La police administrative générale et les polices administratives spéciales
Il convient de différencier, au sein de la police administrative, la police générale de la police spéciale. La police spéciale se subdivise elle-même en une variété de missions et d’activités distinctes, chacune dotée de finalités spécifiques. Bien que les polices spéciales puissent être vues comme des polices de l’ordre public, elles s’attachent en réalité à un ordre public spécial, qui se distingue nettement de l’ordre public général.
- La police générale a pour but la protection globale de la sécurité, de la tranquillité et de la salubrité publique, applicable à tous et à l’ensemble des activités humaines.
- En revanche, la police spéciale est limitée par des objectifs particuliers et des domaines d’application restreints, tels que la police des installations classées, la police des monuments historiques, ou encore la police des débits de boissons. Chacune de ces polices répond à des nécessités propres qui vont au-delà des besoins généraux d’ordre public.
Distinction entre la police générale et les polices spéciales
Pour assurer la protection de l’ordre public dans des secteurs bien définis, les pouvoirs publics ont, dans certaines circonstances, octroyé à des autorités spécifiques des attributions renforcées. Ces prérogatives particulières, associées à des moyens d’intervention plus étendus, viennent s’ajouter aux missions plus globales de la police administrative générale.
Les critères de distinction
Cette distinction entre police générale et police spéciale ne repose pas sur un critère organique, puisque les autorités de police spéciale ne disposent pas toujours de pouvoir de police générale.
- Par exemple, certains ministres, bien que non investis du pouvoir de police administrative générale, exercent des fonctions de police spéciale : ainsi, le ministre de la Culture intervient dans la police du cinéma, tandis que le ministre des Affaires étrangères est responsable de la police des étrangers.
- Inversement, des autorités disposant d’un pouvoir de police générale, comme les maires, se voient également confier des missions de police spéciale, telles que la gestion des cimetières dans leur commune.
Le principe de spécialité permet d’identifier ce qui relève de la police générale par rapport aux compétences des polices spéciales. En effet, tandis que la police générale s’applique de manière générale à toute personne et à toute activité humaine, la police spéciale se caractérise par un objet défini et un champ d’application limité, tel que déterminé par le texte législatif ou réglementaire qui l’institue.
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Complémentarité entre la police générale et les polices spéciales
La coexistence des deux types de police se base sur une logique de complémentarité. En effet, la police générale, par sa nature, couvre un domaine d’action large, mais ses mesures sont souvent limitées aux interventions strictement nécessaires pour assurer l’ordre public. Ce champ d’action, bien que vaste, reste généralement superficiel. En revanche, les polices spéciales, bien qu’appliquées à des domaines plus restreints, disposent souvent de pouvoirs d’intervention plus intenses et plus contraignants, leur permettant ainsi d’aller bien plus en profondeur dans leur domaine spécifique.
Cette complémentarité se manifeste souvent dans les interventions des autorités disposant de pouvoirs tant de police générale que de police spéciale. Les maires, par exemple, peuvent ainsi pallier les limites de la police générale par des mesures plus fortes issues de la police spéciale. Face à un bâtiment en ruines qui met en péril la sécurité publique, un maire peut, au titre de la police générale, interdire l’accès aux abords du site. Cependant, en activant les pouvoirs conférés par la police spéciale des édifices en ruine, il peut aller plus loin et imposer des réparations, voire ordonner la démolition de l’immeuble pour éviter tout danger.
Polices spéciales : un cadre juridique plus strict
La spécificité des missions conférées aux polices spéciales impose également une réglementation plus stricte. Les activités de police spéciale sont souvent accompagnées de régimes juridiques détaillés et de procédures précises, encadrées par la loi, tandis que les pouvoirs de police générale, bien que larges, sont moins rigoureusement encadrés. Cela est dû au fait que les mesures prises par les polices spéciales sont généralement plus intrusives.
II ) Les différents types de polices administratives spéciales
Les polices administratives spéciales se distinguent par leur diversité fonctionnelle et leur hétérogénéité, s’adressant à des secteurs précis ou à des groupes spécifiques de personnes. À la différence de la police administrative générale, qui s’applique indistinctement à l’ensemble de la population, les polices spéciales se concentrent sur des catégories bien définies ou sur des activités spécifiques, souvent en complément du maintien de l’ordre public. Cette diversité se manifeste par leurs champs d’application, leurs objectifs, et la nature des autorités compétentes chargées de leur mise en œuvre.
Des champs d’application ciblés : personnel et matériel
Les polices administratives spéciales se définissent principalement selon deux types de champ d’application :
- Champ d’application personnel : certaines polices spéciales sont dédiées à des groupes spécifiques, comme la police des étrangers, qui régule le statut et la circulation des personnes d’origine étrangère, ou encore la police des nomades, qui supervise les mouvements et installations des gens du voyage. Ces régulations sont souvent dictées par des considérations liées à la sécurité publique et au bon ordre social.
- Champ d’application matériel : d’autres polices s’appliquent à des activités ou des secteurs déterminés. Par exemple :
- La police des débits de boissons vise à réguler la vente d’alcool dans l’intérêt de la santé publique et de la tranquillité.
- La police de la chasse s’assure de la protection de la faune et de la régulation des pratiques de chasse, intégrant des préoccupations environnementales.
- La police des édifices en ruine, encadrée par les articles L. 511-1 et suivants du Code de l’habitation et de la construction, concerne la sécurité et la salubrité en imposant des mesures visant à prévenir les risques d’effondrement.
Des objectifs variés et parfois spécifiques
Les polices administratives spéciales ont chacune un objectif particulier, qui peut être étroitement lié à la protection de l’ordre public général ou viser des finalités plus spécifiques et distinctes. Par exemple :
- Préservation de la salubrité publique : Plusieurs polices spéciales, comme celle des installations classées pour la protection de l’environnement, se concentrent sur la santé publique et la sécurité environnementale. De même, la police des cimetières vise à garantir la tranquillité des lieux tout en répondant à des exigences de santé publique en assurant des conditions d’inhumation respectueuses de l’environnement.
- Protection culturelle et esthétique : Certaines polices ont des objectifs esthétiques ou culturels, assez éloignés des concepts traditionnels de l’ordre public. Par exemple, la police des monuments historiques veille à la protection des bâtiments à valeur patrimoniale, préservant ainsi le patrimoine culturel au nom d’un ordre esthétique. La police de l’affichage public, quant à elle, permet aux autorités de réguler l’affichage publicitaire pour protéger le paysage urbain ou rural.
Des autorités spécifiques et une multiplicité d’intervenants
Les polices spéciales sont souvent confiées à des autorités administratives spécifiques, distinctes de celles en charge de la police générale :
- Autorités préfectorales et municipales : Le préfet détient généralement la compétence pour la police des gares et les transports publics, assurant ainsi l’ordre public dans des lieux stratégiques. Par ailleurs, les maires peuvent être chargés de la police des baignades, en plus de leur pouvoir de police générale, pour garantir la sécurité des lieux de baignade publics dans leur commune.
- Identité organique et compétences mixtes : Dans certains cas, une même autorité peut cumuler des pouvoirs de police générale et de police spéciale. Cette situation entraîne une complexité accrue quant aux compétences et à la nature des mesures prises. Par exemple, un préfet pourrait être à la fois responsable de la police de sécurité générale et de la police des établissements recevant du public, mais la distinction se fait en fonction de la nature spécifique des mesures à mettre en œuvre.
Des ordres publics spécifiques et complémentaires
En raison de la spécificité de leurs objectifs, les polices administratives spéciales peuvent être considérées comme visant à maintenir un ordre public spécialisé, qui se distingue, mais complète l’ordre public général. Par exemple :
- L’ordre public de l’environnement peut être observé dans les mesures de protection de la biodiversité ou la préservation des ressources naturelles. Ce type de police va au-delà de la sécurité publique classique pour inclure des préoccupations écologiques.
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L’ordre public économique et commercial est parfois mis en avant dans la police des marchés et des foires, où l’intervention de l’État ou des collectivités vise à organiser la vente publique en assurant à la fois la sécurité et la salubrité des produits commercialisés.