Qu’est ce que la pratique commerciale de l’article L121-2 ?

La pratique commerciale dans la « pratique commerciale trompeuse ».

Incriminer aujourd’hui les pratiques commerciales trompeuses au lieu de la simple publicité, c’est une extension car la qualification est plus large. Mais si cette incrimination permet de réprimer des comportements qui n’auraient pu l’être avant, il n’en demeure pas moins qu’une partie non négligeable d’application de ce texte résidera dans les publicités trompeuses : cela restera le noyau central donc il ne faut pas faire l’impasse sur ce en quoi consistaient ces pratiques de publicité commerciales trompeuses.

1) L’extension réalisée par le passage de la publicité à la pratique commerciale.

Trois points:

– le premier point a pour objet de préciser en quoi consiste cette notion nouvelle. Le législateur s’est abstenu de lui donner une définition. L’article L120-1 du Code de la consommation définit les pratiques commerciales déloyales mais on n’a pas de définition sur la pratique commerciale en elle – même ce qui est regrettable car cette notion est au cœur de plusieurs incriminations pratiques commerciales trompeuses pratiques commerciales agressives. Or, c’est une notion dont on peut penser qu’elle est une définition large. La non-précision introduit donc, sinon une insécurité, une certaine incertitude ce qui n’est pas satisfaisant au regard du principe de légalité qui suppose une certaine précision dans les incriminations. Quoi qu’il en soit, la notion de pratiques commerciales est sensé être une extension comme le suggère le fait que pour qu’il y ait une publicité au sens de l’incrimination, il faut un message destiné à un public. Pour qu’il y ait publicité, commerciale ou légale, il faut un caractère de publicité, il faut qu’un public soit visé, autrement dit, rationnellement, c’est différent d’une audience purement privée: si audience purement privée, il ne peut y avoir publicité trompeuse. En revanche, la pratique commerciale n’exige pas une publicité destinée à un public. Donc, on peut penser que la pratique permet de réprimer les comportements qui n’ont pas fait l’objet de publicité, qui serait resté privé : par exemple un message destiné à un consommateur dans une relation privée.

– la pratique commerciale doit avoir un objet déterminé. Il faut d’abord se demander à quelle opération tend la pratique commerciale; à quoi la pratique commerciale incite-t-elle le consommateur. Jusqu’à sa modification par la loi du 3 janvier 2008, l’article L121-1 (ancien) qui incriminait la publicité trompeuse visait la vente de bien et la prestation de service. Aujourd’hui, l’article L121-1 du Code de la consommation continue, mais de façon moins nette, de renvoyer à la vente ou la prestation de service quiapparaissent donc comme étant l’objet de ces pratiques commerciales trompeuses. Par ailleurs, autre précisions sur cet objet, le législateur s’il n’a pas défini la notion de pratique commerciale a établi une liste qui est fournie, longue de pratiques commerciales qui sont trompeuses et cette liste fait apparaître un nombre important d’objets sur lesquels peut porter le caractère trompeur de la pratique incriminé e. On constatera ainsi en se reportant aux textes crées par les lois de 2008 que la liste des pratiques commerciales réprimées car trompeuse est longue donc diversité d’objet sur lesquels portent la tromperie à l’image de ce que prévoyait le législateur dans la publicité trompeuse.

– les destinataires : enfin, pour terminer d’évoquer l’extension, il faut préciser quelles sont les personnes qui pourront être destinataires ou auteurs de ces pratiques ce qui invitent à se demander quelles sont les personnes qui pourront être victimes ou auteurs. A cet égard, si on distingue pratique et publicité, c’est l’une des innovations les plus frappantes. Cette évolutions se vérifie à un double égard par une sorte de chassé croisé qui se rattache à une évolution des valeurs, de plus en plus accent sur la protection du consommateur alors qu’avant, il s’évertuait à instaurer une concurrence saine.

– Les victimes : sous l’article L121-1 ancien du Code de la consommation, la jurisprudence dit que cela ne concernait pas la seule publicité destinée aux consommateurs mais aussi celle destinée au professionnel, ce qui était conforme à la ratio legis initiale de l’incrimination puisque le but était aussi de protéger les professionnels. L’incrimination de pratiques commerciales trompeuses se recentre sur la protection du consommateur dans l’esprit de la directive de 05. Le professionnel est en partie écarté de la protection de la loi aujourd’hui : l’article L121-1 du Code de la consommation nouvellement rédigé énumère en effet toute une série de pratiques commerciales trompeuses. A la fin de cet article, dernier alinéa dit que certaines de ces pratiques peuvent concerner des professionnels. Donc, il y a toute une série de pratiques qui ne peuvent être commises qu’à l’encontre de consommateur donc les professionnels ne peuvent en être victime donc cloisonnement. C’est par cette disposition ultime de l’article, §3 que le législateur accorde sa protection au professionnel.

– Les auteurs: Pour ce qui concerne les auteurs, sous l’empire de l’article L121-1 ancien, il était de jurisprudence constante que la publicité illicite pouvait émaner d’un simple particuliers, ou même, cette infraction pouvait être commise par une association à but non lucratif. Cette jurisprudence paraît être remise en cause par l’incrimination de pratiques commerciales trompeuses. En effet, la directive du 11 mai 2005 transposée a pour objet de protéger les consommateurs contre les pratiques développées par lesentreprises. Dès lors, cette incrimination de pratiques commerciales trompeuses d’inscrit dans le contexte d’une activité commerciale et on peut donc avoir l’impression que cette jurisprudence peut être remise en cause car un simple particuliers ne peut développer des pratiques commerciales. Il faudrait donc considérer que désormais, les simples particuliers ne pourraient se voir reprocher une pratique trompeuse car il faut que ce soit une pratique commerciale alors même qu’ils pouvaient se rendre coupable d’une publicité trompeuse.

2) La publicité aspect principal de la pratique commerciale.

Lorsqu’on étudie aujourd’hui les pratiques commerciales trompeuses, on a peu de recul sur cette incrimination mais on peut continuer à se référer à ce que la jurisprudence avait précisé au sujet de la publicité trompeuse, car si toute pratique n’est pas une publicité, toute publicité est une pratique. Donc, ce qui a été précisé par la jurisprudence pour cette incrimination reste applicable, sauf que ce sera sous une nouvelle qualification. La publicité n’était pas définie, c’est la jurisprudence qui s’était employé à préciser cette notion et l’Interprétation de cette notion reste d’actualité. Pour la Cour de cassation, cela consiste en tout moyen d’information destiné à permettre au client potentiel de se faire une opinion sur les caractéristiques des biens ou services qui lui sont proposé. Plusieurs arrêts, exemple arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 octobre 1998. Cette définition de la publicité telle qu’elle résulte decette jurisprudence permet de réduire la publicité commerciale à sa plus simple disposition. Le seul affichage du prix, même s’il ne s’accompagne d’aucune autre circonstance ou mention peut être constitutif d’une publicité : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 23 mars 1994. Solution reprise par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 octobre 1998.

Cela donne donc à la notion une large portée qui met l’accent sur la simple fonction informative de la publicité : information destinée à permettre au client de se faire une opinion. C’est donc une définition qui est trop restrictive car mettant l’accent sur le caractère informatif, elle omet le caractère incitatif. Je vous l’ai dit, au début de la présentation que la publicité n’a pas nécessairement pour objet l’information, c’est la publicité légale qui informe, la publicité commerciale a pour objet la s éduction. Il n’y a pas que l’information => la jurisprudence semble considérer qu’il ne pouvait y avoir de publicité dans des films d’informations ou articles de presse donc la jurisprudence n’omet pas le caractère incitatif, arrêt de la Cour d’appel d’Aix en Provence de 1980.

L’existence d’une publicité semble dire qu’elle suppose une publication donc il faut un public, autrement dit, la jurisprudence exige pour qu’il y ait publicité, qu’un message soit porté à connaissance du public ce qui exclut toute publicité lorsque la mention litigieuse est invisible d’acheteurs potentiels. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 15 mars 1990 l’affirme. De même, il a été jugé d’une façonqui est conforme à l’étymologie que l’envoi d’un document par lettre ne saurait constituer une publicité lorsqu’il est adressé dans le cadre d’une correspondance privée à une personne déterminée, personne à laquelle est réservé le document: cela exclut la qualification de publicité comme l’a précisé un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 12 novembre 1986. Aujourd’hui, l’envoi d’un document dansce cadre pourrait tomber sous la qualification de pratique commerciale.

Support : article L121-1 ancien du Code de la consommation ne faisait preuve d’aucunes exigences particulières sur la forme ou le support de la publicité. Au contraire, les termes sont larges puisque la publicité était interdite sous quelques formes que ce soit: la jurisprudence sur la publicité reste applicable: une publicité trompeuse peut être réalisée par des sons, des écrits, des images: la doctrine pense même que la publicité pourrait être réalisée par des odeurs. La jurisprudence montre que dans ce domaine, l’imagination est sans limite: supports novateurs, surprenant: on a la presse écrite, audiovisuel(cinéma, radio, TV), les affiches placardées dans les lieux publics, à cela s’ajoute des modes différents: mentions qui figurent aux verso d’assiette (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 28 novembre 1983), l’étiquette apposée sur des marchandises : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 15 mai 2001 en ce sens au sujet d’étiquettes apposé sur des bouteilles et qui comportait une fausse mention demédaille d’or. Egalement, nombre d’étoiles d’un hôtel : arrêt de la Cour d’appel de Paris du 10 mars 1995. De même dans les documents contractuels, facture, bons de commande. Dernier support en date de publicité qu’on doit à l’innovation technologique: sites internet qui sont venus rejoindre cette liste jurisprudentielle de support.