Ordre ou autorisation de la loi, commandement de l’autorité légitime

L’ordre ou l’autorisation de la loi ou du règlement et le commandement de l’autorité légitime (article 122-4) :

Sous l’empire du code antérieur c’était l’article 327 qui s’intéressait à ces faits justificatifs : l’article 327 avait des défauts :

  • Il ne faisait référence qu’à l’ordre du texte et non à l’idée de permission ou d’autorisation.

Cet article ne concernait que les crimes et délits et pas les contraventions.

La jurisprudence est venue combler ces deux lacunes en appliquant le texte aux contraventions et en visant la permission ou autorisation. On va étudier les deux alinéas du texte.

Article 122-4 al 1 : L’ordre ou l’autorité de la loi ou du règlement :

Pourquoi se pose-t-on ces questions ? La loi ou le règlement peuvent créer des incriminations ; dans la légalité si on crée une incrimination on peut créer des exceptions : c’est le principe de la légalité.

Certains textes vont obliger une personne à commettre ce qui normalement est une infraction, d’autres textes vont permettre de commettre l’infraction.

On voit par exemple ce qui se passe en matière de secret professionnel : normalement la violation est un délit (article 226-13) toutefois par exception à cela ces mêmes personnes tenues au secret professionnel doivent ou peuvent le briser dans certains cas. Les exceptions sont générales ou particulières (on ne vise que certains type d’infraction) elles peuvent être expresse (on renvoie à une infraction, un texte) ou tacite (c’est souvent le cas : par exemple le fait de considérer que ne sont pas des délits pénaux les opérations chirurgicales qui pourtant sont une atteinte à l’intégrité physique d’une personne).

L’ordre donné par un texte :

L’infraction ainsi commise perd son caractère délictueux. Pourquoi va-t-on permettre ? Le

fondement doit être cherché dans l’utilité pour la société (ex : révélation d’un secret) qui est plus important que l’intérêt personnel.

L’ordre de la loi :

Dans le texte il est question de dispositions législatives. On peut penser à la loi pénale ou civile.

α) L’ordre de la loi pénale :

On entend les lois parlementaires et les textes à valeur législative (ordonnance…), il y un exemple à travers les prérogatives des agents de l’autorité publique qui agissent dans le cadre de leurs fonctions. (Lorsque le juge des libertés ou détention place quelqu’un en détention il est autorisé à porter atteinte à l’intégrité de la personne ce qui normalement est une infraction). Si on démontre que l’agent abuse de ses fonctions il ne peut pas se protéger derrière la loi (ex : violences policières injustifiées).

β) La loi civile :

En principe la loi civile ne devrait pas justifier la commission d’une infraction pénale. A cet égard on a des jurisprudences.

Ex : le devoir de cohabitation entre époux. Pendant des années ce devoir n’a pas pu justifier l’infraction de cohabitation avec une prostituée ce qui était assimilé à du proxénétisme (article 334 al 3 de l’ancien code pénal) puis au fur et à mesure la jurisprudence a évolué notamment sous l’influence de l’article 12 de la CEDH qui reconnaît le droit au mariage. Le nouveau Code Pénal a changé tout cela puisque désormais vivre avec une prostituée n’est plus du proxénétisme (article 225-5 du Code Pénal).

Ex 2 : affaire du viol entre époux : la loi civile inclue dans la cohabitation une composante sexuelle sous entendue. Le devoir de cohabitation peut-il justifier certaines relations Cass. Crim. 26 Septembre 1994 le devoir de cohabitation crée une présomption simple de consentement. La femme qui voudrait démontrer qu’elle a été forcée peut le faire.

L’ordre du règlement :

Un règlement peut justifier sans problème une contravention. Très souvent lorsque le règlement

est d’application il intervient sur délégation du texte législatif. Ex : un règlement oblige les médecins à faire une entorse au secret médical concernant certaine pathologie.

L’autorisation de la loi ou du règlement :

Il n’y a pas obligation pour la personne : le texte laisse un choix. Si la personne choisit de

commettre l’infraction elle est justifiée.

La permission de la loi :

En ce qui concerne la loi pénale un article parfois utilisé est l’article 73 du Code de Procédure

Pénale qui autorise toute personne à appréhender l’auteur d’un crime ou délit flagrant passible de prison.

La loi civile par à priori et en principe ne devrait pas autoriser à la commission d’une infraction mais cela arrive parfois. La loi civile ne justifie pas l’auteur lorsqu’il a un droit civil et qu’il l’exerce de manière illégitime. Ex : un créancier face à un débiteur récalcitrant, le créancier prend un objet du débiteur pour se payer : c’est un vol.

Permission du règlement :

Le plus connu est le décret du 20/05/1903 qui autorise les gendarmes à utiliser leurs armes dans

certains cas. A la base ils ne doivent pas mais il y a une liste de cas où l’usage est autorisé : article 174 du décret lorsqu’on ne peut pas immobiliser un véhicule autrement qu’avec l’arme ou si quelqu’un force un barrage (refus d’obtempérer) on peut utiliser l’arme.

Ex : Cass. Crim. 5/01/2000 un contrôle d’identité tourne mal : un jeune automobiliste force un barrage renverse un gendarme, un autre tire et tue un passager de la voiture. Le gendarme auteur du coup de feu est poursuivi pour homicide involontaire : peut on utiliser l’article 122-4 ou la combinaison des deux textes pour s’exonérer ? Le gendarme cherche à s’exonérer en utilisant la combinaison des deux textes. La CA le condamne en suivant un raisonnement particulier :

Il y a autorisation donnée par règlement et à priori les conditions d’application de l’article 122-4 du CP sont réunies mais la CA dit que l’autorisation du décret ne dispense pas les gendarmes d’être prudent et d’utiliser l’arme avec un minimum d’adresse. On ajoute qu’il y a eu tir instinctif imprudent et maladroit…

Un pourvoi en Cassation est formé, l’arrêt est cassé sans renvoi (on casse sur le droit mais il n’y a

pas de renvoi donc aucune CA ne pourra se prononcer à nouveau). Le pourvoi est formé par le procureur à l’audience, c’est très intéressant.

Qu’est ce qui est décidé ? La Cour de Cassation ne préconise aucune analyse morale, on reste juridique. Elle censure le raisonnement. Elle reproche à la CA d’avoir ajouté l’obligation de prudence qui n’existe pas dans le décret. Il faut exonérer car les conditions sont réunies.

Ce cas ne concerne que les gendarmes, les policiers pour s’exonérer doivent prouver la légitime défense. On s’était demandé s’il ne fallait pas réformer.

La coutume :

Peut-elle autoriser la commission d’une infraction ? Elle intervient parfois en raison d’une

permission ou délégation implicite ou explicite de la loi.

Implicite : ex : en droit civil les textes relatifs à l’autorité parentale (loi du 4/03/2002) renvoie implicitement à la coutume concernant le droit de correction des parents sur leurs enfants (il y a des limites.

Explicite : ex : article 521-1 du Code Pénal sur la Corrida… (tradition locale ininterrompue).

  1. B) Article 122-4 alinéa 2 :

Nous aurons en pratique les deux : un ordre et par cet ordre le commandement de l’autorité légitime. Parfois le commandement de l’autorité légitime peut être autonome par rapport à la loi. Les deux causes sont juridiquement indépendantes.

Le commandement de l’autorité légitime sera retenu sous 2 caractères :

  • L’autorité doit être légitime.

L’acte ne doit pas être manifestement illégal.

L’autorité est légitime :

Elle l’est quand elle est publique : administrative, judiciaire, militaire … L’ordre émanant d’une

Autorité privée n’est pas une cause d’exonération (chef d’entreprise, parents…). Quand on est subordonné on doit respecter la hiérarchie.

L’acte n’est pas manifestement illégal :

Par principe le subordonné doit exécuter tous les actes de son supérieur sauf une illégalité de

manière manifeste, mais comment apprécier ce caractère . On va tenir compte de la nature de l’ordre et de son objet. Ex : achever une personne blessée (ordre illégal). Tout subordonné doit exercer un minimum de réflexion.

On va tenir compte de la place de la personne dans la hiérarchie. Ex : pour les crimes contre l’humanité. Aujourd’hui c’est l’article 213-4, pour les crimes contre l’humanité le commandement de l’autorité légitime ne peut pas jouer.

Remarques sur la loi Guigou du 4/03/2002 :

  • Sur la garde à vue : on a fait un changement au niveau des termes pour un plus grand respect de la présomption d’innocence. On dit « une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner ».
  • Le témoin ne peut toujours pas être placé en garde à vue.
  • On a changé le délai pour les formalités, on passe de 1h à 3 h.
  • Le droit de se taire est maintenant signalé en dernier.
  • Le parquet pourra interjeter appel des arrêts d’acquittement mais toujours pas les victimes.

Dans la détention provisoire on a rajouté un cas avec le concept de réitération de l’infraction. On peut placer en détention des personnes qui ont fait l’objet d’un acte de poursuite pour un crime ou délit passible de 2 ans de prison ou plus quelque soit la fin qui a été donnée à l’affaire précédente.