La Monarchie Constitutionnelle, un régime parlementaire

LA MONARCHIE CONSTITUTIONNELLE (1814/1815 – 1848)

—> La 1ère période porte le nom de Restauration et s’étend de 1814-1815 jusqu’en 1830, période qui voit se succéder sur le trône les 2 frères cadets de Louis XVI que sont Louis XVIII (1814 – 1824) qui va se révéler assez libéral et Charles X (1824 – 1830) qui va au contraire apparaître comme un monarque conservateur. La 2nde période porte le nom de Monarchie de Juillet qui s’étend de 1830 jusqu’en 1848, le nouveau roi est incarné par Louis Philippe et appartient à une branche cousine de la famille des Bourbon qu’est la famille d’Orléans. Louis Philippe ne porte plus le titre traditionnel de roi de France mais de roi des français et on s’habitue même à le qualifier de roi bourgeois ce qui veut dire que cette période est dominée par le pouvoir politique de la bourgeoisie avec les tendances libérales qui la caractérisent. Libéral ne signifie pas forcément démocrate c’est à dire la reconnaissance de la compétence politique de l’ensemble de citoyens et de fait ce régime comme la Restauration connaît un suffrage restreint, ce qui suscitera de + en + l’hostilité des républicains qui vont tirer partie en 1848 de l’impopularité croissante de Louis Philippe due au fait que son régime devient de + en + conservateur.

LES ORIGINES DU REGIME PARLEMENTAIRE

—> Sous la révolution il n’y a aucune forme de régime parlementaire et d’autant moins qu’on prétend s’accrocher au principe de la séparation des pouvoirs. C’est donc sous la monarchie constitutionnelle que se forme peu à peu le régime parlementaire, ce système parlementaire s’inspirant très largement du régime qui a commencé à se mettre en place en Angleterre à partir de la fin du 18e siècle car c’est elle qui va proposer la formule de ce régime. Mais ce régime parlementaire n’est pas encore un régime parfaitement évolué c’est à dire ce qu’on appelle aujourd’hui un régime parlementariste moniste (le gouvernement est responsable uniquement devant le Parlement) mais c’est un régime parlementaire dualiste (le gouvernement est responsable à la fois à l’égard du chef de l’Etat et du Parlement).

—> Collaboration des pouvoirs entre l’exécutif et le législatif c’est à dire que chacun des 2 organes a des moyens de pression sur l’autre et donc il y a une sorte d’équilibre qui s’exerce entre les 2 qui font qu’ils sont forcés de collaborer comme le souhaitait déjà Montesquieu au milieu du 18e siècle. Le Parlement à l’époque est composé de 2 chambres mais en ce qui concerne l’exécutif la situation est assez complexe car en effet d’après la Charte de 1814 (puis celle révisée en 1830) seul le roi détient en principe le pouvoir exécutif. Or, dans la pratique le roi partage de + en + le pouvoir exécutif avec les ministres ou plus précisément avec l’ensemble des ministres qu’à l’époque on appelle le ministère ou le cabinet (repris au vocabulaire de l’Angleterre). La Charte parle de responsabilité des ministres mais sans aucune précision de sorte qu’au départ on peut se demander si les ministres sont politiquement responsables autrement dit ont une véritable autorité gouvernementale et donc participe au pouvoir exécutif.

=>Cela acheminant un régime parlementaire

A) Les moyens d’action des chambres

Les pouvoirs attribués par la Charte

a) Le vote du budget

—> c’est en 1814, lors de la 1ère Restauration, que le budget est voté pour la 1ère fois en France par le Parlement dans les règles et il vote les dépenses de l’Etat avant les recettes (étant constituées surtout par l’impôt) qui couvriront les dépenses et le principe est de s’assurer de l’équilibre budgétaire c’est à dire que toutes les dépenses seront couvertes par des recettes.

—> Au début de la Restauration, le budget est encore voté en bloc mais très rapidement le budget est voté de + en + dans les détails (dépenses de chaque ministère, de chaque type d’activité, etc.) et le but de cet examen détaillé du budget par le Parlement étant évidemment d’assurer un contrôle étroit du Parlement sur l’activité du gouvernement (activités des divers ministères).

b) Le vote de la loi

—> Le pouvoir de voter la loi : c’est sous la monarchie constit que se mettent en place les principes de la procédure législative

=>Problème : l’initiative de la loi au début, sous la Restauration, l’initiative appartient seulement au roi mais sous la Monarchie de juillet l’initiative est partagée entre le roi (càd le gouvernement) et le Parlement.

—> Les projets de loi sont d’abord transmis pour examen à la chambre des députés et pour cela elle constitue 9 bureaux (càd commissions législatives) entre lesquelles sont répartis tous les députés par tirage au sort (calquée sur le système anglais) Le vote des projets de loi a lieu après les débats législatifs en assemblée plénière, débats qui se font en toute liberté puis on passe au vote et au départ c’est un vote secret donc sans pression de la part d’un groupe politique mais en 1845 on introduit au contraire le vote public, ce nouveau système devant permettre au gouvernement d’exercer des pressions sur les députés.

—> En conclusion à propos du pouvoir législatif des assemblées, il faut relever la grande qualité à cette époque à la fois des débats au Parlement (haute tenue intellectuelle) et une grande qualité des textes eux-mêmes (sans équivoques). Ceci étant ce bon travail du Parlement s’explique en partie par le fait que peu de lois sont votées à l’époque du fait que l’Etat qui est libéral intervient assez peu dans la vie du pays en particulier dans la vie éco et sociale.

La mise en cause de la responsabilité du gouvernement

—> La Charte de 1814 parle de la responsabilité des ministres mais sans précision et cette expression prend alors 2 sens que sont d’une part la responsabilité pénale individuelle des ministres qui peut être mise en cause en cas de trahison ou en cas de trafics financiers illégitimes, la mise en accusation étant réalisée par la chambre des députés et le jugement est rendue par la chambre des pairs. D’autre part la responsabilité politique des ministres mais seulement devant le roi car c’est lui qui nomme les ministres et donc on en déduit que lui seul peut révoquer les ministres

—> La nouveauté c’est la responsabilité politique collective des ministres devant le Parlement et c’est en cela qu’on peut parler d’un véritable début de régime parlementaire. Pour que cette responsabilité soit effective il faut l’existence d’un véritable gouvernement c’est à dire d’une entité constituée par les ministres autonome par rapport au roi mais aussi qu’en désignant les ministres le roi tienne compte des sentiments du Parlement.

=> Il faut une certaine entente entre le roi et le Parlement pour la désignation des ministres.

—> De fait, le roi, dans l’ensemble, tiendra compte de l’opinion des ministres c’est à dire tiendra compte des vœux de la majorité parlementaire. En conclusion on peut dire que cette responsabilité collective des ministres ne découle pas directement de la Charte mais d’une sorte d’interprétation de la Charte par le Parlement c’est à dire que les chambres ont en quelques sorte considérées que d’après la Charte on pouvait mettre en cause la responsabilité collective des ministres (coutumes).

—> Dès cette époque, apparaissent plusieurs moyens pour mettre en œuvre cette responsabilité :

D’abord il existe un devoir de pétition présentée à la chambre qui appartient aux citoyens et ces pétitions sont le point de départ des questions posées au Parlement qui parfois sont l’occasion de mettre en cause la politique générale du gouvernement, c’est ce qu’on appelle une interpellation.

Un procédé inspiré du système anglais qu’est le discours du trône qui est l’occasion pour le gouvernement (au nom du roi) de présenter sa politique pour la période à venir, or les députés sont autorisés à faire des remarques sur les propos du gouvernement, sur ce discours et l’ensemble de ces remarques est appelée l’adresse de la chambre au gouvernement.

=>Peu à peu cette adresse fait l’objet d’une véritable élaboration et d’une véritable discussion de sorte qu’elle devient le principal moyen pour les députés de faire connaître leur position au gouvernement.

—> La + célèbre est l’adresse en réponse au discours du trône de l’année 1830 car elle a été très critique à l’égard du gouvernement conservateur en place dirigé par Polignac et constitue le point de départ de la crise politique qui allait aboutir au bout de quelques mois à la révolution de juillet de 1830. Sous la monarchie de juillet, toutes ces procédures se régularisent et deviennent banales de telle façon que il devient impossible pour un gouvernement de rester en place s’il n’a pas la confiance de la majorité de la chambre et c’est le critère d’existence d’un régime parlementaire. Le régime parlementaire reste à l’époque un régime parlementaire dualiste c’est à dire un régime dans lequel le gouvernement a besoin d’une double confiance, la confiance de la chambre mais également la confiance du chef de l’exécutif c’est à dire le roi et précisément Louis Philippe n’a jamais renoncé à son pouvoir de chef de l’exécutif et ceci l’amène en particulier a dissoudre des gouvernements c’est à dire à renvoyer des ministres même quand ceux-ci ont la confiance du Parlement.

=>A partir de la IIIe République il ne sera plus dualiste mais moniste

B) Les moyens de pression de l’exécutif sur les chambres

—> 3 moyens sont surtout utilisés par l’exécutif à l’encontre du Parlement :

La faculté de dissoudre la chambre des députés car le roi en effet peut constitutionnellement dissoudre cette chambre et cela est un critère de l’absence de séparation des pouvoirs.

—> De plus en plus la dissolution n’est pas due à l’initiative du roi mais est demandée au roi par le gouvernement et dès cette époque elle a 2 fonctions bien connues en GB que sont le moyen de se défaire d’une chambre qui s’oppose au gouvernement et une dissolution au moment le plus opportun pour réaliser les élections car on pense que la nouvelle chambre sera favorable en majorité au gouvernement.

Les fournées de pairs qui consistent pour le roi à nommer de nouveaux pairs quand la majorité de la chambre est hostile au gouvernement et donc il va nommer des pairs favorables au gouvernement pour renverser la balance.

—> Ce procédé est parfaitement légitime car c’est le roi à sa discrétion peut nommer des pairs mais a été utilisé à des fins éminemment politiques.

Le système des députés-fonctionnaires c’est à dire un moyen par lequel le gouvernement peut exercer une pression politique sur un certain nombre de députés.

—> Sous la monarchie constitutionnelle il n’y a pas d’indemnité parlementaire (revenu versé aux députés pour leur permettre d’organiser leur travail) et donc pour vivre ils doivent disposer d’un revenu personnel alors beaucoup sont en même temps propriétaire foncier (40% à peu près). Ces députés sont totalement indépendants du gouvernement mais il en va autrement pour les députés qui détiennent un emploi de l’Etat autrement dit un emploi de fonctionnaire. Or à cette époque il n’y a pas d’incompatibilité entre la fonction de député et la fonction d’agent de l’Etat c’est à dire qu’on peut exercer les 2 métiers en même temps et en tant que fonctionnaire on perçoit un revenu de l’Etat.

=> Le gouvernement en tant qu’employeur dirige en quelques sorte la carrière des députés-fonctionnaires

=>Pour se débarrasser de cette pression, les députés vont faire élire députés des fonctionnaires en place.

Attribuer à un député un poste avantageux dans l’administration

—> Les députés fonctionnaires ont été de plus en plus nombreux et on a pu compter que sous la Monarchie de juillet et donc spécialement où le vote à l’assemblée devient publique, + de la moitié des députés seront des fonctionnaires et on comprend alors très bien le pouvoir de pression de l’exécutif sur l’assemblée.

CCL : La crise politique marquant la fin du régime

=>A la fin des années 1840, l’opinion publique est de + en + critique à l’égard du roi et du gouvernement qui est dirigé par Guizot donc de + en + conservateur. Les critiques portent surtout en matière politique sur le poids de l’exécutif sur la chambre des députés et pour mettre fin à ce système les opposants demandent ce qu’ils appellent la réforme parlementaire. Mais il y a une autre forme de critique qui concerne le suffrage et c’est pourquoi l’opposition demande ce qu’elle appelle la réforme électorale c’est à dire non pas l’instauration du suffrage universel mais l’abaissement du cens à 100 francs ce qui multiplierait le nombre des électeurs simplement.

=>On demande également en 1847 au gouvernement des mesures sociales pour faire face à la crise éco qui atteint alors la France, crise qui a pour effet d’entraîner un chômage important. Le gouvernement, à l’époque, s’oppose à toute forme de réunion politique et à plus forte raison de manifestations de rue, pour cette raison les opposants vont utiliser un procédé assez curieux qu’est l’organisation de banquets et on va parler de campagnes des banquets. c’est la seule forme de réunion publique admise par le gouvernement et les banquets sont l’occasion de discours dans lesquels on critique le gouvernement. Ces banquets ont été un grand succès en Province et on avait prévu pour achever la campagne d’organiser un grand banquet à Paris suivi d’une manifestation politique mais le gouvernement s’oppose à cela car il a peur qu’il mette en cause sa légitimité et finalement les organisateurs renoncent au projet. Mais il y a un secteur de l’opinion à Paris qui ne renonce pas à manifester son opposition, d’une part les ouvriers de la capitale et d’autre part les étudiants concentrés au quartier latin, ces 2 groupes constituant une manifestation qui doit converger et pour essayer de l’empêcher le gouvernement devrait recourir à la force publique mais à Paris la force publique principale c’est la garde nationale bourgeoise qui soutient les opposant.

=>Louis Philippe renvoie Guizot et son ministère le 22 février 1848 puis le 23 les ouvriers et les étudiants décident de faire une nouvelle manifestation pour fêter leur victoire. Or cette manifestation du 23 est réprimée au prix d’une fusillade entraînant plusieurs morts et cette fusillade est immédiatement le point de départ d’insurrection populaire qui évidemment appelle à la fin du régime et Louis Philippe dans l’urgence est contraint d’abdiquer (comme Charles X en 1830) mais en faveur de son petit-fils qui doit le remplacer à la tête du royaume, faveur qui n’a cependant aucun effet car en l’absence de pouvoir, la révolution aboutit à l’instauration de la République (IIe)