Les obligations du vendeur au contrat de vente au Sénégal

Droit sénégalais (OHADA) : Les obligations du vendeur au contrat de vente

A la rencontre de l’offre et de l’acceptation, le contrat de vente commerciale est conclu. La vente est donc un contrat personnel en ce sens qu’il ne se conclut pas par la remise de la chose, celle-ci étant un effet et non une condition de formation du contrat. Elle est aussi un contrat instantané, l’exécution des obligations étant immédiate et concomitante. Mais, il faut reconnaître que cela est plus vrai pour les ventes aux consommateurs que pour les ventes entre commerçants et, de surcroît, des clauses particulières peuvent affecter les modalités d’exécution de la vente.

Dans tous les cas, la vente fait naître des obligations aussi bien pour le vendeur que pour l’acheteur. Ses principaux effets sont le transfert de propriété et le transfert des risques.

Le vendeur est tenu d’une obligation de délivrance, d’une obligation de conformité et d’une obligation de garantie. En effet, il doit, dans les conditions prévues au contrat et dans le respect des règles de droit, livrer les marchandises et remettre s’il y a lieu les documents s’y rapportant, s’assurer de leur conformité à la commande et accorder sa garantie[20].

  • a) Obligation de délivrance et de livraison

Le transfert de propriété est subordonné à l’exécution de l’obligation de délivrance. La délivrance est le transfert de la détention de la chose vendue. Le vendeur doit délivrer la chose vendue, c’est-à-dire permettre à l’acheteur d’en prendre possession. C’est une obligation juridique qui peut se réaliser matériellement par la remise de la chose de la main à la main, mais qui ne se confond pas avec l’obligation matérielle de livraison qui doit être souscrite spécialement. L’obligation de délivrance peut, par exemple, être exécutée par remise d’un titre de propriété ou par la mise à disposition en magasin.

La délivrance se fait de façon différente selon que la chose vendue est mobilière ou immobilière. Si la chose vendue est un meuble, les modes de délivrance sont fixés par la volonté des parties et seront déterminés en fonction de la nature de la vente et des usages du commerce. Elle peut résulter d’une simple remise de la chose, du titre ou des documents à l’acquéreur.

En revanche, si la chose vendue est un immeuble, la délivrance s’opère lorsque les formalités de publicité à la propriété foncière ont été satisfaites et que le titre foncier est établi au nom de l’acquéreur.

1°- Lieu de livraison

La délivrance doit se faire au lieu convenu au contrat ou déterminé par les usages. Cependant, si le vendeur n’est pas tenu de livrer la marchandise en un lieu particulier déterminé d’un commun accord avec l’acheteur, son obligation de livraison consiste à remettre les marchandises à un transporteur pour leur livraison à l’acheteur si le contrat prévoit un transport des marchandises et, dans tous les autres cas, à tenir les marchandises à la disposition de l’acheteur au lieu où celles-ci ont été fabriquées, ou encore, là où elles sont stockées ou encore, au lieu ou le vendeur a son principal établissement.

Si le vendeur est tenu de prendre des dispositions pour le transport des marchandises, il doit conclure les contrats nécessaires pour que ce transport soit effectué jusqu’au lieu prévu avec des moyens de transport appropriés et selon les conditions d’usage. Si l’obligation de transporter les marchandises qui pèse sur le vendeur ne comporte pas une obligation de souscrire lui-même une assurance de transport, le vendeur doit fournir à l’acheteur, à la demande de celui-ci, tous les renseignements dont il dispose qui sont nécessaires à la conclusion de ce contrat d’assurance. Il s’agit, pour le vendeur, d’une obligation de coopération en vue de faciliter la livraison.

2°- Date de livraison

Comme le lieu de la délivrance, la date de la délivrance dépend de la commune volonté des parties ; dans ce cas, elle peut fixée par le contrat ou déterminable par référence au contrat. Si par contre, une période de temps est fixée par le contrat ou est déterminable par référence au contrat, la livraison doit être effectuée par le vendeur à un moment quelconque au cours de cette période. A défaut de convention quelconque portant sur la date de la livraison, la livraison doit se faire dans un délai raisonnable à partir de la conclusion du contrat qui résulte des circonstances de la cause et des usages commerciaux ; l’appréciation du caractère raisonnable est du pourvoir souverain du juge. Cependant, dans les ventes au comptant, la délivrance peut être subordonnée au paiement du prix. Mais, en aucun cas, le vendeur ne peut obtenir un délai de grâce pour effectuer son obligation.

Pour conclure sur l’obligation de délivrance et de livraison, il faut rappeler que si le vendeur est tenu de remettre les documents se rapportant aux marchandises, il doit s’acquitter de cette obligation au moment, au lieu et dans la forme prévus au contrat.

Par ailleurs, les frais de délivrance incombent au vendeur sauf conventions contraires des parties.

En outre, l’acheteur peut contraindre le vendeur à délivrance par une astreinte. Sinon, après mise en demeure, il peut se fournir chez un concurrent aux frais du vendeur. Cette possibilité n’est cependant ouverte que si la vente porte sur des choses de genre. Il peut aussi obtenir la résolution du contrat pour inexécution avec remboursement des acomptes versés.

Enfin, tout manquement à l’obligation de délivrance peut ouvrir droit à des dommages-intérêts, non seulement pour le préjudice subi, mais aussi pour le manque à gagner. Cela est d’autant plus logique lorsque l’on est en matière commerciale où la célérité et la rapidité sont de rigueur.

  • b) Obligation de conformité

Le vendeur doit délivrer les marchandises dans la quantité, la qualité, la spécification, le conditionnement et l’emballage correspondants à ceux prévus au contrat. La marchandise doit être conforme à ce qui a été convenu accompagnée de tous ses accessoires et de tout ce qui est indispensable à son utilisation, mais également, tout ce qui est indispensable à sa remise à l’acheteur.

En effet, à moins que les parties n’en soient convenues autrement, l’article 224 de l’acte uniforme portant droit commercial général considère, de manière pragmatique, comme conformes au contrat, les marchandises qui :

  • sont propres aux usages auxquels servent habituellement les marchandises de même type,
  • sont propres à tout usage spécial qui a été porté à la connaissance du vendeur au moment de la conclusion du contrat,
  • possèdent les qualités d’une marchandise dont le vendeur a remis à l’acheteur l’échantillon ou le modèle,
  • sont emballées ou conditionnées selon le mode habituel pour des marchandises de même type, ou à défaut de mode habituel, de manière propre à les conserver et à les protéger.

La chose délivrée doit donc correspondre à celle qui a été commandée. L’écart est considéré juridiquement comme un manquement à l’obligation de délivrance. C’est à l’acquéreur qu’il appartient de rapporter la preuve de cet écart ; d’où l’intérêt de la vérification et de l’examen de la chose réceptionnée.

Dans tous les cas, la référence, qui permet de vérifier la conformité, peut être inscrite au contrat (exemple : vente sur échantillon, références à des normes techniques). Si le contrat ne contient aucune stipulation, il faut se référer aux usages : la marchandise doit être loyale et marchande. Mais, la jurisprudence est allée plus loin en admettant que la référence pouvait aussi porter sur la destination que l’acheteur entendait donner à la chose : par exemple, le juge a été déclaré non conforme un appareil de détartrage qui, malgré son excellent fonctionnement, ne correspondait pas à l’usage auquel il était destiné. La jurisprudence est ainsi passée d’une conformité d’identité à une conformité des qualités de la chose, ce qui a opéré un certain rapprochement avec la garantie des vices cachés. L’acte uniforme portant droit commercial général a repris cette position en considérant que la chose livrée doit répondre à l’utilisation à laquelle elle est destinée.

L’obligation de conformité n’est pas illimitée. En effet, le vendeur n’est responsable que du défaut de conformité qui existe au moment du transfert des risques à l’acheteur, peu importe que ce défaut soit apparent ou apparaisse ultérieurement. Est donc exclu tout défaut postérieur au transfert des risques.

En cas de livraison anticipée, le vendeur a le droit jusqu’à la date prévue pour la livraison, soit de livrer une partie ou une quantité manquante ou des marchandises nouvelles en remplacement des marchandises non conformes au contrat, soit de réparer tout défaut de conformité des marchandises, à condition que l’exercice de ce droit ne cause à l’acheteur ni dommage, ni frais. Le vendeur peut ainsi parfaire l’exécution de son obligation jusqu’à la date prévue sans toutefois porter atteinte aux intérêts de l’acheteur.

La conformité ou non des marchandises livrées ne peut se déterminer qu’à partir de leur examen. Aussi, l’acte uniforme considère-t-il cet examen comme une obligation de l’acheteur en ce sens qu’il appartient à ce dernier de dénoncer la conformité de la chose réceptionnée et de d’apporter la preuve de sa non-conformité. Nous reviendrons sur cette obligation dans l’étude des obligations de l’acheteur.

Le défaut de conformité entraîne en principe la résolution du contrat pour inexécution fautive. Mais, la jurisprudence considère que, pour entraîner cette sanction, l’écart doit être tel que, s’il l’avait su au moment de la formation du contrat, le cocontractant ne l’aurait pas achetée. Cette fois, un rapprochement est opéré avec l’erreur sur les qualités substantielles de la chose objet du contrat. Lorsque la chose, sans être conforme, permet la réalisation de l’opération projetée, le juge se contente de réduire le prix à payer ou payé par l’acquéreur : c’est ce que l’on appelle la réfaction du contrat.

  • c) Obligation de garantie
  • Dans le droit OHADA (Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires), la garantie contre l’éviction est une protection accordée à l’acquéreur d’un bien contre les réclamations de tiers ayant des droits antérieurs sur le bien.

  • Quant à la garantie contre les vices cachés, c’est une protection accordée à l’acquéreur d’un bien contre les défauts ou les malfaçons qui n’étaient pas apparents lors de la vente et qui rendent le bien impropre à sa destination. La garantie contre les vices cachés permet à l’acquéreur de demander une réparation ou une réduction du prix de vente.

Garantie contre les vices cachés et contre l’eviction (OHADA)

 

[20] Article 219 de l’acte uniforme portant droit commercial général