La QPC : article 61-1 de la Constitution

La QPC : (article 61-1 de la Constitution)

Il s’agit de la possibilité pour tout justiciable de soulever devant son juge la question de la Constitutionalité de la loi applicable au litige dont il est partie. Si les sont convaincu du bien-fondé de la question il doit sursoir à statuer et la transmette à sa cour suprême (cour de cassation pour le juge judiciaire et Conseil d’Etat pour le juge administratif. C’est cette dernière qui décide de saisir ou non le conseil constitutionnel.

En cas de saisine,tout repose sur le Conseil où le Conseil Constitutionnel juge la loi conforme à la constitution et le procès reprend devant sa juridiction de base. Ou il l’a juge contraire à la constitution et la loi est abrogé provoquant l’arrêt définitif du procès et de tous les procès engagés sur le fondement de la loi déclaré contraire à la Constitution.

On peut donc dire que la QPC, qui est née à la fois de l’idée de R. Badinter, de F. Mitterrand, du comité Vedel, est un nouveau moyen à la disposition des justiciables, qu’ils soient des personnes physiques ou morales, français ou non. La QPC est donc un moyen considérable puisqu’il détermine et conditionne la poursuite et l’issue du procès quel que soit l’affaire litigieuse.

La QPC,dont Nicolas Sarkozy disait « ce dont vous aviez rêvé je vous l’ai offert ! », est une révolution juridique. Jusqu’à la QPC la constitution était en quelque sorte « la chose » des politiques, qui l’utilisaient à leur profit comme ressource au service de leur stratégie. Avec la QPC la constitution devient la chose des citoyens. Elle sort dans la rue pour être prise par les citoyens comme bouclier civique, comme moyen pour défendre leur droit contre d’éventuel abus de pouvoir.

Le conseil constitutionnel rend aujourd’hui 4 à 5 décisions par semaine, contre 2 à 3 par ans avant 2008, avant la naissance de la QPC.

Les décisions rendu tant par la Cour de Cassation, le Conseil d’Etat, que par le Conseil Constitutionnel démontre que le contrôle apostériori de la constitutionnalité de la loi s’est imposé avec une forte rapidité dans le paysage français. En appelé à la Constitution devient un reflex du comportement de tous citoyens justiciables.

Les avocats deviennent les premiers acteurs du droit Constitutionnel. En effet, une affaire civile, pénale, fiscale, sociale, environnementale ne peut plus être seulement appréhendée dans sa dimension civile, pénale, fiscale ou sociale. Elle doit être aussi appréhendée en terme constitutionnel car pour chacune de ces matières il existe des arguments constitutionnel qui peuvent être mobilisés pour soutenir une Question Prioritaire de Constitutionnalité.

L’onde de la QPC s’étend aussi aux magistrats : ils doivent désormais porter sur les lois un premier jugement de constitutionnalité. En effet, le justiciable ne peut saisir directement le Conseil Constitutionnel, il doit seulement soulever devant le juge ordinaires la question de constitutionnalité à charge pour celui-ci de filtrer sa demande. C’est-à-dire de décider s’il y a lieu de saisir ou non le Conseil Constitutionnel. Pour se faire le juge ordinaire doit d’abord dire si la contestation de constitutionnalité porte sur une disposition législative qui commande l’issue du litige au fond, et ensuite vérifier si le problème invoqué par le requérant n’a pas déjà été tranché par le Conseil Constitutionnel ou si les changements dans les circonstances de droit ou de fait autorisent un nouvel examen de constitutionnalité. Enfin il va apprécier si la contestation soulevée révèle une difficulté sérieuse de constitutionnalité. Ce filtrage conduit nécessairement les juges à un examen de la constitutionnalité de la loi, pour lequel la Cour de Cassation et le Conseil d’Etat se déclarait jusqu’en 2008 incompétent.

Aujourd’hui les cours suprêmes sont les instances où se forge un doute sur la constitutionnalité de la disposition législative litigieuse. La QPC est et restera dans l’histoire comme la grande réforme de 2008 : celle qui a bouleversé et continue de bouleversé le paysage juridictionnel français et plus profondément la culture juridique française.

On peut dire que la QPC turbule d’une part le savoir constitutionnel, d’autre part turbule la vie politique et enfin turbule le paysage juridictionnel.

La QPC et le savoir constitutionnel…

Les fondamentaux du savoir constitutionnel était la séparation des pouvoirs, l’Etat, le concept de souveraineté, la différence entre peuple et Nation, les mérites respectifs des régimes parlementaire/présidentiel, etc.

La QPC ne vient pas à disparaître ces objets du savoir constitutionnel. Elle en fait apparaître de nouvelles constitutionalités, comme le port du voile intégral, l’internement psychiatrique sans consentement, de la l‘adoption d’un enfant par un couple non marié, du mariage homosexuel, du régime de garde à vue, de l’ouverture des magasins du dimanche (questions de la vie sociale et quotidienne de la vie des gens).

Le QPC remet en quelque sorte la constitution sur «ses pieds » en la redonnant, selon Dominique Rousseau, à la société. L’Etat n’est devenu l’objet du droit constitutionnel que par l’effet d’une réduction de la notion de constitution à la seule question des institutions. Ainsi avec la QPC le savoir constitutionnel retrouve son objet et se déploie dans toutes les sphères sociales.

La QPC n’a pas tué le droit politique, elle l’a renouvelé en lui offrant de nouveaux champs d’application.

La QPC et la vie politique…

En effet, la QPC a fait bouger les lignes de la vie politique. Jusqu’en 2008, la vie politique appartenait aux hommes politiques. Les citoyens en été exclu. Avec la QPC tout change, il y a maintenant l’électeur avec ses habits de justiciable pour controler la vie législative de ses représentants. N’importe qui peut faire tomber, censurer, une loi votée par le législateur.

Dans le cadre du contrôle apriori de la constitutionnalité de la loi, le contrôle reste une affaire de famille politique. Dans le cadre de l’examen de conventionalité de la loi, c’est à dire de l’examen de la loi au regard des traités internationaux et de la convention européenne des droits de l’Homme, l’affaire se conclu dans les cas échéants par une mise en écart de la loi. Dans le cadre de la QPC, l’affaire se conclu par l’abrogation, c’est-à-dire par la disparition définitive de la loi de l’ordre juridique : le citoyen justiciable devient un majeur constitutionnel, c’est-à-dire un acteur du jeu politique qui par la QPC a le moyen de peser sur la fabrication des lois.

Il pèse d’abord sur l’existence des lois puisqu’il peut détenir leur mort (exemple, les dispositions relative à l’hospitalisation d’office des malades mentaux, le régime de droit commun de la garde à vue, la procédure d’élaboration des décrets de nomenclature des établissements classés pour la protection des environnements, etc.).

Il pèse ensuite sur l’application des lois, puisqu’il peut obtenir du Conseil Constitutionnel qu’il édicte les modes d’exécution constitutionnelles de la loi qui est un véritable travail de correction législative réalisé par la technique d’interprétation.

On peut dire aussi que le citoyen pèse sur l’agenda du législateur puisque la Conseil peut lui imposer en échange d’un report de l’abrogation dans le temps de modifier la loi avant une date fixé par lui (exemples, le Conseil Constitutionnel a donné 9 mois au parlement pour fixer des nouvelles règles de la garde à vue, il en a donner 10 pour les règle relatives à l’attribution des noms de domaine donné à internet, etc.)

Enfin le citoyen justiciable pèse sur le contenu des lois puisqu‘il peut obtenir du Conseil Constitutionnel qu’il guide la main du législateur dans la rédaction des futures lois (exemple, le Conseil Constitutionnel fait savoir au parlement que concernant la garde à vue, la future loi pour être conforme à la constitution devra prévoir « l’assistance effective de l’avocat auprès de la personne gardée à vue et la reconnaissance de son droit à garder le silence).

Le citoyen peut également intervenir directement sur la constitution en soulevant une question qui oblige le Conseil Constitutionnel à faire vivre les principes constitutionnels autant présents, voire à en découvrir de nouveaux. Ainsi sollicité par un justiciable sur la constitutionnalité de la loi qui réserve le bénéfice du mariage aux couples homosexuel, le Conseil Constitutionnel ne la déclare pas contraire au principe d’égalité, mais fait savoir au parlement que qu’il décidait d’ouvrir le mariage aux homosexuels, il jugerait cette loi conforme à la constitution.

Les citoyens ne sont pas uniquement compétents pour choisir leur représentant, mais aussi pour intervenir dans la fabrication des règles dont ils sont les destinataires.

« Le métier de citoyen s’exerce désormais en continue, par le vote il fait le pouvoir, par la QPC il contrôle le pouvoir (…) Le citoyen doit être un homme politique, c’est alors un électeur, le citoyen doit être aussi un homme juridique, c’est un justiciable ». D. Rousseau.

La QPC et le paysage juridictionnel…

La QPC a ouvert une guerre des juges : en effet, l’enjeu aujourd’hui est la position des cours suprêmes. En d’autre terme, c’est la possibilité de voir le Conseil Constitutionnel de devenir Cour Suprême.

« La seule Cour Suprême en France c’est le peuple » Charles de Gaulle.

Le conseil d’Etat et la Cour de Cassation ne sont ni l’un ni l’autre cour suprême pour l’ordre juridique français. Mais la constitution de 1958 à propos du Conseil Constitutionnel ne lui donne aucun caractère d’une cour suprême. Par ses compétences par son mode de composition par son organisation la nature juridictionnelle du Conseil Constitutionnel est même discutée. On peut donc dire que le Conseil Constitutionnel jusqu’en 2008 restait en dehors du paysage juridictionnel Français. La QPC ne va-t-elle pas mettre le Conseil Constitutionnel en position première de cour suprême ?

Le président de la Cour de Cassation craint la QPC et dénonce la campagne sans précédent orchestrée par certain qui voient dans la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire le principal obstacle à l’instauration en France.

La QPC ouvre le chemin de la cour suprême pour le conseil constitutionnel, indépendamment de la volonté du constituant de 2008 ainsi que de la volonté du Conseil constitutionnel. Par ses règles de fonctionnement la QPC porte la transformation du Conseil Constitutionnel en cour suprême. La cour de cassation et le Conseil d’Etat veulent résister à cette tentation du Conseil constitutionnel. Il y a une sorte de bataille entre Conseil constitutionnel, Cour de Cass et Conseil d’Etat qui se joue sur 3 fronts :

La QPC.

La nature de la disposition soumise au contrôle du Conseil constitutionnel et surtout l’exercice du fameux « filtre ». C’est la Cour de Cassation qui en avril 2010 a déclenché les hostilités en saisissant la Cour de Luxembourg en lui demandant en urgence de se prononcer sur la validité de la QPC au regard des exigences européennes. En effet, en contestant l’obligation d’examiner en priorité la question de constitutionnalité, la cour de cassation frappait directement le cœur de la réforme car si cette obligation tombait, si elle était condamné par la Cour de Luxembourg, soulevait l’inconstitutionnalité d’une disposition législative, perdait tout intérêt dès lors que sa validité aurait été appréciée d’abord au regard des traités Européen. La cour de cassation voulait donc tuer la QPC et par ricochet le Conseil constitutionnel. En effet, reconnaître la priorité de la QPC s’était laisser s’affirmer le pouvoir du Conseil Constitutionnel puisqu’il en avait le monopole. Au contraire faire reconnaître la primauté de la question de conventionalité (contrôle des lois au regard des conventions et traités internationaux) s’était de faire préserver le pouvoir de la Cour de Cassation puisqu’elle en a le monopole. La cour de Luxembourg a reconnu conforme la QPC au regarder du droit de l’Union. Avec la QPC, le contrôle de constitutionnalité sort d’une logique purement abstraite pour connaître, non plus la loi parlementaire, mais la loi juridictionnelle : la loi « vivante », celle qui a produit des effets concrets sur le justiciable. Le conseil constitutionnel soulignant qu’en posant une QPC tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu’une interprétation jurisprudentielle constante confère à cette disposition. On peut donc dire que le 1er Mars 2010 restera comme la date d’un changement profond de notre système juridique. La QPC étant une innovation importante pour notre système juridictionnel et une véritable révolution juridique.

Avant nous étions dans une démocratie par la loi, aujourd’hui nous sommes dans une démocratie par la constitution. En effet, comme le souligne D. Rousseau le conseil constitutionnel est devenu une nouvelle figure de la démocratie.

Le conseil constitutionnel en déplaçant la question constitutionnelle d’une réflexion sur la séparation des pouvoirs à une réflexion sur la garanti des droits des citoyens va provoquer la rupture de l’identification.

Le passage de la séparation des pouvoir par la constitution a la garanti des lois est intimement lié à l’existence de la politique jurisprudentielle. La constitution n’est donc plus comme autrefois la définition des rapports entre les institutions elle est désormais d’avantage la définition des rapports entre les citoyens et l’Etat.

Le conseil constitutionnel opère une différenciation entre gouvernés et gouvernants en constituant les droits des premiers encore séparé des droits des seconds. Avant lui la volonté des représentant prévalait avant celle du peuple du fait de la confusion de l’identification et donc de la substitution de cela à celui-ci. Avec lui, et notamment après l’invention de la QPC, la souveraineté populaire est en position de prévaloir car elle dispose de plusieurs moyens parmi lesquels le Conseil Constitutionnel lui permettant d’exprimer sa volonté contre la prétention des représentants. Donc le progrès démocratique représentait par le Contrôle de constitutionnalité consiste ainsi en ce qu’il permet de réintroduire, à l’intérieur de la logique de la démocratie représentative, le principe de la démocratie directe. En vérifiant que les lois des institutions représentativesrespectent la constitution expression de la souveraineté populaire, le Conseil Constitutionnel contribue à rétablir la soumission de la volonté représentative à la souveraineté populaire. Le Conseil Constitutionnel est-il donc devenu une institution de la société civile ?

Le parlement et l’exécutif relève de l’ordre de la société civile alors que le conseil constitutionnel relèverai plutôt de la société politique. Aujourd’hui le conseil Constitutionnel tend à être reconnu comme la jonction de la société politique et civile. En ce sens, le Conseil constitutionnel peut être définit comme une institution d’une nouvelle relation constitutionnelle entre la société civile et politique en imposant le respect des droits des gouvernés aux organes de l’Etat.

On assiste au déclin des figures traditionnelles de la démocratie, à la crise de l’Etat légal, au déclin de la figure du représentant et même au déclin de la figure de l’énarque (avec les limites de l’Etat providence). La première figure de la démocratie moderne est celle du parlementaire elle correspond à ce moment particulier du moment politique où le critère de l’action légitime n’est pas à la volonté du prince, mais à la volonté générale du peuple. Le rejet de la démocratie directe ramena la responsabilité de l’expression générale aux seuls représentants. Cette figure de la démocratie est en déclin. En effet, le représentant et l’institution qu’il abrite ont perdu beaucoup de leur crédit et de leur prestige : chacun sait aujourd’hui qu’il exprime d’avantage la volonté de son partie que la volonté de la nation. Chacun s’est que la loi répond d’avantage aux impératifs électoraux qu’à ce de la Raison.

La deuxième figure de la démocratie moderne est celle du fonctionnaire et celle du technocrate : elle traduit le mouvement qui fait passé la France de l’Etat parlementaire qui voué un culte à la raison philosophique à l’Etat providence vouant un culte à la raison scientifique. Avec la crise de l’Etat providence survient un discrédit de l’énarque à qui on reproche de ne pas savoir régler la crise. Comme le débuté et le technocrate sont en déclin est très réputé, le critère de l’exigence démocratique se déplace vers une autre notion qui est l’éthique qui met en scène un autre personnage, à savoir le juge qui est le nouveau sage de notre république

La raison ethnique et l’émergence de la Raison du juge :

Le juge est celui par lequel passe une sorte de nouvelle promotion. Le juge devient celui à qui est demandé d’exercer une sorte de fonction critique. Celui qui oblige les acteurs sociaux et politiques à s’interroger sur la validité de leur décision, à argumenter et à convaincre chacun de la légitimité de ses actes. Cette dimension nouvelle attendu du juge : recours du Conseil d’Etat sur le port du voile à l’école, extension du justiciable sur la saisine du conseil constitutionnel, etc. cette valorisation du rôle du juge dans les démocraties moderne pose évidemment la question de sa légitimité par rapport aux institutions démocratiques traditionnelles qui ont pour elles, la légitimité du SUD. Toutes ces raisons tendent à ce que la démocratie constitutionnelle peut être la nouvelle appellation de la Vème république avec le rôle très important du Conseil constitutionnel. Ce dernier peut être qualifié de producteur d’une sorte de démocratie qu’il légitime notamment à travers sa jurisprudence.

On peut dire que par sa jurisprudence, le Conseil constitutionnel construit une démocratie différente de la période précédente et qu’il devient aussi acteur d’un régime dénonciation concurrentiel de la volonté générale. Le conseil Constitutionnel est une juridiction qui entre dans un jeu de rapport de force avec d’autres institutions de nature différente et dont l’ensemble défini, ce que la doctrine appelle un régime d’énonciation concurrentiels des normes (de la volonté générale). La formation de la loi est en effet, aujourd’hui le produit du travail de 4 institutions concurrentes : le président (promulgue la loi), le parlement (à l’origine des textes législatifs : discute, amende et vote la loi), le conseil constitutionnel (peut supprimer certaine disposition de la loi, etc.).