Modification du bail pour changement de situation (bailleur ou locataire)

Quelles sont les incidences sur le bail d’habitation du changement de situation du bailleur ou du locataire) 

   Le contrat d’habitation a une durée minimum d’un an pour un logement meublé et une durée minimum de trois ans pour un logement vide. Au cours de cette période, il est possible que la situation du ou des locataires évolue mais une évolution voire un changement de situation peut fausser le contenu initial du contrat de bail et donc avoir une incidence sur celui-ci. Par exemple, Il peut s’agir d’un départ ou d’une arrivée d’un locataire dans le cadre d’une colocation ou d’une sous-location, ou le décès du propriétaire bailleur ou du locataire. 

            A/ Le changement dans la situation du bailleur

                        1) Le décès du bailleur

            En principe, son décès n’a aucune incidence sur le bail article 1742 du Code Civil sauf s’il est établi que les parties s’étaient engagées intuitu personae (clause expresse). A défaut d’une telle clause, au décès du bailleur, le contrat tombe dans le succession et comme il y a indivision, elle va s’appliquer au contrat à les héritiers deviennent co-bailleur.

 

                        2) La vente de la chose louée

            Ce cas est régit par l’article 1743 du Code Civil « Si le bailleur vend la chose louée, l’acquéreur ne peut expulser le fermier, le colon partiaire ou le locataire qui a un bail authentique ou dont la date est certaine. Il peut, toutefois, expulser le locataire de biens non ruraux s’il s’est réservé ce droit par le contrat de bail », le bail ayant une date certaine et le bail souscrit pas acte authentique sont transmis à l’acquéreur, donc il devient le nouveau bailleur. Le bail est opposable à l’acquéreur de l’immeuble mais le locataire peut être expulser si son contrat avait prévu qu’en cas de vente, le bail ne serait pas tenu ; ainsi, on voit que l’article 1743 du Code Civil n’est pas d’ordre public

            Problème de la portée de la transmission, de l’étendue des droits transmis à l’acquéreur de l’immeuble ?

C’est une question dont les juges ont été saisis à propos des garanties des loyers (garantie personnelle ou versement d’une somme d’argent + autres garanties : le Ministre du logement a indiqué un certain nombre de garanties pour le bailleur, elles ont été souscrites dans le cadre d’un accord cadre entre les professionnels de l’immobilier et le ministère du logement sur la Garantie des Risques Locatifs (GRL) et donc cette garantie est souscrite pour une durée de 12 mois, un des objectifs de ce contrat est de promouvoir la garantie des risques locatifs, accompagner les locataires et les propriétaires dans sa mise en place. Accord cadre du 24/09/2007 (chercher sur le ministère du logement et de la ville)).

La Cour de cassation s’est prononcé relativement à la caution à la suite de la transmission du bail à l’acquéreur de l’immeuble AP. 6/12/2004 Dalloz 2005, p : 70, 227, 749 et 1424… « En cas de vente de l’immeuble donné à bail, le cautionnement garantissant le paiement des loyers est sauf stipulations contraires transmis de pleins droits au nouveau propriétaire en tant qu’accessoire de la créance des loyers cédés à l’acquéreur par l’effet combiné de l’article 1743 et des articles 1692, 2013 et 2015 du Code Civil ».

On peut s’interroger sur la situation du locataire ou le changement de bailleur dans le cadre des baux spéciaux ? 

  •             Le bail à usage d’habitation soumis à la loi de 1989, le bail peut il être transmis à l’acquéreur ? La réponse est non, la solution de l’AP ne s’applique pas parce que au terme de l’article 15 II, le locataire a un droit de préemption et en vertu de ce droit, le bailleur qui décide de vendre, doit proposer la vente au locataire en précisant les conditions. Le locataire peut donc décider d’acquérir soit par ses propres moyens, soit qu’il entend recourir au financement par une banque auquel cas l’achat est subordonnée à l’obtention du prêt. Il peut ne pas acquérir, s’il décide donc de ne pas acquérir, il devient occupant sans droit à l’expiration du congé qui lui a été donné. Dans le cadre de l’article 1743 du Code Civil, la transmission produit ses effets pour l’avenir et non pour la passé et cette date étant retenue parce que le locataire n’étant pas un tiers au contrat, on n’attend pas la publicité. Exemple : s’il faut restituer la garantie, ce n’est pas à l’acquéreur de le faire, c’est le vendeur qui doit restituer car il l’avait autrefois reçu. Si manquement ou faute du locataire en vertu desquelles le locataire peut être déclaré responsable et tenu de réparer le bailleur, l’acquéreur ne pourra pas recevoir cette indemnisation car l’action est personnelle au vendeur, elle ne peut être exercée par l’acquéreur que si elle a été cédée mais il faut noter les cas exceptionnels dans lesquels l’acquéreur peut valablement poursuivre le locataire :
  •         Cas ou l’obligation du locataire devait être exécutée à la fin du bail, ce n’est plus le vendeur qui est créancier mais l’acheteur ;
  •        Sanctions reportées en fin de bail ;  Fautes rattachées à l’exécution de cette obligation Civ. 3ème, 21/11/2001 n° 00-13237 et 2/10/2002 Dalloz 2003 p : 731.

B/ Le changement dans la situation du locataire

1)    Le décès du locataire

Article 1742 du Code Civil, le décès n’a aucun effet sur le contrat sauf s’il s’agit d’un contrat conclu intuitu personae, ce qui veut dire qu’en cas de décès du locataire, le bail tombe dans la succession et en indivision, les héritiers deviennent co-titulaires du bail, les règles de l’indivision s’appliquent et en particulier, les indivisaires ne se représentent pas et donc les actes destinés aux indivisaires doivent être adressés à chacun ; inversement, les actes des indivisaires adressés au bailleur doivent être fais par l’ensemble des indivisaires. Il y a donc en principe pluralité de liens entre les indivisaires et leur cocontractant mais cette pluralité peut être écartée par les indivisaires lorsqu’ils désignent un des leur pour les représenter.

Avec la réforme du droit des successions intervenue en 2006 et la consécration du mandat posthume, cette technique peut permettre d’éviter les difficultés liées à l’indivision, à la gestion des biens indivis.

Sur la pluralité des liens : Civ. 3ème, 11/07/2007 qui rappelle clairement que lorsque « le bail a été consenti par les propriétaires indivis, le congé par le preneur doit être délivré à chacun sinon il est nul sauf si les indivisaires ont désignés l’un d’entre eux pour les représenter comme mandataires ». Cette solution est applicable à tous les cas d’indivision quel qu’en soit le fondement juridique : indivision successorale, conventionnelle.

Cette règle est inapplicable au bail à usage d’habitation régit par la loi de 89 parce que son article 14 énumère les personnes qui peuvent bénéficier du logement à la suite du décès du locataire :

  •            le conjoint survivant ;
  •             les descendants vivants avec le défunt depuis un an ;
  •             les partenaires pacsés ;
  •             les descendants ;
  •            les concubins notoires ;
  •           les personnes à charges vivant avec le défunt depuis un an.

 

2)    La sous-location

Elle désigne un bail consenti par le locataire à une tierce personne soit sur une partie soit sur la totalité de la chose louée. La sous-location est-elle valable ? ici encore il faut penser à deux réponses, que l’on soit dans le droit commun ou dans les droits spéciaux. Article 1717 du Code Civil selon lequel, la sous-location comme la cession est valable sauf clauses contraires. L’opération va donc introduire une troisième personne dans le bail ce qui a pour effet d’ajouter à la première série de relation (bailleur et locataire), une deuxième série (locataire et sous-locataire). Le locataire devient sous-bailleur à l’égard du sous-locataire donc il n’y a pas de lien juridique entre les parties extrêmes à la chaîne (bailleur principal et sous-locataire). Cependant, l’article 1753 du Code Civil permet au bailleur d’agir directement contre le sous-locataire pour réclamer le prix du loyer dans la limite du prix de sous-location à action directe.

Quand est-il dans les baux spéciaux ? Selon la loi de 89, le principe est celui de l’interdiction de sous-louer avec comme exception l’autorisation du bailleur, la même règle vaut pour le bail commercial mais pour l’application de cette autorisation, il faut appeler le bailleur pour qu’il participe à la souscription de la sous-location. A défaut le bail principal peut être résilié à la demande du bailleur sauf renonciation. Civ. 3ème, 27/09/2006 n° 05-14700 « au visa de l’article L 145-31 du Code de Commerce, attendu que sauf stipulations contraires au bail ou accord du bailleur, toute sous-location totale ou partielle est interdite ». Dans cette arrêt il y avait une autorisation de sous-louer mais le locataire n’a pas appelé le bailleur au moment de la sous-location (il fait toujours faire participer la bailleur).

                       

3) La cession du bail

            Le locataire se substitue à une autre personne et perd sa qualité de locataire en même temps que ses liens avec le bailleur cessent. Le cessionnaire est donc substitué au locataire, c’est lui qui devient locataire avec les charges et les droits du cédant auxquels il est substitué. C’est une opération donnant lieu au versement d’un prix de la part du cédant au nouveau locataire, opération autorisée par l’article 1717 du Code Civil.

            Quand est-il dans les baux spéciaux ? Pour les baux à usage d’habitation, selon la loi de 89, le principe est l’interdiction sauf accord écrit et préalable du bailleur. Dans le bail commercial, c’est le contraire article L 145-16 du Code de Commerce qui est hostile à la clause interdisant la cession du bail à l’acquéreur du FDC. Le régime de la cession dans les baux spéciaux vise des objectifs particuliers à éviter la spéculation, le bail est utile à celui qui acquiert le fonds de commerce.

            Quels sont les effets d’une cession régulière ? Le cessionnaire est substitué au cédant et devient le locataire face au bailleur, cette substitution s’opère en transmettant les droits et obligations du cédant au cessionnaire. C’est la raison pour laquelle s’agissant du bail commercial, la jurisprudence déclare que les cessions successives d’un bail commercial opèrent transmission des obligations qui en découlent au dernier titulaire du contrat qui devient débiteur envers le bailleur des dégradations causées par ses prédécesseurs. Civ. 3ème, 9/07/2003 n° 02-11794 rendu à propos du bail commercial, cette décision applique l’article L 145-16 du Code de Commerce. En raison de cette substitution et en dépit de l’autorisation du bailleur, la cession peut être dangereuse pour la bailleur si du moins le locataire n’est pas aussi solvable que le cédant ; pour éviter ces risques, le bailleur peut prendre certaine disposition comme par exemple, exiger la garantie du cédant ou exiger un cautionnement de la part du cessionnaire.

 

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