La formation d’un nouvel ordre : élaboration de la Constitution et gouvernement de fait
Du au
—> Les députés du Tiers Etat à l’occasion du Serment du Jeu de Paume s’étaient engagés à rédiger une Constitution et le 9 juillet 1789 l’Assemblée Nationale se proclame constituante. Dès lors, elle se lance dans le travail d’élaboration de la Constitution mais ce travail ne sera achevé que le 3 septembre 1791 c’est à dire au bout de 2 ans notamment en raison de l’inexpérience des députés, de nombreux incidents (crise et conflit) mais aussi par la préparation de nombreuses lois à côté.
=>Pendant 2 ans, la France a vécu sous un régime politique en partie légal.
—> C’est un régime de représentation nationale qui a la forme d’une monarchie constitutionnelle. La souveraineté, pouvoir suprême de l’Etat, est transférée du roi non pas au peuple, ensemble concret des citoyens mais à la Nation, entité abstraite qui est un être indivisible (≠ pas encore démocratie). Le pouvoir n’est pas exercé par la communauté des citoyens mais par les représentants de la Nation, titulaire de la souveraineté, c’est à dire essentiellement les députés qui ne représentent pas, à l’Assemblé nationale, leurs électeurs mais la Nation toute entière, Nation qui est indivisible. Or, il va de soi qu’un être abstrait ne peut pas donner un mandat impératif aux députés et par conséquent ils pourront en toute autonomie exprimer la volonté de la Nation, volonté dite générale donc pas de compte à rendre aux électeurs
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—> Dans ces conditions on voit que le rôle des citoyens se réduit à élire les députés mais nous verrons plus tard que tous les citoyens ne pourront pas être électeurs. Cette conception très restrictive du rôle des citoyens s’explique sans doute en partie par la méfiance des députés à l’égard du citoyen dit moyen car il est considéré comme peu éclairé pour se prononcer directement sur les intérêts du pays. L’application de ces principes a connu des nuances, en effet, beaucoup de députés en 1789 ont le souci de garder le contact avec leurs électeurs (envois de lettres notamment) et de fait, ils tiendront compte dans une certaine mesure de l’état d’esprit de leurs électeurs. A propos de l’idée de représentation nationale, on peut parler de fiction juridique mais de façon générale, les députés ne feront jamais abstraction des désirs de leurs électeurs. Ensuite on a l’idée d’un principe de la séparation des pouvoirs dégagé par Montesquieu, en effet tandis que le pouvoir législatif, pouvoir suprême est confié à l’Assemblée nationale, le pouvoir exécutif, simple pouvoir d’exécuter la loi, est confié à un roi qui est constitutionnel c’est à dire que ses pouvoirs sont limités par la Constitution écrite mais ce principe fondamental ne sera pas strictement appliqué ni respecté.
I ) L’organisation et les compétences de l’Assemblée
—> Le problème est de savoir si l’Assemblée législative doit comporter une (monocaméralisme) ou 2 chambres (bicaméralisme) et 2 camps se sont battus sur ce point. Les partisans de 2 chambres dont le principal argument est que l’intervention d’une 2e chambre doit permettre la modération dans les débats et le vote de la loi s’opposent aux partisans de la chambre unique qui répliquent que d’une part «la nation étant une, la représentation doit être une» et d’autre part que les membre d’une 2e chambre risqueraient de former une nouvelle aristocratie (la chambre des lords en GB).
=>Finalement la Constitution de 1791 ne prévoit qu’une seule chambre dite assemblée législative
- a) L’organisation de l’Assemblée
—> Elle devait être élue pour 2 ans et comporter 745 députés. Contrairement au Parlement moderne, elle est permanente c’est à dire qu’en principe elle siège sans interruption entre le jour de l’élection et la fin du mandat des députés.
=>Cela s’explique par le fait que l’Assemblée représente la Nation par définition permanente
—> Le roi n’a pas le pouvoir de convoquer ou de renvoyer les députés comme il le faisait pour les Etats G.
—> L’Assemblée se réunit 2 fois par jour et la 2e séance débute à 18h ce qui explique l’importance des séances de nuit comme la nuit du 4 août 1789 par exemple. Etant nombreuse l’Assemblée a d’abord siégé à Versailles mais en octobre 1789 elle vient à Paris avec le roi et va se réunir dans un 1er temps dans la salle des manèges (pour chevaux) qui se situe dans le jardin des Tuileries mais elle n’est pas adaptée (très longue et acoustique déplorable). Pour être un bon orateur il faut avoir une voix puissante. 2 ans + tard, l’Assemblée s’installe au Palais des Tuileries
—> Au centre de l’un des 2 côtés est placé le bureau du président, sous celui-ci on trouve la tribune des orateurs et la salle est abondamment décorée car elle est considérée comme une sorte de temple civique. —> Au titre de ces décors, on trouve gravé le texte de la DDHC et de la Constitution sur des pierres mises en évidence. Le président est censé diriger les débats et en cas de perturbation, assurer la police. Sous la révolution, le président de l’Assemblée manque d’autorité et ceci s’explique par le fait qu’il est élu seulement pour 15 jours. L’Assemblée étant très nombreuse et le travail difficile à organiser en séance plénière, on a décidé d’élire au sein même de l’Assemblée des comités pour préparer les projets de lois avant qu’ils soient votés. Ces comités sont au nombre de 30 environ et sont élus parmi les députés mais certains députés comme Robespierre refusent de faire partie de ces comités et ont une attitude purement critique à l’égard du travail législatif. Le comité le + prestigieux est le comité de C°.
- b) Les compétences : la législation et le veto royal
—> L’Assemblée constituante a eu un rôle constituant ms pas uniquement. En principe, en vertu de la séparation des pouvoirs, l’Assemblée n’a pas de pouvoir de contrôle sur l’exécutif et en ce sens le régime politique n’est pas un régime parlementaire. L’Assemblée a un rôle budgétaire c’est à dire qu’elle vote les dépenses et les recettes de l’Etat puis il faut remarquer que c’était pour résoudre la crise financière qu’avaient été réunis les Etats Généraux. Or on constate que les députés ont largement négligé ce rôle budgétaire même si la Constitution leur en donne le pouvoir notamment en matière d’impôts (institution d’un nouveau système d’impôt) et de gérer l’équilibre entre les recettes et les dépenses de l’Etat.
=>Ce désintérêt est 1 des aspects de la crise des finances publiques qui se prolongera pendant toute la révolution.
=>On peut donc dire que l’activité principale de l’Assemblée est le vote de la loi, c’est pourquoi elle est législative.
—> Il faut aussi considérer l’initiative de la loi qui appartient, sous la révolution, uniquement à l’Assemblée toujours en vertu de la séparation des pouvoirs, le gouvernement n’y participe donc pas. En principe tout député a l’initiative de la loi c’est à dire qu’il n’est pas nécessaire que le projet soit soutenu par un certain nombre de députés car chaque député personnellement est censé représenter toute la Nation. L’initiative prise, le projet de loi est étudié par un comité puis voté en assemblée plénière et doit requérir la majorité simple c’est à dire que pour qu’il soit valable 200 députés (sur 745) doivent participer au vote. On parle de «quorum». Une sorte de dérogation au principe de la séparation des pouvoirs apparaît en l’intervention du roi à qui on reconnaît le droit de promulguer la loi, on parle de sanction royale et il dispose aussi d’un pouvoir qu’on appelle le droit de veto c’est à dire le droit de s’opposer à une loi. La question du veto royal a été le + important débat constitutionnel car 2 camps s’opposaient avec d’un côté les partisans d’un roi au pouvoir fort demandant le droit de veto absolu et de l’autre côté les partisans qui voulaient soit que le roi n’est aucun veto soit tout au + un veto suspensif ou temporaire.
=>La solution de compromis l’a emporté dès sept 1789 et on la retrouve dans la Constitution de 1791
—> Le roi pouvait dont s’opposer à l’application d’une loi seulement pendant 2 législatures successives maximum c’est à dire 4 ans mais ce système n’a pas fonctionné puisque la royauté a disparu en 1792. Pourtant il s’agit là d’un pouvoir important accordé et Louis XVI l’a utilisé d’ailleurs à de nombreuses reprises pour s’opposer notamment à certaines réformes fondamentales, opposition temporaire en raison de la solution de compromis. C’est à l’occasion de ce débat qu’ait apparu en France cette opposition fondamentale dans l’imaginaire politique entre la droite et la gauche car selon les dires cela viendrait du fait que les partisans du veto absolu s’étaient regroupés à la droite du président de l’Assemblée et les adversaires à sa gauche. On constate que les lois de la révolution étaient souvent connues avec 2 dates comprenant toujours un écart de quelques jours car la 1ère date est celle du vote de la loi qui à ce moment là est un décret (le terme n’ayant pas le sens qu’on lui donne aujourd’hui) puis c’est uniquement au moment de la promulgation quelques jours + tard que le décret prend le nom de loi (2e date).
- c) Le public à l’Assemblée
—> Il peut assister aux débats de l’Assemblée en vertu du principe de la publicité de ceux-ci, public important en nombre car outre les députés près de 8 000 personnes peuvent entrer dans la salle. Il s’agit essentiellement du petit peuple parisien (boutiquiers, artisans, commerçants…) autrement dit les sans-culottes de la révolution et il manque de discrétion car il intervient bruyamment soit pour applaudir soit pour conspuer un orateur c’est à dire quasiment l’empêcher de parler. L’intervention du public perturbe donc les débats qui doivent être fait normalement dans un climat de clarté et aliène la liberté de parole des députés en la menaçant, c’est pourquoi il aurait fallu réunir l’Assemblée à huit clos comme l’avait prévu la Constitution mais les députés n’ont pas siégé ainsi car ils avaient peur des manifestants. Le public a aussi un droit de position de pétition autrement dit le droit de présenter des demandes à l’Assemblée (des revendications en général) et cela permet de redonner un certain pouvoir aux électeurs. Ce peut être des pétitions individuelles mais le plus souvent elles sont collectives et durant les séances les pétitionnaires ne cessent de défiler devant le bureau du président, les députés devant ensuite examiner ces pétitions, ce qui désorganise le travail législatif. D’où la réaction de l’Assemblée qui, à plusieurs reprises, essaiera de limiter le droit de pétition mais elle échouera et c’est par pétition que sera demander la destitution du roi par les manifestants parisiens. On peut dire que l’Assemblée a été très perturbée par l’intervention du public et c’est la raison pour laquelle le régime du directoire va limiter rigoureusement celle-ci.
II) Le roi et le pouvoir exécutif
- a) Le maintien de la royauté et le statut du roi
—> On a maintenu la royauté en 1789 car il n’y avait pas de véritable parti républicain en France et même Robespierre, partisan du suffrage universel, pense qu’il n’entraîne pas forcément la République. Le roi est donc titulaire du pouvoir exécutif et on maintien même Louis XVI à ce pouvoir. Le roi est considéré comme un personnage supérieur car en effet il est un représentant de la Nation et est inviolable au même titre que les députés c’est à dire qu’il est politiquement irresponsable et ne peut pas être traduit en justice.
=>Cependant la Constitution prévoit 5 cas où la destitution du roi est automatique ou de droit et notamment en cas de départ du roi pour l’étranger sans avoir prévenu l’Assemblée par exemple.
- b) Le pouvoir exécutif du roi
—> Il est en principe titulaire du pouvoir exécutif entendu au sens strict de l’époque c’est à dire pouvoir d’exécuter la loi et non de l’interpréter car seule l’Assemblée est jugée compétente. Par ailleurs, le roi n’a pas de pouvoir réglementaire c’est à dire qu’il ne peut pas édicter des règles générales et en ce sens il ne dispose pas du pouvoir gouvernemental. Cette théorie cependant est fort nuancée par la pratique, c’est le roi qui est chargé de la politique extérieure pour une raison d’opportunité car les révolutionnaires sont mal vus par les rois européens et donc pour éviter les provocations, il est décidé que Louis XVI, qui a des rapports privilégiés avec les monarques européens, qui s’occupera de la politique extérieure.
- c) Les ministres du roi
—> En vertu de la séparation des pouvoir, les ministres sont en principe des agents du roi, par ailleurs un député ne peut devenir ministre, et il n’y a pas de solidarité ministérielle c’est à dire qu’il n’y a pas de régime parlementaire (≠ responsabilité collective). Cependant le principe de séparation entre exécutif et législatif n’est pas tjrs respecté car on constate que l’Assemblée essaie d’attirer les ministres dans son champ de pouvoir.
=>Une loi constitutionnelle de 1791 attribue une vraie responsabilité perso à chaque ministre devant l’Assemblée.
—> Enfin par la pratique l’Assemblée tente de contrôler de + en + l’action des ministres et on constate qu’elle peut + ou – contraindre le roi à les renvoyer, cela étant contraire à la séparation des pouvoirs.
- d) Les empiétements de l’Assemblée sur la fonction exécutive
—> L’Assemblée ne se contente pas de contrôler l’activité des ministres, de + en + elle intervient dans la fonction exécutive pour une raison de circonstance qui est que durant l’été 1789 on constate que Louis XVI, dépassé, abdique nettement sa fonction gouvernementale c’est à dire sa fonction exécutive et cela a pour conséquence les nombreux troubles de l’ordre public, l’Assemblée va donc intervenir. Il y a aussi une forte méfiance à l’égard du roi et des ministres, ce sont alors les comités de l’Assemblée qui vont réaliser les fonctions d’exécution et c’est ainsi que les comités spécialisés vont chacun dans sa spécialité + ou – remplacer l’action des ministres en prenant même des décisions réglementaires.
=>Absolutisme parlementaire = confusion des pouvoirs
—> Le roi n’a plus qu’en définitif qu’un pouvoir fort qui est son droit de veto et pour se défendre il aura tendance à multiplier les vetos (Louis XVI a été surnommé «Monsieur veto»). Le comité des recherches créé durant l’été 1789 effectue un travail de police politique car il centralise les dénonciations, peut procéder à des arrestations et dispose d’action d’espions dans la société. En 1792 on créé au sein de l’Assemblée législative la commission des 12 (députés) qui a une large compétence en matière exécutive et va parfois donner des ordres aux ministres.
=>Elle se substitue donc au roi et anticipe le futur comité de salut public