Quelle est la procédure de contrôle de constitutionnalité ?

La procédure de contrôle de constitutionnalité des lois 

Qui peut saisir le conseil constitutionnel ? à quel moment est-il possible de saisir le conseil constitutionnel? Quelles sont les effets de la saisine? Comment se passe le débat? Comment est prise la décision?

Avant 2008, le droit de saisine du Conseil constitutionnel restait assez restreint et ne pouvait être exercé qu’a priori, c’est-à-dire avant qu’une loi ne soit promulguée ou avant qu’un traité ne soit ratifié. Depuis la loi constitutionnelle de 2008, il peut s’effectuer a posteriori et les citoyens français peuvent, comme c’est le cas dans d’autres pays, demander le contrôle de constitutionnalité des lois en vigueur, à l’occasion d’une action en justice les concernant, s’ils estiment que la loi porte atteinte à leurs droits et libertés (question prioritaire de constitutionnalité). Toutefois, le Conseil n’est pas saisi directement par le citoyen, mais par le Conseil d’État ou la Cour de cassation auxquels la demande a été transmise.

A)Qui peut saisir le conseil constitutionnel?

Le Conseil Constitutionnel n’intervient que s’il est saisi par: 

  • 1) Président de la République

Cette saisie est un acte dispensé du contre seing donc ne peut pas entrainer la responsabilité du président. Jusqu’à maintenant, jamais le président n’a saisi le Conseil Constitutionnel. On pourrait imaginer en période de cohabitation mais c’est trop dangereux car c’est demandé au conseil de trancher un litige au sein de l’exécutif. Ce que faisait Mitterrand il demandait à l’opposition parlementaire de saisir le Conseil Constitutionnel, ce qui évite que le président entre en conflit avec le conseil.  

  • 2) Premier ministre

La saisine par le 1er ministre n’est pas limitée mais ce droit est utilisé exceptionnellement à l’égard des lois car le 1er ministre est maitre de la procédure législative. il a une majorité à l’Assemblée Nationale il a donc les moyens de ne pas faire adopter une loi. 

Parfois il peut y avoir une saisine quand des amendements ont été voté sans son accord et il peut vouloir les contester. La quasi-totalité des cas où le 1er ministre saisi le Conseil Constitutionnel c’est en application de l’article 37 de la Constitution : procédure de délégalisation. Possibilité où une loi a été votée, le 1er ministre ne l’a pas vu ou a laisser faire et certaines dispositions sont du domaine réglementaire et que le Premier ministre veut modifier ces dispo, il demande au Conseil Constitutionnel de se prononcer sur ces dispositions, par décret le 1er ministre pourra les modifier. 

Ex décision du Conseil Constitutionnel 31 janvier 2006 : le 1er ministre saisi le Conseil Constitutionnel pour lui demander de se prononcer sur la nature juridique d’une disposition de la loi du 23 février 2005 « loi portant reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des français rapatriés ». De Villepin saisi le Conseil Constitutionnel alors qu’il pouvait s’opposer à la loi. A l’époque de l’adoption de la loi, les rares députés présents votent pour les 400. La loi a été adoptée sans que personne n’y fasse attention, la droite comme la gauche ont vu les dangers de la disposition mais certains lobbys font pression. la disposition soumise au Conseil Constitutionnel par De Villepin : article de la loi « les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer (c’est à dire que le législateur impose une obligation dans les programmes scolaires), notamment en Afrique du nord, et accordent à l’histoire et aux sacrifices des combattants de l’armée française issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont droit« . Il y a le lobby des parlementaires de droite issu de la région PACA (rapatriés de l’Afrique du nord), on ne parle que des combattants d’Afrique du nord. Cette disposition est votée à l’Assemblée Nationale. Pourquoi un an après De Villepin demande l’examen du Conseil Constitutionnel ? Car le lobby des professeurs essentiellement de lycées ont fait pression, il n’y a pas des programmes officiels d’histoire. De Villepin demande de retirer cet article de la loi, mais pour cela il faut refaire une loi, les députés de droite ne voteront pas en faveur d’une loi modificative. il faut donc demander au Conseil Constitutionnel de délégaliser cette loi, déclarer que la loi empiète sur le domaine réglementaire. Décision du Conseil Constitutionnel : il regarde article 34, le contenu des programmes scolaires ne relève pas des principes fondamentaux de l’enseignement qui relèvent de la loi, donc article a le caractère réglementaire, il pourra donc être modifié/supprimé par décret. 

3) Président de l’assemblée nationale

il est difficile de comprendre pourquoi le président AN dispose du pouvoir de saisine, car le président est issu de la majorité, pourquoi contesterait-il un texte voté par sa majorité? c’est une saisine très peu utilisée. C’est quand le président s’est opposé à la procédure du vote bloqué imposée par le gouvernement. Article 44 alinéa 3: quand une discussion traine, le gouvernement dit qu’il y aura un vote bloqué sur toute la loi, le gouvernement force la main des députés en leur demandant d’adopter par vote unique des article que peut-être ils auraient refusés. C’est le seul cas où le président de l’assemblée Nationale a saisi le Conseil Constitutionnel. 

5) Président du sénat

Cette saisine a eu une grande importance. Jusqu’en 1974 le Sénat a toujours été opposé aux gaullistes. Les deux seules décisions du Conseil Constitutionnel jusqu’en 1974 ont été rendu après saisine du président Sénat car le sénat est la seule opposition à De Gaulle. Depuis 1974, le rôle d’opposant est assuré par les députés et sénateurs. la plupart du temps le président ne saisit pas en sa qualité de président, mais il saisit le Conseil Constitutionnel avec 59 sénateurs.  

6)  60 députés ou 60 sénateurs

Saisine parlementaire. Elle est ouverte depuis la révision constitutionnelle de 1974, c’est une volonté du président république VGE et un geste en direction de l’opposition. C’est un geste politique et c’est permettre de mieux protéger les droits et libertés contre une majorité qui serait toute puissante (parti visé : UDR, parti gaulliste) VGE donne le moyen au parti socialiste de contester des lois votées par l’UDR.  

Avec cette nouvelle forme de saisine il y a une explosion des recours car sauf cas rare il y aura toujours une opposition de 60 qui vont pouvoir contester une loi. Sauf cas rare la saisine parlementaire vient toujours de l’opposition, seul cas de saisine par la majorité : loi IVG 1975. Dès lors que la saisine arrive devant le Conseil Constitutionnel il examine le nombre et qualité des signatures, pas possible 30 députés +30 sénateurs.  

Un député qui a saisi le Conseil Constitutionnel peut-il se désister de sa requête et donc il n’y aura plus que 59 signatures et donc dessaisir le Conseil Constitutionnel ? Décision 1996. Majorité de droite. Dans la loi votée, un amendement demandé par la gauche et la droite le laisse passé, la droite finalement veut revenir sur cet amendement. Dans cette loi de finance, la loi attribue la carte d’anciens combattants aux française qui ont combattus aux cotés des républicains espagnols entre 1936 et 1939. En France en 1936, Blum refuse que la France s’engage en Espagne pour combattre contre franco aux cotés des républicains. Certains français vont quand même se battre en Espagne (André Malraux). Les députés de la majorité disent pour contester la disposition qu’il y a une tradition législative qui serait donc un PFRLR pour dire que la qualité d’ancien combattant ne peut être attribuée que quand le combattant va se battre au nom de l’état français et qu’il a été envoyé par le France. Dans cette loi de fiance il y a des curiosités qui sont inconstitutionnelle. Les députés UMP s’aperçoivent de l’erreur. Par cette saisine, le conseil va contrôler la totalité de la loi et annuler la totalité de la loi, il faut donc empêcher le conseil de statuer sur la loi. Un député de désiste. Mais le Conseil Constitutionnel refuse le désistement car il n’y a rien de prévu dans la Constitution pour faire obstacle à la mise e œuvre du contrôle de constitutionnalité. C’est critiquable car le Conseil Constitutionnel est une juridiction, or devant toute juridiction le requérant a le droit de se désister. Quand le Conseil Constitutionnel statut comme juge électoral il admet le désistement, mais pas quand il est juge constitutionnel. 

Les parlementaires doivent motiver la saisine. Sauf qu’il n’y a aucune obligation constitutionnelle de motiver la saisine. On voit apparaitre des saisines blanches, aucun motif juridique. Cette saisine blanche a 2 exemples : décision du 19 novembre 2009 relative à la loi pénitentiaire, décision 7 octobre 2010 loi relative à la burqa. Cela peut avoir des conséquences sur les saisines de QPC.  

Les députés donnent les raisons constitutionnelles de leur opposition. Chaque parti dispose d’un service juridique chargé de rédiger les saisines, chaque parti dispose ou pratique des consultations auprès d’universitaires.  

L’opposition fait un usage quelque fois prudent de ce droit de saisine car, en période d’alternance a susciter de décisions du Conseil Constitutionnel, la Jurisprudence du conseil peut parfois limiter la gauche quand elle arrive au pouvoir. Cela peut expliquer un consensus entre droite et gauche pour ne pas saisir le conseil. Ex loi Chevènement sur les collectivités territoriales, droite et gauche se sont entendu pour ne pas soumettre cette loi au contrôle constitutionnel. 

Jusqu’à maintenant le Conseil Constitutionnel en tant que juge constitutionnel a toujours refusé d’être saisi par un particulier, quand il a été saisi par un particulier il s’est toujours déclaré incompétent : Jurisprudence 1982 TOURET. 

B) A quel moment ?

Le conseil est saisi d’une loi avant sa promulgation, donc après le vote définitif de la loi. Entre ses 2 moments il peut être saisi. C’est à dire qu’il faut que la loi soit définitivement votée. Le texte qui n’est pas encore une loi est envoyé au conseil. Le recours avant le vote définitif de la loi n’est pas recevable. Article 10 Constitution fixe un délai max de 15 jours pour promulguer une loi à compter de la transmission de la loi définitivement votée au président république. Rien sur un délai minimum, que faire si le président veut promulguer rapidement ? Juridiquement c’est possible, le président peut promulguer une loi rapidement pour éviter la saisie. Les parlementaires font part de leur intention de saisir le conseil au gouvernement, dans ce cas, le président ne promulgue pas la loi il attend que les parlementaires saisissent le Conseil Constitutionnel. Il se peut que la saisine soit déposée rapidement en cas d’urgence : ex  loi janvier 1985 sur l’état d’urgence en Nouvelle Calédonie.  

C) Effet de la saisine 

La saisine est définitive, pas de désistement. Pour le moment cette Jurisprudence contre le désistement ne concerne que les parlementaires.  

La saisine suspend le délai de promulgation, c’est à dire que le délai de 15 jours recommence à courir dès la publication de la décision du conseil. Quand il y a saisine, le conseil informe toutes les autres autorités de saisine qu’il y a une saisine. 

D) Le débat

Art 61al3 Constitution, dès sa saisine le conseil a un délai d’un mois, peut être ramené à 8 jours si le gouvernement prononce l’urgence. Le débat est dit contradictoire avec une pratique qui se généralise depuis la présidence de Badinter. Le juge rapporteur va auditionner des représentants, des universitaires, des agents du gouvernement. Très souvent le juge rapporteur fait savoir aux parties qu’il écoute qu’il va peut-être demander au conseil de se saisir d’office sur une question non soulevée. A ce moment se font les demandes et donc cela signifie que le juge rapporteur consulte et tire les conséquences qu’il souhaite, ces auditions ne sont jamais mentionnées dans les décisions du conseil, c’est seulement pour éclairer le juge rapporteur. 

Il y a ensuite la saisine, puis au JO est publiée la décision, la saisine et les observations en défense c’est à dire la réponse de la partie en défense. Le demandeur est celui qui saisi. Le défendeur serait la majorité qui a voté la loi, mais c’est le secrétariat général du gouvernement qui défend la loi (on attaque le législatif et ‘est l’exécutif qui la défend). Le débat juridique devient un débat politique. Dans aucun autre pays le gouvernement ne fait des observations en réponse à la saisine. De + en + ces observations écrites sont transmises au demandeur qui peut encore y répondre. 

Les débats ne sont pas publics, pas de séances publiques où demandeur et défendeur s’expriment devant le juge. Pas d’audition publique.  

La saisine et les observations donnent une certaine publicité à l’argumentation des parties.  

Pour les lois organiques, la saisine est automatique, il n’y a donc jamais d’observations du gouvernement. 

E) La décision

Elle est prise à partir du rapport du juge rapporteur, elle doit être motivée et publiée au JO. Les article de cette décision vont comporter une déclaration de conformité ou de non-conformité du texte à la Constitution. Parfois il y a des curiosités : « dispo pas contraires à la const », « dispo sont déclarées non contraires à la const ». Le conseil semble différencier ce qui permis et ce qui n’est pas contraire à la Constitution  

Il existe la technique des réserves d’interprétation. Quand une loi va être susceptible par le biais d’une interprétation de voir sa conformité à la Constitution admise, dans certains cas, le juge va préférer cette interprétation qui lui permet de sauver la loi plutôt que de l’annuler. Techniques utilisées depuis très longtemps par les cours suprêmes étrangères et le Conseil d’Etat. Cette technique est très originale devant le Conseil Constitutionnel autant par les formes et les controverses suscitées par cette technique.  

Le conseil peut déclarer qu’une loi est conforme. La Constitution sous réserves d’interprétations formulées dans les considérants, il va indiquer aux autorités chargées de l’application de la loi (pouvoir exécutif et juges ordinaires) il va indiquer le sens exact à donner à la disposition en cause, s’il y avait d’autres interprétations possibles elles rendraient la loi inconstitutionnelle. 

3 types de réserves d’interprétation : 

interprétations neutralisantes : elles vont rendre une disposition législative inopérante en lui refusant toute portée juridique. Ex une disposition qui ne permettait la modification de la loi qu’après 2 ans d’exécution, elle est neutralisante car pour le conseil le fait que le pouvoir législatif se limite pendant deux ans n’a aucune valeur juridique. 

interprétation constructive : l’interprétation du conseil va modifier le contenu apparent de la loi soit pour restreindre soit pour compléter son champ d’application. Ex Qui limite le champ d’application de la loi : loi 1993  interdit de délivrer une carte de résident à tout étranger qui vit en état de polygamie, or, Badinter dit que cette dispositions est conforme à la Constitution à condition qu’elle ne s’applique qu’aux étrangers vivants en France en état de polygamie. Ex qui complète le champ d’application : loi 1992 autorise une autorité administrative à prendre une sanction, Badinter dit que la décision de sanction doit pouvoir faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant le juge administratif, qu’un sursis à exécution peut être demandé, l’exercice du droit de recours contre cette sanction ne peut jamais conduire à aggraver la situation. Cette disposition est conforme si le prononcé de sanction est assorti de certaines conditions. Le juge constitutionnel se comporte comme un co-législateur.  

interprétation directive : consiste en instructions relativement détaillées quant à la manière dont une disposition devra être appliquée. Loi 1993 dans cette loi on considère que le contrôle d’identité effectué par les forces de police peut ne pas être lié à l’attitude de la personne. C’est la possibilité d’avoir un contrôle au faciès. Devant ce danger, Badinter dit que cette dispositions est conforme à la Constitution sauf que la constitutionnalité des nouvelles modalités du contrôle d’identité doit répondre à 2 conditions cumulatives : le contrôle au faciès est possible si « l’autorité policière doit justifier dans tous les cas, les circonstances particulières établissant le risque d’atteinte à l’ordre public qui a motivé le contrôle » + « l’autorité judiciaire doit contrôler les conditions relative à la légalité, à la réalité et à la pertinence des raisons motivant les opérations de contrôle et d’apprécier le comportement des personnes intéressées ». En pratique il n’y a plus de contrôle au faciès. C’est seulement en vertu de cette interprétation que la disposition est conforme à la Constitution.  

-> Ces 3 techniques ressemblent don à une réécriture de al loi pour la sauver, pour qu’elle soit conforme à la Constitution. C’est quand même inadmissible qu’un juge puisse réécrire la loi. Mais l’œuvre du juge est là pour protéger nos libertés, mais pourquoi ne pas annuler la loi ? Car le juge ne veut pas entrer en conflit avec le pouvoir politique. La technique du « oui, mais » signifie que dans certains cas le Conseil Constitutionnel va aller très loin, il peut aller jusqu’au « non, mais« , la disposition n’est pas conforme, mais si vs voulez la réécrire il faudra… ex décision 1982 relative aux nationalisations.  

Le conseil saisi d’un seul article de la loi estime qu’il est saisi de la totalité de la loi. Cela lui permet de se prononcer sur d’autres articles.

 

Laisser un commentaire