Quels sont les pouvoirs du Président de la République sous la Vème République ?

Le Président de la République dispose de pouvoirs étendus sous la Cinquième République. Ces prérogatives se divisent en pouvoirs propres, qui s’exercent sans contreseing du gouvernement, et pouvoirs partagés, nécessitant la collaboration avec le Premier ministre et/ou d’autres membres du gouvernement.

  • Les pouvoirs partagés : une continuité institutionnelle (I) : Ces pouvoirs nécessitent systématiquement un contresignature du Premier ministre ou des ministres compétents, conformément à l’article 19 de la Constitution. Parmi eux :
    • Nomination des ministres : Le Président nomme les membres du gouvernement sur proposition du Premier ministre.
    • Présidence du Conseil des ministres : Bien que le Président dirige les réunions, les décisions doivent être contresignées.
    • Promulgation des lois : Une fois votées, les lois sont promulguées par le Président, mais avec le concours de son gouvernement.
    • Convocation du Parlement en session extraordinaire : Cette prérogative est exercée sur proposition du Premier ministre et après contresignature.
    • Droit de grâce : Bien qu’attribué au Président, ce pouvoir s’exerce généralement sur avis du ministère de la Justice.
    • Révision constitutionnelle (article 89) : Le Président ne peut initier seul une révision de la Constitution, nécessitant une collaboration entre le Parlement et le gouvernement.

 

  • Les pouvoirs propres : une rupture avec la tradition parlementaire (II) : Les pouvoirs propres du Président de la République, énumérés à l’article 19 de la Constitution, représentent une nouveauté significative dans l’histoire constitutionnelle française. Ils renforcent considérablement le rôle du chef de l’État, libérant certaines prérogatives de toute obligation de contreseing et marquant une rupture avec les traditions parlementaires.

Les pouvoirs propres incluent des prérogatives exercées sans le concours du gouvernement, renforçant l’autorité présidentielle. Parmi ces pouvoirs, figurent :

  1. La dissolution de l’Assemblée nationale (article 12) : Le Président peut dissoudre l’Assemblée nationale, sauf en cas d’application de l’article 16 ou d’intérim exercé par le Président du Sénat.Cet outil lui permet de résoudre des crises politiques ou d’imposer une nouvelle légitimité parlementaire en cas de blocage.
  2. La nomination du Premier ministre (article 8 alinéa 1er) : Le Président désigne librement le Premier ministre, bien que ce choix soit conditionné par la nécessité d’assurer une majorité parlementaire.
    • En juillet 2020, le Président Emmanuel Macron a nommé Jean Castex au poste de Premier ministre, succédant à Édouard Philippe. Cette nomination a été suivie de la formation d’un nouveau gouvernement, illustrant le pouvoir présidentiel de nommer les membres du gouvernement sur proposition du Premier ministre.
  3. Le référendum législatif (article 11) : Le Président peut soumettre directement une loi à l’approbation populaire, contournant ainsi le Parlement. Cette prérogative, utilisée par De Gaulle en 1962 et 1969, symbolise la souveraineté populaire.
  4. Les pouvoirs exceptionnels (article 16) : En cas de crise grave menaçant les institutions, l’intégrité territoriale ou l’indépendance nationale, le Président peut concentrer l’ensemble des pouvoirs pour un temps limité. Ce mécanisme, utilisé en 1961 lors du putsch des généraux en Algérie, illustre l’ampleur des pouvoirs présidentiels en situation exceptionnelle.

 

I) Les pouvoirs contresignés

Les pouvoirs partagés du président de la République sous la Cinquième République, dits « contresignés », trouvent leurs origines dans la tradition des régimes parlementaires établis sous les Troisième et Quatrième Républiques. Si la Constitution de 1958 a marqué une rupture dans bien des domaines, elle a néanmoins préservé certains de ces pouvoirs, inscrivant ainsi le président dans une continuité institutionnelle. Ces prérogatives, souvent symboliques ou partagées avec d’autres institutions, s’exercent aujourd’hui dans un contexte modernisé.

A) Une continuité institutionnelle des pouvoirs partagés

Dans le domaine des relations internationales

  • Accréditation des diplomates : Le président de la République exerce un droit de légation, accréditant les ambassadeurs étrangers en France et désignant les représentants français à l’étranger. Ce pouvoir inclut la possibilité de suspendre l’accréditation d’un État en cas de rupture des relations diplomatiques, renforçant son rôle dans la diplomatie française.
  • Négociation et ratification des traités : Selon l’article 52 de la Constitution, le président négocie et ratifie les traités. Toutefois, ce pouvoir, hérité de la Constitution de 1946, reste souvent limité dans sa portée pratique. Les accords les plus significatifs sont directement soumis à l’implication présidentielle, mais la plupart du temps, il s’agit davantage d’une formalité ou d’une consultation.

Dans les affaires intérieures

  • Chef des armées : L’article 15 de la Constitution consacre le président comme chef des armées. Il préside les conseils et comités relatifs à la défense nationale, mais cette prérogative, déjà présente en 1946, conserve un caractère partagé avec le Premier ministre en cas de gestion opérationnelle.
  • Droit de grâce : Historiquement rattaché à la fonction présidentielle, le droit de grâce a été maintenu mais encadré depuis 2008. Le président reste également le garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire.
  • Promulgation des lois et demandes de seconde délibération : La promulgation des lois, bien qu’essentiellement symbolique, permet au président de demander une seconde délibération par le Parlement, un pouvoir existant déjà sous la Quatrième République.

Dans la formation et le fonctionnement du gouvernement

  • Le président nomme les membres du gouvernement sur proposition du Premier ministre (article 8). Cette nomination, tout comme la révocation, témoigne d’une continuité entre les constitutions de 1946 et 1958. Cependant, le président préside le Conseil des ministres, jouant un rôle actif dans la coordination des politiques publiques, particulièrement en l’absence de cohabitation.

B) Des prérogatives renforcées et adaptées à un rôle présidentiel modernisé

Rapport avec le Parlement

  • Convocation en session extraordinaire : Le président peut convoquer le Parlement en session extraordinaire, un pouvoir qui a suscité des controverses quant à son caractère discrétionnaire. En 1960, de Gaulle a refusé de convoquer le Parlement, affirmant que ce rôle devait prévenir toute législation sous pression populaire.
    • François Mitterrand a exercé ce pouvoir de manière sélective, en particulier durant les périodes de cohabitation, comme en 1993 avec Édouard Balladur.
    • En septembre 2022, le Président Emmanuel Macron a convoqué le Parlement en session extraordinaire pour débattre et voter sur des mesures urgentes liées à la crise énergétique. Cette convocation, effectuée sur proposition du Premier ministre, a permis l’adoption rapide de lois visant à soutenir les ménages et les entreprises face à la hausse des prix de l’énergie.
  • Promulgation des lois : Bien que perçue comme une compétence liée, cette prérogative a été réaffirmée dans des contextes critiques, comme en 2006, lorsque Jacques Chirac a promulgué la loi sur le contrat de première embauche malgré une forte opposition populaire.

Pouvoir réglementaire et nomination

  • L’article 13 de la Constitution instaure un partage des pouvoirs réglementaires entre le président et le Premier ministre. Toutefois, ce partage reste ambigu, permettant au président d’exercer une influence significative sur l’activité normative. La révision constitutionnelle de 2008 a introduit des limites, notamment en exigeant un avis des commissions parlementaires pour certaines nominations stratégiques.
  • Concernant les emplois civils et militaires, le président conserve un rôle central. Cette prérogative a toutefois évolué pour renforcer la transparence et le contrôle parlementaire, notamment pour les nominations ayant un impact majeur sur l’économie et la société.

Justice et indépendance judiciaire

  • Si le président est constitutionnellement garant de l’indépendance judiciaire, des critiques persistent sur la séparation des pouvoirs. Jusqu’à la réforme de 2008, le président désignait une proportion importante des membres du Conseil supérieur de la magistrature, un organe essentiel pour la gouvernance judiciaire.

C) Une pratique renforcée mais encadrée

Sous la Cinquième République, le président de la République exerce des pouvoirs qui, bien qu’hérités des régimes parlementaires précédents, ont été élargis ou adaptés aux enjeux contemporains. Cependant, l’exercice effectif de ces prérogatives reste conditionné par le contexte politique, en particulier la cohabitation, où le Premier ministre occupe une place prépondérante. En outre, des réformes récentes, notamment celles de 2008, ont cherché à encadrer ces compétences pour garantir une gouvernance plus équilibrée et démocratique.

En résumé, bien que les prérogatives partagées du président de la République soient marquées par une forte continuité historique, elles ont été modernisées et souvent réévaluées pour répondre aux défis institutionnels contemporains.

 

II – Les pouvoirs propres (ou domaines réservés) dont le Président de la République bénéficie sous la Vème République ?

Les pouvoirs propres du Président de la République, énumérés à l’article 19 de la Constitution, représentent une nouveauté significative dans l’histoire constitutionnelle française. Ils renforcent considérablement le rôle du chef de l’État, libérant certaines prérogatives de toute obligation de contreseing et marquant une rupture avec les traditions parlementaires.

Outre ces pouvoirs constitutionnels, la pratique institutionnelle a élargi les prérogatives présidentielles, notamment dans deux domaines clés :

  • Relations internationales : Le Président est le principal acteur de la diplomatie française, dirigeant les grandes orientations stratégiques. Le Premier ministre, bien que techniquement responsable, joue souvent un rôle secondaire, se limitant à l’exécution des décisions présidentielles.

  • Défense nationale :En tant que chef des armées, le Président décide des grandes orientations militaires et stratégiques, y compris le recours à la dissuasion nucléaire.

 

1)  Les pouvoirs propres et effectifs du Président de la République sous la Vème

Sous la Cinquième République, le Président de la République exerce des pouvoirs propres qui ne nécessitent pas le contreseing du Premier ministre ou d’un autre membre du gouvernement, renforçant son autonomie dans l’exercice de ses fonctions. Parmi ces pouvoirs, trois se démarquent particulièrement : la nomination du Premier ministre, le droit de message et le droit de dissolution.

a) La nomination du Premier ministre

Une compétence inscrite à l’article 8 alinéa 1 de la Constitution

Le Président de la République dispose du pouvoir de nommer le Premier ministre, un droit qui existait déjà sous la IVème République, mais qui était alors fortement limité par l’influence de l’Assemblée nationale.

  • Sous la IVème République :

    • Le Président se contentait de nommer le chef du gouvernement proposé par l’Assemblée nationale, sans véritable pouvoir de choix. Les assemblées jouaient un rôle déterminant via les contrats de législature.
  • Sous la Vème République :

    • Le Président nomme le Premier ministre de manière discrétionnaire, sans être contraint par l’avis de l’Assemblée nationale. Grâce au phénomène majoritaire, le Président bénéficie généralement d’une majorité parlementaire stable, ce qui lui permet de choisir librement un Premier ministre en accord avec ses orientations politiques.

Évolutions et pratiques

  • Stabilité renforcée par le quinquennat :

    • Depuis l’instauration du quinquennat en 2000, le Premier ministre est davantage maintenu dans ses fonctions, même en cas de difficultés politiques, comme ce fut le cas avec Jean-Pierre Raffarin, maintenu en poste par Jacques Chirac malgré les critiques.
  • Cas particuliers :

    • La démission volontaire de Jacques Chirac en 1976 sous Valéry Giscard d’Estaing, illustre les tensions possibles entre le Président et son Premier ministre. Chirac considérait que ses compétences étaient entravées par Giscard, l’empêchant de mener à bien ses missions.

Une légitimité présidentielle renforcée

Depuis la Vème République, les Premiers ministres ne sollicitent plus l’investiture parlementaire, rompant avec la tradition des républiques précédentes. Leur nomination par le Président est considérée comme suffisante pour garantir leur légitimité, en raison de la confiance implicite de l’Assemblée nationale.

b) Le droit de message

Un pouvoir ancien revisité par la Constitution de 2008

Le droit de message, inscrit à l’article 18 de la Constitution, permet au Président de communiquer avec les assemblées parlementaires. Ce pouvoir, hérité des républiques précédentes, a connu une évolution significative avec la réforme constitutionnelle de 2008.

  • Origines historiques :

    • Sous la IIIème République, le Président de la République ne pouvait pas s’exprimer directement devant le Parlement, se contentant de faire lire ses messages. Cette limitation visait à empêcher une influence excessive sur les travaux parlementaires.
    • Exemple : La loi du Duc de Broglie (1873) interdisait au Président de se rendre physiquement devant l’Assemblée nationale, pour limiter son rôle politique.
  • Réforme de 2008 :

    • Nicolas Sarkozy a introduit la possibilité pour le Président de s’exprimer devant le Parlement réuni en Congrès.
    • Le discours présidentiel peut donner lieu à un débat parlementaire, mais ce dernier ne peut aboutir à un vote, préservant ainsi la séparation des pouvoirs.

Une pratique symbolique

Ce droit permet au Président de clarifier ses orientations politiques et de rendre compte de son action auprès des représentants de la nation. Cependant, il reste limité dans son impact pratique sur le processus législatif.

c) Le droit de dissolution

Une compétence inscrite à l’article 12 de la Constitution

Le droit de dissolution est l’un des pouvoirs propres les plus effectifs du Président de la République. Contrairement à la IVème République, où ce pouvoir était conditionné par des censures parlementaires, le Président sous la Vème République peut dissoudre l’Assemblée nationale pour des raisons politiques ou stratégiques, sans restriction préalable.

Les usages de la dissolution : Un outil stratégique :

Exemple :

      • En 1962, Charles de Gaulle dissout l’Assemblée après la censure du gouvernement Pompidou.
      • En 1981 et 1988, François Mitterrand dissout l’Assemblée pour aligner sa majorité parlementaire avec son orientation politique.
      • En 1997, Jacques Chirac utilise ce pouvoir pour consolider sa majorité, mais se retrouve en situation de cohabitation après une victoire inattendue de la gauche.
      • En juin 2024, le Président Emmanuel Macron a dissous l’Assemblée nationale, entraînant des élections législatives anticipées. Cette décision visait à surmonter des blocages politiques et à renouveler la légitimité parlementaire. Cependant, les résultats ont conduit à une situation complexe, avec le Rassemblement National remportant le plus grand nombre de sièges, suivi par une coalition de gauche, tandis que les centristes de M. Macron arrivaient loin derrière.

Les limites du droit de dissolution

Bien que discrétionnaire, le droit de dissolution est encadré par certaines restrictions constitutionnelles :

  1. Consultations obligatoires : Le Président doit consulter pour avis le Premier ministre et les présidents des deux assemblées, mais ces consultations ne lient pas sa décision.
  2. Restrictions temporelles : Une dissolution ne peut être prononcée dans l’année suivant une dissolution précédente.
  3. Article 16 : Lorsqu’il exerce les pouvoirs exceptionnels de l’article 16, le Président de la République ne peut dissoudre l’Assemblée nationale, afin de prévenir toute dérive dictatoriale.

En résumé :  Les pouvoirs propres du Président de la République sous la Cinquième République, tels que la nomination du Premier ministre, le droit de message, et le droit de dissolution, témoignent de son rôle central dans l’équilibre institutionnel. Ces prérogatives, exercées sans contreseing, renforcent son autorité et illustrent la présidentialisation du régime. Cependant, ces pouvoirs sont encadrés pour garantir une certaine stabilité politique et préserver l’esprit parlementaire de la Constitution.

 

2) Les pouvoirs propres et nouveaux du Président de la République

Le Président de la République, sous la Cinquième République, bénéficie de prérogatives étendues, incluant des pouvoirs propres, non soumis au contreseing du gouvernement, et des pouvoirs nouveaux, instaurés par la Constitution de 1958 ou développés par la pratique. Ces compétences illustrent le rôle central du chef de l’État, parfois qualifié de « monarque républicain » en raison de son autorité exceptionnelle.

a) Les pouvoirs propres : une autonomie renforcée

1. L’article 11 : le recours au référendum

L’article 11 confère au Président de la République la faculté d’organiser un référendum, établissant un contact direct avec le peuple. Cette disposition, inspirée des Constitutions bonapartistes, reflète une résurgence césarienne, renforçant la légitimité populaire du Président.

  • Origines et intentions :

    • Lors de l’avant-projet de 1958, Charles de Gaulle souhaitait surmonter d’éventuelles oppositions parlementaires en soumettant des lois directement au suffrage populaire.
    • L’article 11 devait être un instrument de rationalisation du régime parlementaire et permettre au Président de poser des questions majeures pour la vie nationale.
  • Évolutions :

    • L’article 11 a été significativement restreint lors de son adoption pour limiter ses possibilités d’usage excessif.
    • Aujourd’hui, il reste un outil puissant, utilisé notamment par Charles de Gaulle pour des réformes majeures (1962 : élection du Président au suffrage universel direct).

2. Le rôle de gardien de la Constitution

Le Président de la République exerce un rôle central dans la garantie de la Constitution à travers ses prérogatives relatives au Conseil constitutionnel :

  • Nomination des membres :

    • Le Président désigne 3 membres sur les 9 composant le Conseil constitutionnel, ainsi que son Président.
    • Ce pouvoir de nomination assure une certaine influence sur cette institution clé.
  • Renouvellement progressif :

    • Les mandats des membres sont renouvelés par tiers, garantissant leur indépendance.
  • Réformes récentes :

    • François Hollande a proposé de limiter la politisation du Conseil en excluant les anciens Présidents de la République de leur statut de membre de droit, une pratique critiquée.
  • Saisine du Conseil constitutionnel :

    • Le Président peut soumettre des lois ou des traités à l’examen du Conseil, notamment pour vérifier leur conformité à la Constitution.
    • Article 54 : En cas d’inconstitutionnalité d’un traité international, celui-ci ne peut être ratifié qu’après une révision constitutionnelle.

3. L’article 16 : les pouvoirs exceptionnels en cas de crise

L’article 16 confère au Président des pouvoirs de crise, lui permettant de concentrer l’ensemble des pouvoirs exécutifs et législatifs dans des circonstances graves.  La seule utilisation de cet article remonte à 1961, lors du putsch des généraux en Algérie Vie Publique

  • Conditions d’activation :

    • Conditions de fond :
      • Une menace grave et immédiate sur les institutions de la République, l’intégrité du territoire ou l’indépendance nationale.
      • Une interruption du fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels.
    • Conditions procédurales :
      • Consultation obligatoire du Premier ministre, des présidents des assemblées et du Conseil constitutionnel.
      • Information de la nation par un message présidentiel.
      • Réunion automatique du Parlement.
  • Encadrement des mesures :

    • Les mesures prises doivent être temporaires et viser à restaurer rapidement une situation normale.
    • Les actes pris dans ce cadre sont soumis à un contrôle juridictionnel :
      • Les décisions de recourir à l’article 16 sont des actes de gouvernement, insusceptibles de recours.
      • Les décisions prises sous l’article 16 peuvent être contestées, si elles ont un caractère administratif ou réglementaire.
  • Révision de 2008 :

    • Le Conseil constitutionnel peut, après 30 jours, vérifier si les conditions justifiant l’article 16 sont toujours réunies.
    • Au-delà de 60 jours, ce contrôle devient automatique.

b) Les nouveaux pouvoirs du Président de la République

1. Des pouvoirs renforcés par la pratique

Le Président de la République exerce également des pouvoirs qui ne sont pas explicitement prévus par la Constitution, mais qui ont émergé avec le temps :

  • La démission présidentielle :

    • Pouvoir discrétionnaire, sans fondement constitutionnel, utilisé comme levier politique.
    • Exemple : De Gaulle en 1969, après le rejet d’un référendum.
  • La nomination des collaborateurs :

    • Le Président désigne les membres de son cabinet, du secrétariat général de l’Élysée et de la cellule élyséenne, consolidant ainsi son autorité.

2. Les domaines réservés : défense et diplomatie

Les domaines réservés, une notion issue de la doctrine (Chaban-Delmas et Vedel), attribuent au Président une autorité prééminente dans deux secteurs :

  • La défense nationale :

    • Chef des armées (article 15), il décide des grandes orientations stratégiques, notamment en matière de dissuasion nucléaire.
    • Exemple : Chirac (1995) et les derniers essais nucléaires.
  • Les relations internationales :

    • Négociation et ratification des traités (article 52).
    • Exemple : De Gaulle, avec le retrait du commandement intégré de l’OTAN en 1966.

En résumé : Le Président de la République sous la Cinquième République dispose de pouvoirs propres, tels que le recours au référendum, la nomination des membres du Conseil constitutionnel et l’activation de l’article 16 en cas de crise. À cela s’ajoutent des prérogatives nouvelles liées à la pratique institutionnelle, renforçant son rôle central dans des domaines stratégiques comme la défense et la diplomatie. Ces pouvoirs, encadrés mais considérables, consacrent le chef de l’État comme un acteur clé de l’équilibre institutionnel, justifiant parfois son surnom de « monarque républicain ».

 

3) Les pouvoirs personnels du Président de la République

Des pouvoirs non ancrés dans la Constitution

Certains pouvoirs exercés par le Président de la République ne trouvent pas directement leur origine dans les textes constitutionnels, mais résultent des usages politiques et de la pratique. Ces pouvoirs traduisent l’influence personnelle et la position centrale du Président au sein des institutions.

  • La démission présidentielle :

    • Le Président peut décider de quitter ses fonctions de manière discrétionnaire, sans justification formelle. Cette pratique repose uniquement sur la responsabilité morale et politique.
    • Exemple : Charles de Gaulle démissionne après l’échec du référendum de 1969, estimant que ce résultat constitue un désaveu de sa politique. La démission peut également être une arme politique, comme la menace de François Mitterrand lorsqu’il s’estime marginalisé par son Premier ministre.
  • La nomination des collaborateurs personnels :

    • Le Président dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour désigner les membres de son entourage à des fonctions stratégiques, notamment au sein :
      • Du secrétariat général de l’Élysée, véritable centre de décision où travaillent des hauts fonctionnaires issus des grands corps de l’État.
      • Du cabinet présidentiel, composé d’un nombre restreint de conseillers politiques spécialisés dans des domaines précis comme la défense ou les relations internationales.
      • De la cellule élyséenne, une structure informelle regroupant des conseillers entièrement dévoués au Président, agissant parfois comme des ministres de l’ombre.

Une influence déterminante au sein de l’exécutif

La capacité d’influence du Président sur son propre cabinet et ses collaborateurs renforce son rôle décisionnel :

  • Le secrétariat général de l’Élysée :

    • Constitué d’une vingtaine de hauts fonctionnaires, il représente un outil stratégique pour élaborer et coordonner les grandes orientations de la présidence.
    • Le secrétaire général joue un rôle pivot, notamment en cas de cohabitation, où il sert d’intermédiaire entre le Président et Matignon.
  • Le cabinet présidentiel :

    • Chargé de suivre les aspects politiques, il est souvent réduit en nombre mais composé de personnalités influentes. Ces conseillers agissent dans des secteurs directement liés au Président, tels que la défense et les affaires étrangères.

En période de majorité présidentielle, le Premier ministre est souvent perçu comme un exécutant des décisions présidentielles, renforçant l’idée d’un gouvernement de l’ombre, tirant les ficelles du pouvoir depuis l’Élysée. En revanche, en période de cohabitation, des tensions peuvent émerger entre les proches du Président et ceux du Premier ministre.

 

 

4) Les domaines réservés du Président de la République

Origine de la notion de « domaine réservé »

La notion de domaine réservé, introduite par Jacques Chaban-Delmas en 1959 et théorisée par Georges Vedel, désigne des secteurs dans lesquels le Président exerce une influence exclusive, bien que cette compétence ne soit pas explicitement prévue par la Constitution. Ces domaines incluent principalement :

  1. La défense nationale.
  2. Les relations internationales.

Cette doctrine trouve son origine dans les pratiques établies par Charles de Gaulle, qui a profondément marqué l’exercice de la présidence en concentrant les décisions stratégiques dans ces domaines.

Bien que la Constitution ne mentionne pas explicitement un tel domaine, certaines dispositions fournissent un socle juridique à cette pratique :

  • Article 5 : Le Président de la République est « le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des traités ».
  • Article 15 : Il est le chef des armées et préside les conseils et comités de défense.
  • Article 52 : Le Président négocie et ratifie les traités.

La défense nationale

Le Président joue un rôle déterminant dans la politique de défense :

  • Décisions stratégiques majeures :

    • La gestion de l’arsenal nucléaire reste une prérogative présidentielle, instaurée par De Gaulle, qui a choisi d’équiper la France d’une force de dissuasion indépendante.
    • Exemple : Jacques Chirac, en 1995, a décidé des derniers essais nucléaires, malgré des critiques internationales.
  • Commandement opérationnel :

    • En cas de crise, le Président peut prendre des décisions rapides, comme l’utilisation des forces armées à l’étranger.

Les relations internationales

Le Président incarne la France sur la scène internationale et fixe les grandes orientations diplomatiques :

  • Prise de décisions stratégiques :

    • Exemple : Charles de Gaulle a retiré la France du commandement intégré de l’OTAN en 1966. Cette décision, symbolique de l’indépendance nationale, a été inversée par Nicolas Sarkozy, qui a réintégré pleinement la France dans l’organisation en 2009.
  • Exclusion du Premier ministre :

    • Bien que le Premier ministre puisse intervenir dans les affaires internationales, le rôle du Président reste prééminent, limitant celui de Matignon à l’exécution des décisions prises.

Une évolution selon les présidents

  • François Mitterrand : Bien qu’il ait critiqué le concept de domaine réservé, il a lui-même exercé une influence prépondérante sur la défense et les relations extérieures, les justifiant par sa fonction de garant des grands intérêts nationaux.
  • Consensus institutionnel : En période de majorité présidentielle, le Premier ministre reconnaît la suprématie du Président dans ces domaines, transformant parfois le domaine réservé en domaine partagé.

En résumé : Les pouvoirs personnels et les domaines réservés du Président de la République illustrent l’étendue de son influence sous la Cinquième République. Si ses pouvoirs personnels reflètent son autorité discrétionnaire sur son entourage et sa capacité à peser sur la scène politique, les domaines réservés traduisent une prérogative exclusive dans des secteurs stratégiques comme la défense et la diplomatie. Ces pratiques renforcent le rôle du Président comme figure centrale de l’exécutif, bien au-delà des textes constitutionnels.

Isa Germain

Recent Posts

A propos / qui sommes nous?

Qui sommes nous? Cours-de-Droit.net Créés en 2009 par des étudiants regrettant l'absence de cours gratuits…

4 semaines ago

Les mesures de police administrative

Les actions des autorités de police administrative La police administrative peut se définir comme étant…

2 mois ago

La légalité des mesures de police administrative

La légalité des mesures de police administrative L’exercice du pouvoir de police est strictement encadré…

2 mois ago

Les autorités de police administrative

Les autorités administratives compétentes en matière de police administrative Les autorités administratives compétentes en matière…

2 mois ago

Police administrative générale et police spéciales

La police administrative générale et les polices administratives spéciales Il convient de différencier, au sein…

2 mois ago

La protection de l’ordre public [police administrative]

La protection de l’ordre public, une des finalité des mesures de police administrative L'ordre public…

2 mois ago