Les 3 peines privatives de liberté au Maroc

Les 3 peines privatives de liberté au Maroc

On distingue les peines privatives de liberté, c’est à dire l’emprisonnement, la détention, la réclusion (paragraphe 1) et les peines restrictives de liberté (paragraphe 2).

 

INTRODUCTION SUR L’INDIVIDUALISATION DE LA SANCTION PÉNALE EN DROIT MAROCAIN

Il est extrêmement rare que la sanction pénale prévue par le code de 1962 soit fixe, comme c’est le cas pour la peine de mort, pour la réclusion perpétuelle, pour la dégradation civique ou pour les mesures de sûreté réelles. La plupart des peines principales et des sanctions qui en sont l’accessoire sont, en effet, susceptibles de variation entre un minimum et un maximum. Il en va de même des mesures de sûreté ; mais l’individualisation de ces dernières est spécifique.

L’article 141 du Code pénal marocain fixe à cet égard les prérogatives du juge : « Dans les limites du maximum et du minimum édictés par la loi réprimant l’infraction, le juge dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour fixer et individualiser la peine en tenant compte d’une part, de la gravité de l’infraction commise, d’autre part de la personnalité du délinquant ».

Cependant les limites légales ne sont pas toujours infranchissables. Le juge, conformément à l’article 142 du Code pénal marocain, peut, selon les cas, être « tenu » d’appliquer au coupable, soit une peine atténué, soit une peine aggravée.

PARAGRAPHE 1 : LES PEINES PRIVATIVES DE LIBERTÉ EN DROIT MAROCAIN

Elles peuvent, en fonction de la gravité objective de l’infraction, être criminelle, délictuelle ou contraventionnelle et obéir ainsi à des règles spécifiques ; certaines dispositions leurs sont cependant communes ;

A. RÉCLUSION, EMPRISONNEMENT, DÉTENTION EN DROIT MAROCAIN

1. RÉCLUSION EN DROIT MAROCAIN

c’est la seule peine criminelle privative de liberté ; elle peut être soit perpétuelle (article 16-2° du Code pénal marocain), soit prononcée « à temps » pour une durée de cinq à trente ans (article 16-2° du Code pénal marocain). Bien qu’exceptionnelle au regard du principe que pourrait représenter la réclusion à temps, la réclusion perpétuelle est une sanction souvent prévue par le Code : 28 infractions en sont passibles ; il n’est donc pas inopportun de délimiter son champ d’application ;

a. Récidive criminelle

Selon l’article 155 du Code pénal marocain « Quiconque ayant été, par décision irrévocable, condamné à une peine criminelle, a commis un second crime quelle qu’en soit la nature, est condamné :

…….

– à la réclusion perpétuelle, si le maximum de la peine édictée par la loi pour le second crime est la réclusion de trente ans ; »

b. Sûreté de l’État

Attentats et complots contre le Roi, la famille royale et la forme du gouvernement (articles 146, 166, 169, 172 et 173 du Code pénal marocain).

c. Ordre public

Coalition de fonctionnaires civils et militaires visant à attenter à la sûreté intérieure de l’Etat (article 235 du Code pénal marocain).

Corruption d’un magistrat ayant eu pour effet une condamnation à la réclusion à perpétuité (article 253 du Code pénal marocain).

d. Faux, contrefaçons et usurpations

· Concernant les monnaies ou effets de crédit public (article 334 du Code pénal marocain) ;

· Concernant le sceau de l’État (article 342 du Code pénal marocain) ;

· Concernant les poinçons, timbres et marques (article 332 du Code pénal marocain) ;

· En écriture publique ou authentique (articles 352 et 353 du Code pénal marocain) ;

· Faux témoignage en matière criminelle ayant déterminé la condamnation de l’accusé à la réclusion perpétuelle (article 369 du Code pénal marocain).

e. Crime contre les personnes

Homicides volontaires: meurtre simple (article 392 du Code pénal marocain), infanticide simple (article 397 du Code pénal marocain) ;

Homicide involontaire consécutif à des violences volontaires (articles 403, 404, 410, 411, 414-4° et 568 du Code pénal marocain) ;

Blessures: tortures à fonctionnaire public (article 231 du Code pénal marocain), castration (article 412 du Code pénal marocain) ;

Enlèvement: de majeur (article 437 du Code pénal marocain), de mineur (article 473 du Code pénal marocain).

f. Crimes contre les biens

· Vol aggravé (article 507 du Code pénal marocain) ;

· Recel aggravé (article 572 du Code pénal marocain) ;

2. EMPRISONNEMENT EN DROIT MAROCAIN

c’est la seule peine délictuelle privative de liberté. C’est une peine « à temps ».

a. Principe

Un mois au moins, cinq ans au plus (article 17 du Code pénal marocain).

Délit correctionnel; infraction que la loi punit d’une peine d’emprisonnement dont elle fixe le maximum à plus de deux ans (article 111 du Code pénal marocain) ;

Délit de police: infraction que la loi punit d’une peine d’emprisonnement dont elle fixe le maximum à deux ans ou moins de deux ans (article 111 du Code pénal marocain).

b. Exception

· La récidive peut entraîner un emprisonnement de 10 ans (articles 156 et 157 du Code pénal marocain) ;

· Certains délits sont punis d’un emprisonnement inférieur à un mois. Exemple : l’article 325 du Code pénal marocain : suppression, dissimulation ou lacération d’affiches apposées en exécution d’une décision judiciaire ;

· Par le jeu des circonstances atténuantes, le minimum de l’emprisonnement peut être abaissé à 6 jours en matière de délits de police (article 150 du Code pénal marocain).

Dans les trois exceptions, la catégorie de l’infraction n’est pas modifiée (article 112 du Code pénal marocain) bien que la durée de l’emprisonnement déroge au principe posé par l’article 17 du Code pénal marocain.

3. LA DÉTENTION EN DROIT MAROCAIN

c’est la seule peine contraventionnelle privative de liberté. C’est une peine « à temps ».

a. Principe

Moins d’un mois (article 18 du Code pénal marocain).

b. Exceptions

Certains infractions prévues par le Code pénal marocain et sanctionnées par un emprisonnement d’un minimum inférieur à un mois sont des délits de police.

Aux termes de l’article 5 du dahir du 26.11.1962 portant approbation du texte du ode pénal, lorsqu’un texte spécial, antérieur au Code pénal marocain, édicte une peine d’emprisonnement dont le maximum est inférieur à un mois, l’infraction constitue alors une contravention.

B. DISPOSITIONS COMMUNES AUX TROIS PEINES PRINCIPALES PRIVATIVES DE LIBERTÉ EN DROIT MAROCAIN

1. POINT DE DÉPART DE LA PEINE

a. Principe

La durée de la peine se calcule « à partir du jour où le condamné est détenu en vertu de la décision devenue irrévocable », (article 30 du Code pénal marocain).

b. Exception

Lorsqu’il y a eu détention préventive, celle-ci est imputée sur la durée de la peine dont le point de départ est fixé soit au jour où a commencé la garde à vue, soit au jour du mandat de justice.

2. CALCUL DE LA PEINE

La durée des peines privatives de liberté se calcul comme suit :

· Peine d’un jour : 24 heures ;

· Peine inférieure à un mois : se compte par jours complète de 24 heures ;

· Peine d’un mois : 30 jours ;

· Peine de plus d’un mois : se calcul de date à date.

3. ORDRE DANS LEQUEL S’EXÉCUTENT LES PEINES PRIVATIVES DE LIBERTÉ

a. PRINCIPE

Lorsque plusieurs peines privatives de liberté doivent être subies, le condamné exécute en premier lieu la peine la plus grave, à moins que la loi n’en dispose autrement (article 31 du Code pénal marocain). La peine la plus grave sera soit celle qui est au plus haut degré de l’échelle des peines criminelles, délictuelles ou contraventionnelles, soit celle dont la durée est la plus longue lorsqu’il s’agit de peines de même nature.

b. Exceptions

Principe de la continuité des peines

Si une peine a débuté en raison du temps passé en prévention, elle doit être purgée jusqu’à son terme normal, sans interruption.

Révocation du sursis

La première peine est alors exécutée avant la seconde, sans possibilité de confusion avec cette dernière (article 56 alinéa 3 du Code pénal marocain).

4. RÈGLES SPÉCIALES AUX FEMMES ENCEINTES

Selon les termes de l’article 32 du Code pénal marocain :

lorsqu’il est vérifié qu’une femme est enceinte de plus de six mois, la peine privative de liberté prononcée contre elle ne peut être exécutée que 40 jours après sa délivrance.

Si elle est déjà incarcérée, elle bénéficie « pendant le temps nécessaire » du régime de la détention préventive.

Si elle accouche moins de 40 jours avant sa condamnation, l’exécution de la peine est différée.

5. RÈGLES SPÉCIALES AUX ÉPOUX TOUX DEUX CONDAMNÉS

Selon les termes de l’article 33 du Code pénal marocain :

Leur peine ne sera pas exécuter simultanément , s’ils le désirent et remplissent les conditions suivantes :

· Leur peine est inférieure à un an ;

· Ils ne sont pas détenus au jour du jugement ;

· Ils ont un domicile certain ;

· Ils ont à leur charge, et sous leur protection, un enfant de moins de dix-huit ans insusceptible d’être recueilli « dans des conditions satisfaisantes » par une personne publique ou privée.

Lorsque la peine d’emprisonnement prononcée contre chacun des époux est supérieure à une année, et s’ils ont à leur charge ou sous leur protection un enfant de moins de dix-huit ans ou si l’enfant ne peut être recueilli par des membres de sa famille ou par une personne publique ou privée, dans des conditions satisfaisantes, les dispositions de la loi relative à la procédure pénale sur la protection des enfants en situation difficile, ou les dispositions de la kafala des enfants abandonnés sont applicables (article 33 alinéa 2 du Code pénal marocain).

PARAGRAPHE 2 : LES PEINES RESTRICTIVES DE LIBERTÉ EN DROIT MAROCAIN

Il s’agit de la seule résidence forcée qui est d’une part une peine criminelle principal (article 16-4° du Code pénal marocain), d’autre part une mesure de sûreté (article 61-2° du Code pénal marocain).

A. DÉFINITION

Assignation d’un lieu de résidence ou d’un périmètre déterminé dont le condamné ne peut s’éloigner sans autorisation du ministre de la justice pendant la durée fixée par la décision (article 25 alinéa 3 du Code pénal marocain).

B. DURÉE

Cinq ans minimum, le maximum étant déterminé par chaque infraction puni de la résidence forcée (article 25 alinéa 1 du Code pénal marocain). Comme un seul cas d’application est prévu par le Code (article 234 : coalition de fonctionnaires), on peut poser en principe que la durée maximum de la peine est fixée à dix ans.

C. CONTRÔLE ET SANCTION

La direction générale de la sûreté nationale est chargée de contrôler la résidence (article 25 alinéa 2 du Code pénal marocain) dont l’inobservation est sanctionnée par un emprisonnement d’un à cinq ans (article 317 du Code pénal marocain).