Qu’est-ce que le paiement ? (art. 1342 code civil)

 LE PAIEMENT AU SENS STRICT  : ARTICLE 1342 DU CODE CIVIL

Le premier mode d’extinction de l’obligation prévu par le Code civil est le paiement (article 1342) : il est « l’exécution volontaire de la prestation due. » Il doit être fait sitôt que la dette devient exigible.

Le paiement est un des modes d’extinction de l’obligation :   On dit qu’il y a extinction de l’obligation quand il y a disparition de l’obligation. Avant la réforme de 2016, la liste des causes d’extinction de l’obligation était partiellement erronée au regard de la précédente définition. Ex : nullité d’un contrat, les parties se doivent des restitutions. Si la nullité n’est pas rétroactive, il n’y pas forcément de restitution. De plus, la nullité peut être convenue amiablement entre les parties qui peuvent prévoir qu’elle est rétroactive. La résolution n’est pas non plus une disparition des obligations.

La liste était aussi incomplète car on n’y trouvait pas la dation en paiement. Elle était aussi pléthorique car elle prévoyait 9 cas d’extinction qui ne méritaient pas d’être retenus (perte de la chose par exemple).

Depuis la réforme, le Code ne vise plus que 5 cas d’extinction auxquels il faut ajouter la prescription : Le paiement ; La compensation ; L’impossibilité d’exécuter ; La remise de dette ; La confusion

1 : Définition, nature juridique et effet du paiement : 

Dans le langage courant, payer c’est remettre une somme d’argent à un créancier. Dans le langage juridique, la notion de paiement est beaucoup plus large : c’est exécuter volontairement la prestation due. Ex : transporteur qui livre la marchandise paye son client.

Le nouvel article 1342 alinéa 1er consacre ce concept de paiement : « le paiement est l’exécution volontaire de la prestation due. »

Nature juridique. Pendant longtemps, le débat a existé sur ce point car cela a une incidence sur le régime de la preuve. La jurisprudence considérait traditionnellement que c’était un acte juridique donc il était soumis à la preuve des actes juridiques (preuve par écrit dès l’instant que l’enjeu dépassait 1 500 euros).

En 2004, Haute Cour décide que la preuve du paiement qui est un fait peut être rapportée par tous moyens (1ère civ. 6 juillet 2004). Cette solution n’a pas fait l’unanimité.

Aujourd’hui, l’article 1342-8 indique que le paiement se prouve par tous moyens mais il ne prend pas parti sur la qualification (acte ou fait juridique).

Il est indiscutable que le paiement est un fait juridique quand il réalise l’exécution d’une obligation. Ex : peintre qui fait un portrait qu’on lui a demandé. Le tableau est un fait. De même, l’entrepreneur qui construit une maison qui lui a été demandé pourra prouver par tout moyen qu’il a construit la maison.

Mais parfois, le paiement peut aussi être un acte juridique quand son effet extinctif dépend de la volonté exprimée par son auteur ou par son créancier.

Ex : le paiement est fait par un tiers mais le tiers en question n’était pas tenu de la dette. L’auteur ne voulait pas éteindre la dette qu’il a payé. Le payeur va exercer l’action en répétition. Autre ex : le débiteur est tenu d’une pluralité de dette envers le même créancier. Il décide de faire un paiement partiel : il a le choix concernant l’imputation du paiement, il dit quelle date est considérée comme éteinte (article 1342-10 alinéa 1er). L’extinction dépend d’une manifestation de volonté, c’est un acte juridique.

 

Le débiteur souhaite faire un paiement partiel au créancier alors qu’il est prévu un paiement intégral à une échéance précise : le créancier n’est pas obligé d’accepter le paiement partiel (principe de l’indivisibilité du paiement).

Même si le débiteur a payé (le constructeur a construit la maison), le maitre de l’ouvrage peut subordonner la libération de l’entrepreneur à son acceptation des travaux effectués. S’il n’y a pas de malfaçons, le paiement est libératoire. La volonté du créancier intervient donc c’est un acte juridique.

L’effet du paiement. Le paiement libère le débiteur à l’égard du créancier et il éteint la dette (article 1342 alinéa 2). Les deux vont de pair. L’extinction de la créance entraine corrélativement l’extinction des accessoires de la créance. On est en présence d’une exception qui est inhérente à la dette.

Il y a une dérogation importante à cette règle : quand il y a paiement subrogatoire, l’effet extinctif ne se produit pas en cas de subrogation dans les droits du créancier (subrogation légale ou conventionnelle).

Quand il y a un paiement subrogatoire, le paiement qui est fait par un tiers laisse subsister la créance ce qui va permettre la transmission de la créance à l’auteur du paiement.

 2 : Les conditions du paiement : 

Le paiement ne peut produire son effet extinctif qu’à la condition qu’il intervienne entre certaines personnes. Aussi, le paiement ne peut produire son effet extinctif qu’à la condition de porter sur l’objet de l’obligation promise.

A. Conditions tenant aux parties au paiement 

En principe, le paiement doit être fait par le débiteur, le solvens. Mas il peut aussi être fait par un tiers, la caution. Il peut aussi émaner d’un codébiteur. Ce peut être aussi un tiers qui ne devait pas faire le paiement (paiement fait par erreur ou libéralité) → article 1342-1.

N’importe qui peut payer la dette d’autrui, quitte à exercer ensuite un recours en remboursement. Ce peut être un recours personnel et un recours subrogatoire.

Le solvens doit avoir la capacité de le faire car le paiement de la dette d’autrui est considéré comme un acte de disposition.

D’autre part, le créancier peut refuser le paiement proposé par le débiteur ou par le tiers car il dispose d’un motif légitime pour refuser. Ex : un crédit rentier qui compte tenu des relations difficiles avec le débit rentier, le crédit rentier veut obtenir la résolution du créancier de rente viagère → il peut refuser le paiement fait par un tiers à la place du débiteur. Mais le débiteur insolvable ne peut pas refuser qu’un tiers fasse le paiement à sa place car le législateur a estimé que ce serait un obstacle au paiement subrogatoire.

La créance est transmise au solvens donc le tiers doit pouvoir « chausser les bottes » pour obtenir le remboursement de ce qu’il a payé.

En principe, le paiement doit être reçu par le créancier ou par son mandataire. Celui qui reçoit le paiement est l’accipiens (article 1342-2 alinéa 1er ). Le destinataire du paiement peut être un nouveau créancier. Ex : le cessionnaire en cas de cession de créance, un héritier, un créancier saisissant, le représentant légal du créancier.

Le paiement n’est pas valable s’il a été fait à une personne autre que le créancier. Ex : le transporteur qui livre un colis à la mauvaise adresse. Le paiement n’est pas valable non plus si le paiement a été fait

à  une personne qui n’a pas la qualité ou le pouvoir de recevoir le paiement. Ex : prix de vente d’un immeuble remis à un préposé d’une agence immobilière.

Le paiement n’est pas valable s’il a été fait à une personne qui n’a pas la capacité de recevoir le paiement.

Ex : paiement fait à un débiteur saisi.

Dans tous ces cas, le paiement fait à mauvais escient n’est pas valable, il n’est pas libératoire donc il devra recommencer. Qui paye mal paye deux fois.

Deux exceptions à ce principe :

       Le paiement est libératoire s’il s’avère que le véritable créancier a ratifié le paiement ou s’il en a profité. Ex : paiement fait à une société gérée par le créancier et par un jeu d’écritures, les fonds atterrissent sur le gérant. Le paiement a été fait entre les mains de la société et sont arrivés dans la société du créancier donc le paiement est libératoire.

Le créancier a ratifié le paiement qui ne lui était pas fait initialement. Le solvens se trouve placé en redressement judiciaire. Le créancier informé de la procédure collective ne déclare pas sa créance dans la procédure collective donc on peut y voir une ratification du paiement.

       Le paiement est libératoire quand le paiement a été fait de bonne foi à un créancier apparent. Ex : le paiement fait au préposé de l’agent immobilier. L’apparence prévaut.

B. Conditions tenant à l’objet du paiement 

Le paiement consiste pour le débiteur à fournir au créancier la prestation exactement due. C’est le principe de l’immutabilité du paiement. Par conséquent, le créancier ne peut pas être contraint de recevoir une prestation différente de celle promise. Mais il peut accepter de plein gré de recevoir en paiement autre chose que ce qui lui est dû (article 1342-4 alinéa 2). On est en présence d’une dation en paiement.

Par ailleurs, le créancier peut refuser un paiement partiel, c’est-à-dire une exécution partielle de l’obligation (article 1342-4 alinéa 1er). Il s’agit là du principe de l’indivisibilité du paiement qui comporte des exceptions :

       L’accord des parties

       L’autorisation du juge : le juge peut autoriser le débiteur à faire des paiements fractionnés tout en accordant des délais de grâce (article 1343-5).

       Le paiement fractionné peut être un effet de la loi : il se trouve que le débiteur décède, dans ces conditions, division de plein droit de la dette entre les héritiers (article 1309).

 

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