La Procédure par défaut : défaut de comparution ou d’accomplissement d’actes.
La procédure par défaut vise l’hypothèse où l’une des parties n’est pas présente ni représentée ou encore s’abstient de faire connaître ses conclusions. Comme il faut respecter les droits de la défense, des précautions sont alors à prendre: il ne faut cependant pas sacrifier les droits de l’autre partie qui est en droit d’obtenir un jugement même si son adversaire est défaillant. L’évolution de la matière a poussé à prendre de plus en plus compte de ce deuxième impératif auquel s’ajoute la volonté de rendre une justice rapide. Le jugement ne peut être considéré par défaut que dans des cas extrêmement limités.
On suppose qu’une partie au moins est défaillante. Cette défaillance recouvre deux hypothèses.
On suppose que malgré l’existence du litige, de l’instance, l’une des parties ne comparait pas. On peut supposer une autre hypothèse de défaillance. Il y a bien eu ici comparution, mais l’une des deux parties s’abstient d’accomplir les actes de la procédure. Il y a comparution, mais c’est tout.
Dans ces deux cas, la procédure va devoir être adaptée et respecter deux impératifs contradictoires, parce qu’ils l’inspirent.
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Il ne faudrait pas que la défaillance d’une partie empêche la procédure de suivre son cours. En effet, le jugement est un droit pour chaque plaideur. Il serait trop facile pour l’un de ne pas comparaître, pour obtenir jugement. Le service aussi a intérêt à ce que la procédure ne s’enlise pas. La justice a intérêt à ce que les affaires soient tranchées le plus rapidement possible.
Le premier impératif est celui de diligence, de célérité.
Le second impératif tient en ce qu’il ne faudrait pas que la défaillance d’une partie serve de méconnaissance de ses droits fondamentaux. Il faut prendre en compte les intérêts de la partie défaillante.
La jurisprudence a beaucoup évolué. Le Code de procédure civile napoléonien de 1806 n’était pas défavorable au défaillant car le procès était considéré comme étant la chose des parties.
Cela se manifestait par l’ouverture systématique d’une voie de recours spécifique, l’opposition, par une voie de recours ordinaire, voie de rétractation. On demandait au juge de revenir sur la décision qu’il a rendu.
Ce système avait pour inconvénient majeur de retarder les procès, de favoriser les manœuvres dilatoires. On devine alors l’évolution contemporaine de la législation qui, soucieuse de célérité, a restreint considérablement le domaine de l’opposition.
Désormais, en cas de défaillance, le jugement qui aura été rendu ne sera plus toujours juridiquement un jugement par défaut. Il pourra s’agit également d’un jugement réputé contradictoire.
Autrement dit, on fera comme si le jugement était contradictoire, on le traitera comme tel dans le but de fermer la voie à l’opposition, de faire échec à cette voie de rétractation.
A) Le défaut de comparution.
Devant le Tribunal de grande instance, le défaut de comparution est nécessairement celui du défendeur. On ne conçoit pas un défaut de comparution du demandeur.
Devant le Tribunal de grande instance, la comparution consiste à constituer avocat, du fait de la représentation obligatoire.
Or, la constitution d’avocat du demandeur se fait dans l’assignation. S’il ne constitue pas avocat, cette assignation n’est pas valable. On ne conçoit pas un défaut de comparution du demandeur.
Il en irait tout différemment devant les juridictions d’exception. On rencontre souvent un défaut de comparution du demandeur, en cas de repentir.
Premier impératif. Le vœu du législateur, c’est que ce défaut de comparution ne paralyse pas le cours de l’instance. Ce vœu est exprimé formellement à l’article 472 alinéa 1er du Code de Procédure Civile. Le texte énonce que si le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le jugement sera rendu.
En vérité, il sera rendu jugement sous une réserve, l’hypothèse du désistement. Sous cette réserve, le jugement sera rendu.
Second impératif. Il ne faut pas systématiquement sanctionner le défaut de comparution du défendeur. Il peut s’expliquer par le fait qu’il a ignoré le procès. Pour lui donner une dernière chance de comparaître, le Code de Procédure Civile prévoit dans ce cas que le juge, à la demande du demandeur à l’instance, ou bien d’office, peut décider d’une réitération de la citation initiale.
Autrement dit, on va procéder à une nouvelle assignation.
En tous les cas, qu’il y ait une seule citation ou réitération de l’assignation, si le défendeur ne comparait pas à l’instance, la question se pose de savoir comment le juge va pouvoir rendre sa décision.
Le défaut de comparution ne sera pas considéré comme un aveu de la part du défendeur. C’est dire que le juge n’accueillera pas aveuglément les prétentions du demandeur.
En toute hypothèse, qu’il y ait comparution ou non comparution du défendeur, le juge devra apprécier le bien fondé et la recevabilité, la régularité des prétentions du demandeur, c’est ce qui ressort de l’article 472 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
L’affaire va devoir être instruite régulièrement et mise en état d’être jugée comme s’il y avait comparution du défendeur. Donc, il y aurait éventuellement une mise en l’état.
En tous les cas, le jugement qui va être rendu, dans la logique de leurs catégories, devrait être qualifié systématiquement de jugement par défaut.
Il devrait en résulter que systématiquement le défendeur devrait avoir la voie du recours en opposition.
Or, il y a le problème de la célérité. Le législateur a disqualifié certains jugements qui devraient être par défaut en jugements réputés contradictoires.
Le jugement sera traité comme contradictoire, pour fermer la voie de l’opposition. C’est une qualification pragmatique.
Pour tout le reste, le jugement sera traité comme un jugement par défaut. C’est seulement pour fermer le jugement que l’on retient cette qualification fictive.
Une cause de péremption frappe les jugements rendus par défaut.
Le défendeur pourra bénéficier d’un relevé de forclusion. Ceci dit, la difficulté est de savoir quand on est en présence d’un jugement « réputé contradictoire. » Le jugement est réputé contradictoire dans deux cas seulement.
Tout d’abord s’il est susceptible d’appel, il est réputé contradictoire.
Le jugement est encore réputé contradictoire si la citation faite au défendeur a été délivrée à personne. C’est ce qui ressort de l’article 473 du Code de Procédure Civile.
A contrario, si le jugement est réputé contradictoire, cela signifie qu’il y aura jugement par défaut seulement lorsque deux conditions seront réunies, conditions inverses des précédentes, que le jugement ne soit pas susceptible d’appel et que la citation n’ait pas été délivrée à personne.
Le domaine de l’opposition est extrêmement restreint par le fait de ce cumul d’opposition. Cette admission restrictive peut se fonder sur deux qualifications différentes.
Si l’appel est ouvert, on peut considérer qu’il est superflu d’ouvrir la voie à l’opposition. L’appel suffira à garantir les droits du non-comparant.
Si maintenant, la citation a été délivrée à personne, on peut comprendre que la voie de l’opposition soit fermée, que le défendeur avait connaissance effective du procès, qu’il est en faute, et la privation de l’opposition est la sanction de cette faute.
Le jugement par défaut peur intervenir en raison d’une défaillance en raison de l’accomplissement d’actes de procédure postérieurement à la comparution.
B) Le défaut d’accomplissement des actes de la procédure.
On suppose qu’une partie n’a pas accompli les actes qui lui incombaient. Cela recouvre deux hypothèses.
Première hypothèse. Après avoir comparu, une partie a omis d’accomplir les actes de la procédure dans le délai imparti.
Ici, la solution est toute simple, le juge va rendre un jugement contradictoire et statuer au vu des éléments dont il dispose. L’opposition est fermée.
Deuxième hypothèse. Les deux parties comparantes se sont toutes deux abstenues d’accomplir les actes de la procédure.
En ce cas, l’attitude du Tribunal sera évidemment différente. Le juge va pouvoir radier l’affaire du rôle, et cette radiation est une mesure d’administration judiciaire.
Autrement dit, elle ne sera plus appelée à l’audience. Les parties pourront demander le réenrôlement à l’instance, si la forclusion n’a pas joué.
Le défaut d’accomplissement des actes de la procédure donne aussi lieu à une procédure par défaut, mais il faut distinguer suivant les hypothèses.
– Première hypothèse : une partie a omis d’accomplir les actes de la procédure. Dans cette hypothèse, puisque la partie a comparu et que l’instance s’est nouée entre les parties, le jugement sera contradictoire et non par défaut. Puisqu’il en est ainsi, c’est dire que la voie de l’opposition sera fermée.
Si après avoir comparu, la partie qui défaille dans l’accomplissement est le demandeur et non pas le défendeur, dans cette hypothèse, on conçoit que le juge rende un jugement contradictoire sur les seuls éléments fournis précédemment. Mais ce jugement n’est pas forcément de l’intérêt du défendeur. Celui-ci dont la cause peut être fragile peut préférer qu’aucun jugement ne soit rendu. La loi l’autorise à demander au juge de déclarer caduque la citation, à ne prononcer aucun jugement sur le fond.
Mais le juge n’est pas tenu de faire droit à cette demande de caducité et peut rendre un jugement sur le fond.
Si maintenant, le défaut d’accomplissement d’actes de la procédure est le fait du défendeur, une première solution est acquise : le désistement unilatéral d’instance n’est plus possible.
Seconde solution : la caducité, mais il n’y a pas de caducité sans texte, la sanction paraît également inapplicable.
– Seconde hypothèse : il y a eu comparution des parties, mais le défaut d’accomplissement des actes de la procédure sont le fait des deux parties mais non d’une seule. Cette hypothèse n’est pas rare. Il suffit d’imaginer qu’après la liaison de l’instance, les parties se rapprochent pour convenir d’une conciliation, ou d’un accord transactionnel.
Il est clair que le Tribunal n’a aucun intérêt à voir son rôle encombré par des affaires non-jugées. Il est donc prévu que le juge puisse en ce cas radier l’affaire du rôle du Tribunal. La radiation du rôle n’est qu’une mesure d’administration judiciaire. Elle n’aura pas l’efficacité d’une décision juridictionnelle, la citation conservera son effet interruptif et les parties pourront demander la reprise de l’affaire.