distincte exercée en relation de subordination.

Dans certaines hypothèses (groupes des sociétés, SA avec directoire et conseil de surveillance) le dirigeant peut exercer la fonction directoriale au titre d’un contrat de travail.

4) La nomination et la cessation des fonctions

  • a) La nomination aux fonctions de dirigeant

Dans une société, c’est l’assemblée des associés qui désigne ses dirigeants. Les modalités varient selon le type et la taille de la société. Par exemple, dans les petites entreprises (1 personne ou 1 famille), le détenteur du capital est nommé comme dirigeant. Mais dans les sociétés faisant appel public à l’épargne, il y a une dissociation entre propriété et pouvoir et les dirigeants sont choisis par les associés pour leurs compétences techniques.

Le dirigeant doit être juridiquement apte ou capable. Seule une personne majeure, non frappée d’incapacité (tutelle ou curatelle), càd, un majeur qui n’est pas frappé d’une interdiction d’exercer ces fonctions à raison d’une condamnation pénale ou d’un jugement d’interdiction professionnelle rendu après cessation des paiements de l’entreprise dans laquelle il exerçait (art L.625-2 et s. du code de commerce) et qui ne se trouve pas dans une situation rendant l’exercice des fonctions de dirigeant d’une société commerciale incompatible (avocat, notaire,…) peut être nommée, dans les statuts ou par l’AGO dirigeante.

Dans certaines sociétés (SA), le conseil d’administration désigne le Président et le directeur général et les directeurs généraux délégués et les membres du directoire sont élus par le conseil de surveillance.

Les règles classiques de la publicité doivent être suivies pour que la nomination ou la cessation des fonctions soit opposables aux tiers (RCS, BODACC, journal d’annonces légales…). La pub a un effet complémentaire, elle permet la validation à l’égard des tiers d’une nomination irrégulière (art L.210-9 code du com, art 1846 alinéa 2 du code civil). Ni la société, ni les tiers ne peuvent se prévaloir d’une irrégularité dans la désignation des dirigeants lorsque cette nomination a été régulièrement publiée.

  • b) La cessation des fonctions

Elle résulte de la démission libre, de la révocation (le pouvoir de nomination des associés entraîne celui de la révocation) ou encore de la fin de la période prévue dans la délibération de nomination.

Elle peut aussi être l’effet ricochet d’une interdiction d’exercer, de l’incapacité civile ou du décès, ou de la décision de fusion, de scission ou de dissolution.

Elle peut aussi être le résultat d’une révocation par a collectivité des associés. Si la révocation cause un préjudice, elle n’ouvre pas droit à des dommages-intérêts si elle repose sur un juste motif, ou dans les sociétés où les dirigeants sont révocables à tout moment et sans motif (ad nutum), lorsqu’il y a un comportement abusif de la part de l’organe compétent pour en décider.

La fin des fonctions doit faire l’objet d’une publicité (RCS, BODACC).

B) Les pouvoirs des dirigeants de société

1) Le principe de la représentation erga omnes

« Le dirigeant a les pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes circonstances au nom de la société »

Cette règle vise à protéger les tiers qui n’ont pas à rechercher si le dirigeant a tel ou tel pouvoir particulier.

La loi fixe leurs pouvoirs aux articles L.223-18 alinéa 5, L.225-56 et L.227-6. Mais le dirigeant reste un mandataire, donc même si la doctrine le contredit, dans l’analyse contractuelle, les pouvoirs sont attribués et délimités par les associés par une sorte de mandat.

  • a) Dans l’ordre interne

L’organe de direction a tous pouvoirs pour diriger la société dans l’intérêt de celle-ci. Cet organe assure à la fois la direction économique (mêmes fonctions que tout patron : embaucher, assurer la production….) et la direction juridique de la société (= représentation juridique : signature de contrats, engagement d’actions en justice…).

  • b) Dans l’ordre externe

Le dirigeant représente la société à l’égard des tiers, dans la limite des pouvoirs que la loi lui reconnaît ou des restrictions qui sont apportées par les statuts.

2) Les limites au principe : les pouvoirs des dirigeants ne sont pas absolus

  • a) – Il faut que le dirigeant agisse, eu égard à la situation particulière, au nom de la société. Il doit agir es qualités.
  • b) – Il ne faut pas que le pouvoir en question appartienne selon la loi à un autre organe ou que l’acte en question soit interdit par la loi, car nul n’est censé ignorer la loi. Par exemple, seules les assemblées générales sont compétentes pour modifier des statuts ou approuver des comptes.
  • c) – Il faut que le dirigeant agisse dans les limites de l’objet social de la société et dans l’intérêt de la société.

Il ne faut pas, dans les sociétés à risque illimité pour les associés, que l’acte passé par le dirigeant soit en contradiction avec l’objet social (art 1849 du code civil et art L.221-5 du code de commerce).

Dans les autres sociétés commerciales où le risque de l’associé est limité à la perte de son apport, la société est tenue sauf à démontrer la mauvaise foi du contractant du dirigeant, i.e. qu’il savait que le dirigeant ne pouvait agir au-delà de l’objet social.

Il en est encore ainsi si le tiers a agi frauduleusement à l’encontre de la société de concert avec le dirigeant.

Enfin, dans les sociétés où plusieurs gérants sont nommés pour diriger la société, si chaque gérant peut engager seul, la société, tous ont un droit de veto qui peut être signifié au tiers.