Les premiers capétiens, des rois faibles

La royauté capétienne : les premiers capétiens sont des roitelets

La dynastie capétienne prend racine dans une grande famille de princes territoriaux, ducs de France. Ils étaient à l’origine de hauts fonctionnaires carolingiens devenus au fil du temps, maîtres chez eux.

Au 9ème siècle, ils font et défont les rois dans le cadre des réunions des grands du royaume, en les choisissant par élection (1 au printemps, 1 à l’automne).

En 987 Hugues Capet sera élu roi de France, choisit par ses pairs. C’est l’histoire d’un renforcement rapide de la dynastie qui réussit à bâtir un système sécurisé, qui permet de savoir à l’avance qui va devenir roi, c’est une histoire constitutionnelle. Ces rois pratiquent aussi une politique d’indépendance au fur et à mesure que leur pouvoir s’affirme, ce face à l’empereur et au pape.

I) Liste des capétiens directs (987-1328)

On distinguera

  • la période des « roitelets », des rois faibles
  • à partir de Philippe Auguste, les rois capétiens affirment leur pouvoir face aux seigneurs

 

PortraitNomDébut du règneFin du règneNotes 
Contexte : L’administration de Charlemagne est désintégrée car il n’y a plus qu’une vaste pyramide d’allégences : il y a, tout en haut, le roi qui reçoit le serment des grands vassaux. Concrètement, les ducs et comtes sont puissants et ont usurpé la plupart des pouvoirs. Ils sont si puissants qu’ils administrent leurs domaines comme ils l’entendent, et certains d’entre eux sont beaucoup plus puissant que le roi.

Seule une faible portion du territoire est restée sous contrôle direct et effectif du roi : le domaine royal, qui se limite à une portion de l’Ile de France lors de l’avènement d »Hugues Capet.

Tous les Capétiens auront ainsi pour objectif d’agrandir le domaine royal afin de prendre le contrôle des comtés et duchés du royaume, détournés par la Noblesse, et dont ils sont restés maîtres théoriques. La tache sera très longue et ne sera terminée que sous Henri IV.

Les premiers rois Capétiens sont des roitelets qui ne sont pas loin d’être dominés par leurs vassaux. Étant assez faibles, ils ont laissé peu de trace dans l’Histoire.

Hugues Capet
(vers 940 – 24 octobre 996)
98724 octobre
996
Fils d’Hugues le Grand et petit-fils de Robert Ier. Duc des Francs depuis 960, il est élu roi des Francs après la mort de Louis V et sacré en 987, peut-être le 3 juillet à Noyon.
Robert II
« le Pieux »
(27 mars 972 – 20 juillet 1031)
24 octobre
996
20 juillet
1031
Fils d’Hugues Capet et d’Adélaïde d’Aquitaine. Sacré à Orléans le 25 décembre 987 comme roi associé.
Henri Ier
(4 mai 1008 – 4 août 1060)
20 juillet
1031
4 août
1060
Deuxième fils de Robert II et de Constance d’Arles. Sacré à Reims le 14 mai 1027 comme roi associé.
Philippe Ier
(23 mai 1052 – 29 juillet 1108)
4 août
1060
29 juillet
1108
Fils aîné d’Henri Ier et d’Anne de Kiev. Sacré à Reims le 23 mai 1059 comme roi associé. Succède à son père sous la régence de son oncle Baudouin V de Flandre jusqu’à sa majorité, en 1066.
Louis VI
« le Gros »
(1er décembre 1081 – 1er août 1137)
29 juillet
1108
1er août
1137
Fils aîné de Philippe Ier et de Berthe de Hollande. Sacré à Orléans le 3 août 1108.
Louis VII
« le Jeune »
(1120 – 18 septembre 1180)
1er août
1137
18 septembre
1180
Deuxième fils de Louis VI et d’Adèlaïde de Savoie. Sacré à Reims le 25 octobre 1131 comme roi associé.
A partir de Philippe AugusteI : la mise en place d’une administration efficace. L’autorité du roi se consolide, le système féodal est progressivement remplacé par un système monarchique. Philippe Auguste (1180 − 1223) renforce le pouvoir du roi en administrant le royaume : Il installe le pouvoir royal à Paris et renforce l’administration.
Philippe II «Auguste»
(21 août 1165 – 14 juillet 1223)
18 septembre
1180
14 juillet
1223
Louis VIII
« le Lion »
(5 septembre 1187 – 8 novembre 1226)
14 juillet
1223
8 novembre
1226
Louis IX
«Saint Louis»
(25 avril 1214 – 25 août 1270)
8 novembre
1226
25 août
1270
Philippe III
« le Hardi »
(30 avril 1245 – 5 octobre 1285)
25 août
1270
5 octobre
1285
Philippe IV
« le Bel»
(1268 – 29 novembre 1314)
5 octobre
1285
29 novembre
1314
Louis X
« le Hutin »
(4 octobre 1289 – 5 juin 1316)
29 novembre
1314
5 juin
1316
Jean Ier
« le Posthume »
(15 novembre 1316 – 19 novembre 1316)
15 novembre
1316
19 novembre
1316
Philippe V
« le Long »
(17 novembre 1293 – 3 janvier 1322)
19 novembre
1316
3 janvier
1322
Charles IV
« le Bel »
(18 juin 1294 – 1er février 1328)
3 janvier
1322
1er février
1328

II ) Les premiers capétiens : La préservation de l’existence de la royauté.

Dans le tumulte politique des 11èmes et 12èmes siècles. Au début cette royauté est faible en 987, dans un contexte européen instable.

§ 1. A l’intérieur du royaume.

Le roi capétien dispose de peu de pouvoir et ne maîtrise directement que quelques territoires et sa royauté sur l’ensemble territorial et souvent théorique, il a à faire avec des princes aussi puissants que lui (Normandie et Toulouse). Il faudra d’abord assurer la suite et maîtriser le territoire.

A. La continuité dynastique.

Il s’agit d’écarter le processus électif du roi, car avec l’élection de Capet les grands pensaient avoir donné un pli. Dans le Saint Empire romain Germanique circulait aussi la même idée élective. Les capétiens emploieront donc 2 techniques.

a) L’hérédité.

Les premiers capétiens procèderont à l’élection de leurs successeurs de leur vivant et vont obtenir l’assentiment des grands à cet effet. Très rapidement ils se débarrasseront de l’élection par le moyen du sacre. Ils feront sacrer leurs successeurs de leur vivant. Le dernier roi à être sacré du vivant de son père est Philippe Auguste au début du 13ème siècle. Il aura donc fallu 2 siècles pour en arriver à cette solution.

b) L’aînesse.

Il s’agit ici d’éviter les conflits entre les possibles successeurs du roi, donc entre ses fils quand il y en a plusieurs. Les grands nobles joueront souvent un cadet contre l’aîné. Il faudra mettre un frein à cette dérive.

Très vite ce sera le fils aîné qui sera appelé à succéder. Ce qui se met en place ce ne sont pas des dispositions successorales de droit privé ou féodal, mais des dispositions constitutionnelles publiques. La royauté sera successive. L’affirmation de l’ainesse est réalisée avec le règne de Robert II le Pieux qui avait 3 fils, les féodaux préféraient le cadet, mais la solution de l’ainée l’emporta et devint la règle de la primo géniture. Le débat ne s’est réglé qu’avec des garçons du fait de la descendance mâle prégnante des capétiens.

B. L’unité territoriale.

Ce n’est pas un principe acquit il existe de multiples facteurs de divisions territoriales qui renvoient aux pratiques franques et féodales. Il faut bâtir une constitution, un règlement à part et supérieur.

a) L’indivisibilité.

On rejette les règles du droit féodal qui permettait la division. Le problème qui apparait est celui du sort réservé aux enfants qu’on écarte de la succession, c’est de là que nait la pratique de l’apanage qui consiste à donner un territoire au cadet. Les cadet seront maitres chez eux, mais ces apanages ne sont pas des démembrement territoriaux, ils ont vocation à faire retour à la couronne en l’absence de succession. On sécurise ainsi le démembrement territorial, on le rend relatif et transitoire.

b) La régence.

A la mort du roi si son successeur est mineur, il sera roi et l’effectivité du pouvoir est confiée à une régence.

Il y a 2 solutions :

Une solution féodale qui consiste à donner la régence à un oncle, donc à un homme capable de remplir différentes fonctions politiques et militaires.

On changera ensuite de solution à la mort de Louis VIII. On confiera la régence à Blanche de castille mère du petit Saint Louis. Cette solution prévaudra majoritairement. Ce seront les mères du roi mineur qui assureront la régence, y compris pendant toutes les absences du roi (Louis IX Saint Louis). Dans l’histoire il y eut ainsi des dizaines de régences.

La continuité généalogique a rendu possible la construction constitutionnelle qualifiée de « miracle capétien » (fait d’avoir régulièrement des héritiers mâles).

§ 2. A l’extérieur du royaume.

Le roi capétien doit parallèlement se préserver de 2 entreprises.

A. Le roi et l’empereur.

a) L’attitude de l’empereur
1. La souveraineté universelle.

Au 11ème et 12ème l’empereur est en pleine apogée (dynastie Hohenstaufen, Frédéric 1er et II qui prétendaient être les successeurs de Rome).

2. Le droit romain.

Il s’appuie sur un droit cohérent et puissant, le droit romain pour étendre son universalité.

b) L’attitude du roi.

Le roi de France a dû éviter de se faire trop remarquer.

1. Le soutien du pape.

Il doit attendre que le pape fasse son travail. Le roi soutien le pape dans son entreprise d’affaiblissement de l’empereur. Ceci se fera à Canossa (pénitence de l’empereur Henry IV devant Grégoire VII en 1077, pour la levée de son excommunication) et dès lors l’empereur acceptant la supériorité de l’église, ne sera plus comme l’empereur de Rome.

2. « Le roi est empereur en son royaume ».

Ce faisant, le roi de France a profité de la brèche et à mesure que se délite le pouvoir impérial, le roi de France affirmera son pouvoir.

En France le roi est comme l’empereur, il a l’amplitude du pouvoir législatif. Le roi interdit pourtant le droit romain d’enseignement et d’application, car il se veut lui-même législateur, il veut faire son droit et se pose comme véritable héritier de l’empereur de Rome en tant que législateur.

B. Le roi et le pape.

A mesure, que le pouvoir impérial recule et que le pouvoir du pape augmente, le nouvel adversaire du roi devient le pape.

a) L’attitude du pape.

Elle est définit dans la réforme Grégorienne par le Dictatus Papae (Décrets de 1075, Les propositions de ce texte portent de manière non systématique sur l’autorité du Pape dans l’Église, la primauté de l’évêque de Rome sur les autres évêques, sur le respect que lui doivent les gouvernants civils et sur la possibilité d’avoir recours à la juridiction du pape comme à une juridiction supérieure à toutes les autres. Les propositions 8 à 12 affirment une primauté du pape sur l’Empereur. Toutes ces questions ont été débattues lors de la réforme grégorienne qui doit son nom au pape Grégoire VII et qui s’est poursuivie avec ses successeurs). Cette théorie trouve rapidement ses limites et mutent dans une théorie du pouvoir indirect.

1. La théorie du pouvoir direct.

On développe une théorie du pouvoir direct. Les puissances temporelles sont soumises au pouvoir spirituel. On exalte le pouvoir pontifical.

2. la théorie du pouvoir indirect.

Il s’agira de définir que l’église ne détient pas les clés du pouvoir temporel, mais qu’elle détient un droit de regard sur le travail effectué par les princes temporels. Mais la pression de l’église sur le pouvoir temporel reste forte.

b) L’attitude du roi.

C’est une attitude louvoyante et elle se traduira par des excommunications plus ou moins durables.

1. Avant Philippe IV le Bel.

Le pape punira certains comportements politiques, comme les atteintes portées au droit féodal, critiquées comme facteurs de déséquilibre politique. Le pape protège plus le roi d’Angleterre.

2. Sous Philippe IV le Bel.

De la fin du 13ème au début du 14ème c’est la période de son règne et la papauté y est moins flamboyante, alors que le roi de France a gagné en puissance. C’est un conflit à rebondissements.

Philippe le Bel prétend nommer les évêques et dans ce conflit, il affirme la primauté d’un pouvoir laïque et indépendant, un pouvoir gallican,

Le conflit fiscal.

Ce conflit concerne en 1294 une décime réclamée par le pape. Elle a été votée par une assemblée d’évêques et d’abbés, mais des cisterciens porteront plainte à Rome. Le roi alimentera la contestation et fera reculer Boniface VIII.

Le conflit judicaire.

Le roi prétend juger un évêque, le pape réagit et le roi en réaction réunit une assemblée d’états généraux (la première), s’appuyant ainsi sur le peuple. Fort de cet appui le roi avance ses prétentions, il sera excommunié en 1303 et fera déplacer à Rome Guillaume de Nogaret avec une troupe pour s’expliquer avec le Pape. Le Pape se trouve à Agnani et Guillaume somme le pape de s’expliquer. A la mort de Boniface VIII, la Papauté en 1305 sera déplacée en Avignon afin de la libérer de la noblesse romaine pour la rendre indépendante, elle y demeurera pendant 70 ans, et les relations entre le pape et le roi deviendront plus proches.

Le gallicanisme.

C’est le cadre dans lequel se développeront les liens de l’église et de l’état (le gallicanisme est une doctrine religieuse et politique cherchant à promouvoir l’organisation de l’Église catholique en France de façon largement autonome par rapport au pape.

D’une part, le gallicanisme réduit l’intervention du pape au seul pouvoir spirituel, et ne lui reconnaît pas de rôle dans le domaine temporel. D’autre part, s’il reconnaît au pape une primauté spirituelle et juridictionnelle, il cherche à la limiter fortement, au bénéfice des conciles généraux dans l’Église – c’est le conciliarisme -, des évêques dans leurs diocèses et des souverains dans leurs États. En pratique, cela se traduit surtout par une mainmise étroite du souverain français sur les nominations et les décisions des évêques).