Qu’est-ce que la consistance du domaine public ?

La mise en œuvre des critères : la consistance du domaine public

Le domaine public comprend l’ensemble des biens appartenant à une personne publique (État, collectivités territoriales, établissements publics) et affectés soit directement au public, soit à un service public dans le cadre de ses missions. Le domaine public est inaliénable, irrévocable et imprescriptible.

I – La consistance du domaine public composé des biens affectés à l’usage direct du public

Conseils bibliographiques

  • Yolka, Le domaine public naturel, AJDA , p.2325

A) Le domaine public maritime

Il est actuellement défini à l’article L.2111-4 du Code général de la propriété des personnes publiques, mais cette définition reprend à l’identique celle qui avait été donnée par la jurisprudence antérieurement au code.

Sont inclus le sol et le sous-sol compris entre la limite de la mer territoriale, étendue de mer décomptée à partir du rivage (douze miles marins) et les rivages de la mer, qui sont constitués par «tout ce que la mer couvre et découvre, jusqu’où les plus hautes mers peuvent s’étendre en l’absence de perturbations météorologiques exceptionnelles».

Le problème, c’est que les terrains qui sont peu à peu envahis par la mer tombent dans le domaine public de façon naturelle et objective : la personne propriétaire des parcelles en bord de mer est donc expropriée de fait.

Ce domaine maritime fait l’objet d’une protection très forte.

Sont inclus également dans le domaine public maritime le sol et sous-sol des étangs salés, les lais et relais de la mer (dépôts laissés par la mer de façon naturelle et définitivement hors d’eau, comme les lagunes), les concessions d’endigage.

B) Le domaine public aérien et hertzien

Le domaine public aérien, c’est l’ensemble des voies empruntées par les aéronefs, et le domaine public hertzien vise les fréquences radioélectriques disponibles sur le territoire de la République.

C) Le domaine public fluvial

Il est constitué par les cours d’eau et les lacs qui appartiennent à l’Etat et aux collectivités territoriales.

Il y a eu toute une jurisprudence antérieure au Code général de la propriété des personnes publiques où l’on distinguait en fonction de la flottabilité des fleuves (possibilité pour les bateaux de les parcourir), mais le législateur n’a pas tenu compte de ce critère.

D) Le domaine public terrestre

Il est composé principalement de trois éléments :

  • le principal et premier est la voirie publique, de laquelle font partie toutes les voies publiques ouvertes à la circulation, à savoir les autoroutes et routes nationales, départementales et communales, mais aussi les accessoires de la voirie, à savoir appareils de signalisation, colonnes de publicité, réverbères et ponts.
  • En revanche, ne font pas partie de la voirie routière les chemins ruraux, qui font partie du domaine privé des communes, et les voies privées ouvertes au public.
  • Le second correspond aux halles et marchés.
  • Le troisième correspond aux cimetières.

E) Les édifices du culte

Conseils bibliographiques

  • Lavialle, Les édifices affectés aux cultes, RFDA 2006, p.949

Avant 1905, la question ne se posait pas car avant la loi de séparation de l’Église et de l’Etat, il y avait en France un service public du culte, et l’on considérait que toutes les églises étaient bien du domaine public car elles étaient affectées au service public du culte.

Après la loi, le service public du culte a été supprimé, et s’est posée la question de savoir si les églises faisaient toujours partie du domaine public, si elles avaient basculé dans le domaine privé de l’Etat ou si elles n’en faisaient plus du tout partie.

  • Lorsque l’édifice en question a été construit postérieurement à 1905, on considère qu’il est la propriété privée de l’Église.
  • Pour les édifices construits antérieurement à 1905, la logique aurait voulu qu’ils basculent dans le domaine privé, mais ce n’est pas la solution qui a été retenue et l’on considère toujours qu’ils font partie du domaine public parce que le Conseil d’Etat considère que leur affectation est prévue et protégée par la loi dans son arrêt du 19 novembre 1949 Carlier (les cathédrales font partie du domaine public de l’Etat, et les églises du domaine public communal).
  • Dans l’arrêt du 19 octobre 1990 Association Saint Pie V, il s’agissait d’une église construite antérieurement à 1905, mais la commune avait cédé l’église à une association cultuelle ; le Conseil d’Etat a retenu que l’église n’étant pas la propriété d’une personne publique, elle ne pouvait faire partie du domaine public.

II – La consistance du domaine public composé des biens affectés à un service public

  • A) Les dépendances artificielles du domaine public naturel

Il s’agit des ports maritimes et fluviaux, les aéroports et l’ensemble des installations de navigation aérienne.

  • B) Le domaine public milliaire

Il comprend toutes les dépendances affectées au service public de la défense nationale, à l’exception des casernes qui font partie du domaine privé.

  • C) Le domaine public ferroviaire

Il comprend les voies ferrées et les gares.

  • D) Le domaine public mobilier

Conseils bibliographiques

  • Yolka, Les meubles de l’Administration, AJDA 2007, p.964

Pendant longtemps, l’existence d’un domaine public mobilier a été refusée. La doctrine a toujours considéré que les meubles ne pouvaient en faire partie car ils n’étaient pas affectés à un service public.

L’arrêt de principe qui a introduit une brèche dans ce raisonnement est un arrêt de la Cour de cassation du 2 avril 1963 : c’est la première fois qu’un juge a considéré qu’un bien meuble faisait partie du domaine public.

Il ne s’agissait pas de n’importe quel meuble, mais d’un tableau acquis par la Réunion des musées de France, établissement public chargé de la gestion du patrimoine culturel de tous les musées français.

Le juge a retenu cette solution à propos de ce bien car «sa conservation participe et est l’objet même du service public assumé par les musées français».

Aujourd’hui, le Code général de la propriété des personnes publiques a consacré l’existence du domaine public mobilier, le débat est donc clos ; il est visé à l’article L.2112-1 du code, qui le définit comme les biens présentant un intérêt public du point de vue de l’histoire, de l’art, de l’archéologie, de la science ou de la technique (comme les documents d’archives, les collections des musées …).