Qu’est ce que l’objet de la preuve ?

L’OBJET DE LA PREUVE

Avant de définir ce qu’est l’objet de la preuve, il convient de définir la notion de preuve. Prouver est faire apparaître ou reconnaître quelque chose comme vrai, réel, certain ; la preuve est donc ce qui sert à établir qu’une chose est vraie.

En matière judiciaire, il s’agit de convaincre le juge de la vérité de l’allégation. (Ghestin et Goubeaux) Elle permet à celui qui se prévaut de l’affirmation de la faire tenir pour vraie et d’en tirer les bénéfices juridiques qui y sont attachées. Cette matière présente un intérêt pratique considérable et bien souvent l’issue d’un procès dépend directement de la preuve d’un droit. Celui qui perd son procès est bien souvent celui qui n’a pas pu apporter la preuve de l’existence du droit allégué. Finalement, il ne suffit pas d’être titulaire d’un droit pour obtenir satisfaction.

Encore faut-il pouvoir en établir l’existence. Aussi, même si l’existence du droit et sa preuve sont fondamentalement différents, puisque le droit ne dépend pas, dans son existence de la preuve qui peut en être rapportée, il n’en demeure pas moins, qu’en pratique, ils sont très liés. Quel intérêt y a t-il à être titulaire d’un droit, si on ne peut en établir l’existence et donc en bénéficier ? Dès lors, on affirme, depuis le droit romain que n’avoir pas de droit et ne pouvoir le prouver sont des situations équivalente pour la personne !

L’objet de la preuve est ce sur quoi doit porter la preuve. Or, la détermination de l’objet de la preuve est commandée par la distinction du fait et du droit. En effet, tous les droits subjectifs dont une personne est titulaire ont été acquis à la suite d’un acte ou d’un fait juridique. Ils constituent la source des droits subjectifs.

C’est ce fait ou cet acte juridique qui doit être prouver par celui qui invoque à son profit un droit subjectif. Ainsi, par exemple, une personne qui se prétend créancière d’une autre au titre de la réparation du dommage qui lui a été causé à l’occasion d’un accident. Elle devra rapporter la preuve de la réalité de l’accident, l’importance du préjudice qu’elle a ressenti à cette occasion, ces éléments étant les faits pertinents à prouver.

-Par principe, les parties n’ont pas à prouver l’existence, le contenu ou la portée des règles juridiques qu’elles invoquent pour appuyer leur prétention. Il n’est pas nécessaire pour celui qui invoque un droit subjectif à son profit de prouver la règle de droit objectif qui lui reconnaît telle prérogative , tel droit subjectif. En effet, les parties doivent elles-mêmes faire la preuve des faits qu’elles allèguent mais elles n’ont pas à faire la preuve de la règle de droit qui leur reconnaît un droit subjectif. C’est au juge qu’il appartient de vérifier l’existence et le sens de la règle de droit.

-Par exception, l’existence de certaines règles de droit doit être rapportée par les parties. Le juge est en droit de les ignorer. Il en est ainsi des usages et coutumes qui doivent, en cas de contestation, être établis dans leur existence et dans leur teneur par celui qui s’en prévaut. On a vu que cette preuve peut être facilitée par la délivrance de parères délivrées par les Chambres de commerces qui en attestent l’existence. La preuve de l’existence et du contenu des lois étrangères doit également être rapportée par les parties. Là encore, il ne peut être reproché au juge français d’ignorer toutes les lois étrangères. Le juge va se contenter de déclarer la loi étrangère applicable. Il appartiendra aux parties de rapporter le contenu de la loi applicable.

-En définitive, les parties prouvent les faits et le juge applique la loi qu’il doit connaître. Les parties n’ont pas à prouver la loi (sauf coutume, usages et loi étrangère : les parties doivent apporter la preuve de leur existence et de leur contenu). C’est le sens de l’article 9 du nouveau Code de procédure civile : « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ». Quand au rôle du juge, il est précisé à l’article 12 alinéa 1 : « Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. » Très souvent, les parties indiquent au juge la norme juridique qu’elles estiment applicables, mais il s’agit là d’une simple suggestion, d’un simple avis, car la loi reconnaît au juge le pouvoir de « donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée. (Article 12 alinéa 2) » Aux parties, le fait ; au juge, le droit ».

-Les parties doivent prouver les faits qu’elles allèguent. Il faut noter que notre procédure civile est organisée selon un modèle contradictoire. Le juge est, en principe, neutre au procès civil. Il se borne à trancher à trancher deux prétentions opposées. Cependant, ce principe tend à s’effacer lorsque le juge agit, pour les besoins du litige, en véritable juge d’instruction civil. L’article 179 du nouveau Code de procédure civile lui permet de procéder « aux constatations, évaluations, appréciations ou reconstitutions qu’il estime nécessaires, en se transportant si besoin est sur les lieux ». L’article 10 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE donne pouvoir au juge de prendre des mesures d’investigations en matière de preuve : « Le juge a le pouvoir d’ordonner d’office toutes les mesures d’instruction légalement admissibles » (Cf. égal. article 143 CODE DE PROCÉDURE CIVILE). Les parties sont tenues d’apporter leur concours aux mesures d’instruction civile sauf au juge à tirer toute conséquence d’une abstention ou d’un refus.

Si une partie détient un élément de preuve, le juge peut, à la requête de l’autre partie, lui enjoindre de la produire à peine de d’astreinte. Le juge peut, encore à la requête de l’autre partie, demander la production de tous les documents détenus par des tiers s’il n’existe pas d’empêchement légitime (Article 11 CODE DE PROCÉDURE CIVILE). Le principe du procès contradictoire oblige le juge à inviter les parties au débat à chaque fois d’un élément nouveau est mis en évidence par une mesure d’instruction (Article 146 CODE DE PROCÉDURE CIVILE).

Le Cours complet d’Introduction au droit est divisé en plusieurs fiches (notion de droit, biens, acteurs de la vie juridique, sources du droit, preuves, responsabilité…)