Les pourparlers contractuels (art. 1112 du code civil)

Les pourparlers contractuels

L’accord de volonté est un élément essentiel dans la formation du contrat car sans lui pas de contrat. La plupart du temps, cet accord de volonté s’opère en un temps très court : les parties échangent leur volonté de manière simultanée. Mais pour les contrats portant sur des opérations économiques complexes ou mettant en jeu des intérêts très importants, l’accord de volonté ne sera souvent obtenu qu’après de longue négociation destinée à préparer cet accord. Le Code Civil ancien ne réglementait pas cette phase de négociation durant laquelle pourtant peut se dérouler de nombreux problèmes. C’est donc la jurisprudence qui pendant longtemps a apporté les solutions aux problèmes survenant pendant cette période.

La réforme insère désormais le Code Civil dans la section 1  –>  sous section 1 consacrée essentiellement aux négociations et qui reprend pour l’essentielle les règles posées par la jurisprudence.

Soit les parties décident de négocier librement en ayant recours à des pourparlers, soit elles s’imposent des obligations en ayant recours à des avant-contrats. On étudie ici uniquement les pourparlers contractuels.

  • Distinction entre pourparler et avants-contrats

Un pourparler contractuel en droit des contrats est une négociation préalable à la conclusion d’un contrat, au cours de laquelle les parties discutent des termes d’un éventuel contrat. Les pourparlers contractuels peuvent être informels et ne sont pas juridiquement contraignants, ce qui signifie que les parties ne sont pas liées par les termes discutés pendant les pourparlers.

La différence principale entre les pourparlers contractuels et les avant-contrats est que les avant-contrats sont des accords conclus entre les parties avant la conclusion d’un contrat définitif, alors que les pourparlers contractuels ne sont que des discussions préliminaires à la conclusion d’un contrat. Les avant-contrats peuvent être juridiquement contraignants et peuvent donner lieu à des sanctions en cas de non-respect de leurs termes, tandis que les pourparlers contractuels n’ont pas de valeur contractuelle.

Il est important de noter que les pourparlers contractuels ne sont pas nécessairement exclusifs aux avant-contrats. Les parties peuvent avoir des pourparlers contractuels avant de conclure un avant-contrat, et peuvent continuer à discuter des termes du contrat définitif après la conclusion de l’avant-contrat.

  • définition des pourparlers contractuels

Les pourparlers peuvent être définis comme les négociations libres qui précèdent l’accord de volonté. Les parties échangent des propositions jusqu’à ce qu’elles s’accordent sur un accord définitif. Jusqu’à la réforme, ces pourparlers n’étaient pas envisagés par le Code Civil et c’est donc la jurisprudence qui les a réglementé en posant deux grands principes : un principe de liberté et un principe de bonne foi.

Ces deux principes ont été repris à l’article 1112 : « l’initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelle sont libre. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de bonne foi »

 

  • La liberté des pourparlers :

 –>  Les négociations précontractuelle sont libres = elles ne lient pas les parties. Les parties sont libres d’entrer ou non en pourparlers.

 –>  La liberté concerne également le déroulement des pourparlers = Les parties sont libre dans la manière de mener leur négociation. Elles peuvent notamment mener plusieurs négociations parallèles pour comparer les propositions.

 –>  Cette liberté implique également la possibilité de mettre fin aux négociations à tout moment.

 

  • Les pourparlers doivent être menés de bonne foi

 –>  Elles doivent négocier loyalement, ce qui implique également de rompre loyalement si elles ne sont pas intéressées. La rupture en elle-même n’est pas déloyale mais elle peut suivant les circonstances dans lesquelles elle intervient être considérait comme déloyale car révélant la mauvaise foi du cocontractant.

On parle alors de rupture abusive des pourparlers, de la rupture fautive des pourparlers.

 

Circonstances qui peuvent rendre une rupture abusives :

  • Quand elle est faite dans le seul but de nuire à son partenaire ou plus généralement quand elle intervient sans motif légitime à un stade avancé des négociations alors que le partenaire pouvait légitimement croire que le contrat a été conclu.

 

Si la rupture est déclarée abusive, celui qui est victime de la rupture pourra engager la responsabilité délictuelle de son partenaire en négociation (article 1140)

La faute ici est d’avoir rompu de manière déloyale, au niveau du dommage dont on peut demander réparation en cas de rupture abusive des pourparlers, la jurisprudence a restreint très fortement le type de dommage réparable et la réforme reprend cette restriction.

 

En général en matière de responsabilité délictuelle, on exige que pour qu’un dommage soit réparable qu’il soit certains (que sa réalisation ne fasse aucun doute).

Pourtant, alors que par définition une chance n’est jamais certaine, la jurisprudence, dans de nombreux domaines,  admet l’indemnisation la perte d’une chance c’est-à-dire le fait de faire réparer au responsable la perte d’une chance de voir un événement favorable se produire.

Ex : Un cheval est favori pour le tiercé, est blessé juste avant la course. Le propriétaire va agir en responsabilité contre la personne à l’origine de la blessure en demandant la réparation de la perte de son bien et la jurisprudence a également admis la perte d’une chance de gagner le tiercé (à condition que la chance soit sérieuse). S’il y avait par exemple 8 chances sur 10 de gagner, l’indemnisation sera calculée par rapport à cela.

 

 –>  Puisque la jurisprudence admet l’indemnisation de la perte d’une chance, on pourrait envisager que la victime de la rupture abusive des pourparlers demande réparation de la perte d’une chance de tirer des avantages du contrat qui ne sera pas conclu.

Dans le domaine des pourparlers, dans un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de Cassation (arrêt Manoukian) 26 novembre 2003  –>  la jurisprudence a refusé d’indemniser la perte d’une chance de percevoir les gains espérés par la conclusion du contrat.

 

 –>  On ne peut demander réparation que des autres préjudices effectivement subis.

Ex : remboursement des frais de négociation.

 

La réforme a repris cette jurisprudence puisque l’article 1112 alinéa 2 prévoit qu’en cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser la perte des avantages attendus du contrat non-conclu.

 

Il faut enfin dire que cette obligation de bonne foi dans les pourparlers implique une nouvelle obligation qui est énoncée à l’article 1112 – 2 : « celui qui utilise ou divulgue sans autorisations une information confidentielle obtenue à l’occasion des négociations engage sa responsabilité dans les conditions du droit commun »  –>  responsabilité délictuelle

 

                 –>  Le législateur considère que la loyauté dans les négociations implique une obligation de confidentialité et le fait de ne pas respecter cette obligation est une faute susceptible d’engager la responsabilité délictuelle de son auteur.

A l’issu des pourparlers soit les parties n’arrivent pas à s’entendre et le contrat ne sera jamais conclu, soit l’une d’elle va formuler une proposition assez précise et définitive pour être considéré comme une offre et si son partenaire l’accepte le contrat est conclu.

 

Laisser un commentaire