L’extorsion : définition, éléments constitutifs, peine
Elle peut être rapprochée du vol, en raison de l’appréhension violente, contrainte, à laquelle elle donne lieu.
Elle s’en différencie, parce que dans l’extorsion, l’auteur va obtenir la remise de la chose sous l’effet d’une contrainte, c’est cette remise, qui en principe, sépare l’extorsion et le vol.
Code pénal ; article 312-1 donne une définition de l’extorsion : L’extorsion est le fait d’obtenir par violence, menace de violences ou contrainte soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d’un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d’un bien quelconque.
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L’extorsion est punie de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.
La peine peut être aggravée : L’extorsion est punie de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende :
- 1° Lorsqu’elle est précédée, accompagnée ou suivie de violences sur autrui ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant huit jours au plus ;
- 2° Lorsqu’elle est commise au préjudice d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;
- 3° (abrogé)
- 4° Lorsqu’elle est commise par une personne dissimulant volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée ;
- 5° Lorsqu’elle est commise dans les établissements d’enseignement ou d’éducation ainsi que, lors des entrées ou sorties des élèves ou dans un temps très voisin de celles-ci, aux abords de ces établissements.
A)- Les éléments constitutifs :
1°)- Les éléments matériels :
On voit bien que le caractère d’infraction matérielle : moyens à l’origine du résultat.
a)- Les moyens d’extorsion :
La violence, menace de violence ou contrainte : élément commun, pression psychologique sur une personne, pression qui peut être physique (violence et contrainte) et morale (menace et contrainte).
Cette pression permet de distinguer l’extorsion de l’escroquerie et de l’abus de confiance ; donnant lieu eux-aussi à des remises de la chose, même dans ces deux derniers, la remise est volontaire.
Mais cette pression la rapproche du vol : absence de consentement à la remise.
— Violence : Même violence que dans les atteintes volontaires à la vie ou à l’intégrité physique, ou comme dans le vol avec violence (difficulté de séparation extorsion / vol avec violence).
— Menace de violence : Menacer autrui d’un acte de violence, devant être suffisamment précise. Il n’est pas exigé que cette menace vise la personne à qui la remise est demandée.
— Contrainte : Physique pas de problème, mais morale oui : le juge pénal admet la contrainte morale au titre de l’extorsion.
Par hypothèse ne suppose pas de pression physique, il faut qu’elle soit suffisamment forte pour avoir déterminé la personne à faire une remise.
Il faut que l’individu ait été dans l’impossibilité de s’opposer à la remise demandée, malgré l’absence de violence ou de contrainte physique.
Cela renvoie à un contexte de soumission de la victime à l’auteur.
Ex : CA Paris ; 27/09/1991 : un pharmacien au cours de sa période de garde imposait une surtaxe de 100F à ses clients pour la délivrance de médicaments urgents, ce qui les contraignaient s’ils refusaient à entreprendre un déplacement lointain de plus de 20 km.
Les individus n’avaient pas de liberté de choix, face à la situation d’urgence, aucune possibilité de s’opposer à la demande.
Ex : refus d’extorsion, en présence de sollicitations réitérées ne suffisant pas à créer une contrainte ; menace d’usage d’une voie de droit
b)- Le résultat :
C’est la remise provoquée par le moyen utilisé : soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d’un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d’un bien quelconque.
Initialement, elle était limitée à la remise d’une signature. Ce n’est qu’ultérieurement que l’extorsion a été étendue à d’autres remises : engagement, la renonciation, la remise de fonds
L’énumération permet d’appliquer l’extorsion à n’importe quel objet corporel ou incorporel susceptible d’être remis : « remise de fonds, valeur, secret, n’importe quel objet, renonciation et engagement ».
La seule exclusion porte sur les immeubles.
Cette remise doit être le résultat des moyens utilisés, lien de causalité.
Question de la distinction entre le vol avec violence et l’extorsion résultant d’une violence :
Approche presque littérale des infractions devrait conduire à :
– appliquer le vol dans l’hypothèse om les faits ont donné lieu à un usage de la violence, mais où l’appréhension de la chose a été matériellement le fait de l’auteur.
– appliquer l’extorsion à l’hypothèse dans laquelle l’usage de la violence a donné lieu à une remise de la chose par la victime.
Dans cette approche littérale, que permet les textes d’incrimination, la remise est déterminante séparant le vol avec violence de l’extorsion (chose prise // remise).
Cette analyse doit être nuancée, voie contestée en pratique, il est extrêmement fréquent, que l’on applique le vol avec violence dans l’hypothèse où la victime a remis la chose sous l’effet de la violence.
Mais cette solution paraît justifiée par le fondement même de l’extorsion, à l’origine l’extorsion de signature, l’extorsion s’applique dans l’hypothèse où l’auteur exerce une violence pour obtenir quelque chose qui est incapable d’être violée avec violence : la signature se remet nécessairement, ne se vole pas.
L’application de l’extorsion doit se trouver dans l’hypothèse où la chose est incapable d’appréhension au moment de la commission de l’usage de la violence. Mais il peut y avoir extorsion avec violence de fonds : la victime ne détient pas les fonds au moment de l’usage de la violence (racket).
2°)- L’élément intentionnel :
L’extorsion est une infraction intentionnelle, le texte d’incrimination ne comporte plus d’élément dans ce sens, mais principe de l’intention de 121-3.
Cette intention a été définie par Crim ; 9/01/1991 : l’élément intentionnel est caractérisé par la conscience d’obtenir la force, la violence ou la contrainte ce qui n’aurait pu être obtenu par un accord librement consenti.
→ volonté d’obtenir une remise aux moyens de procédés.
Cette preuve résulte généralement des faits constatés, matérialité de ces faits.
B)- La répression :
— Les peines :
7 ans d’emprisonnement, 100 000€ amende, peines plus élevées que celles du vol.
Cela s’explique par le fait que l’extorsion donne nécessairement lieu à une atteinte à la personne conjointement à une atteinte aux biens (nécessairement pression, inhérent), pour le vol, atteinte à la personne, circonstance aggravante.
Aggravations, violence sur autrui qui a provoqué une ITT de plus de 8 jours, en raison de l’âge de la victime.
Puis réclusion criminelle : 15 ans, si infirmité permanente et mutilation : 20 ans etc.
Usage ou menace d’un arme : 30 ans, perpétuité si mort ou torture et acte de barbarie.
— La tentative :
Oui, intentionnel.
Initialement, l’extorsion pas applicable aux personnes morale, jusqu’à la soumission au principe de spécialité par la loi Perbens II.
— La consommation :
Infraction instantanée, les immunités familiales sont applicables en matière d’extorsion 312-9 Code Pénal, consécration d’une solution jurisprudentielle précédente.
Interprétation par analogie, contraire au principe de l’interprétation stricte, mais celle-ci a pour objet la protection de la personne poursuivie, ne s’applique pas lorsque cette interprétation sert les intérêts de cette personne (interprétation in favorem).
Portée de l’immunité familiale, lorsque l’atteinte au bien s’accompagne d’une atteinte à la personne :
Si victime, violence avec incapacité de travail.
En matière de vol, les violences sont absorbées par l’infraction lui-même.
La jurisprudence : l’obstacle vaut pour la qualification de vol, qui dans tous les cas n’est pas punissable, mais les faits de violence entourant le vol pourront être poursuivis par une qualification de violence distincte (exception à l’absorption des violences par le vol).
Dès lors qu’il y a violence dans l’extorsion, il y aura qualification distincte possible.