La possession d’état d’enfant et la présomption sur la conception

Les présomptions applicables à tous les enfants

Filiation = lien de droit qui unit l’enfant à sa mère ou à son père ou à chacun d’eux. Ce lien fonde la parenté et fait entrer l’enfant dans la famille de son auteur.

I – Présomptions relatives à la conception de l’enfant

La preuve directe n’est pas prouvée. Permet à la mère de demander des subsides à l’homme avec lequel elle a eu des relations sexuelles.

Présomption relative à la période de conception. La conception a lieu pendant la période qui s’étend du 300e au 180e jour avant la date de la naissance. Au moment de la conception : la conception est présumée avoir lieu à un moment quelconque selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant. La charge de la preuve incombe à la partie qui allègue que la conception n’a pas eu lieu dans le délai. Le juge ne peut ordonner toute mesure d’instruction propre à ordonner la vérité.

II – La possession d’état d’enfant

Notion

La possession est le fait pour un individu de se comporter comme s’il était titulaire d’un état. En filiation, ce sont ceux qui se comportent comme les parents d’un enfant qui créent la possession d’état. Cette apparence fait présumer qu’elle est réelle.

  • 1. Éléments constitutifs

*Le nom n’est pas déterminant de la possession d’état. Son absence n’implique pas celle de la possession d’état.

*Tractatus : c’est le fait d’être traité par celui ou ceux dont on est dit issus comme tels et le fait pour l’enfant de les traiter comme ses père et mère. Il convient de rattacher le fait de pourvoir en qualité de parents à l’éducation, l’entretien et l’installation de l’enfant.

*Réputation : fondée sur l’apparence, d’où l’importance de la reconnaissance de la filiation. C’est l’aspect social. Rôle important en cas de décès et pour constater une filiation pré natale.

  • 2. Recherche par le juge

La réunion de tous les éléments n’est pas nécessaire, la liste n’est pas limitative et le juge peut retenir d’autres indices comme des photos ou des souvenirs (Créteil 21 février 2002).

Contrôle de la cour de cassation : elle n’hésite pas à casser. La cour a aussi affirmé que les éléments pris en considération doivent être interprétés et appréciés dans leur contexte.

Qualités :

  •     La possession d’état doit être continue, des faits isolés ne peuvent pas être constitutifs d’une possession d’état. Il faut une stabilité. La possession existe qu’avec le temps sans qu’aucune durée ne soit quantifiable. On n’admet pas qu’elle soit existante à la date où elle est invoquée et on n’exige pas la communauté de vie entre parents et enfants.
  •     La possession doit être paisible. Exemple de vice : s’il s’agit de contourner à l’aide de la constatation de la possession d’état la mère porteuse. En cas de violence et enlèvement de l’enfant par l’amant de la mère.
  •     La possession doit être non équivoque. Exemple : parent prétendu a ignoré l’existence de l’enfant. En cas de possession d’état successive ou concurrente.

La possession doit être publique.

Preuve

Mode autonome d’établissement de la filiation. L’enfant qui s’en prévaut doit en faire la preuve pour produire ses effets. Constatation soit par un acte de notoriété et ce pour l’établissement non contentieux, soit par un jugement.

Les faits constitutifs peuvent être prouvés par tout moyen (ex : acte juridique passé au profit de l’enfant).

Rôle

Fonction probatoire autonome du lien de filiation. La possession d’état à l’égard du mari de la mère permet de rétablir la présomption de paternité.

Moyen de consolider la filiation de l’enfant. Lorsque la possession d’état est conforme au titre, la contestation du lien de filiation est soumise à des conditions plus sévères et elle est même irrecevable depuis la naissance ou reconnaissance.

La possession est indispensable pour l’établissement de la filiation. C’est une véritable possession acquisitive de la filiation et elle est essentielle pour la protection de la possession d’état établie. C’est un rempart contre la contestation de la filiation dans un objectif de paix des familles et dans l’intérêt de l’enfant.

 

CONCLUSION SUR LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT DE FILIATION

Avant la réforme de 2005 il existait 3 types de filiations :

  • La filiation légitime, naturelle qui correspond à un lien biologique.
  • La filiation artificielle qui ne constitue pas une catégorie  juridique, le tiers donneur n’ayant jamais la qualité de parent.
  • La filiation adoptive qui ne résulte pas d’un lien biologique mais d’un acte de volonté.

La loi constitue la base de la législation actuelle.

Loi du 3 janvier 1972 : égalité entre tous les enfants et recherche de la vérité. L’enfant est rattaché à ses auteurs biologiques. On parle de vérité biologique. Place importante donnée à la vérité socio affective (la possession d’état exprime cette vérité). L’objectif d’égalité n’a été que partiellement rempli en 1972 car il existe toujours des enfants adultérins qui n’ont pas les mêmes droits que les autres.

Restriction abolie par la loi du 3 décembre 2001 qui a mis en œuvre le principe de non discrimination.

Dans la loi du 4 mars 2002 sur l’autorité parentale le législateur a proclamé l’égalité de statut entre les enfants (Article 370). L’établissement de la filiation légitime était gouverné par des règles différentes. Depuis l’ordonnance du 4 juillet 2005, suppression de la distinction entre filiation légitime et naturelle.

Abandon de ces deux notions. Cette ordonnance a été suivie d’un décret et d’une circulaire ratifiée par la loi du 16 janvier 2009 qui apporte des modifications à ces ordonnances. Le droit s’accoucher sous X n’est pas remis en question.

I – Le principe d’égalité

Harmonisation des modes d’établissement de la filiation. L’ordonnance confirme l’état du droit antérieur. Tous les enfants peuvent voir leur lien de filiation établi sous deux réserves :

égalité ou harmonisation ?

L’égalité se manifeste par l’abandon de la distinction filiation légitime/filiation naturelle. La légitimation est elle aussi supprimée (légitimation par le mariage). Elle instaure un droit commun sans distinction selon la structure du couple parental. L’ordonnance de 2005 n’a pas supprimé la présomption de paternité. Cette présomption est liée aux devoirs réciproques de cohabitation et de fidélité. Hors mariage, il n’y a pas de présomption de paternité. La reconnaissance subsiste et la divisibilité de la filiation est réaffirmée.

La suppression des notions de filiation légitime et naturelle est principalement symbolique. Elle signifie que la famille n’occupe plus un rôle central. Il faut partir de la distinction entre filiation paternelle et maternelle.

  • Le principe d’égalité ne signifie pas unification des modes d’établissement mais harmonisation. Ce principe doit être nuancé quant à l’accès à la filiation.
  • inégalité dans l’accès à la filiation 

Accouchement sous X : la mère qui a demandé le secret de son admission ou identité était jusqu’à la loi de janvier 2009 protégée par une fin de non recevoir quant à l’action en recherche de maternité.

Critique : contraire à l’Article 7-1 de la convention de NY 26 janvier 90 : droit à la connaissance per chacun de ses origines et interdiction de toute discrimination liée au sexe.

La cour de cassation dans un arrêt « Benjamin » a retenu l’application de l’Article 7-1 de la convention de NY.

Une reconnaissance de paternité peut être souscrite si la mère a demandé le secret de son admission et identité.

La mère a un délai de 2 mois pour revenir sur sa décision (arrêt CEDH 10 janvier 2008). Ce délai vise à atteindre un équilibre et une proportionnalité différente entre les intérêts en cause.

La loi de janvier 2009 supprime la fin de non recevoir à l’action en recherche de maternité mais cette suppression ne remet pas en cause le droit d’accoucher sous X. Si la mère use de ce droit, l’enfant ou son représentant légal aura des difficultés à la retrouver. Il n’y a plus d’obstacle de droit mais de fait. La mère pourrait être tentée de refuser de révéler son identité à l’enfant mais elle prive l’enfant de l’accès à ses origines.

Les grands parents peuvent intervenir dans l’instance en adoption.

La disparition de la fin de non recevoir ne change rien aux problèmes.

Décision TGI Angers 8 octobre 2009 : les grands parents ont contesté l’arrêté d’admission de leur petite fille comme pupille de l’Etat. Les grands parents peuvent solliciter une expertise politique.

La filiation de l’enfant issu de la relation incestueuse peut être établie soit à l’égard de sa mère soit de son père mais pas à l’égard des deux.

Ordonnance de 2005 a renforcé « par quelques moyens que ce soit ».

La cour de cassation estime que l’ordre public s’oppose à ce qu’un lien incestueux soit établi même par un lien d’adoption simple.

II – Le principe de vérité

  • 1. Vérité biologique et réalité sociologique

Premier fondement : vérité biologique. Elle est traditionnellement présumée.

Si un homme déclare être le père par une reconnaissance, la loi présume que cette filiation est conforme à la vérité biologique. Ordonnance de 2005 a accentué le place de la vérité par deux mesures : les actions en justice tendant à une filiation ne sont soumises à aucunes conditions et la preuve en est entièrement libre. De plus, les délais pour contester une filiation établie par un titre sont raccourcis.

Deuxième fondement : possession d’état. Les progrès de la médecine ont renouvelé ces deux fondements en y rajoutant la volonté. En cas de don de sperme aucun cas de filiation ne peut être reconnu. La procréation médicalement assistée exclut la vérité biologique.

  • 2. Preuve scientifique de la procréation

La preuve est libre donc elle peut reposer sur une simple expertise biologique. Il faut qu’une action judiciaire soit engagée. Le test de paternité n’a pas de valeur juridique. Il existe deux méthodes : l’expertise sanguine et l’expertise génétique.

Loi bioéthique (94) est intervenue mais seulement au sujet des emprunts.

Conditions de recours : art 16-11 action au fond et action ordonnée par le juge, le consentement de l’intéressé doit être préalable ou expresse, l’expertise post mortem n’est possible qu’en cas d’accord expresse de la personne manifesté de son vivant. Art 16-12 seules sont habilitées à procéder aux expertises les personnes admises sur liste judiciaire et agrémentées.

Jurisprudence : l’expertise biologique est de droit en matière de filiation sauf s’il existe un outil légitime permettant de ne pas y procéder (arrêt 14 juin 2005). Une telle mesure ne peut être suppléée qu’en vue d’un motif légitime. Motif légitime : père introuvable, possession d’état conforme au titre de naissance depuis 5 ans, action irrecevable, demande posée uniquement par intérêt strictement financier. Ne constitue pas un motif légitime le principe de l’inviolabilité du corps humain, la possession d’état établie à l’égard d’un homme, l’identité partielle de patrimoine entre deux frères dont l’un était le mari de la mère.

Effet du refus de consentement : le refus de participer à l’expertise biologique n’est pas en soi illégitime. Il appartient au juge du fond d’apprécier souverainement les conséquences. Si le demandeur n’établit aucune preuve ni aucun indice le refus du défendeur peut être considéré comme justifié.

 

 

 

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