Les sources du droit : élaboration et hiérarchie

Le cadre légal et règlementaire

La France est un pays de droit écrit avec cependant quelques sources de droit oral qui sont des survivances.

Ces sources du droit sont hiérarchisées : une source est toujours subordonnée à la source qui lui est supérieure.

I – Les sources directes du droit objectif

A – La loi ordinaire

Au sens large, dans le langage commun, il y a confusion entre les diverses règles juridiques. Ainsi, tout texte est assimilé à une loi. Or, au sens juridique du terme, la loi est seulement le texte voté par le parlement, conformément aux règles établies par la Constitution.

La loi constitutionnelle : de la Constitution même

La loi référendaire, qui selon l’article 11 de la Constitution, consiste à présenter directement au peuple français et non pas aux parlementaires, un texte organisant les pouvoirs publics.

La loi organique qui sont des dispositions constitutionnelles prévoyant l’intervention obligatoire du parlement, par exemple pour la déclaration de guerre (article 35).

La loi ordinaire est la source de droit par excellence. C’est donc un texte qui s’applique à tous les citoyens d’une façon abstraite et permanente. Cette loi ordinaire peut être impérative ou supplétive.

La loi impérative est d’ordre public. Il est impossible d’y déroger par des conventions particulières. La loi supplétive interprète la volonté des partis et elle peut être écartée par des conventions particulières.

1 – Elaboration de la loi

  1. a) domaine de la loi

Il nous est donné par l’article 34 de la Constitution

  1. b) étapes de l’élaboration de la loi

Lois proposées par le pouvoir législatif.

Projets de loi proposés par le gouvernement élaborés en conseil des ministres

Déposés sur le bureau de l’Assemblée Nationale, cependant, c’est le gouvernement qui détermine l’ordre du jour : initiative des lois (en majorité, pouvoir exécutif).

Une fois que le texte est déposé, il va faire l’objet d’un travail en commission : amendement par des rapporteurs à 1° lecture Assemblée Nationale

promulgation : signature qui doit intervenir dans les 15 jours après le vote final.

2 – Application de loi

  1. a) dans le temps : application du principe de la non rétroactivité des lois

Une loi peut être abrogée de façon express ou de façon tacite. L’abrogation express figure en toute lettre dans le nouveau texte.

L’abrogation tacite existe en dehors de toute abrogation formelle lorsqu’un texte ancien se trouve contredit par un autre plus récent.

Principe lorsqu’il y a interactivité : non rétroactivité

L’article 2 du code civil précise que la loi ne dispose que pour l’avenir. Elle n’a pas d’effet rétroactif. Ce principe s’impose au juge mais pas au législateur.

  • application du principe par le juge :

lorsqu’une loi nouvelle vient modifier les effets d’un contrat, elle s’applique aux effets des contrat à venir alors que les effets des contrats antérieurement conclus demeurent soumis à la loi ancienne.

Il s’agit en effet de sauvegarder la stabilité des contrats et de respecter la commune volonté des parties.

Ensuite, lorsqu’une nouvelle loi vient modifier une situation légale, cette loi ne s’applique que pour les effets à venir. La loi nouvelle remplace immédiatement la loi ancienne. Il est en effet nécessaire que toutes les personnes qui se trouve dans une même situation, à un moment donné, soient soumises à la même législation.

  • Application par le législateur :

il peut de lui même édicter des lois rétroactives. Elles sont rares et furent toujours votées dans des périodes troublées. Ex : révolution nationale, 1994 crimes, …

Mais certaines lois sont normalement rétroactives quand l’intérêt général et les intérêts particuliers sont en même temps améliorés. Ainsi, par exemple, les lois d’interprétation sont normalement rétroactives : lois qui précisent le sens d’une loi antérieure (ambiguës, obscures).

Les lois pénales plus douces sont normalement rétroactives. Elles s’appliquent aux délinquants qui n’ont pas encore fait l’objet d’une condamnation définitive sauf en matière économique et fiscale.

Les lois de procédure s’appliquent immédiatement à toutes les instances judiciaires en cours.

Le législateur peut édicter des lois rétroactives pour des raisons d’ordre public.

b)dans l’espace : conflits de lois et droit international

Depuis 1804, la codification napoléonienne, le principe est l’unité de législation sur le territoire français. Cependant, l’Alsace-Lorraine a conservé des dispositions du droit allemand depuis 1919, depuis le traité de Versailles qui a instauré le statut de concordat.

Ex : le statut des associations, la publicité immobilière, les contrats d’assurance, le droit du travail, de la sécurité sociale, obéissent à des règles différentes du droit français. Cependant le droit français gagne de plus en plus de terrains sur le droit Alsacien et Lorrain.

La loi métropolitaine s’applique de plein droit dans les départements d’outre-mer sauf disposition particulière expressément exprimée dans la loi.

Pour les DOM-TOM, c’est la coutume locale qui s’applique, la loi française n’étant applicable que pour une disposition particulière.

Les frontières au delà desquelles le système juridique français perd sa force obligatoire avec l’essor des , la mobilité des personnes, le droit international prend de plus en plus d’importance

La difficulté de cette discipline vient du fait que chaque pays a ses propres règles pour résoudre les conflits de lois dans l’espace. La réponse française est donnée par l’article 3 du code civil. Cet article pose 2 principes :

– le principe de la personnalité de la loi : la loi française s’applique à tous les français, mêmes ceux qui résident à l’étranger pour ce qui concerne l’Etat, la capacité, et le statut des personnes.

– le principe de la territorialité : la loi française s’applique sur tout le territoire français y compris aux étrangers qui résident en France, pour ce qui concerne les lois de sûreté, et la loi sur les immeubles.

Cet article 3 du code civil est insuffisant pour régler tous les cas, il en résulte une très abondante jurisprudence qu’il faut consulter pour déterminer la loi territorialement applicable en cas de conflit entre des lois de plusieurs pays.

B – Les règlements

Ils comprennent l’ensemble des textes pris par le pouvoir exécutif donc par le gouvernement, tout ce qui n’est pas légiféré.

1 – Les ordonnances

Elles s’appelaient autrefois des décrets lois ; ce terme montre bien la nation hybride de l’ordonnance.

L’ordonnance est bien un acte réglementaire parce qu’elle est élaborée par le gouvernement. Elle intervient dans les domaines notamment réservé à la loi.

Les ordonnances appartiennent bien au domaine du règlement car les recours contre ces ordonnances relèvent des juridictions administratives alors que les litiges relatifs aux lois relèvent du domaine judiciaire.

Le schéma d’élaboration de l’ordonnance nous montre qu’elles sont bien élaborées par le gouvernement mais contrôlées par le parlement.

  • Loi d’habitation
  • Avis du conseil d’Etat
  • Rédaction en conseil des ministres
  • Signature du président de la République

L’ordonnance

Publication au journal officiel

entre en vigueur

immédiatement

Ratification par l’Assemblée Nationale

Exemples d’utilisation des ordonnances

  • en 1945, une, ordonnance crée le régime général de la sécurité sociale
  • en 1982, la réduction du temps de travail à 39 heures et la 5° semaine de congés payés ont été votés par voie d’ordonnance
  • Réduire le temps de travail créerait des emplois au 5° semaines de congés payés en 1981 avec Mitterrand. Finalement, ordonnance 5° semaine de congés payés.
  • Le plan Juppé, maîtrise des dépenses de la sécurité sociale mise en place par 4 ordonnances.

2 – Décrets

Décrets d’application des lois : article 21 soumis au contrôle du conseil d’Etat.

Décret subordonné à une loi.

Les décrets autonomes, article 37 de la constitution, ils sont signés par le premier ministre en sa qualité de chef de gouvernement.

Ils sont hiérarchiquement inférieurs aux lois et relève du contentieux administratif. Certains décrets autonomes font l’objet de délibération en conseil des ministres, ils sont alors signés par le président de la République, ils sont aussi contresignés par les ministres chargés de leur exécution. Il n’y a pas de domaine précis faisant l’objet de telle délibération. Il s’agit simplement de donner plus d’importance à un décret.

Les décrets simples sont utilisés pour les nominations aux emplois de fonctionnaire. Ils sont contresignés par les ministres ou par l’organisation de département ministériel.

3 – Les arrêtés qui interviennent à un échelon inférieur

Leur objet est de prévoir les mesures d’application concrète des lois et des décrets auxquels ils sont subordonnés.

Sur un plan hiérarchique et par ordre décroissant, il y a :

– les arrêtés interministériels signés par 2 ou plusieurs ministres ;

– les arrêtés ministériels qui sont signés par un ministre ;

– les arrêtés préfectoraux qui sont signés par le préfet et dont la force exécutive est restreinte soit à la région, soit au département ;

– les arrêtés municipaux qui sont signés par le maire et qui ne sont obligatoires que sur le territoire d’une commune.

Tous les arrêtés doivent être pris dans le respect des lois. Par exemple : un arrêté municipal qui décide de la limitation de vitesse en agglomération, le maire peut décider de rouler à 30km/h dans sa ville mais il ne peut pas décider 70km/h, ce qui est contraire à la loi.

4 – Les circulaires ou instructions de service

Ce sont des prescriptions que les autorités administratives adressent aux fonctionnaires placés sous leur tutelle au sujet de l’interprétation et de l’application des lois et des règlements.

Ces documents s’imposent aux fonctionnaires, ils doivent s’y conformer mais les circulaires n’ont pas d’effets à l’égard des administrés, elles ne leur sont pas opposables et ne peuvent les invoquer à leur avantage. Ce ne sont pas des documents officiels à l’usage du public.

Les circulaires ont un usage considérable. Le fonctionnaire n’exécute pas directement la loi, il exécute la circulaire de cette loi. Il est essentiel pour les administrés de savoir comment les dispositions légales sont analysées dans les circulaires. Les administrés peuvent en prendre connaissance car elles sont publiées au journal officiel.

5 – Divers

Les directives : lignes de conduite que se fixe l’administration

Les avis : ce sont des règlements consultatifs

Des modèles types : statut, cahier des charges

Les réponses ministérielles : ce sont des réponses d’un ministre à une question posée par un député, les réponses sont publiées au J.O.

II – Autres sources du droit objectif

A – La doctrine

Ensemble des travaux et des études juristes portant sur différent problème de droit (manuel, thèse, article de journaux).

Ce n’est qu’une source indirecte, car ce ne sont que des commentaires, analyses.

La doctrine peut influencer les juges. En effet, en commentant la jurisprudence, la doctrine peut dégager des principes et montrer aux juges les lignes de conduite à suivre pour l’application de la loi.

Elle peut influencer le législateur car en montrant les imperfections des lois, elle peut faire des suggestions, et des lois nouvelles peuvent s’inspirer des travaux de la doctrine. Des rapports sont souvent demandés avant les réformes, ces rapports sont publiés à la documentation française.

B – La jurisprudence

Ensemble des décisions émanant des juridictions ; il s’agit des jugements pour les juridictions du fond et des arrêts pour les cours.

Ce sont principalement les arrêts de la cour de cassation et les arrêts du conseil d’Etat qui font jurisprudence. Ils s’imposent aux autres juridictions.

Les arrêts ne font jurisprudence que s’ils se répètent un certain nombre de fois jusqu’à établir une règle jurisprudentielle. Cette règle n’a pas la valeur d’une règle de droit. Il lui manque à la fois le caractère général et le caractère obligatoire.

La jurisprudence présente parfois des décisions contradictoires. Elle est soumise à des revirements. Elle reste une somme de décisions individuelles. Cependant, sa fonction est utile, elle interprète les lois ou elle comble les lacunes. On peut véritablement parler du rôle créateur de la jurisprudence.

C – Les principes généraux du droit

Ils sont une survivance de la tradition orale. Ce sont des règles non écrites à l’origine qui s’imposent de façon permanente aux législateurs et aux juges. Ce sont des principes qui tâchent l’ordre politique comme le principe d’égalité, de laïcité, de liberté individuelle, ou qui touche l’ordre moral.

La doctrine et la jurisprudence ont fréquemment rappelés ces principes, qui se trouvent inscrits désormais alors qu’avant ils étaient oraux.

D – La coutume et les usages

La coutume est une pratique de la vie juridique qui présente un caractère habituel et qui tend à se poser en règle de droit. Cependant, tout comportement habituel dans la vie sociale n’est pas une coutume.

Ex : du pourboire

Pour qu’il y ait coutume, il faut que soit réuni un élément matériel et un élément psychologique.

L’élément matériel c’est un comportement suivi de manière habituelle. La coutume doit avoir une certaine ancienneté pour que sa mise en œuvre répétée soit possible.

L’élément psychologique implique que ce comportement soit perçu comme obligatoire dans l’opinion. La coutume présente les caractères essentiels de la règle de droit.

Elle est exprimée de façon générale et impersonnelle ; elle a un caractère obligatoire. Malgré cela, elle reste une source secondaire et accessoire par rapport à la loi.

Les usages : ils sont parfois confondus avec la coutume mais il faut les distinguer.

Les usages s’appliquent davantage à des pratiques qui n’ont pas forcément une grande portée juridique.

Les usages sont aussi de tradition orale mais on les trouvent de plus en plus consignés par écrit. Ainsi, les usages professionnels peuvent être authentifier dans les parères délivrés dans les chambres de commerce.

Les usages en droit du travail se trouvent souvent consignés dans les accords d’entreprise.

E – Divers

La pratique : ce sont des règles qui découlent de formules types et qui finissent par s’imposer comme usage. Ex : franchise.

Parfois, des pratiques sont consacrées par des législateurs : le crédit bail a d’abord été une pratique avant d’être recommandé par la loi.

La déontologie : règles qui ont un aspect réglementaire mais rédigé par un ordre.

Ces codes de déontologie font des règles de conduite, de morale.