Les Lumières à l’origine de la Révolution (Rousseau, Voltaire, Montesquieu)

l’ordre juridique et politique contesté : les critiques des lumières

Les Lumières sont animés d’un esprit de critique universel, au point d’avènement du règne de la critique. Cet esprit philosophique se caractérise par une croyance dans le pouvoir de la raison (les Lumières sont rationalistes) et une confiance dans les progrès de la civilisation.

Ce mot « civilisation » date du 18°s, sous la plume du Marquis de Mirabeau, le père du Tribun aixois, l’ami des hommes, mais pas de sa famille (il fit envoyer sa femme et ses enfants au cachot).

De la raison procède les lois du fonctionnement des sociétés (non plus du droit divin), société qui doit être organisée pour le bonheur des hommes.

Il y a 3 mots d’ordre : raison, bonheur, progrès. C’est l’équation des Lumières.

Au nom de cette raison érigée en nouveau dogme, les Lumières vont se livrer à l’exam critique de toutes les institutions, de toutes les coutumes et elles vont reformuler le lien politique et social à partir de l’idée de liberté.

Le droit et le pouvoir ne pouvaient pas échapper à ces grandes réflexions philosophiques. Les Lumières vont aussi remettre en cause l’ordre juridique et politique au nom de la raison, du progrès. Elles sont représentées comme un bloc. Les principales Lumières sont :

Rousseau, Voltaire, Diderot, Montesquieu.

En dépit de leur unité apparente, les critiques du droit et du système politique de leur temps sont loin d’aller toutes dans le même sens. Elles se haïssaient parfois entre elles.

Leurs critiques vont déboucher sur la Révolution Française, débouché sur le dogme de la loi.

& 1 : MONTESQUIEU (1689-1755) : la critique de l’absolutisme et la défense du pluralisme juridique

C’est un membre de la noblesse (Baron de la BREDE) et le président du parlement de Bordeaux. Sa formation de juriste l’amène à réfléchir sur l’esprit des lois.

Il a écrit : « l’esprit des lois » en 1748 (son œuvre majeure),

« Les lettres Persanes » en 1723,

« Les considérations sur les causes de la grandeur et de la décadence des romains ».

La séparation des pouvoirs chez Montesquieu n’existe pas au sens de la séparation rigide des pouvoirs du 19°s en France. On l’entend à l’époque par la non réunion de la totalité de 2 pouvoirs dans les mêmes mains (législatif et exécutif).

Dans « l’esprit des lois » il se livre à une analyse approfondie de ce qui constitue le droit et il va réfléchir sur le « meilleur régime politique ».

Il va se montrer très critique envers le règne de Louis XIV, (le monarque absolu). Il est parlementaire, aristocrate, il va donc se faire l’apôtre d’un gouvernement modéré, une monarchie tempérée, limitée par le parlement (qui à l’époque est un organe judiciaire, une Cour Suprême du Justice), monarchie tempérée par les 2 corps intermédiaires :

– le Parlement,

– l’aristocratie, la noblesse.

En effet, dans l’esprit des lois, il met en avant l’exemple de la Constitution anglaise fondé sur le principe de la séparation des pouvoirs, par laquelle il faut entendre la non réunion de la totalité de 2 fonctions : législative et exécutive (plus judiciaire) dans les mêmes mains. Cette non réunion en Angleterre commence à se réaliser par l’équilibre des pouvoirs au sein de la fonction législative entre le roi et le parlement grâce au véto royal.

Pour que la séparation des pouvoirs soit effective, il faut trouver un équilibre au sein de la fonction législative. Hors en France, on observe que le roi à le pouvoir de donner et casser la loi d’où la critique de Montesquieu. Dans son œuvre, il va chercher l’origine des libertés françaises chez les peuples germains, plus précisément du peuple Franc. Il dit là toute son admiration des lois féodales et il vante la diversité coutumière juridique de l’ancienne France.

Il va chercher à réhabiliter l’ancienne Constitution Franque, contre l’uniformité. Il est critique à l’égard de l’uniformité des lois. La politique d’unification juridique de Louis XIV est visée ici.

A l’opposé de Montesquieu, Voltaire, partisan d’un absolutisme éclairé va prendre pour modèle la politique de Louis XIV.

&2. Voltaire (1694-1778) et l’absolutisme éclairé : unification du droit et réforme des législations civiles et pénales.

Voltaire, contrairement à Montesquieu, est philosophe avant tout. Il n’est pas l’auteur d’une théorie politique achevée. Quand il naît en 1694, la monarchie est à son apogée. Il est né sous le règne de Louis XIV. Quand il meurt, en1778, elle s’apprête à somembrer dans l’abîme.

Il a commencé par faire du droit (sous le nom de AROUET) puis s’est tourné vers la littérature, la poésie, l’histoire. On sait qu’il refusa d’être avocat comme l’espérait son père, (lui-même officier bourgeois, receveur des épices à la Cour des Cptes). La seule explication dont on dispose sur son renoncement et selon lui-même « la profusion de choses inutiles ».

Voltaire, grand contestataire au point du vue phylo, religieux, a un mot d’ordre : « ECR L’INF »écraser l’infâme, l’infâme étant la religion chrétienne.

Il est plutôt conservateur du pt de vue politique. Il est partisan de la monarchie absolue éclairée par les Lumières et lui en particulier (partisan despotisme absolu).

L’absolutisme éclairé : c’est un programme qui repose sur une volonté d’adaptation et de conversion des monarchies absolus (en Europe) à l’esprit du siècle dans une perspective de développement et de progrès.

Donc, tout doit partir d’en haut, d’un roi ayant tous les pvrs, une main éclairée par les phylos et qui doit faire le bonheur du peuple. Dans la pratique, l’absolutisme éclairé est illustré par les réformes mises en place au 18°s par des souverains comme Frédéric II de Prusse, Catherine II de Russie, et Joseph II d’Autriche, qui se disent inspirés des préceptes des philosophes.

L’unification législative c’est aussi l’idéal et l’objectif de Voltaire. Plusieurs fois dans son œuvre il va souligner les inconvénients qui résultent de « l’assemblage bizarre » formé par les anciennes lois romaines, le droit canonique et les coutumes barbares qui se sont érigé en France sur les ruines de l’empire romain.

Voltaire ne voulait pas voir le génie coutumier au nom de la lumière et de la raison. Ces attaques les plus acerbes vont être dirigées contre la coutume de Paris, qui est un peu le centre de ralliement de toute une série de grands juristes qui rejette le droit romain, et qui regarde cette coutume comme le droit commun de la France.

Pour Voltaire, les bonnes lois romaines intégrées à celles du Pays devraient former un seul corps de loi de la nation. En fait, c’est ce qu’à commencé à faire Louis XIV, qui Voltaire cite en ex, notamment à propos des ordonnances de codifications. Pour Voltaire, Louis XIV est Louis le Grand. Il écrit « le siècle de Louis XIV » qu’il considère comme le plus grand des s de l’humanité, après la Grèce, Rome ou Florence sous Médicis.

Pourtant Voltaire estime que ces Grandes ordonnances (civile, criminelle) comportent de grand défauts, notamment dans le domaine du droit civil, à propos du mariage et surtout du divorce non autorisé en France. Mais également en matière de législation criminelle, ce qui le rendra célèbre. Il va devenir l’homme aux Calas (affaire Calas, qui était un protestant accusé, torturé, mis à mort dont Voltaire prendra la défense). Voltaire appelle une réforme de la procédure criminelle car il constate que l’ordo criminelle de 1670 semble n’avoir été dirigé qu’à la perte des accusés. Il dit que c’est la seule loi qui soit uniforme dans tout le royaume, il dira : « ne devrait-elle pas être aussi favorable à l’innocent que terrible au coupable ? Par là, il dénonce la procédure digne de l’inquisition, la rétention des pièces du procès, le secret enveloppant les procédures. Il dénonce les magistrats qui ne cherchent qu’à fabriquer un coupable.

Sous sa plume, on trouve mis en cause la valeur toute relative des témoignages, l’intimidation dont font l’objet les témoins de la part du juge, la détention préventive, l’emploi de la torture (appelé la « question » à l’époque).

Voltaire approfondi une idée d’un juriste italien en diffusant son ouvrage en France :

« Le traité des délits et des peines » de Cesare Beccaria (auteur milanais, père fondateur du droit pénal moderne) ».

L’idée maîtresse de Beccaria reprise par Voltaire est que les peines doivent être proportionnées aux délits. Voltaire est avec Beccaria l’un des 1ers à condamner la peine de mort car il l’a juge inutile à la sté. Il voudrait rendre les supplices « utiles » en faisant travailler les criminels aux biens publics.

A sa mort, son combat pour le droit de l’humanité se présente encore comme une espérance même si la plupart de ses propositions vont être consacrées durant la révolution.

Mais, plus encore qu’au nom de Montesquieu ou Voltaire, la révolution d’un point de vue politique consacre la victoire des principes de J. J. Rousseau.

& 3. Rousseau (1712-1778) : le républicanisme classique, la souveraineté populaire et le dogme de la loi, expression de la volonté générale.

Les critiques de Montesquieu, celles de Voltaire avaient porté surtout sur le droit et les réformes nécessaires à apporter en la matière. Ces 2 personnages ne contestaient pas la forme monarchique du gouvernement. Ils acceptaient les inégalités sociales.

La critique de Rousseau, citoyen de Genève, (comme il se définissait lui-même), est beaucoup plus radicale. Elle part de l’idée qu’il est nécessaire de refonder le droit en son entier. Dans son œuvre la plus célèbre au niv politique :

« Le contrat social » 1762,

Rousseau replonge aux origines même de la société politique. En faisant cela, il affirme l’égalité naturelle des hommes et selon lui, cette égalité naturelle a été très vite perdue de vue.

En effet, sa thèse centrale « l’homme ne nait pas corrompu, c’est la société qui le corrompt ». Il est naturellement bon mais il a été corrompu par la sté.

Pour cela, il s’agit de transposer cette égalité naturelle dans le domaine politique et juridique à l’aide des lois, à travers un contrat social, fondateur et organisateur de la société politique.

Mais pour Rousseau, il n’y a pas que le contrat social. Ce dernier fait reposer la liberté de l’homme sur la loi qui est l’expression de la volonté générale. Le modèle de Rousseau est le peuple romain. Il part de l’exemple de la République Romaine (comme Montesquieu) et il affirme que la souveraineté réside à l’origine dans le peuple qui ne serait aliéner sa liberté. L’esclavage n’est pas une institution naturelle. Mais contrairement à la philosophie de Montesquieu plutôt d’essence aristocratique, celle de Rousseau incarne complètement l’idéal républicain.

ROUSSEAU insiste dans sa philosophie sur le contractualisme nécessaire au passage de l’état nature à la société civile. Cette construction théorique commune aux théoriciens du droit naturel moderne le place dans la lignée de GROTIUS, PUEFENDORF, LOCKE, HOBBES.

Cette interprétation ne permet pas de rendre compte de toute la pensée politique de Rousseau. En effet, il a un champ de réflexion plus large : les chapitres « contrat social » traitent de la République Romaine, les discours sur les sciences et les arts, le discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes, l’art éco-po, enfin l’étude politique appliquées à savoir « les lettres écrites de la Montagne », le projet de Constitution pour la Corse ou encore les considérations sur le gouvernement de Cologne, tous ces écrits placent Rousseau dans la tradition du républicanisme classique.

C’est une tradition politique (républicanisme classique, surtout des anglais et américains) qui constitue un puissant langage au service de la contestation de l’absolutisme. C’est un langage d’origine romaine qu’on va retrouver chez Cicéron, Tite-live, Salluste, Tacite. Ce langage va être redécouvert à la renaissance en Italie et en particulier dans La République de florence. A Florence, un auteur, MACHIAVEL, qui a écrit le Prince mais aussi des œuvre républicaines, notamment des discours sur la décade de Tite live et des histoires florentine ou il apparait comme un cœur républicain. Rousseau dira dans le contrat social qu’on s’est trompé sur Machiavel qui en donnant des leçons au prince, donnait des leçons aux peuples.

Grâce à Machiavel cette tradition de pensée va exercer une grande influence au s suivant, en Angleterre, (pendant les 2 révolutions anglaises, celle 1649 et celle de 1688. John Milton, et également Sidney) mais également au cours de la révolution américaine, et enfin un rôle idéologique majeur en France dans les décennies précédant la révolution.

Les mots d’ordre d’opposition politique sont : « éloge de la liberté, de la vertu civique, haine du despotisme, critique du luxe et enfin dénonciation des armées permanentes, des armées de mercenaires auxquels les républicain préfère l’idéal du citoyen soldat qui défend sa patrie, porte une arme ;

Cette tradition se retrouve donc dans les écrits de Rousseau mais aussi dans ceux de Mirabeau.

La loi pour Rousseau (et pour toute la tradition républicaine) porte par définition sur des objets généraux, sur tous, et ne peut émaner que de la communauté politique elle-même, qui est seule souveraine et donc par conséquent seule capable pour Rousseau d’exprimer la volonté générale.

La loi ne saurait émaner d’un seul homme, fut ce t il le monarque le plus éclairé qu’il soit. C’est une opposition du règne de la loi au règne des hommes. Il faut que la loi règne et non les hommes. Pour Rousseau, le peuple est soumis aux lois, les lois qui sont la garantie de sa liberté et pour cela le peuple doit en être lui même l’auteur.

Durant la révolution française cette conception va être LA CONCEPTION. Elle est nait de l’impuissance de la monarchie à se réformer.