La procédure pénale au Sénégal
Les règles de procédure pénale au Sénégal assurent la réalisation concrète du droit substantiel. Elles constituent par conséquent des auxiliaires du droit pénal de fond. La procédure pénale comporte deux aspects
· Un aspect statique car il est lié aux règles relatives à la composition et au rôle des autorités qui interviennent depuis la constatation de l’infraction jusqu’à l’exécution de la sentence.
· Un aspect dynamique, qui est lié aux règles applicables aux différentes opérations allant du déclenchement des poursuites au prononcé de la sanction.
La procédure pénale sénégalaise est régie par le Code de Procédure Pénale sénégalais, qui a été promulgué en 1967 et qui a subi plusieurs révisions depuis. La loi la plus récente modifiant le Code de Procédure Pénale est la loi n°2020-16 du 26 mai 2020 portant suspension des délais de prescription, de l’exécution des contraintes par corps et prorogation des délais de recours et autres formalités en matière pénale.
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I – Généralités sur la procédure pénale sénégalaise
A. Lancement de l’action publique
L’action publique pour l’application des peines est mise en mouvement et exercée par les magistrats ou les fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi (article 2 du Code de Procédure Pénale sénégalais). Cela signifie que l’initiative de poursuivre une personne pour une infraction pénale appartient au ministère public, qui est représenté par le procureur de la République.
B. Droits de la défense
Le Code de Procédure Pénale sénégalais accorde une place aux droits de la défense. En effet, il prévoit la nullité des actes de procédure viciés, voire de la procédure ultérieure à ces actes (article 166 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale sénégalais), en cas de violation des droits de la défense.
Cela signifie que si les droits de la défense ont été violés lors d’une procédure pénale, les actes de procédure concernés peuvent être annulés, ainsi que toute la procédure qui en découle.
C. Déroulement de la procédure pénale
La procédure pénale sénégalaise se déroule en plusieurs étapes, dont voici les principales :
- L’enquête : l’enquête est menée par la police judiciaire, sous le contrôle du procureur de la République. Elle a pour objectif de rassembler les preuves nécessaires pour établir la culpabilité ou l’innocence du suspect.
- La mise en examen : si les preuves réunies lors de l’enquête semblent suffisantes, le juge d’instruction peut mettre en examen le suspect. Cette mise en examen permet au suspect d’avoir accès au dossier et de pouvoir s’exprimer sur les faits qui lui sont reprochés.
- L’instruction : l’instruction est menée par le juge d’instruction, qui a pour mission d’établir la culpabilité ou l’innocence du suspect en recueillant des éléments à charge et à décharge.
- Le renvoi devant le tribunal : si le juge d’instruction estime qu’il y a suffisamment d’éléments à charge contre le suspect, il peut renvoyer celui-ci devant le tribunal correctionnel.
- Le jugement : le tribunal correctionnel est chargé de juger l’affaire et de prononcer une condamnation ou un acquittement.
II: Les juridictions pénales au Sénégal
Entre le moment où une infraction est commise et le moment où la condamnation est exécutée, plusieurs autorités interviennent. Certaines comme la police judiciaire et le ministère public ne rendent pas des décisions juridictionnelles alors que d’autres rendent de telles décisions. Il s’agit des organes juridictionnels qui comportent les juges d’instruction et les juridictions de jugement.
A / Les juridictions d’instruction
L’instruction préparatoire est une phase importante du procès pénal. C’est à ce stade que l’on recherche s’il existe des charges suffisantes contre la personne poursuivie justifiant son renvoi devant la juridiction de jugement. Elles n’interviennent pas toujours dans les affaires pénales. Il existe en effet des affaires qui sont portées directement devant la juridiction de jugement. Il en est ainsi en matière de contravention et de délits qui ne présentent aucune complexité. Pour d’autres affaires en revanche, le recours au juge d’instruction est nécessaire soit parce qu’il y a des éléments à étudier (l’auteur de l’infraction n’est pas encore connu), soit parce qu’il s’agit d’une exigence légale comme par exemple en matière de crime où la saisine du juge d’instruction est obligatoire.
Il existe deux degrés dans les juridictions d’instruction :
ü Au premier degré, il y a le juge d’instruction qui existe au niveau de chaque tribunal
Régional. Le tribunal départemental peut par contre ne pas avoir de juge d’instruction dans sa composition. Dans ce cas, le seul magistrat installé au siège joue à la fois le rôle de juge de jugement et d’instruction.
ü Au second degré, il y a la chambre d’accusation qui est une section spéciale de la
Cour d’appel. Elle procède à un nouvel examen de l’affaire après le juge d’instruction lorsqu’elle estime que les faits poursuivis constituent une infraction qualifiée de crime. Elle est aussi juge d’appel des ordonnances rendues par le juge d’instruction.
B / Les juridictions de jugement
Elles sont chargées de statuer sur la culpabilité des personnes poursuivies et de prononcer éventuellement des condamnations pénales. Elles sont saisies soit par ordonnance de renvoi du juge d’instruction soit par l’arrêt de mise en accusation rendue par la chambre d’accusation, soit par citation directe du ministère public ou de la victime. Elles sont hiérarchisées comme suit :
ü Au premier degré, nous avons le T D, le T R et la Cour d’appel.
ü Au second, la Cour d’appel qui dans ses chambres deux qui sont spécialisées en matière pénale
ü Au sommet de la hiérarchie, se trouve la Cour Suprême dont l’une des chambres est compétente en matière répressive.
Soulignons enfin que pour les mineurs, il existe un tribunal pour enfants auprès de chaque tribunal régional et une chambre spéciale de la Cour d’appel.
III : Le procès pénal au Sénégal
Toutes les infractions de la loi pénale donnent naissance à une action qui a pour but la répression de l’atteinte à l’ordre social et l’application d’une peine. Deux types d’actions permettent de déclencher un procès pénal : L’action publique et celle civile.
A / L’action publique
Dans sa mise en œuvre, l’action pénale met en rapport deux catégories de personnes : celles qui exercent les poursuites et celles contre qui ces dernières sont dirigées.
Selon l’article 1er alinéa 1 du Code de Procédure pénale, « l’action publique est mise en œuvre par un magistrat(le parquet) et les fonctionnaires auxquels elle conférée par la loi (ex : en matière douanière)… » Quant aux personnes poursuivies, il s’agit de l’auteur de l’infraction et de son complice. En vertu du principe de la responsabilité individuelle en matière pénale et de celui de la personnalité des peines, il est interdit d’exercer des poursuites contre les personnes civilement responsables… En vertu des mêmes principes, il est aussi interdit de diriger des poursuites contre l’héritier du délinquant en cas de décès de celui-ci. C’est cela qui explique l’extinction de l’action publique en cas de décès.
B / L’action civile
La victime d’un dommage causé par une infraction pénale peut exercer son action en réparation soit devant le tribunal civil soit devant le juge répressif. Cette possibilité donnée à la victime de porter son action civile devant la juridiction répressive lui permet aussi de mettre en mouvement l’action publique même au cas où le ministère public avait décidé de ne pas engager de poursuites ou dans le cas où il avait classé le dossier sans suite.
L’action civile obéit à des règles particulières. Elle ne peut être exercée que par la victime ou ses ayants droits et ils doivent justifier d’un préjudice résultant d’une infraction pénale. Elle est dirigée contre le délinquant, ses héritiers ou les personnes civilement responsables. Par ailleurs, en raison de son origine pénale, elle est soumise à la primauté de la procédure répressive exprimée par la règle selon laquelle « Le criminel tient le civil en état »