Les obligations et droits des parties au bail commercial

Les relations entre les parties au cours du bail

   Quels sont les droits et obligations du bailleur et du locataire (ou preneur) d’un local commercial? En l’absence de dispositions particulières, les baux commerciaux sont assujettis aux règles générales régissant le louage d’immeubles. Ces règles générales sont contenues aux articles 1713 à 1762 du Code Civil.

Elles concernent la conclusion du contrat de bail, son exécution et son extinction. Ces baux donnent lieu en pratique à un écrit, mais le Droit des baux commerciaux se particularise par les avantages exorbitants accordés aux commerçants. Le preneur ou locataire dispose de nombreux droits.

 

1)  Les droits du locataire (ou preneur )

Le locataire est en droit d’obtenir la délivrance des lieux loués mais aussi le maintient de ce local en bon état d’entretient. En parallèle, le locataire doit aussi pouvoir jouir paisiblement de ce local ce qui n’exclue pas la possibilité pour le bailleur de louer dans le même immeuble à un concurrent du locataire un autre local pour l’exercice d’une activité similaire. Le propriétaire peut lui-même concurrencer le locataire : liberté contractuelle.

Au-delà de ces aspects, certaines particularités existent. Elles permettent de constater que le locataire dispose d’avantages majeurs quant à la durée du bail, au montant du loyer, à l’utilisation des lieux.

  • a) La durée du bail

Il est fixé pour 9 ans au minimum. Cette durée ne s’impose qu’au bailleur. Le locataire peut résilier le bail tous les 3 ans. Il est admis qu’une clause du bail puisse stipuler une durée supérieure à la durée normale de 9 ans. Il peut donc être résilié par anticipation. La loi autorise ce dernier à donner congé dans le cas où il ferait de mauvaises affaires mais aussi à tout moment quand le locataire peut faire valoir ses droits à la retraite. Ce congé du locataire doit être de 6 mois à l’avance, le locataire n’a pas à motiver sa résiliation. Le contrat peut prévoir une indemnité au profit du bailleur afin de compenser le préjudice qu’il subit. Le contrat de bail peut aussi écarter cette résiliation anticipée. Ce n’est pas une règle d’Ordre Public, mais une règle supplétive à laquelle on peut déroger. Le contrat de bail sera aussi résilié par anticipation en cas de comportement fautif d’une partie, l’autre partie peut alors saisir le juge afin de prononcer la résiliation du bail : article 1184 du Code Civil. prévoyant la résolution du contrat pour inexécution d’une obligation contractuelle. Très souvent, les motifs invoqués sont le défaut de paiement par le locataire, l’absence d’exploitation des lieux loués. C’est le juge saisi qui devra apprécier la situation et voir si le manquement de l’une des parties est suffisamment grave pour générer la résolution du contrat. Les dommages-intérêts peuvent parfois suffire. Les parties peuvent aussi prévoir une clause résolutoire. La clause qui prévoirait que le comportement fautif des parties serait sanctionnée par la résolution du contrat. Ces clauses résolutoires ne sont valables qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le juge peut accorder, même en présence d’une clause résolutoire, un délai de grâce fondé sur l’article 1244-1 du Code Civil.

  • b) Le montant du loyer

Au stade de la formation du contrat, le montant du loyer est librement fixé entre les parties. Aucune disposition du Code de commerce ne vient fixer ce montant. Ce sont donc les parties qui en vertu de l’article 1134 du Code Civil. qui vont déterminer la somme correspondant à la location du bien. La périodicité des paiements est laissée à l’appréciation de chacun, le loyer est généralement trimestriel. Lors de l’entrée dans les lieux, le bailleur peut exiger le versement du versement d’un pas de porte, somme d’argent que va payer le locataire. Cette pratique est licite même si on peut s’interroger sur la nature juridique du pas de porte. S’agit-il d’un supplément de loyer ? Ou de la contrepartie infligée à la propriété du bailleur ? La jurisprudence s’est penchée sur la question et reconnaît les deux qualifications. La Cour de cassation. indique qu’il revient au juge du fond de trancher souverainement le problème de l’interprétation de la volonté des parties. Cette qualification n’a pas qu’un intérêt académique mais des intérêts pratiques concrets. Si le pas de porte est un supplément de loyer, le juge va devoir en tenir compte dans la fixation du loyer révisé. Le juge ne va pas avoir à le prendre en considération pour le calcul de l’indemnité d’éviction en cas de non renouvellement du bail.

  • c) L’utilisation des lieux

Il faut se reporter à une loi du 12 mai 1965 qui a pris en considération la situation du locataire commerçant devant s’adapter en fonction des circonstances économiques. Cette loi prévoit la possibilité d’une déspécialisation du lieu loué, du local. Le commerçant va pouvoir modifier l’usage des lieux. Il existe deux types de déspécialisation :

La déspécialisation partielle : c’est le cas quand le commerçant voudra adjoindre à son exploitation principale une activité connexe ou complémentaire. Le locataire n’a pas à solliciter une autorisation du bailleur. La déspécialisation partielle est un droit. Le bailleur ne peut s’opposer à la demande du locataire qui doit l’informer par acte extrajudiciaire : article L 145-47 alinéa 1 du Code de commerce. Si le bailleur considère que la déspécialisation n’est pas partielle, il peut contester ce caractère dans un délai de deux mois après la notification faite par le locataire. C’est le TGI qui tranchera la contestation. L’ancienne activité doit subsister mais il n’est pas interdit que l’activité nouvelle dépasse l’ancienne : arrêt du 24 octobre 1984, chambre civile 3. Le rajout d’une activité connexe a pour conséquence une augmentation de loyer.

La déspécialisation totale : le locataire demande à exercer une ou plusieurs activités nouvelles différentes. La ou les nouvelles activités nouvelles n’ont plus aucun lien direct ou indirect avec l’ancienne. Pour ce faire, le locataire doit obtenir une autorisation du bailleur et démontrer que le changement d’activité économique est justifié par la situation économique. L’article L 145-48 alinéa 1 du Code de commerce nous parle de la conjoncture économique et des nécessités rationnelles de la société. Le bailleur dispose alors de 3 mois pour répondre à la demande du locataire. S’il ne dit mot, il consent. S’il refuse, le locataire peut saisir le TGI. Le président du TGI tranche alors en appréciant la situation économique. S’il impose la déspécialisation, le bailleur peut réclamer une augmentation de loyer mais également une indemnité destinée à compenser le préjudice que lui cause le changement d’activité qu’il doit prouver : article L 145-50 du Code de commerce. Le locataire dispose d’une faculté de renonciation qu’il doit exercer dans les 15 jours de la date à laquelle le jugement est passé en force de chose jugée : article L 145-55 du Code de commerce.

 

Le Cours complet de droit des affaires est divisé en plusieurs fiches :

 

2)  Les obligations du locataire

Le locataire doit jouir des lieux en bon père de famille, ainsi, il doit éviter tout agissement qui pourrait nuire au bailleur ou aux tiers (troubles anormaux de voisinage par exemple). il ne doit pas modifier le local, sans l’autorisation du bailleur. Il doit garnir de meubles suffisants pour servir d’assiette aux privilèges du bailleur qui pourra les saisir en cas de non-paiement et après procédure.

Le locataire doit également payer les loyers aux termes convenus, faire les réparations locatives, ne doit pas interrompre l’exploitation. Les parties devront déterminer la périodicité, la date et le mode de règlement. La prescription des loyers  est de cinq ans.

Respecter la « destination des lieux »
Le preneur du bail commercial doit exploiter le local commercial conformément à ce qui a été prévu dans le bail. Le bailleur pourrait prévoir dans le bail qu’une seule activité pourra être exercée au sein du local ou en autoriser plusieurs. Il est possible de prévoir un « bail tous commerces », ce qui justifierait, un loyer plus élevé.

 

3)  Les obligations du bailleur

La délivrance des locaux en bon état.

Les obligations du bailleur consistent avant toute chose en la délivrance des locaux en bon état.

Cette obligation est présumée satisfaite dans deux hypothèses : lorsque le bail est verbal et lorsque le locataire a signé le bail écrit sans avoir formulé de réserve quant à l’état des lieux. Cette règle probablement destinée à faciliter le règlement des contestations relatives à la mise en oeuvre de l’obligation du bailleur, peut se révéler dangereuse pour le locataire trop confiant.

Les grosses réparations

Le bailleur a, en outre, l’obligation de faire procéder à ses frais aux grosses réparations (les gros murs, les voûtes, les poutres, la toiture…)

Si ces réparations deviennent nécessaires et urgentes et qu’aucune stipulation du bail ne les met à la charge du preneur, celui-ci peut se faire autoriser par le juge des référés, en cas de refus du bailleur, à les faire exécuter pour le compte du bailleur. Le juge saisi en fixe le montant et les modalités du remboursement par le bailleur. Cela exclut la possibilité pour le preneur de se faire payer par prélèvement sur le loyer.

L’obligation de garantie

Il s’agit de protéger des troubles qui peuvent intervenir après la signature du contrat de bail commercial au préjudice du locataire. On distingue :

  • la garantie des vices cachés (ex : présence d’amiante). Le caractère «caché» d’un vice est déterminé par le juge et, s’il constitue un préjudice pour le locataire (ou preneur), il sera indemnisé.
  • la garantie d’éviction concerne la perte de la jouissance du local ou du droit au bail, et elle est causé par un trouble de fait ou de droit.
  • la garantie de l’exercice de l’activité: le contrat peut impliquer une clause de non concurrence à la charge du propriétaire. En cas de non respect, le preneur pourra engager la responsabilité du bailleur si, par exemple, un autre locataire exerce une activité concurrentielle.

Les charges, impôts, taxes et redevances

À noter que les dispositions de la loi Pinel ajoutent à cet ensemble l’obligation pour le bailleur d’établir un inventaire des charges et impôts liés au bail, de réaliser un budget prévisionnel des travaux prévus dans les 3 ans et un état récapitulatif de ceux qui sont en cours, et d’informer le locataire de tout nouvel impôt survenant durant le bail.

Jusqu’au vote de la loi Pinel, la répartition par écrit des charges entre bailleur et locataire n’était pas obligatoire et était librement fixée par les parties.
La loi relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises du 18 juin 2014 rend obligatoire d’indiquer dans le contrat de bail, un inventaire précis et limitatif des charges, dépenses de travaux, impôts, taxes et redevances liés à ce contrat, ainsi que leur répartition entre le bailleur et son locataire. Un décret d’application du 3 novembre 2014 liste les catégories de charges que le bailleur n’a pas le droit d’imputer à son locataire.

 


Par opposition, on peut donc en déduire la répartition légale suivante :
Pour le locataire :
. les charges d’eau, de gaz et électricité,
. les charges d’équipement de la copropriété (entretien/ascenseur et ménage),
. les impôts liés à l’usage des locaux tels que la taxe foncière, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.
Pour le bailleur :
. les « grosses réparations » touchant au bâti (mur de soutènement, toiture, etc.)
. les travaux de mise aux normes relevant des grosses réparations ou liés à la vétusté des locaux,
. les honoraires de gestion des loyers ou de l’immeuble,
. les frais d’assurance de l’immeuble,
. les impôts liés à la propriété du local (CET).
Cette répartition légale s’impose aux contrats conclus, ou renouvelés après le 5 novembre 2014.
Le bailleur doit adresser un état récapitulatif annuel à son locataire au plus tard le 30 septembre de l’année suivant celle au titre de laquelle il est établi ou, pour les immeubles en copropriété, dans le délai de 3 mois à compter de la reddition des charges de copropriété sur l’exercice annuel.
Pour avoir la liste exhaustive des charges, décret n° 2014-1317 du 3 novembre 2014, journal officiel du 5 novembre 2014

 

 

4)  Les droits du bailleur

— recevoir le loyer

— Le dépôt de garantie

Ce n’est pas une obligation légale, le locataire verse le plus souvent au bailleur un dépôt de garantie lors de la conclusion du bail. Le dépot de garantie est une somme qui a pour objectif de garantir au bailleur la bonne exécution du bail. Cette somme sera remboursée au locataire quand il quittera les lieux et s’il a rempli toutes ses obligations contractuelles. Le montant du dépôt de garantie est fixé librement par les parties mais si ce montant excède deux termes de loyer, le dépôt de garantie est alors productif d’intérêts.

 

sources :

Créer son entreprise : où s’implanter ?

Baux commerciaux – Info-entreprises LR

www.resiliationdebail.com/baux/bail-commercial.html

 

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