Les sources internationales du droit administratif

 LES SOURCES INTERNATIONALES DU DROIT ADMINISTRATIF

 La supériorité du droit international : rôle accrue depuis le XXe.  

Selon le Préambule de la Constitution de 1946: la République française se conforme aux règles de Droit International Public. Les autres sources du droit administratif sont :

 

Il existe deux conceptions antagonistes sur les rapports entre les ordres juridiques nationaux et l’ordre international.

 > Le dualisme (normes du droit international n’acquièrent de force juridique qu’après leur transposition droit interne).

> Le monisme (norme du droit international directement applicable et n’exige aucune réception dans l’ordre interne sur lequel elles ont une primauté absolue).

 

La conception française est en principe moniste. Selon l’Article 55 de la Constitution : les traités ou accords régulièrement ratifié ou approuvés ont dès leur publication, une autorité supérieure à celles de la loi, sous réserve de réciprocité.

 

L’Article 55 pose le principe de la supériorité du droit international sur les lois mais est ce que le droit international est aussi supérieur à la Constitution ?

 

  Dans l’ordre international: les traités sont supérieurs à l’ensemble des normes, mêmes constitutionnelles. En effet, les engagements pris par l’Etat doivent être respecté par tous les actes qu’il édicte.

 

  Dans l’ordre interne: la Constitution reste la norme suprême, expression de la volonté du peuple souverain. CE 1998, Sarran: les engagements internationaux n’ont pas dans l’ordre interne d’autorité supérieure à celle des dispositions constitutionnelles.

 

Cette primauté de la Constitution a été confirmée par le Conseil Constitutionnel dans une décision en 2004, Traité établissant une Constitution pour l’Europe: une Constitution pour l’Europe conserve le caractère d’un traité international et la Constitution national prime.

 

Le Conseil Constitutionnel peut (dans le cadre d’un contrôle de constitutionnalité des traités [art 54] ou de la loi [art 61]) déclarer qu’un engagement international contient une clause contraire à la Constitution. Pour ratifier le traité il faudra une révision préalable. Le droit international doit donc « être reçu » par la Constitution → système de type dualiste.

 

La conception française des rapports entre le droit national et l’ordre international est variable. Elle est moniste quand il s’agit de la loi, dans ce cas, face à des normes législatives, c’est l’ordre international qui prime mais elle est dualiste quand il s’agit de la Constitution. Quand la Constitution est en cause, elle prime.

 

Les sources internationales du Droit Administratif dont le contenu et le nombre se sont fortement diversifiés (§1) encadrent dès lors l’exercice des compétences administratives dans de multiples domaines (§2) et s’imposent a l’administration (§3).

 

§1. Les normes de références

 

Le bloc de conventionalité contient de nombreuses normes (A), qui doivent être applicable pour s’imposer à l’administration (B).

 

A. Le contenu du bloc de conventionalité

 

1) Traités et conventions: contrat conclus entre plusieurs sujets de droits internationaux, en vue de produire des effets juridiques régis par le droit international. Le Président peut négocier lui-même ou déléguer ce pouvoir à une autre autorité. Une fois négocié, le traité doit être signé et le cas échéant ratifié par le Parlement. Pour produire des effets en droit interne il doit être publié au JO.

 

2) Droit dérivé de l’UE: ont le même statut dans la hiérarchie des normes d’une convention internationale. L’Article 288 TFUE distingue plusieurs types d’actes

 

– Règlement : ont un effet direct en droit interne s’applique dès publication au Journal Officiel de l’Union Européenne sur l’ensemble du territoire de l’UE, sans la nécessité d’un acte de transposition.

 

– Directives : lie les états quant aux résultats, aux buts à atteindre mais les laissent libres du choix des moyens. Doivent être transposé en droit interne par une loi ou un règlement national.

 

 Décisions : n’est pas un texte a porté général et peut désigner des destinataires. Obligatoire.

 

 Recommandations / avis : n’ont aucun effet normateur et ne lient pas.

 

3)  Normes non écrites: leur application reste obligatoire. 

 

La coutume internationale, les principes généraux du droit international bénéficie de la valeur juridique de normes internationales lorsque leur existence est clairement avérée comme des règles de Droit International.

 

Principes généraux consacrés par le juge de l’Union : même valeur que les traités de l’Union Européenne en vertu de la jurisprudence communautaire et de l’Article 6-3 du TUE.

 

B. L’applicabilité et l’interprétation du droit international

 

Les normes internationales sont soumises à des conditions pour produire leurs effets dans l’ordre interne (1). Leur interprétation fait l’objet d’une évolution jurisprudentielle significative (2).

 

1) Conditions de l’applicabilité

 

a) Signature, ratification et publication

 

Pour exister les traités doivent avoir été signés et le cas échéant ratifié ou approuvés. Un décret de publication au JO ou au JOUE est nécessaire faute d’inopposabilité.

 

La légalité de la décision est conditionnée à la régularité de la ratification et le Juge Administratif peut contrôler cette dernière. Par voie d’action le recours est alors dirigé contre le décret de publication (CE 1998 Sarl du Parc d’activité de Blotzheim) ou par voie d’exception (à l’occasion d’un litige).

 

Le JA peut vérifier la régularité loi de ratification quand cette intervention est exigée mais il est incompétent pour apprécier la conformité des conventions internationales à la Constitution. Faute de hiérarchie entre les traités, l’incompatibilité d’une convention internationale avec une autre convention est sans incidence sur sa validité ni sur la légalité du recours qui la publie. Pas d’exigence de ratification pour les actes dérivés de l’UE.

 

CE 1990 Confédération nationale des associations familiales catholiques et autres: un traité non publié au JO ou au JO de l’UE n’est pas susceptible de produire des effets de droit.

 

b) Effet normateur

 

Les dispositions internationales au caractère très vague et sans porté contraignante n’ont d’effets ni en droit international ni en droit interne. Leur non-respect par l’Etat ne saurait donc être sanctionné.

 

c) Effet direct

 

Parmi les dispositions normatives internationales seules certains sont d’effet direct et seules ci s’impose. Une norme a effet direct que si elle confère aux sujets de droit interne des droits dont ceux ci peuvent se prévaloir à l’égard des autorité nationales.

 

La qualification d’effet direct nécessite la réunion de deux conditions (CE 2012 Gisti et Fapil).

 

1. Que la disposition n’ait pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats (car dans ce cas elle ne crée aucun droit pour les particulier).

 

2. Qu’elles ne requièrent pas l’intervention d’autre acte complémentaire pour produire des effets à l’égard des particuliers (pas d’effet direct puisque la disposition est trop vague pour être applicable sans qu’aient été au préalable déterminées ses modalités d’application).

 

Pour déterminé si ces 2 conditions sont remplies ont doit prendre en considération l’intention exprimée des parties, l’économie général du traité invoqué ainsi que son contenu et ses termes. Si la stipulation désigne les Etats parties comme sujets de l’obligation qu’elle définit, il y’a toujours un effet directe.

 

d) Réciprocité

 

La suprématie du droit international à la loi est conditionnée par son application par l’autre partie. Cette exigence de réciprocité soulève trois questions:

 

1. Champ d’application: En principe applicable a tous les traités. Exception:

 

> Les obligations relatives aux droits fondamentaux (ex: la protection de la personne humaine) sont indépendante de l’attitude des autres parties.

 

> Le droit de l’Union Européenne constitue un ordre juridique spécial et intégré s’impose, hors de toute condition de réciprocité.

 

2. L’effet de l’absence de réciprocité: ni le législateur ni l’administration ne sont tenus de respecter le traité.

 

3. L’autorité compétente pour apprécier si la condition de réciprocité est ou non remplie: déclaré dans un premier temps incompétent par le Conseil d’Etat, le Juge Administratif devait renvoyer ces affaires aux ministres des affaires étrangères.

 

En 2003, le Conseil d’Etat abandonne cette position et le contrôle de réciprocité relève désormais des pouvoirs du Juge Administratif.

 

CE 2010 Mme Cheriet-Benseghir: le Conseil d’Etat vérifie si la condition de réciprocité est remplie après avoir recueilli les observations du ministre des AE et le cas échéant de l’Etat en cause.

 

2) Interprétation des traités:

 

Longtemps il fut admis qu’en cas de sérieuse difficulté d’interprétation, le ministre des Affaires étrangère, responsable de la conduite des RI, pouvait seul indiquer le sens à donner au texte.

 

Dans certains procès ou tout dépendait de l’interprétation donné au texte, l’administration était a la fois juge et partie, ce qui paraissait contraire a l’exigence d’un procès équitable.

 

CE 1990, GISTI (arrêt de revirement), le Juge Administratif est compétent pour interpréter les dispositions du DI.

 

 

L’interprétation des textes de l’Union Européenne : l’Union Européenne étant une organisation d’intégration cela nécessite une centralité de l’interprétation du droit communautaire. Création du mécanisme de question préjudicielle posé par les juges interne au juge de l’Union Européenne en cas de difficulté d’interprétation. Ceci lui assure une application unitaire sur l’ensemble du territoire de l’union. L’interprétation ou l’appréciation du juge de l’Union Européenne s’impose à la Cour, qui devra se soumettre à cette base pour résoudre son cas d’espèce.

 

§2. Les normes internationales et l’exercice des compétences administratives

 

L’incidence du Droit international sur l’action des autorités administratives est considérable. D’innombrable convention bi ou multilatérale, les traités de l’UE, la Convention de sauvegarde des droits de l’homme, l’existence de mécanisme de sanctions juridictionnelles (Cour de justice de l’UE, Cour européenne des droits de l’homme) constitue un maillage d’une densité exceptionnelle à laquelle aucun secteur de l’action administrative n’y échappe. Exemples:

 

>  L’intervention financière de la puissance publique: est largement régi par les textes de l’Union Européenne (ou les grandes libertés destinées à assurer une réelle concurrence au sein de l’Union Européenne joue un rôle essentiel).

 

>  En matière de droits fondamentaux : traité bilatéraux, pactes de l’ONU, CEDH. Concerne l’activité de police (statut des étrangers).

 

>  Environnement, urbanisme, habitat : soumise aux dispositions du droit dérivé.

 

>  La procédure contentieuse et non contentieuse : art 6 (procès équitable) et 13 (droit au recours effectif) de la CEDH + obligations issues du droit de l’Union Européenne on eu des conséquences de taille sur le contentieux administratif.

 

§3. La sanction de la violation des normes internationales par les actes administratifs

 

La violation du Droit international est sanctionnée (A). Toutefois, une limite s’est posé avec la question de l’écran législatif s’est posée comme pour la Constitution (B).

 

A. Les actes administratifs contraires aux normes internationales

 

Longtemps, bien que les traités avaient une force obligatoire au niveau international, ils ne produisaient pas d’effet en droit interne. Les liens établis entre les Etats étaient censés ne pas créer de droits invocables par les particuliers. La conduite des RI, prérogative de l’exécutif ne pouvait entrainer d’obligations pour l’administration que si elle l’acceptait. L’annulation d’un acte administratif contraire à une norme de droit international ne pouvait être obtenue.

 

Avec la Constitution de 1946 qui reconnut au traité une force de loi, le droit international s’imposa à l’administration dès lors que ses conditions d’applicabilité sont remplies.

 

1) La violation des conventions internationales

 

Le JA sanctionne toute contrariété entre l’acte administratif (réglementaire ou individuel) et les normes internationales (traité, CEDH, traités de l’UE).

 

Il peut y’a avoir une complication lorsqu’un acte administratif est incompatible avec un engagement international que parce qu’il fait application d’un autre engagement contraire au premier (= le Juge Administratif va tenter de réconcilier entre elles les normes de droit international ou de déterminer celle qui doit prévaloir).

 

CE 2001 Ministre de la Défense c/M. Diop : le contrôle de conventionalité de la loi amène le Juge Administratif à rechercher plus la compatibilité des deux normes entre elle que la conformité de la loi a la règle internationale.

 

2)  La violation du droit dérivé de l’Union européenne

 

a) Violation de règlements / décisions

 

Le droit dérivé s’impose à l’administration. Est illégal l’acte qui viole un règlement ou une décision de l’Union Européenne (lorsqu’elle produit des effets directes).

 

b) Violation de directives

 

La question est + complexe car les directives doivent être transposé et n’ont pas d’effet direct, elles créent aucun droit (même si dans la pratique les directives tendent par leur précision sans cesse accrue à se rapprocher des règlements).

 

Quel est la valeur juridique des directives de l’Union Européenne non transposée en droit interne ?

 

→ La position du CJEU:

 

Pour éviter le risque de vide juridique qui résulterait d’une absence de transposition de la directive, la CJEU a commencé à accroitre leur valeur juridique en admettant leur effet direct, comme dans CJCE 1974 Van Duyn. Elle a admis que les justiciables peuvent s’en prévaloir et invoquer la directive en l’absence de transposition sous certaines conditions : • la directive doit être claire (pose l’obligation de faire ou ne pas faire).

 

• la directive doit être précise (ne nécessite pas de règlement d’application).

 

• les dispositions invoquées doivent être inconditionnelle.

 

L’idée est de sanctionner le manquement de l’Etat à ses obligations de transpositions en donnant une force juridique aux directives même en l’absence de transposition.

 

La position du Conseil d’Etat :

 

Le Conseil d’Etat s’est d’abord séparé de la conception de la CJCU avec la jurisprudence Cohn-Bendit en refusant de reconnaitre tout effet direct à la directive, puis opéra un revirement de jurisprudence avec l’arrêt Mme Perreux.

 

 La jurisprudence du Conseil d’Etat 1978, Cohn-Bendit

 

Les actes administratifs réglementaires sont tenus de respecter les objectifs fixés par la directive. L’absence de transposition dans les délais est illégale. Les autorités administratives ne peuvent – après l’expiration des délais impartis – laisser subsister des dispositions réglementaires incompatibles avec les objectifs définis ni prendre des mesures de nature à compromettre la réalisation du résultat prescrit par celle ci. (CE 1989, Cie Alitalia).

 

Le recours contre acte réglementaire est possible – annulable pour violation de la directive ou transposition incorrecte.

 

Les actes administratifs individuels :

 

La directive n’ayant aucun effet direct, n’est invocable ni par l’Etat pour l’appliquer directement aux administrés (faute de transposition), ni par un requérant pour obtenir l’annulation de la décision prise à son encontre.

 

Cohn-Bendit contesta la décision l’expulsant du territoire français qui violait selon lui une directive de l’UE. Or le moyen invoqué par Daniel est inopérant car la directive ne peut pas être directement invoquée par un administré.

 

Il eut fallu contester la légalité du décret français régissant la procédure d’expulsion et soulever l’exception d’illégalité de ce décret au regard de la directive. S’il avait eu gain de cause, le décret aurait été écarté, et la décision individuelle d’expulsion aurait été annulée pour défaut de base juridique. Solution qui est moins simple qu’en se fondant sur la violation immédiate de la directive. On le voit le justiciable ne peut invoquer directement les effets d’une directive. Restait l’hypothèse de non transposition de la directive: soulever l’exception l’illégalité semble impossible puisqu’il n’existe a priori aucun acte intermédiaire entre la directive et l’acte individuel. Si a l’expiration du délai de transposition aucune mesure nationale n’a été prise, il faut pour contester la régularité d’une décision individuelle, soulever l’exception l’illégalité contre la réglementation qui est à la base de l’acte et l’écarter en raison de son incompatibilité avec les dispositions de la directive.

 

Longtemps le Conseil d’Etat refusé d’examiner, lorsqu’il est soulevé à l’encontre d’un acte administratif individuel, le moyen tiré de l’incompatibilité avec une directive.

 

Cette solution de principe reposait sur la définition de la directive: acte dont seuls les Etats membres sont destinataires et dont les effets dans leurs ordres internes sont subordonnés à une opération de transposition.

 

Mais comme la transposition des directives est une obligation constitutionnelle la jurisprudence Cohn-Bendit a été abandonnée sous certaines conditions (absence de mesures de transpositions dans les délais impartis, dispositions précises et inconditionnelles de la directives).

 

 Revirement de jurisprudence avec l’arrêt du Conseil d’Etat 2009 Mme Perreux:

 

Désormais, avec l’arrêt Perreux, tout justiciable peut se prévaloir, a l’appui d’un recours contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles (1) d’une directive, lorsque l’Etat n’a pas pris, dans les délais impartis les mesures de transposition nécessaire (2). Effet direct des directives (= même sans transposition). Ainsi, la directive doit toujours être respectée:

 

 qu’elle ait été transposé en droit interne: la régularité des actes de l’administration au regard de la directive est vérifié par voie d’action ou par voie d’exception.

 

 ou qu’elle ne soit pas transposée en droit interne. Elle ne peut échapper a ses obligations internationales, qu’il s’agisse des actes réglementaires (CE 1989 Cie Alitalia) ou individuel (CE 2009 Perreux).

 

Le Conseil d’Etat rejoint les conceptions de la CJCE en reconnaissant un effet direct aux directives non transposé.

 

B. L’acte administratif face à l’écran législatif

 

Un acte administratif fondé sur une loi dont il constitue une mesure d’application, se trouve être en contrariété avec un traité. Pour assurer la supériorité du droit international sur les normes administratives, il faut écarter la loi qui fait écran. Qui est compétent ?

 

1) Solutions initiales

 

Principe : le Conseil d’Etat s’est refusé d’annuler une loi incompatible avec un traité pour annuler l’acte administratif contraire au Droit International. Justification : le juge administratif assimilait implicitement ce contrôle à un contrôle de constitutionnalité, car une loi violant le traité viole en fait l’article 55 de la Constitution.

 

Exception : si la loi est antérieure au traité. On considère que la norme de droit international à implicitement abrogé la loi antérieur. Et donc la base juridique de  l’acte administratif ayant disparu, il peut annuler l’acte administratif contraire au Droit International.

 

2) Evolutions postérieures

 

 L’impossible contrôle de la conventionalité des lois par voie d’action

 

Perte de force de l’argument du Conseil d’Etat comme quoi vérifier le rapport de compatibilité de la loi au regard du droit international consiste à exercer un contrôle de constitutionnalité.

 

Le Conseil Constitutionnel (1975, Loi relative à l’IVG) se reconnut incompétent pour examiner la compatibilité de la loi a la CEDH lorsqu’il fut saisi de la loi Veil sur l’avortement. => Refus du contrôle de la conventionalité des lois par voie d’action.

 

Causes du refus du contrôle de la conventionalité des lois par le Conseil Constitutionnel :

 

 un tel contrôle n’est pas expressément prévu par l’Article 61 de la Constitution. Les traité ne font pas partie du bloc de constitutionnalité.

 

 les décisions d’annulation prises dans le cadre de l’Article 61 revêtent un caractère absolu et définitif alors que la supériorité des traités sur les lois présente un caractère à la fois relatif et contingent.

 

Cette supériorité du traité sur la loi est limitée au champ d’application du traité et subordonnée à une condition de réciprocité dont la réalisation peut varier selon le comportement des signataires.

 

La supériorité du traité peut varier dans l’espace (= un traité peut s’imposer a une loi pour des situations visé par lui, mais n’avoir aucune incidence pour les autres) et dans le temps (= supériorité subordonné a la condition de réciprocité : quand cette condition n’est pas respecté, le traité est écarté, il n’est plus supérieur a la loi).

 

 Le contrôle de la conventionalité des lois par voie d’exception Jurisprudence judiciaire: La Cour de Cassation se reconnut le pouvoir d’exercer un contrôle de la conventionalité de la loi, c’est à dire le droit de vérifier si la loi était compatible avec le droit international (1975 Société des cafés Jacques Vabre).

 

Jurisprudence constitutionnelle: Le Conseil Constitutionnel se reconnut en 1988 le pouvoir d’exercer un contrôle de conventionalité de la loi lorsqu’il intervient comme juge du fond (juge électoral).

 

Jurisprudence administrative: Face à l’évolution générale, il se reconnut à son tour cette compétence, abandonnant la jurisprudence Semoules de France.

 

Jusqu’à lors, le Conseil d’Etat refusait de faire prévaloir un traité sur une loi postérieure. Refus de censurer les actes du législateur. Si le traité postérieur prime sur une loi antérieure, c’est parce qu’en ratifiant le traité, le législateur a eu l’intention implicite de modifier la loi.

 

Depuis l’arrêt du Conseil d’Etat 1989, Nicolo le traité a une primauté de principe sur la loi. Et même dans le cas d’une loi postérieur au traité, le traité prime.

 

De plus, avec cet arrêt, le Conseil d’Etat s’est reconnu compétent pour contrôler la conventionalité de la loi.

 

Le JA s’interroge désormais sur la compatibilité entre les normes internationales et législative. L’administration ne peut plus s’abriter derrière une loi postérieure au traité pour échapper à ses obligations internationale. La loi cesse d’être incontestable si a la date ou le juge statue il y’a incompatibilité avec le traité. Tout traité prime sur toute loi.

 

Mécanisme de l’exception d’inconventionnalité :

 

Sanction : Le juge se borne à ne pas appliquer au cas d’espèce la norme reconnut inconventionnelle, mais elle reste théoriquement applicable. Ne sont donc pas invalidé erga omnes (opposable a tous) ou abrogé (comme dans le cadre d’une QPC).

 

La nature de l’inconventionnalité :

 

 L’inconventionnalité peut tenir au contenu même de la loi indépendamment des données de l’espèce. Dans ce cas, même si elle reste applicable en théorie, elle ne pourra gère être appliquée en fait puisque toute application qui en serait faite présenterait la même inconventionnalité.

 

 L’inconventionnalité peut affecter que l’application qui a été faite de la loi, elle n’est donc pas systématiquement inconventionnelle.

 

Exception d’inconventionnalité et inconstitutionnalité:

 

Le juge ordinaire s’interroge sur la compatibilité de la loi au regard d’une norme conventionnel quasiment identique à celle contenu dans la Constitution.

 

Le contrôle de conventionalité est très proche du contrôle de constitutionnalité par voie d’exception. C’est un contrôle indirecte de constitutionnalité, le Juge Administratif prend compte de la jurisprudence du Conseil Constitutionnel lorsque les droits en causes sont identiques pour éviter toutes contradictions. Conseil Constitutionnel : contrôlé de constitutionnalité. Juge ordinaire : contrôlé de conventionalité.

 

Pouvoir du Parlement français et droit dérivé:

 

Le Parlement peut être appelé à intervenir pour donner l’autorisation de ratifier un traité. Mais le juge peut écarter une loi voté par la Parlement pour contrariété avec une norme de Droit International. Les pouvoirs du Parlement sont donc considérablement limités.

 

La révision en 2008 de l’article 88-4 de la Constitution permet de réintroduire le législateur français dans le jeu européen : tous les projets d’actes de l’Union Européenne doivent lui être communiqués qu’ils comportent ou non des dispositions législatives. Le parlement ne peut s’opposer à ces projets mais il peut participer à la procédure d’élaboration de la norme de l’Union Européenne.

 

 

§1. La supériorité des normes internationales sur les lois nationales

 

La Constitution pose une réponse simple : l’article 55. L’application de cet article s’est compliquée au nom d’un nationalisme juridique: la réticence des juges à considérer que la volonté des institutions communautaires prime sur la volonté manifestée par le législateur. Vision légicentriste. Les choses ont basculé avec l’arrêt du Conseil d’Etat 1989 Nicolo.

 

A.  La jurisprudence antérieure à l’arrêt « Nicolo »

 

Fixée par la jurisprudence des semoules. A cette époque, les traités ne pouvaient être introduits dans l’ordre juridique interne, qu’après avoir fait l’objet d’une loi de ratification. La manifestation de la volonté du parlement était nécessaire pour l’entrée des normes internationales dans l’ordre juridique interne.

 

Il était possible de résoudre le conflit de norme par la règle de chronologie de manifestations de volonté. Quand le traité est postérieur à une loi contraire à celui-ci, cela signifie que le parlement a eu implicitement la volonté de modifier la loi. Le traité postérieur prime sur la loi antérieure.

 

Et inversement, la loi postérieure prime sur le traité antérieur. A tout moment le législateur peut revenir sur le traité qui a été signé par la République française, et c’est cette nouvelle volonté du législateur qui va s’appliquer. Il y a une sorte de pouvoir d’évocation ou de droit de veto du législateur à tout moment. On consent à une norme internationale, mais à tout moment on peut décider autre chose et c’est cette autre chose qui s’applique.

 

B.  Revirement de jurisprudence avec l’arrêt « Nicolo »

 

Cet un arrêt de principe qui établit la primauté du traité (même sur une loi postérieure).

 

1) Les justifications de la jurisprudence Nicolo

 

 L’isolement croissant du Conseil d’Etat dans sa position de primauté de la loi postérieure sur le traité: la totalité des juges des Etats membres de l’Union avaient reconnu la primauté du traité communautaire sur la loi, y compris postérieure.

 

Cette position avait été adoptée par d’autres juges français : la Cour de cassation dans Société des Cafés Jacques Vabre, elle avait admis la primauté des normes internationales sur la loi, et ceci d’une manière générale.

 

 L’article 55: la position du Conseil d’Etat aboutissait à nier la primauté du traité sur la loi, pourtant consacrée dans l’article 55. C’est gênant d’avoir une disposition jurisprudentielle qui aboutit à une position inconstitutionnelle.

 

 La position du Conseil d’Etat contribuait à créer un vide juridique : car il n’y avait aucune procédure juridique permettant de sanctionner les atteintes à l’article 55 et de garantir la primauté du traité sur la loi.

 

Le juge s’y refusait (jurisprudence des semoules) et le Conseil Constitutionnel se refuse le contrôle de conventionalité (depuis 1975). Nuance : dans une décision du Conseil Constitutionnel de 2004 Loi relative à la confiance dans l’économie numérique : le Conseil Constitutionnel s’autorise à vérifier respect de l’article 88-1 C, toujours contrôle de constitutionnalité, pas de conventionalité.

 

2)  Les conséquences de la jurisprudence Nicolo

 

En cas de contrariété entre une loi et un traité, le juge administratif doit systématiquement faire primer le traité sur la loi. C’est la conséquence la plus immédiate de l’arrêt. Tout traité prime sur toute loi.

 

Cette primauté vaut à l’égard de tout traité international, elle n’est pas spécifique au droit communautaire.

 

Si une loi a été maintenue alors qu’elle était contraire à une règle internationale, et qu’un administré ou une entreprise en a subi un préjudice, entreprise ou administré a droit à une réparation du préjudice subi. La méconnaissance par la loi du droit communautaire, du droit international, entraine la responsabilité de l’Etat. CE 2007 Sieur Gardedieu.

 

§2. Les rapports entre les normes internationales et la Constitution

 

A.  Le principe de primauté de la Constitution sur les normes internationales

 

1)  La consécration du principe

 

Selon le Conseil d’Etat 1988 Sarran et Levacher, la primauté des normes internationales ne s’applique pas aux dispositions constitutionnelles.

 

Cette position du Conseil d’Etat est commune aux autres juges français, notamment la Cour de Cassation, arrêt de son assemblé plénière en 2000 Mme Fraisse: la Constitution prime sur les normes internationales.

 

2)  La justification du principe

 

Ce principe ne va pas de soi car il donne la possibilité au pouvoir constituant des Etats de méconnaitre le droit international et le respect de la parole donnée (principe qui fonde les traités internationaux).

 

En intégrant une règle de la Constitution, on peut se défaire de ce qu’on a accordé dans un traité. Justification: L’ordre juridique interne de tout Etat est fondé sur sa Constitution, c’est la Constitution qui instaure toute norme, c’est le pouvoir constituant originaire qui instaure toute norme, qui instaure tout pouvoir public. Ces autorités publiques dépendent de la constitution, elles ne peuvent donc pas consacrer une règle ou un principe qui conduirait à donner à une norme juridique, dans l’ordre juridique interne, une valeur supérieure à la norme qui les fonde (la Constitution).

 

B.   Les limites au principe de la primauté de la Constitution

 

1)    Les limites de la primauté de la Constitution dans l’ordre juridique international

 

Dans l’ordre juridique international, la règle internationale prime la règle interne, y compris la règle C.

 

2)     Les limites de la primauté de la Constitution dans l’ordre juridique interne

 

Ces limites à la primauté de la constitution dans l’ordre interne concernent exclusivement les règles de l’UE.

 

Le problème s’est essentiellement posé à propos de la question de la transposition des directives communautaires. Imaginons une directive qui doit être transposée par le législateur. Il faut donc adopter une loi de transposition. Or la directive est contraire à la constitution. Faut-il transposer la directive ou faut-il assurer d’abord le respect de la Constitution, c’est-à-dire ne pas transposer la directive, tout au moins le temps que l’on modifie la constitution ?

 

a) La réponse du Conseil constitutionnel dans une décision en 2004 Loi pour la confiance dans l’économie numérique, 2004

 

Le Conseil Constitutionnel fut saisit d’une loi transposant une directive communautaire. Pour les auteurs de la saisine cette loi est contraire à la Constitution. La question était, que faut-il appliquer, la Constitution ou la directive ?

 

A priori la réponse devrait être simple, (surtout depuis le refus du Conseil Constitutionnel en 1975 de contrôler la conventionalité de la loi) étant juge de constitutionnalité, il doit vérifier la compatibilité de la norme litigieuse à la Constitution.

 

Sauf qu’entre-temps, en 1992, pour ratifier le traité de Maastricht, il a fallu modifier la Constitution et intégrer des dispositions dans celle-ci qui ont permis l’intégration du traité, notamment l’article 88-1.

 

Cet article rappelle la participation de la France à l’Union Européenne et impose que la France respecte ses obligations communautaires, et donc impose que la France transpose correctement les directives communautaires. Cet article donne un fondement constitutionnel à l’obligation de transposer les directives.

 

Dès lors, le Conseil Constitutionnel est compétent pour vérifier que la loi qui lui est déférée est bien conforme à la directive que cette loi transpose, car vérifier cela ce n’est pas faire un contrôle de conventionalité, mais un contrôle de constitutionnalité car c’est vérifier le bon respect de l’article 88-1.

 

Si la directive est contraire à une norme constitutionnelle, est-ce qu’on peut évacuer totalement la question du respect de la constitution, juste du fait de l’article 88-1 ?

 

Pas tout à fait répond le Conseil Constitutionnel, car en réalité la primauté du droit communautaire sur la Constitution, du fait de l’article 88-1, ne vaut que dans la mesure où les règles communautaires que l’on applique, que l’on transpose, sont des règles similaires ou identiques aux règles constitutionnelles françaises.

 

Quand la loi de transposition méconnaît une règle constitutionnelle qui découle de l’identité constitutionnelle de la

 

France, c’est-à-dire des spécificités constitutionnelles de la France, qui ne se retrouvent pas dans l’ordre juridique communautaire, alors, dans ce cas, malgré l’article 88-1, il y a lieu de garantir la primauté de ce noyau dur constitutionnel français.

 

Autrement dit, de fait, les directives communautaires priment sur la Constitution française, sauf lorsqu’est en cause une règle constitutionnelle qui ne se retrouve pas dans l’ordre juridique communautaire, qui est spécifique à l’ordre constitutionnel français (ex : principe de laïcité) et dans ce cas il faut préserver l’identité constitutionnelle de la France.

 

b) La réponse du Conseil d’Etat dans l’arrêt 2007 Société Arcelor

 

En l’espèce, fut invoquée la méconnaissance par le décret de transposition d’une directive de règles constitutionnelles. Le décret est conforme à la directive, mais la directive méconnait le principe d’égalité, la directive n’est pas conforme a la Constitution. Que faire ?

 

La CE fut saisi d’une demande d’écarter le décret de transposition (donc la directive), pour faire respecter les règles constitutionnelles.

 

 

Le Conseil d’Etat commence par se fonder lui aussi sur l’article 88-1 de la constitution. Il tire de cet article une obligation constitutionnelle de transposition des directive et en déduit que le contrôle des actes de transposition de la directive, loi ou décret, doit obéir à des règles particulières. Quelles règles particulières ?

 

Þ  Si la règle constitutionnelle invoquée (que le décret de transposition méconnait) a un équivalente dans son contenu à une règle communautaire: la règle de transposition et donc la directive devront être contrôlées par rapport à la règle communautaire équivalente. Il appartient alors au juge interne de vérifier si la directive est conforme à une règle communautaire supérieure.

 

       Si la compatibilité ne pose pas de problème, alors le juge communautaire tranche la difficulté et considère que directive est conforme.

 

       Si la règle supérieure n’est pas claire, il lui a appartient de poser une question préjudicielle à la Cour, et c’est la CJUE qui tranchera pour savoir si la directive est contraire à l’ordre juridique communautaire.

 

Þ  Si la règle constitutionnelle invoquée est propre au droit français, et relève de l’identité constitutionnelle de la France: il faut s’assurer que la directive respecte la règle constitutionnelle propre à l’identité constitutionnelle française.

 

Il résulte en l’état actuel de la jurisprudence, s’agissait spécifiquement du droit communautaire, qu’il existe une primauté partielle des règles communautaires sur les règles constitutionnelles. Elle connait des limites : celle du respect de l’identité constitutionnelle de la France.

 

§3. Les rapports entre les normes internationales et les actes administratif

 

CE 1952 Kirkwood la suprématie des traités sur les actes administratifs.

 

CE 2011 Kandyrine saisi d’un recours contre une décision administrative appliquant les stipulations d’un traité que le requérant estime incompatible avec un autre traité le Juge Administratif tente de les concilier. Il n’y a pas d’hiérarchie entre les traités.

 

Si conciliation impossible le juge doit faire application de la norme internationale dans le champ de laquelle la décision administrative a entendu se placer et il écarte l’autre norme internationale.

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