LES SOURCES ÉCRITES DU DROIT
SECTION 1 – Les sources Internes du Droit (ou sources nationales)
En France, la principale source du droit interne est la loi, bien que d’autres actes réglementaires interviennent également dans l’élaboration des règles juridiques. Ces règles sont organisées selon une hiérarchie des normes qui assure leur cohérence et résout les éventuels conflits entre elles.
- Qu’est-ce que le raisonnement juridique ?
- Résumé de droit civil : famille, patrimoine, personne…
- L’organisation territoriale et politique (État, département…)
- Le droit objectif : caractère, définition, ses branches
- Quelles sont les sources du droit objectif ?
- Quelle est l’organisation des juridictions françaises ?
- Droits subjectifs : définition, sources, preuves
La hiérarchie des normes est un principe fondamental qui régit l’ordre juridique interne en classant les normes selon leur importance. En France, cette hiérarchie se présente comme suit :
- La Constitution : C’est la norme suprême, qui définit l’organisation des pouvoirs publics et garantit les droits fondamentaux.
- Les lois organiques : Elles complètent ou modifient la Constitution en encadrant le fonctionnement des institutions. Elles sont soumises à un contrôle constitutionnel avant promulgation.
- Les lois ordinaires : Ce sont les lois votées par le Parlement dans les domaines définis par la Constitution. Elles incluent les lois de finances et les lois de programmation.
- Les règlements : Ils sont pris par le pouvoir exécutif pour appliquer ou compléter la loi. Ils se subdivisent en règlements d’application et règlements autonomes (ces derniers régissent les matières non couvertes par la loi).
- Les arrêtés : Ils sont adoptés par des autorités administratives (ministres, préfets, maires) et concernent des domaines précis.
1 – La Constitution de 1958
La Constitution du 4 octobre 1958 est la norme suprême de l’ordre juridique français. Elle définit les principes fondamentaux de la République, organise les institutions et répartit les pouvoirs entre les autorités publiques. Adoptée sous l’impulsion du général de Gaulle, elle marque la naissance de la Ve République et renforce le pouvoir exécutif face au Parlement pour garantir la stabilité institutionnelle.
Structure et contenu de la Constitution de 1958
La Constitution comprend 89 articles répartis en 16 titres, et elle est précédée d’un préambule qui lui confère une portée symbolique et juridique majeure. Ce préambule renvoie aux textes suivants :
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La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 (DDHC), affirmant les droits civils et politiques fondamentaux.
-
Le Préambule de la Constitution de 1946, qui pose des droits économiques et sociaux, comme le droit au travail et la protection sociale.
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La Charte de l’Environnement de 2004, intégrée au bloc de constitutionnalité en 2005, introduisant des droits et devoirs en matière de protection de l’environnement.
Ces éléments, combinés aux articles de la Constitution, forment le bloc de constitutionnalité, garantissant la protection des droits et des libertés dans le cadre de la République.
Organisation des pouvoirs publics
La Constitution de 1958 repose sur une séparation des pouvoirs adaptée aux institutions de la Ve République :
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Pouvoir législatif : Le Parlement, composé de l’Assemblée nationale et du Sénat, est chargé de faire les lois dans les domaines prévus par l’article 34. L’Assemblée nationale a un rôle prépondérant, mais le Sénat participe activement au processus législatif.
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Pouvoir exécutif : Il est bicéphale, partagé entre le Président de la République et le Premier ministre. Le Président nomme le Premier ministre et préside le Conseil des ministres, ayant un rôle d’arbitre et de garant de la Constitution, notamment en matière de défense et de politique étrangère. Le Premier ministre, quant à lui, dirige l’action du gouvernement et veille à l’application des lois.
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Pouvoir judiciaire : L’autorité judiciaire est indépendante et comprend les juges civils, pénaux et administratifs. Elle est chargée de régler les litiges entre particuliers et de veiller à la bonne application des lois.
Le contrôle de constitutionnalité par le Conseil constitutionnel
Le Conseil constitutionnel est l’organe chargé de garantir la conformité des lois à la Constitution. Sa mission principale consiste à effectuer un contrôle de constitutionnalité des lois. Ce contrôle peut être exercé de deux manières :
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Contrôle a priori : Avant la promulgation d’une loi, le Conseil peut être saisi par le Président, le Premier ministre, ou par 60 députés ou sénateurs. Si le Conseil déclare la loi inconstitutionnelle, celle-ci ne peut être promulguée, conformément à l’article 62 de la Constitution.
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Contrôle a posteriori (Question Prioritaire de Constitutionnalité – QPC) : Depuis la réforme de 2008, les citoyens peuvent soulever une QPC pendant un procès s’ils estiment qu’une disposition législative porte atteinte à leurs droits et libertés garantis par la Constitution. Cette possibilité permet de contester la constitutionnalité d’une loi déjà promulguée.
Portée et effets des décisions du Conseil constitutionnel
Les décisions du Conseil constitutionnel sont irrévocables et s’imposent aux pouvoirs publics et aux juridictions. En plus d’annuler les lois contraires à la Constitution, le Conseil peut assortir ses décisions de réserves d’interprétation. Cela signifie qu’une loi est jugée constitutionnelle sous certaines conditions d’interprétation. Ces réserves permettent de rendre une disposition compatible avec la Constitution en en restreignant ou en précisant l’application.
Importance et évolutions de la Constitution de 1958
La Constitution de 1958 a subi de nombreuses révisions, notamment pour :
- Élargir le domaine d’intervention des citoyens (par exemple, avec l’élection du Président de la République au suffrage universel direct en 1962 et l’introduction du référendum).
- Introduire de nouvelles protections pour les droits fondamentaux (comme avec la Charte de l’environnement de 2004).
- Renforcer le contrôle de constitutionnalité avec la QPC (réforme de 2008), permettant à chaque citoyen de défendre ses droits directement en s’appuyant sur la Constitution.
En conclusion, la Constitution de 1958 reste le socle du système juridique et institutionnel français, garantissant l’équilibre des pouvoirs et la protection des droits fondamentaux. Grâce à son contrôle exercé par le Conseil constitutionnel, elle assure la stabilité du régime et l’adaptation de la République aux exigences de la société moderne.
2 – Les différentes lois
La loi est une règle de droit générale, abstraite et obligatoire, élaborée par l’autorité étatique. Elle se distingue en plusieurs types de lois ayant des fonctions et un processus d’élaboration spécifiques, chacun contribuant à l’organisation de l’État et à la vie en société.
A. Définition et caractéristiques générales de la loi
La loi est adoptée par le pouvoir législatif (le Parlement), et constitue un texte normatif qui s’applique à la population. En parallèle, le règlement est pris par le pouvoir exécutif et se divise en décrets et arrêtés. Contrairement aux lois, qui fixent des règles générales, les règlements (décrets présidentiels, ministériels, préfectoraux, etc.) visent la mise en œuvre des lois et peuvent s’appliquer à toute ou à une partie de la population. Un règlement peut également concerner des décisions individuelles (par exemple, la naturalisation d’un citoyen).
B. Types de lois
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Lois organiques
- Les lois organiques précisent et complètent la Constitution, notamment pour l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics. Elles sont adoptées selon une procédure plus stricte, nécessitant une validation par le Conseil constitutionnel avant promulgation.
- Exemples : Lois organiques sur le fonctionnement du Parlement, ou sur l’organisation de la justice constitutionnelle.
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Lois ordinaires
- Les lois ordinaires, votées par le Parlement, régissent des domaines divers tels que les droits civils, le droit pénal, l’économie, etc. Elles doivent respecter les lois organiques et la Constitution.
- Exemples : Lois sur la protection des données personnelles, loi sur la bioéthique, ou lois budgétaires annuelles.
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Projets et propositions de loi
- Projet de loi : Texte proposé par le gouvernement.
- Proposition de loi : Texte proposé par les parlementaires.
- Les projets de loi traitent souvent de mesures liées aux politiques publiques ou à la sécurité, tandis que les propositions de loi peuvent émaner d’initiatives parlementaires pour répondre à des enjeux sociétaux.
C. Le domaine de la loi et du règlement
Avant la Constitution de 1958, les lois avaient un champ d’action très large, et le Parlement possédait presque un monopole normatif. La Constitution de la Ve République, avec l’article 34, a restreint le champ d’intervention de la loi pour donner un espace d’autonomie au pouvoir exécutif.
1. Domaine réservé à la loi
- La Constitution définit les domaines législatifs dans lesquels seule la loi peut intervenir, par exemple :
- Libertés publiques et droits civils
- Régime électoral
- Impôts et finances publiques
- Le Parlement fixe ainsi les principes fondamentaux en matière de défense nationale, sécurité sociale, éducation, entre autres, mais laisse les détails au pouvoir réglementaire.
2. Domaine du règlement autonome
- En vertu de l’article 37 de la Constitution, tout ce qui ne relève pas du domaine législatif est de la compétence du règlement autonome. Les règlements autonomes permettent à l’exécutif de fixer des règles dans des domaines tels que l’organisation administrative, les transports, et la gestion des services publics.
D. Le processus d’élaboration de la loi
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Initiative et examen :
- Le projet ou la proposition de loi est déposé auprès de l’une des deux chambres du Parlement (Assemblée nationale ou Sénat). Le texte est ensuite examiné par une commission parlementaire, qui désigne un rapporteur chargé de présenter et défendre le texte.
-
Débats et votes :
- Le texte est discuté en séance publique. La discussion suit un ordre : intervention du gouvernement, du rapporteur, puis des députés ou sénateurs. Si le texte est adopté, il est transmis à l’autre chambre.
- En cas de désaccord entre les deux chambres après deux lectures, une commission mixte paritaire composée de sept députés et sept sénateurs est formée pour trouver un compromis. Si un accord est trouvé et voté par les deux chambres, le texte est adopté.
-
Adoption et promulgation :
- Une fois le texte voté par le Parlement, il est transmis au Conseil constitutionnel pour examen si demandé. Le Conseil dispose de 30 jours pour vérifier la constitutionnalité du texte.
- Après promulgation par le Président de la République, la loi est publiée au Journal officiel, acquérant ainsi force obligatoire.
E. Catégories de lois selon leur portée et objet
Outre les lois organiques et ordinaires, d’autres catégories de lois existent pour répondre à des situations spécifiques.
-
Lois de finances :
- Votées chaque année, elles établissent le budget de l’État pour l’exercice suivant et prévoient les ressources et dépenses publiques. Elles sont obligatoirement déposées à l’Assemblée nationale avant d’être transmises au Sénat.
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Lois de programmation :
- Elles déterminent les orientations de l’État dans un domaine donné sur plusieurs années (ex. : lois de programmation militaire, loi de programmation de la recherche).
-
Lois de ratification :
- Conformément à l’article 38 de la Constitution, le Parlement peut autoriser le gouvernement à légiférer par ordonnance dans le domaine législatif pour un temps limité et dans des domaines précis. Les ordonnances acquièrent force de loi une fois ratifiées par le Parlement.
F. L’évolution de la loi et du règlement depuis 1958
La Constitution de 1958 a réduit le champ d’intervention législatif au profit du pouvoir réglementaire, qui peut aujourd’hui intervenir de manière autonome dans des domaines non spécifiquement réservés à la loi. Ce partage des compétences entre loi et règlement favorise une réactivité accrue de l’État en matière de gestion administrative et réglementaire.
3 – Le règlement
Le règlement est une source de droit établie par le pouvoir exécutif, et joue un rôle essentiel dans la mise en œuvre et l’application de la loi. Les règlements sont adoptés pour encadrer des domaines d’action publique, soit en complément de la loi, soit de manière autonome.
Le règlement, qu’il soit d’exécution ou autonome, est essentiel au bon fonctionnement de l’administration et à la mise en œuvre des lois. Il offre de la souplesse à l’État pour intervenir efficacement dans des domaines variés. L’importance des contrôles assurés par le Conseil d’État et le Parlement garantit que les règlements et ordonnances s’insèrent de manière conforme dans l’ordonnancement juridique français, sous la Constitution.
a) définition
Les règlements se distinguent selon leur domaine d’intervention :
1. Règlement d’exécution (ou d’application)
Le règlement d’exécution est pris pour mettre en œuvre les lois votées par le Parlement. Il est subordonné à la loi, c’est-à-dire qu’il doit respecter son contenu et ne peut la contredire. Ce type de règlement permet à la loi de devenir applicable, en précisant les modalités de sa mise en œuvre, telles que des règles techniques, administratives ou d’organisation.
- Contrôle de conformité : Si un règlement d’application est jugé non conforme à la loi qu’il met en œuvre, il peut être annulé par le juge administratif via un recours pour excès de pouvoir. Cette annulation a pour effet de supprimer le règlement pour tous, rendant cet acte inapplicable.
2. Règlement autonome
Le règlement autonome est un règlement pris par le gouvernement dans les domaines qui ne relèvent pas du pouvoir législatif, comme précisé par l’article 37 de la Constitution. En effet, selon la Constitution de 1958, les domaines d’intervention de la loi sont énumérés par l’article 34, tandis que les autres domaines relèvent du pouvoir réglementaire.
- Contrôle de constitutionnalité : Les règlements autonomes doivent être conformes à la Constitution. Le Conseil d’État, plus haute juridiction administrative en France, veille à leur conformité soit par voie d’action (pour attaquer le règlement), soit par voie d’exception (comme moyen de défense dans un procès).
b) Domaine du règlement
Les règlements peuvent intervenir dans divers domaines de l’administration et des politiques publiques, et se distinguent en fonction de leur domaine d’intervention et de leur portée :
1. Règlements d’exécution de la loi
Ces règlements interviennent pour mettre en application des lois votées par le Parlement. Ils sont limités aux dispositions nécessaires pour assurer l’application de la loi, en restant strictement dans les limites définies par celle-ci. Ils peuvent être :
-
Décrets : Issus du Président de la République ou du Premier ministre, ils sont de portée nationale.
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Arrêtés : Issus des ministres, préfets ou maires, ils sont de portée locale ou sectorielle.
Ces règlements sont une composante essentielle de la mise en œuvre des lois, assurant que les lois votées soient opérationnelles.
2. Règlements autonomes
En vertu de l’article 37 de la Constitution, le pouvoir exécutif peut agir de manière indépendante dans tous les domaines ne relevant pas du législatif (par exemple, l’organisation administrative de l’État). Ces règlements sont adoptés sans nécessité d’une loi préalable, leur conférant une grande autonomie dans des domaines comme :
-
La gestion des services publics
-
Les règles de circulation et de stationnement
-
Certaines mesures de santé publique ou d’ordre public
3. Les ordonnances
Les ordonnances occupent une place particulière dans le domaine des règlements. Prévue par l’article 38 de la Constitution, l’ordonnance est un texte pris par le gouvernement dans le domaine législatif, mais sous certaines conditions :
- Le gouvernement demande au Parlement une autorisation temporaire pour légiférer par ordonnance dans des domaines normalement réservés à la loi.
- L’autorisation fixe la durée et les limites des domaines où le gouvernement peut agir.
- Une fois l’ordonnance adoptée par le gouvernement, elle doit être ratifiée par le Parlement pour acquérir la valeur d’une loi. Si le Parlement refuse de ratifier l’ordonnance, elle reste un règlement.
SECTION 2 – Les sources internationales et européennes du droit
Les sources internationales ont une place croissante en France, et elles priment parfois sur les normes nationales, notamment en vertu des engagements pris par la France.
1. Les traités et conventions internationales : Les traités et conventions lient les États signataires et imposent le respect de règles communes, comme la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Pour être applicables en droit interne, ces accords doivent être ratifiés par la France. Ils peuvent ensuite être invoqués devant les juridictions françaises, à condition qu’ils aient été publiés et qu’ils respectent la hiérarchie des normes.
2. Le droit de l’Union Européenne : Le droit de l’Union Européenne est composé de règlements et de directives :
- Règlements européens : Ils sont directement applicables dans tous les États membres, sans nécessiter de transposition en droit interne.
- Directives européennes : Elles fixent des objectifs que les États membres doivent atteindre dans un délai donné, mais laissent aux États la liberté de choisir les moyens pour y parvenir. En cas de non-transposition dans les délais, une directive peut néanmoins être invoquée devant les juridictions nationales si elle est suffisamment claire et précise.
1 – Les traités internationaux
Les traités internationaux jouent un rôle important dans l’organisation des relations entre la France et les autres États, contribuant à l’harmonisation des droits et des pratiques. Un traité est un accord formel entre plusieurs États, et en France, il doit suivre un processus spécifique avant d’être intégré au système juridique national.
1. La conclusion des traités internationaux
La conclusion d’un traité passe par plusieurs étapes et engage les États signataires sur des sujets variés : coopération économique, défense, droits de l’Homme, ou encore environnement. En France, le Président de la République dispose du pouvoir de négociation des traités, assisté par le ministère des Affaires étrangères. Une fois le texte finalisé entre les États, il doit être ratifié pour avoir force obligatoire.
2. La ratification et l’intégration des traités en droit interne
La ratification consiste à approuver le texte au niveau national, ce qui permet son application dans l’ordre juridique interne. Pour que la ratification soit effective, deux étapes sont nécessaires :
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Autorisation parlementaire : Conformément à l’article 52 de la Constitution, pour certains traités (ceux qui modifient la législation, impactent le territoire ou les finances publiques, entre autres), le Président doit obtenir l’autorisation du Parlement par une loi de ratification. Les traités plus simples peuvent être ratifiés directement par décret présidentiel.
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Publication au Journal Officiel : Une fois ratifié, le traité est publié au Journal officiel, ce qui lui confère sa force exécutoire. Cette publication rend le texte officiel et opposable aux citoyens et institutions.
3. La hiérarchie des normes et les traités
En France, la hiérarchie des normes est ainsi établie :
- La Constitution : Elle est la norme suprême du droit interne.
- Les traités internationaux : Ils priment sur les lois nationales sous certaines conditions, notamment de réciprocité, comme le précise l’article 55 de la Constitution.
- Les lois nationales : Les lois doivent respecter les engagements internationaux de la France, sous peine d’être écartées en cas de conflit avec un traité international.
La primauté des traités signifie qu’un juge national peut écarter une loi nationale contraire à un traité international. Cependant, si le traité est incompatible avec la Constitution, une révision constitutionnelle pourrait être nécessaire pour garantir la conformité des engagements internationaux avec le droit interne.
4. Les effets des traités internationaux en France
Les traités signés par la France ont plusieurs effets :
- Effet direct : Certains traités, dits « self-executing », peuvent être directement appliqués par les tribunaux sans nécessiter de transposition.
- Effet indirect : D’autres traités exigent une adaptation par voie législative pour être mis en œuvre dans le droit interne.
Exemples :Traité de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) : Affecte les règles commerciales et impose des adaptations dans la législation économique française.
2 – Le droit de l’UE et le droit issu de la CEDH
L’intégration du droit européen dans les systèmes juridiques des États membres, notamment en France, s’articule autour de deux grands ensembles : le droit de l’Union européenne, qui se divise en droit originaire (traités) et droit dérivé (actes des institutions), et le droit de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), qui protège les libertés fondamentales et les droits individuels. Ces deux sources jouent un rôle crucial dans l’évolution du droit français. Appliquée directement en droit français, elle permet aux citoyens de contester des décisions nationales en invoquant des droits protégés par la Convention.
A. Le droit de l’Union européenne
Le droit communautaire de l’UE se compose de deux catégories : le droit originaire, issu des traités fondateurs, et le droit dérivé, constitué des actes adoptés par les institutions européennes.
1. Les traités fondateurs : le droit originaire
Les traités fondateurs de l’Union européenne sont les piliers de la coopération politique et économique entre les États membres, définissant le cadre de l’UE et ses compétences :
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Traité de Paris (1951) : Ce traité a institué la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), première étape de l’unification économique.
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Traités de Rome (1957) : Ils ont marqué la création de la Communauté économique européenne (CEE) et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (Euratom), visant un marché commun et une coopération atomique.
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Acte unique européen (1986) : Introduit pour renforcer le marché unique, avec l’objectif d’éliminer les obstacles à la libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes.
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Traité de Maastricht (1992) : Ce traité crée l’Union européenne, introduit la citoyenneté européenne, pose les bases de l’union économique et monétaire, et définit la politique étrangère et de sécurité commune (PESC).
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Traité d’Amsterdam (1997) et Traité de Nice (2001) : Ils ont adapté l’UE à ses futurs élargissements, notamment en augmentant le nombre de sièges et en réformant les institutions.
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Traité de Lisbonne (2009) : Il a réformé les institutions pour les rendre plus efficaces dans une Europe élargie, renforcé les pouvoirs du Parlement européen et clarifié la répartition des compétences entre l’UE et les États membres. Ce traité est important car il introduit la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dans le droit primaire de l’UE, lui conférant une valeur juridique contraignante.
2. Le droit dérivé : règlements, directives et décisions
Le droit dérivé comprend les normes adoptées par les institutions européennes en application des traités fondateurs.
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Les règlements : Actes législatifs d’application directe et immédiate, les règlements sont obligatoires dans tous leurs éléments pour les États membres sans qu’il soit nécessaire de les transposer en droit national. Exemples :
- Règlement général sur la protection des données (RGPD) : Ce règlement garantit les droits des citoyens en matière de traitement des données personnelles et est directement applicable dans l’ensemble de l’Union.
- Règlement REACH (enregistrement, évaluation et autorisation des substances chimiques) : Il impose aux entreprises de fournir des informations sur les substances chimiques utilisées, renforçant la sécurité sanitaire et environnementale.
-
Les directives : Elles fixent des objectifs que les États membres doivent atteindre dans un délai déterminé, laissant à ces derniers le choix des moyens. La directive doit être transposée dans le droit national. Si une directive n’est pas transposée dans les délais, elle peut néanmoins être directement invoquée si elle est suffisamment précise et inconditionnelle.
- Exemple : La directive sur la qualité de l’eau potable (Directive 2020/2184) impose aux États membres de revoir leurs normes de qualité de l’eau, ce qui a conduit la France à renforcer ses normes sanitaires en 2021.
-
Les décisions : Obligatoires pour les destinataires qu’elles désignent (un État, une entreprise ou une personne spécifique). Contrairement aux règlements et directives, les décisions s’appliquent de manière ciblée.
B. La Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH)
La Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), adoptée en 1950, constitue un texte majeur de protection des droits fondamentaux en Europe. Elle est administrée par le Conseil de l’Europe et s’applique aux 46 États membres, dont la France.
1. Fonctionnement et portée de la CEDH
La CEDH énumère les droits civils et politiques essentiels, tels que le droit à la vie, le droit à un procès équitable, et la liberté d’expression. Les citoyens de chaque État signataire peuvent se tourner vers la Cour Européenne des Droits de l’Homme (Cour EDH), située à Strasbourg, pour se plaindre de violations de leurs droits si toutes les voies de recours internes sont épuisées (Appel, Cassation, etc.).
- Exemple de condamnation : En 2019, la Cour EDH a condamné la France pour des conditions de détention inhumaines dans certaines prisons, jugeant que le pays avait violé l’article 3 de la Convention (interdiction des traitements inhumains et dégradants). Cette condamnation a poussé la France à entreprendre des réformes visant à améliorer les conditions de détention et réduire la surpopulation carcérale.
2. Hiérarchie et supériorité de la CEDH dans le droit national
Les arrêts de la Cour EDH ne modifient pas directement les lois, mais ils obligent les États condamnés à prendre des mesures pour éviter des violations futures, souvent en réformant leur législation. La Convention est supérieure aux lois nationales, bien que la France ait parfois hésité à appliquer certaines décisions.
- Exemple de réforme : À la suite de l’arrêt Mazurek (2000) sur la discrimination envers les enfants adultérins, la France a modifié son Code civil pour supprimer cette discrimination successorale.
C. La hiérarchie des normes et articulation avec le droit français
En France, la primauté du droit européen et de la CEDH sur le droit national est bien établie. La hiérarchie des normes est la suivante :
- Droit de l’UE et CEDH : En cas de conflit, les lois françaises doivent s’incliner devant le droit européen.
- Constitution française : Elle reste la norme suprême du droit national, mais le Conseil constitutionnel a intégré la primauté du droit européen dans son interprétation.
- Lois nationales : Les lois doivent respecter les normes européennes et peuvent être révisées pour se conformer aux obligations de l’UE.
- Règlements et autres actes infra-législatifs.
En cas de conflit entre une loi et un texte européen, les juridictions françaises peuvent écarter l’application de la loi nationale au profit du droit européen.
D. Les mécanismes de contrôle et recours
Les juridictions françaises et européennes disposent de moyens pour assurer l’application correcte des normes européennes :
-
Recours en manquement : La Commission européenne peut engager un recours en manquement devant la CJUE contre un État membre qui ne respecte pas le droit de l’UE, pouvant entraîner des sanctions financières.
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Questions préjudicielles : Les juges nationaux peuvent poser des questions à la CJUE pour obtenir une interprétation sur l’application du droit de l’UE. Cette procédure permet de garantir l’interprétation uniforme du droit européen dans tous les États membres.
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Effet direct et invocabilité : Les citoyens peuvent invoquer directement certaines dispositions européennes (comme les règlements) et exiger des droits auprès des juridictions nationales sans attendre de transposition.
E. Exemples récents d’influence du droit européen sur le droit français
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Directive Services de Paiement (DSP2) : Cette directive impose aux banques et entreprises de renforcer la sécurité des transactions en ligne, ce qui a transformé les procédures de sécurité pour les paiements et ouvert le marché à de nouveaux acteurs.
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Arrêt de la CEDH sur les écoutes téléphoniques (2017) : La France a dû modifier ses lois sur la surveillance des communications, renforçant les garanties pour les libertés individuelles et limitant la durée de conservation des données.
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Règlement relatif à la transparence des prix de transfert dans les multinationales (CBCR, 2021) : Ce règlement impose aux entreprises de publier les données fiscales et comptables pays par pays, pour mieux lutter contre l’évasion fiscale.
Ce cours d’Introduction au sciences juridiques est divisé en plusieurs fiches (notion de droit, sources du droit, biens, contrat, organisation judiciaire française
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