Les sources juridiques (loi, jurisprudence, coutume…)

Les sources du droit français

Le droit est l’ensemble des règles de conduite extérieure, définies par les hommes pour régir les rapports sociaux et sanctionnées par la contrainte publique. La sanction attachée à la règle de droit est ce qui distingue cette dernière des autres règles, telles que les règles morales et de politesse.

Le droit objectif est alimenté par des sources. Les trois principales sont, dans l’ordre, la législation, la jurisprudence et la doctrine, auxquelles on ajoute des sources accessoires, telles que la coutume, les usages professionnels, les conventions collectives, les réponses ministérielles, les circulaires et instructions, etc…


A – La loi ou législation

Elle constitue la source essentielle, et même la seule selon certains auteurs. Elle est entendue au sens général de l’ensemble des textes législatifs, quelle que soit leur place dans la hiérarchie : lois, ordonnances, règlements d’administration publique, décrets divers, arrêtés, circulaires réglementaires, etc. La Constitution du 4 octobre 1958, favorable au pouvoir exécutif, a fait du décret l’acte législatif de droit commun. Le Parle

ment a été cantonné dans un domaine législatif limité. Le pouvoir judiciaire est confiné et dispose de faibles moyens d’action.
Il y a plusieurs sortes de textes et ils sont hiérarchisés. Au sommet, on trouve la constitution. Ensuite, il y a la loi votée par le Parlement et promulguée par le Président de la République. La constitution actuelle, adoptée en 1958, a diminué le pouvoir législatif du Parlement. Celui-ci ne légifère que dans les matières principales, dont la liste est donnée à l’article 34 de la constitution. Les autres matières sont de la compétence du gouvernement, qui fait des règlements (décrets). Ainsi, la procédure civile ne relève pas de la compétence législative du Parlement mais du pouvoir réglementaire du gouvernement. En bas de la hiérarchie, on trouve les arrêtés ministériels et les arrêtés faits par les autres autorités administratives, par exemple les préfets des départements et les maires des communes. Le Conseil d’Etat, juridiction suprême en matière administrative, contrôle la légalité des règlements.
Les codes, les lois et les décrets sont divisés en articles, et les articles sont divisés en alinéas. L’expression » art. 1384 al. 1 C. civ. » désigne l’article 1384 alinéa 1 du Code civil. Quand on ajoute des nouveaux articles dans le Code civil, on prend le numéro de l’article qui précède et on ajoute un tiret et un numéro (art. 334-1, art. 334-2, art. 334-3 etc.).



B – La jurisprudence

Si la qualité de source lui est contestée, elle concourt toutefois à la sécurité juridique, du fait de l’interprétation des textes par les juges, qui ne peuvent refuser de juger sous prétexte de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi. Elle est coordonnée par la Cour de cassation, qui harmonise les décisions des juridictions du fond en imposant ses directives. Mais il est interdit aux juges de rendre des arrêts de règlement, c’est-à-dire de statuer par un motif d’ordre général sans se référer au cas qui leur est soumis. La jurisprudence est le complément indispensable de la législation.
On appelle jurisprudence l’ensemble des décisions rendues par les cours et les tribunaux, qui sont appelées arrêts quand elles sont rendues par une cour, et jugements quand elles sont rendues par un tribunal.
Dans l’ancien droit, la jurisprudence des parlements avait une grande importance. La Révolution a voulu limiter le pouvoir des juges, et leur décisions n’ont pas l’autorité d’un précédent. On dit officiellement que la jurisprudence n’est pas une source directe du droit. C’est une source indirecte. La jurisprudence interprète et complète la loi.
La réalité est différente. La loi étant générale, elle a souvent besoin d’être interprétée. En outre, il faut parfois la compléter. Pour cela, la Cour de cassation établit une jurisprudence qui est spontanément suivie par les juridictions inférieures (les juges du fond). Les juges du fond ne sont pas obligés de suivre la jurisprudence de la Cour de cassation, mais ils savent que s’ils ne la suivent pas, il y a de grandes chances que leur décision soit annulée (cassée) suite à un appel et à un pourvoi en cassation.
A partir du XXe siècle, la jurisprudence a pris l’habitude d’interpréter les textes de manière très extensive, en s’éloignant de la lettre de la loi et de la simple recherche de l’intention du législateur. Les juges n’hésitent pas à imposer de nouvelles doctrines, souvent inventées par les professeurs de droit, et qui ne correspondent pas à l’intention de ceux qui ont écrit les textes. Ils contribuent largement à l’évolution du droit.
Aussi, malgré la théorie qui dit qu’elle n’est pas une source officielle, une grande partie du droit français est créée par la jurisprudence.



C – La coutume

La coutume est constituée d’usage généraux et constants, que la population reconnaît comme obligatoires. Par exemple, le Code civil ne dit pas que la femme mariée a le droit ou le devoir de porter le nom de son mari. C’est une simple coutume.
La coutume était autrefois une source importante. Aujourd’hui, il reste quelques coutumes, en matière professionnelle et surtout commerciale. La coutume a un caractère obligatoire.



D – La doctrine

Elle regroupe les opinions de nombreux auteurs (professeurs de droit, avocats, magistrats), exprimées dans des ouvrages ou des revues. Une de ses fonctions est de réaliser une présentation de synthèse de toutes les autres sources. Comme à la jurisprudence, on lui reproche son inefficacité. En vérité, son efficacité, si elle est indirecte, est certaine. Son influence reste considérable sur les projets du législateur et les décisions du juge. Surtout, par la critique constante qu’elle entretient des institutions en vigueur, elle en favorise l’adaptation et le progrès. Enfin, son existence est une garantie essentielle des libertés publiques, en ce qu’elle manifeste, par rapport au pouvoir, la liberté d’expression dans un secteur où elle peut être menacée, autant qu’elle fait sentir la relativité et le besoin d’évolution de règles dont l’autorité est cause d’immobilisme.
On appelle donc doctrine l’ensemble des écrits et des publications des juristes, qu’ils soient universitaires ou praticiens. La doctrine des auteurs avait une grande influence dans l’Ancien Droit. Aujourd’hui, on dit que la doctrine n’est pas une source directe, mais qu’elle influence indirectement la création du droit.
De nombreuses réformes législatives et réglementaires ont été préparées avec le concours des professeurs de droit. En outre, beaucoup de règles jurisprudentielles trouvent leur origine dans les travaux des auteurs. Mais comme officiellement, les juges et les auteurs ne peuvent pas créer le droit, on ne cite pas directement la jurisprudence et la doctrine dans les décisions de justice. On fait comme si le législateur était à l’origine de toutes les règles.

Le cours Introduction au droit français est divisé en plusieurs fiches (notion de droit, patrimoine, organisation judiciaire, sources du droit, preuves…)