La procédure devant la CEDH

la procédure devant la CEDH

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) est une institution internationale qui a été créée en 1959 et qui a pour mission de veiller au respect des droits de l’homme dans les 47 États membres du Conseil de l’Europe. Voici quelques points importants à savoir sur la CEDH :

  1. Composition de la Cour : La Cour européenne des droits de l’homme est composée de juges, au nombre de un par État membre. Les juges sont élus par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pour un mandat de neuf ans, renouvelable.
  2. Compétence de la Cour : La CEDH est compétente pour examiner les requêtes individuelles alléguant des violations des droits de l’homme protégés par la Convention européenne des droits de l’homme. Elle peut également se prononcer sur les demandes d’avis consultatifs émanant des gouvernements des États membres.

La procédure devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) comprend plusieurs étapes.

  1. Introduction de la requête : La procédure débute par l’introduction d’une requête devant la CEDH. La requête peut être déposée par toute personne physique, organisation non gouvernementale (ONG) ou groupe de particuliers, qui allègue avoir été victime d’une violation des droits protégés par la Convention européenne des droits de l’homme.
  2. Recevabilité de la requête : La Cour examine d’abord la recevabilité de la requête pour s’assurer qu’elle remplit certaines conditions prévues par la Convention. Ces conditions incluent notamment l’épuisement des recours internes, le respect du délai de six mois à compter de la dernière décision interne et le caractère suffisamment grave de l’allégation de violation des droits.
  3. Communication de la requête aux parties défenderesses : Si la Cour estime que la requête est recevable, elle la communique aux États parties à la Convention européenne des droits de l’homme, désignés comme parties défenderesses. Les parties défenderesses ont alors l’occasion de présenter des observations écrites sur le fond de l’affaire.
  4. Échanges écrits : Les parties échangent ensuite des mémoires écrits, dans lesquels elles exposent leurs arguments sur les questions de fond soulevées par la requête. Ces échanges écrits peuvent également inclure des observations des tiers intervenants (tels que des ONG ou des gouvernements tiers).
  5. Audience : Dans certains cas, la Cour peut décider de tenir une audience pour permettre aux parties de présenter leurs arguments de vive voix et de répondre aux questions posées par les juges. Les audiences sont généralement publiques, sauf si la Cour décide de les tenir à huis clos.
  6. Jugement : Après avoir examiné tous les éléments de l’affaire, la Cour rend un jugement. Le jugement peut conclure à une violation des droits protégés par la Convention ou à l’absence de violation. Les jugements peuvent également accorder des réparations ou des indemnisations aux requérants.
  7. Affaire portée devant le Comité des Ministres : Une fois qu’un jugement est rendu, l’affaire est transmise au Comité des Ministres du Conseil de l’Europe. Le Comité des Ministres est chargé de superviser l’exécution des jugements de la Cour et de s’assurer que les États parties prennent les mesures nécessaires pour remédier aux violations constatées.

A l’origine, 2 organes faisaient respecter la Conv. EDH : la Commission européenne des Droits de l’Homme (organe non juridictionnel) ; la Cour européenne (juridiction). Ces organes étaient sollicités seulement si les États mis en cause avaient adopté un AAI acceptant la procédure de contrôle. La FRANCE n’a accepté un tel acte qu’en 1981.

Le Protocole n°11 à la CEDH adopté le 11 mai 1994 met en place un système simplifié : la Commission européenne est supprimée au profit d’une cour unique, et chaque E partie à la Conv EDH est soumis au contrôle de cet Cour. Simplification procédurale qui a pour conséquence inévitable l’engorgement de la Cour EDH.

Pour pallier cette situation, nouveau protocole institutionnel adopté en 2004: le protocole 14 modifié et entré en vigueur le 1er juin 2010. L’objectif de ce nouveau protocole est de permettre à la Cour EDH de gérer le stock des requêtes non traitées et d’accélérer les procédures de décision. La principale solution qui a été adoptée a toutefois été contestée: permettre une décision à juge unique. Solution qui créé des tensions avec les objectifs de la CEDH s’agissant notamment de la qualité de la procédure qui est offerte aux victimes.

  • A) Organisation de la Cour et de la procédure

La Cour EDH est saisie par 2 types de requêtes qui n’ont pas le même régime :

Les requêtes étatiques prévues à l’article 33Conv EDH. Introduites par un ou plusieurs ETATS c/ plusieurs autres ETATS
Requêtes individuelles d’un particulier c/ un E. Art 34Conv. EDH. Seules les requêtes individuelles sont susceptibles de faire l’objet d’une procédure à juge unique.

1)  Composition de la Cour EDH 

 47 juges (47 E parties), siégeant à titre individuel (ne sont pas les représentants des E parties), élus sur une liste de 3 candidats présentés par chaque E, par l’Assemblée Ptaire du Conseil de l’Europe, pour un mandat de 9 ans non renouvelable (& prend fin lorsque le juge a 70 ans). Ils ne sont pas désignés par les E & les E ne sont pas obligés de proposer des juges ayant leur nationalité. Ils bénéficient d’une immunité qui les protège dans leur indépendance.

4 formations de jugement:

formation en juge unique / comité de 3 juges / chambre de 7 juges / Grande Chambre : formation la + solennelle 17 juges.

2) Fonctionnement 

Requêtes individuelles soumises à la procédure du juge unique qui ne peut pas  être le juge élu au titre de l’État mis en cause. Juge unique peut déclarer la requête irrecevable soit non fondée. Pas de recours possible  —>  permet de désengorger la cour.

S’il estime la requête recevable, il transmet l’affaire à un comité de 3 juges OU à une chambre de 7 juges. Comité (3) peut à l’unanimité déclarer requête irrecevable et rendre un arrêt de fond. Encore une fois pas de recours. Sinon déclare recevable et transmet à la Chambre (7) qui est la formation ordinaire de la CEDH et qui comporte en son sein, le juge de l’État mis en cause. Elle se prononce sur la recevabilité et sur le fond.

Art. 30 de la Convention., permet à la Chambre (7) de se dessaisir au profit de la Grande Chambre, lorsque l’aff soulève une question grave relative à l’interprétation de la Convention ou de ses protocoles OU si la solution peut conduire à une contradiction avec un arrêt rendu antérieurement par la Cour. Le dessaisissement peut être empêché par chacune des 2 parties. Arrêt rendu par Chambre (7) devient définitif au bout de 3 mois si aucune des 2 parties ne saisit le Grande chambre : innovation du prot 11.

Si une des 2 saisit la Grande chambre alors l’affaire est soumise à un comité de filtrage de 5 juges qui accepte la demande si :

  • – l’affaire soulève une question grave relative à l’interprétation ou à l’application de la Convention ou de ses protocoles
  • – Idem mais une question grave de caractère général.

Si demande acceptée : la procédure qui commence devant la Grande chambre = procédure d’appel et non de cassation. Si les 5 juges acceptent la demande de renvoi devant la Grande chambre, cette dernière rejuge l’affaire EN ENTIER, librement, en droit et en fait.

Les arrêts définitifs sont transmis au Comité des Ministres du Conseil de l’Europe qui surveille l’exécution des arrêts de la Cour EDH. Pouvoir contesté mais conservé par le prot 14 qui a ouvert la possibilité pour le Comité des ministres de saisir la Cour EDH en cas de difficultés relatives à l’exécution de ses arrêts pour qu’elle apprécie elle-même si l’arrêt a été correctement exécuté. Ce protocole a érigé la CEDH en juge de l’exécution de ses propres arrêts. Pour que le Comité des min saisisse la Cour il faut un vote à la majorité des 2/3. Cette réforme est destinée à réduire la place du politique de l’exécutif dans les conditions d’exécution des arrêts de la CEDH dc à juridiciser davantage la procédure.

  • B)  Le problème spécifique des recevabilités des requêtes à la CEDH

Requêtes étatiques :

  • -soumises directement à la Grande Chambre
  • -peuvent  être introduites pour toute allégation de violation de la CEDH, sans forcément d’intérêt à agir de la part de l’E requérant.
  • -nécessite seulement que l’Etat requérant et que l’Etat accusé soient parties à la CEDH. Mais en pratique, les affaires sont traduites devant la Grande Chambre que si les Etats y ont un intérêt.

Requêtes individuelles : -recevables que si le demandeur a la qualité de victime d’une violation de la CEDH (doit donc établir un intérêt à agir).

  • conception large de cette qualité de victime par la CEDH : permis procédures qui peuvent concerner les pers exposées à un risque imminent de la violation de la CEDH (pas encore la qualité de victime).
  • -victime peut  être une personne physique, mais =t une « organisation non gouvernementale ou un groupe de particuliers ». JURISPRUDENCE de la Cour EDH admet le recours des personnes morales de droit privé. (assoc, soc comm)
  • -peut  être une pers morale de droit public à partir du moment où l’activité litigieuse ne confère pas au requérant des prérogatives de puissances publiques.
  • -nationalité de la victime indifférente. Seule condition : que les faits litigieux se soient déroulés sous la compétence de l’E mis en cause.

Les autres conditions de recevabilité posées par l’article 35 CEDH :

Condition générale : 

  • La Cour ne peut  être saisie qu’après l’épuisement des voies de recours internes ; dans un délai de 6 mois à partir de la date de la décision interne définitive.
  • L’épuisement des voies de recours internes a provoqué une JURISPRUDENCE abondante dans laquelle la Cour EDH a précisé cette exigence à 2 points de vue:
  • Elle impose au plaideur particulier une diligence; la victime doit d’abord invoquer le grief devant le juge national avant de solliciter la CEDH. Toutefois la Cour EDH a considéré que si la réclamation du particulier se heurte à une JURISPRUDENCE nationale bien établie, la victime n’est pas tenue d’utiliser les recours internes et peut s’adresser directement à la CEDH.

-conditions qui ne s’appliquent qu’aux actions des particuliers : 

la requête ne doit pas  être anonyme et ne doit pas  être essentiellement la même qu’une requête déjà portée devant la Cour ou devant un autre organe international (le comité des DDH est visé) à moins qu’un fait nouveau justifie une nouvelle réclamation. Il ne faut pas que la réclamation soit incompatible avec les dispositions de la convention ou des protocoles, ou ne doit pas être manifestement mal fondée ou abusive.

Lorsqu’on prévoit la possibilité de déclarer irrecevable une requête manifestement mal fondée, c’est pour donner un pouvoir de filtrage à la CEDH qui se débarrasse du cas: examen sommaire de la réclamation.

Dernière exception :  très incertaine vient d’être ajoutée (il faudra attendre la JURISPRUDENCE pour la préciser): la possibilité de rejeter à titre préliminaire une requête si le requérant n’a subi « aucun préjudice important (volonté de rejeter les affaires mineures) sauf si le respect des droits garantis exige un examen de la requête au fond (grande latitude laissée à la cour, pouvoir de filtrage), et à condition de ne pas rejeter pour ce motif une affaire qui n’aurait pas été examinée par un tribunal interne (hypothèse des portes fermées au requérant). « 

  • Les procédures nationales d’application de la Convention EDH

Principe : CEDH est exécutée dans les ordres internes des États Membres conformément aux procédures nationales. Seule obligation : prévoir en droit interne un recours effectif en cas d’allégation de violation de la CEDH.

  •  —>  Il appartient aux organes de l’Etat d’exécuter les décisions de la Cour EDH.
  •  —>   Pas d’obligation gale d’adaptation de la législation nationale aux arrêts de la CEDH. Cependant, si pas d’adaptation, risque pour l’Etat d’être condamné.
  •  —>  En principe l’exécution des arrêts ne soulève pas de difficulté particulière sauf 2 situations principales :
les condamnations en matière pénale  le contentieux de l’éloignement des étrangers 
-quand la procédure nationale n’a pas respecté l’article 6 CEDH (n’a pas été équitable), la CEDH condamne au paiement de DI.

Cette indemnisation ne suffit pas à réparer le P subi quand la pers est encore en prison.

La difficulté est alors prise en charge par les diffts droits internes.

–>France : amendement Lang à la loi Guigou (15 juin 2000) : sur la présomption d’innocence, qui réforme art 626-1 CP pour permettre de demander un réexamen d’une condamnation pénale suite à une arrêt de la CEDH lorsqu’il apparait que la réparation par équivalent ne suffit pas à tirer les conséquences de l’arrêt (rare cas de réexamen de la procédure pénale française). Réouverture du procès pénal national dès lors que « par sa nature et sa gravité, la violation constatée entraine des conséquences dommageables pour le condamné, conséquence auxquelles la satisfaction équitable ne pourrait mettre un terme ».

La pratique a montré des condamnations prononcées par la CEDH alors que l’étranger avait déjà été éloigné : l’expulsion ou la reconduite à la frontière sont jugées c/res à la CEDH (art 8 +14). On condamne à indemniser, mais éloignement déjà effectif.

Ces situations font l’objet de toute une JURISPRUDENCE de la CEDH d’abord, puis du droit national ensuite.

CEDH a considéré qu’il résultait de l’article 34 TFUE (droit de recours individuel) la possibilité d’ordonner pour elle à l’E de surseoir à l’exécution d’une mesure d’éloignement.

Par la JURISPRUDENCE, la Cour a considéré que les PG du droit international lui donnaient le pouvoir d’indiquer aux parties dans l’urgence les mesures nécessaires à la sauvegarde des droits litigieux dans l’attente d’une décision sur le fond.

Le CE a =t considéré que cette décision s’imposait aux autorités publiques qui ne pouvaient procéder à l’éloignement des étrangers qu’une fois la mesure conservatoire réalisée.  Il est possible par la procédure de référé d’obtenir respect de la mesure conservatoire prononcée par la Cour à condition que l’urgence soit remplie c’est à dire que l’exécutif n’ait pas déjà pris des mesures pour suspendre l’éloignement de l’étranger.

 

Les droits internes se sont adaptés:

  • –     par la voie législative pour la question pénale
  • –     par la voie jurisprudentielle pour la question de l’éloignement des étrangers.

De Gibraltar à Vladivostok, socle commun de libertés fondamentales qui s’applique dans toute l’Europe politique des droits de l’Homme.

Autorité de chose jugée : L’arrêt de la cour européenne a autorité relative de la chose jugée. Elle lie donc uniquement les parties au procès et pour l’affaire jugée. Si un fait nouveau apparaît, en revanche, une nouvelle procédure peut être introduite. La JURISPRUDENCE de la cour est désormais fixée. Si l’Etat ne tire pas les conséquences d’ordre général, alors il s’expose à des condamnations répétées.

C’est un calcul de l’Etat qui a des avantages et inconvénients et un coût. Dans l’ensemble, les politiques d’opposition n’ont pas été efficaces. Sur la durée, les Etats ont estimé plus avantageux d’adapter leur ordre juridique interne aux interprétations de la Cour européenne des DH.